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Catherine Coutelle
Question N° 90155 au Secrétariat d'état au numérique


Question soumise le 13 octobre 2015

Mme Catherine Coutelle attire l'attention de Mme la secrétaire d'État, auprès du ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique, chargée du numérique sur l'ouverture du crédit d'impôts jeux vidéo (CIJV) aux titres déconseillés aux moins de 18 ans par l'organisme de classification paneuropéen, le PEGI, mise en place par le décret du 23 juin 2015 relatif au crédit d'impôt pour dépenses de création de jeux vidéo. Fortement attendu par les professionnel-le-s du secteur, ce dispositif ambitieux permettra de soutenir la production française du jeu vidéo, dont le savoir-faire est mondialement reconnu, et alors que les jeux vidéo classés « PEGI 18 » représentent un tiers des ventes de productions dites « AAA », productions parmi les plus innovantes et disposant des budgets les plus importants du marché. Alors que les conditions d'éligibilité au CIJV prévoient que ces jeux devront répondre à un barème visant à apprécier la contextualisation de la violence, la loi ne prévoit pas, à ce jour, de dispositions similaires permettant de signaler la présence de contenu sexiste dans un jeu vidéo. La promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes dans les médias est pourtant un objectif fort des politiques publiques, comme l'a démontré la loi du 4 août 2014 pour l'égalité réelle entre les femmes et les hommes en renforçant les compétences du Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) quant à la représentation des femmes et des hommes dans les programmes des services de communication audiovisuelle - notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein des couples. Le contenu sexiste de certains jeux vidéo, régulièrement dénoncé par des joueuses qui, loin des clichés, représentent en France près d'un-e joueur-se sur deux, devrait également pouvoir être signalé. En 2014, la Suède a lancé une réflexion autour de la création d'un label, indiquant si une œuvre participe, ou non, à la reproduction des stéréotypes de genre. Un tel dispositif pourrait permettre, en outre, de disposer des outils nécessaires pour identifier le contenu sexiste de certaines œuvres éligibles aux financements publics. C'est pourquoi elle lui demande quelles sont les intentions du Gouvernement pour s'assurer que les financements publics alloués au secteur du jeu vidéo soient conditionnés au respect de l'égalité femmes-hommes et à la lutte contre les stéréotypes de genre.

Réponse émise le 31 mai 2016

Le jeu vidéo connaît depuis quelques années un mouvement de fond en faveur de la place des femmes dans les studios de conception de jeu vidéo, d'une part, et au sein même des jeux vidéo, d'autre part, en réaction notamment à des polémiques violentes sur le sujet sur les réseaux sociaux. En effet, le secteur a vu, au niveau mondial, se développer une analyse de la place des femmes en son sein, grâce à la popularité de la série Feminist Frequency sur les plateformes de streaming. Des femmes de plus en plus nombreuses ont commencé à s'exprimer sur leurs conditions de travail dans les studios de jeux vidéo, sur les réseaux sociaux (hashtag #1reasontobe sur Twitter) et dans les conférences professionnelles du secteur (panel du même nom à la Game Developers Conference). En Europe et en France, le secteur travaille à promouvoir l'égalité des femmes et des hommes dans le jeu vidéo : - en informant le public sur le contenu des jeux vidéo : la classification PEGI comprend de nombreux critères liés au sexisme et à la violence contre les femmes, dont certains impliquent une classification automatique en 18+ du jeu considéré (violences sexuelles, discrimination, emploi d'injures sexistes) et l'affichage de pictogrammes sur la boîte ou la page internet du jeu ; - en réalisant un travail de sensibilisation, par le biais du site pedagojeux.fr. Ce changement produit des effets dans la production de jeux vidéo. Le salon E3 2015 a été salué pour le nombre de jeux mettant en scène des protagonistes féminins et promouvant une image respectueuse de la femme. La France, qui a donné au jeu vidéo un de ses personnages féminins les plus emblématiques (Jade dans le jeu Beyond Good and Evil), figure en première ligne de ce mouvement. En effet, parmi les jeux les plus visibles d'entreprises françaises, sortis ou annoncés récemment, beaucoup mettent en avant des personnages principaux féminins porteurs d'une image positive de la femme (Remember me, Beyond : Two Souls, Life is Strange, Dishonored 2 ou encore Assassin's Creed : Syndicate). La ministre chargée du numérique souhaite accompagner cette évolution, en encourageant la production de jeux vidéo qui promeuvent l'égalité entre hommes et femmes, en traitant par exemple spécifiquement et sérieusement de sujets liés au sexisme et à la violence envers les femmes. La réforme du crédit d'impôt jeu vidéo mentionnée dans les questions procédait en partie de la volonté de soutenir les jeux qui traitent sérieusement de ces sujets difficiles (agressions sexuelles, etc.) et qui, en raison de leur contenu et leurs thématiques, reçoivent automatiquement une classification PEGI 18. L'accroissement de la féminisation des métiers du jeu vidéo est un second objectif primordial. Le réseau de la Grande école du numérique, lancé par le Président de la République le 17 septembre 2015, constitue un outil formidable de promotion de la diversité dans les formations au numérique, en fixant un objectif initial de 30 % de femmes dans ces formations. Cet objectif est appelé à évoluer pour aboutir, in fine, à une parité entre hommes et femmes dans le numérique, et par inclusion, dans le jeu vidéo. L'action du Gouvernement en faveur de l'inclusion des femmes dans les formations aux métiers du numérique s'ajoute à celles entreprises par le secteur, qui accueillera lors de la Paris Games Week 2015 le premier forum pour étudiantes en jeux vidéo et proposera à celles-ci un système de mentorat par des professionnelles du secteur. Enfin, dans le cadre du groupe de travail sur le jeu vidéo rassemblant les ministères de l'économie et de la culture, le CNC et les professionnels du jeu vidéo, un travail a été lancé pour identifier les actions à mener pour mieux lutter contre les stéréotypes de genre dans les jeux vidéo mais également pour développer la féminisation de la filière. Ce travail pourrait inclure un label spécifique, des évolutions des critères du fonds d'aide au jeu vidéo et des actions sur les événements liés aux jeux vidéo.

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