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Catherine Troallic
Question N° 80280 au Ministère du travail


Question soumise le 26 mai 2015

Mme Catherine Troallic appelle l'attention de M. le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social au sujet des actions menées par le Gouvernement contre le détachement des travailleurs et le travail illégal. Des pratiques à la fois immorales et illégales se multiplient sur nos territoires, non pas seulement dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, mais également dans les transports, l'agriculture ou encore la sécurité privée. En effet, malgré l'encadrement par la réglementation européenne et les nombreuses mesures prises par le Gouvernement notamment avec la loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale créant un nouveau dispositif de vigilance en matière de salariés détachés, les fraudes au détachement de salariés ne cessent d'augmenter en France. Par ailleurs, dans le cadre du projet de loi pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, trois mesures supplémentaires sont prévues pour lutter contre le travail illégal : l'augmentation de 10 000 à 500 000 euros du montant de l'amende administrative ; l'ouverture à la possibilité, pour l'autorité administrative, de suspendre une prestation de services internationale en cas de fraude manifeste ; la généralisation de la carte professionnelle obligatoire voulue par la Fédération française du bâtiment. Cependant, afin de lutter efficacement contre le travail illégal il est nécessaire que des actions de terrain soient menées avec la mise en place de contrôles de ces pratiques. Ainsi, elle lui demande quelles sont les apports du décret d'application du 30 mars 2015 relatif à la lutte contre les fraudes au détachement de travailleurs et la lutte contre le travail illégal et souhaiterait connaître les mesures prises sur le terrain pour faire appliquer les dispositifs gouvernementaux visant à œuvrer contre ces pratiques.

Réponse émise le 9 juin 2015

Pour la bonne application des règles relatives au détachement dans un contexte de libre circulation accrue des travailleurs au sein de l'Union Européenne et compte tenu du constat de certaines pratiques de contournement du droit (exemple des entreprises « boîte aux lettres »), la directive européenne 2014/67/UE du 15 mai 2014 renforce les moyens dont disposent les États pour lutter contre les pratiques frauduleuses. Elle prévoit notamment différentes mesures destinées à permettre une information plus précise et plus accessible des acteurs du détachement et à faciliter le contrôle et les sanctions des entreprises qui ne respectent pas les droits des salariés détachés et les règles encadrant la prestation de service transnationale. Le Gouvernement a fait le choix de devancer la transposition de cette directive en soutenant avant même la fin des négociations, l'initiative législative du député M. Savary. La loi n° 2014-790 du 10 juillet 2014 visant à lutter contre la concurrence sociale déloyale a donc notamment pour objet de transposer cette directive et de compléter la réglementation en matière de lutte contre les fraudes au détachement. Elle instaure un dispositif de responsabilité solidaire entre le donneur d'ordre et l'un de ses sous-traitants s'il ne respecte pas, ou pas intégralement, l'obligation de verser aux salariés - notamment détachés - une rémunération au moins égale au salaire minimum légal ou conventionnel. Elle transpose ainsi la directive d'application en garantissant à tous les salariés, et notamment aux salariés détachés, la possibilité de faire valoir leur droit au paiement d'un salaire conforme au minimum légal ou conventionnel. Mais elle va aussi plus loin que le dispositif prévu dans la directive. D'une part, la responsabilité solidaire mise en place n'est pas limitée au seul secteur du bâtiment mais s'applique à tous les secteurs professionnels. D'autre part, cette responsabilité pèse sur les maîtres d'ouvrage et l'ensemble des donneurs d'ordre, quel que soit leur rang dans la chaîne de sous-traitance et n'est pas limitée au seul cocontractant. Le décret n° 2015-364 du 30 mars 2015 a précisé les obligations des employeurs établis hors de France détachant des salariés en France en matière de déclaration préalable de ce détachement, de désignation d'un représentant en France et de conservation des documents à présenter en cas de contrôle. Ce décret détermine les conditions de mise en oeuvre de la responsabilité du cocontractant en cas de manquement à l'obligation de déclaration préalable ou de désignation d'un représentant et les sanctions encourues dans cette hypothèse. Il définit également les modalités de mise en oeuvre de l'obligation de vigilance et de la responsabilité des maîtres d'ouvrage et des donneurs d'ordre vis-à-vis de leurs sous-traitants et cocontractants. Il précise en outre les modalités selon lesquelles les organisations syndicales représentatives de travailleurs informent les salariés des actions en justice formées en leur nom. Le décret définissant les modalités de la peine complémentaire de diffusion de la décision pénale des personnes ayant recouru au travail illégal sur le site internet du ministère du travail est en cours de rédaction et devrait paraître dans les prochaines semaines. Enfin, la loi précitée contient des dispositions qui renforcent les sanctions applicables en cas de travail illégal, qui peut souvent être constaté dans les cas de fraude au régime du détachement. Mais il faut amplifier l'action et traduire les sanctions dans les faits. C'est pourquoi figurent dans le projet de loi croissance et activité trois mesures importantes : - Premièrement l'augmentation de l'amende administrative pour non respect de la déclaration de détachement, avec un passage du plafonnement du cumul d'amendes de 10 000 € à 500 000 €. - Deuxièmement la possibilité pour l'autorité administrative de suspendre une prestation de service internationale. - Enfin La généralisation d'une carte d'identité professionnelle obligatoire sur tous les chantiers du BTP. Par ailleurs, les contrôles seront considérablement renforcés en 2015. 30 000 contrôles conjoints avec l'URSSAF seront opérés notamment dans les secteurs prioritaires, soit 8 000 de plus avec une action ciblée sur 500 grands chantiers. De plus, dans le cadre de la nouvelle organisation de l'inspection du travail, pour accentuer les contrôles, ont été créés un groupe national chargé des affaires les plus sensibles et des unités régionales. Le gouvernement est totalement engagé dans la lutte contre le travail détaché illégal. Il le fait pour les salariés employés dans des conditions indignes, pour les entreprises victimes du dumping social mais aussi pour l'emploi.

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