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Jean-Louis Gagnaire
Question N° 87691 au Ministère des familles


Question soumise le 1er septembre 2015

M. Jean-Louis Gagnaire attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie sur la question des placements abusifs d'enfants diagnostiqués autistes par les services de l'Aide sociale à l'enfance (ASE). Alors que le défenseur des droits doit remettre un rapport sur l'ASE et le handicap en novembre prochain, d'ores et déjà les associations constatent des dérives et des augmentations alarmantes de tentatives de placements d'enfants ayant des troubles envahissants du développement (TED). De fait, les enfants autistes montrent des signes pouvant laisser croire, à qui n'est pas familier de ce handicap, au mieux à des carences éducatives, au pire à de la maltraitance : difficultés à se concentrer, agitation, troubles alimentaires, troubles du sommeil, automutilation. En juillet 2015, l'association Autisme France a publié un rapport sur les dysfonctionnements de l'Aide sociale à l'enfance (ASE), qu'elle qualifie d' «impitoyable machine à broyer les familles d'enfants autistes». En effet, la vice-présidente de l'association, Danièle Langloys, affirme être régulièrement contactée sur ces dérives. Or l'article 1 de la loi 5 mars 2007, codifié à l'article L. 112-3 du CASF, dispose : « La protection de l'enfance a pour but de prévenir les difficultés auxquelles les parents peuvent être confrontés dans l'exercice de leurs responsabilités éducatives, d'accompagner les familles et d'assurer, le cas échéant, selon des modalités adaptées à leurs besoins, une prise en charge partielle ou totale des mineurs. Elle comporte à cet effet un ensemble d'interventions en faveur de ceux-ci et de leurs parents ». La loi met pourtant en avant la prévention, prévention qui repose d'une part, sur la protection maternelle et infantile (PMI) à laquelle est donnée une compétence dans le domaine de la prévention sociale et médico-sociale beaucoup plus marquée qu'auparavant (article L. 2112 du code de la santé publique) et, d'autre part, sur la médecine scolaire (article L. 541-1 du code de l'éducation). Or selon la Commission nationale consultative des droits de l'Homme (CNCDH), le taux de placement en France ne cesse d'augmenter, il n'a jamais été aussi élevé, il est sans commune mesure avec les autres pays européens : Ainsi, en 2013, 143 000 ont été placés hors du cercle familial sur 273 000 enfants qui font l'objet de mesures de protection en France. En Italie, 30 000 enfants seraient placés hors du cercle familial pour une population comparable à celle de la France. Le placement d'enfants n'est jamais anodin, mais il revêt une dimension particulière lorsqu'il s'agit d'enfants autistes. Ils ont besoin d'un environnement sécurisé et de rituels, alors que dans le cadre d'un placement ils se retrouvent du jour au lendemain sans repères, sans accompagnement, donc en insécurité massive. Il lui demande donc quelles mesures spécifiques aux enfants autistes elle compte prendre dans le cadre des 101 mesures annoncées dans la feuille de route de la protection de l'enfance 2015-2017.

Réponse émise le 22 mars 2016

A travers le plan autisme 2013-2017, le Gouvernement a montré sa volonté de répondre à de nombreuses familles confrontées aux difficultés d'accompagnement et de réponses aux besoins de leurs enfants présentant des troubles du spectre de l'autisme. Parmi les cinq axes stratégiques de ce plan, le repérage, le diagnostic et les interventions précoces conformes aux recommandations de la HAS et de l'ANESM sont au cœur des attentes des familles. C'est donc bien l'une des priorités majeures de l'action du gouvernement dans le cadre de ce plan doté de 205 millions d'euros. Concrètement, deux dispositions importantes ont été prises en 2014 : la circulaire du 30 août 2014 sur le repérage, le diagnostic et les interventions précoces pour les jeunes enfants ayant un trouble du spectre de l'autisme, et la circulaire du 13 février 2014 sur la création d'unités d'enseignement en maternelle pour la scolarisation de ces mêmes enfants pour qui une scolarisation en milieu ordinaire avec un accompagnant des élèves en situation de handicap (aesh) n'est pas adaptée au regard de l'intensité de leurs troubles. Par ailleurs, l'instruction du 17 juillet 2014 relative au cadre national de repérage, de diagnostic et d'interventions précoces pour les enfants avec autisme ou autres troubles envahissants du développement prévu par le plan autisme (2013-2017) vise à la mise en place d'une organisation régionale coordonnée et graduée favorisant le repérage, le diagnostic et les interventions précoces, avant l'âge de 6 ans, pour les enfants avec autisme ou autres troubles envahissants du développement. Cette instruction précise les enjeux de cette action en termes de santé publique et d'organisation de l'offre médico-sociale et de soins. Elle fixe le cadre et les objectifs d'une démarche d'un « parcours » précoce autour de la mise en place d'une organisation coordonnée et graduée sur les territoires et propose des éléments de démarche régionale. Concernant la protection de l'enfance, la remontée annuelle des données de l'observatoire national de l'enfance en danger sur la prise en charge des enfants au sein de l'aide sociale à l'enfance n'indique pas d'augmentation significative de placements d'enfants ni de tentatives de placements d'enfants autistes. Il est néanmoins vrai que ces situations ne sont pas toujours identifiées et que les données ne permettent pas d'avoir une vision claire des profils des enfants accueillis. Il existe par ailleurs un certain nombre d'enfants pris en charge présentant des troubles du comportement liées aux négligences et maltraitances subies durant l'enfance. Il convient également de rappeler que la survenue d'un handicap peut aussi être un facteur de fragilisation familiale. C'est pour cela que, concernant l'autisme, le plan 2013-2017 prévoit la formation des aidants ainsi que des actions de guidance parentale fondées sur les recommandations de bonnes pratiques. Le défenseur des droits a évoqué cette fragilisation familiale dans son rapport consacré aux liens entre protection de l'enfance et handicap. [SA1]  . Dans tous les cas, les besoins de formation des professionnels sont importants, en particulier pour ceux qui interviennent dans l'évaluation des informations préoccupantes.  C'est un des aspects du plan d'actions pour l'amélioration de la prise en compte des spécificités de l'autisme dans le processus de décision en protection de l'enfance qui est en cours d'élaboration au niveau interministériel et sous l'égide du ministère des affaires sociales et de la santé. Ce plan, qui sera notamment annexé au Plan Autisme 2013-2017, est co-construit avec les représentants des associations de parents d'enfants autistes parmi lesquelles Autisme France. Ces travaux devront permettre la constitution d'outils partagés pour les professionnels et la possibilité de mobiliser dans chaque département les ressources spécialisées et les experts en capacité d'aider à évaluer et proposer des réponses adaptées à la spécificité des troubles du spectre de l'autisme.  Ce plan s'appuie par ailleurs sur un certain nombre de mesures déjà identifiées dans la feuille route pour la protection de l'enfance qu'a présentée la secrétaire d'Etat chargée de la famille, de l'enfance, des personnes âgées et de l'autonomie en juin 2015 et qui a fait l'objet d'une communication au Conseil des ministres du 19 août 2015. A travers cette feuille de route se dessinent les grands principes d'une réforme centrée sur l'enfant, ses besoins et la réaffirmation de ses droits. C'est l'attention portée à l'enfant qui guide les interventions des professionnels, favorise l'aide aux parents et la mobilisation de toutes les personnes qui comptent pour lui, depuis la prévention jusqu'aux éventuelles décisions d'accueil de l'enfant en dehors de la cellule familiale. Pour que ces principes se traduisent concrètement dans le quotidien des enfants, de leurs familles et des professionnels qui les accompagnent, la feuille de route comprend 101 actions concrètes. Une des grandes orientations de cette feuille de route est de mieux prendre en compte les besoins de l'enfant : ainsi il est prévu notamment de mener une démarche de consensus sur les besoins fondamentaux de l'enfant (action 9), de développer et d'étayer les évaluations précoces (action 11), de mieux prendre en compte les besoins spécifiques des enfants en situation de handicap (action 15) et de mieux former les professionnels chargés de l'évaluation de l'information préoccupante (actions 46 et 48). une attention particulière sera portée dans le décret à la sensibilisation des professionnels chargés d'évaluer les informations préoccupantes aux manifestations des troubles du spectre de l'autisme. Plus généralement, la feuille de route place la prévention au cœur du dispositif de protection de l'enfance notamment à travers la mise en place de protocoles départementaux entre les acteurs locaux afin de mieux repérer et accompagner les enfants et les familles présentant des fragilités d'ordre matériel mais également psychologique.

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