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Jean-Michel Couve
Question N° 91630 au Ministère de l'agriculture


Question soumise le 8 décembre 2015

M. Jean-Michel Couve attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt, porte-parole du Gouvernement sur la question des visites rapides mises en place par son administration afin de contrôler les déclarations des éleveurs dans le cadre des aides perçues au titre de la PAC 2015. En effet, après avoir déclaré dans un premier temps qu'il y aurait des contrôles et des conseils d'ordre pédagogique auprès des producteurs pour qu'ils définissent correctement le prorata sur leurs parcelles, il est aujourd'hui annoncé la mise en place de visites rapides dont le but sera de vérifier si les déclarations faites par les éleveurs correspondent bien à leurs photos aériennes. L'éventualité des sanctions potentielles que pourraient générer ces visites est vécue par les éleveurs comme une double peine après la perte de surface liée à la mise en place du prorata. La profession agricole peine à comprendre cet acharnement à son encontre, alors même que les agriculteurs ont déclaré de bonne foi leurs surfaces sans consignes précises. Face à cette décision, les éleveurs varois réclament donc une année de mise à niveau positive ou négative sans sanction, afin de pouvoir recevoir les aides qui correspondent réellement à leur système pastoral. Ils demandent par ailleurs des moyens d'accompagnement technique et une mise à niveau de la méthode, basée sur la végétation réellement consommable et mobilisable par l'espèce animale présente sur l'exploitation. Il lui demande donc s'il envisage de prendre en considération ces mesures, vitales pour l'avenir de l'élevage pastoral varois.

Réponse émise le 22 décembre 2015

Les surfaces pastorales, notamment les sous-bois pâturés comme les châtaigneraies et chênaies, les landes avec des zones embroussaillées ou empierrées, ou encore les estives, où se pratique un élevage extensif important à la fois en termes économique, environnemental et de préservation des paysages, sont désormais clairement reconnues dans la politique agricole commune (PAC). Cette reconnaissance est le fruit de la négociation conduite par le ministre en charge de l’agriculture de mai 2012 à juin 2013 au niveau européen, au cours de laquelle il a obtenu que soient reconnues comme potentiellement admissibles des surfaces adaptées au pâturage et relevant de pratiques locales établies, dans lesquelles l’herbe et les autres plantes fourragères herbacées ne prédominent traditionnellement pas. Dans la nouvelle PAC qui concerne la période 2015/2020, ces surfaces font désormais partie de la catégorie des prairies permanentes. Jusqu’en 2014, ces surfaces bénéficiaient le plus souvent d’aides sur la totalité de la surface, sur la base d’arrêtés concernant l’admissibilité des surfaces, que la Commission européenne a remis en cause. En effet, la France s’est vu infliger 1,1 milliard d’euros de correction financière sur les campagnes PAC 2008 à 2012. Les reproches de la Commission sur la définition des surfaces admissibles, notamment pour les surfaces peu productives, représentent une bonne moitié de cette somme. C’est donc un sujet suivi de très près par la Commission européenne qui est attentive à ce qu’il soit traité correctement à partir de 2015. En pratique, l’éligibilité des surfaces pastorales, comme pour toutes les autres surfaces en prairies et pâturages permanents, se traduit par des « prorata » déclarés par les agriculteurs dans le cadre de leurs demandes d’aides PAC, qui consistent à retenir comme surface éligible aux aides un certain taux de la surface réelle des parcelles. Pour ces surfaces, un guide national d’aide à la déclaration des prairies et pâturages permanents a été mis en place, issu d’un travail conjoint entre les professionnels agricoles et l’administration, y compris les contrôleurs de l’agence de services et de paiement (ASP), conduit de novembre 2014 à avril 2015. S’appuyant sur de nombreux échanges avec les acteurs dans tous les départements concernés, ce travail a permis d’établir un guide national expliquant la méthode à retenir, illustré de 200 photographies permettant à chaque agriculteur de savoir quel taux appliquer sur ses parcelles. Ce travail a été conduit le plus finement possible et au plus près du terrain. La partie illustrative du guide comporte l’indication de prorata pour de nombreux types de situation comme les sous-bois pâturés et les landes avec des zones embroussaillées ou empierrées. En contrepartie de la reconnaissance de l’éligibilité de ces surfaces, il est important d’être très vigilant sur le respect des règles d’admissibilité fixées par la réglementation européenne. C’est la raison pour laquelle un effort est engagé cette année pour vérifier l’éligibilité de ces terres, ce qui permettra aussi d’apporter aux agriculteurs concernés le niveau d’assurance qu’ils sont en droit d’attendre, non seulement pour cette année mais pour toute la période 2015/2020. Ainsi, dans le cadre de la campagne 2015, l’instruction administrative des dossiers par les directions départementales des territoires (et de la mer) [DDT (M)] pourra comporter des visites sur place effectuées par l’ASP pour s’assurer de l’adéquation de la déclaration de l’agriculteur avec la réalité du terrain. De telles visites seront notamment programmées dans les cas où le prorata déclaré par l’agriculteur pour une parcelle conduit à retenir une surface admissible plus élevée que le prorata découlant de l’instruction administrative à partir des photographies des parcelles agricoles vues du ciel. Ce sera typiquement le cas pour les sous-bois pâturés qui apparaissent non éligibles sur les photographies mais qui peuvent en pratique être éligibles grâce à la règle du prorata. Il s’agit dans ces cas de s’assurer que le prorata retenu dans sa déclaration par l’exploitant, avec l’appui du guide national d’aide à la déclaration des prairies et pâturages permanents, est cohérent. Une phase pilote a été conduite du 30 septembre au 13 octobre 2015 sur douze départements avant le déploiement de ces visites en grand nombre. Cette phase pilote a permis de préciser plusieurs points, dans le cadre d’un groupe de suivi national auquel l’ensemble des organisations professionnelles agricoles participent. Cela a fait l’objet de notes techniques, s’appuyant notamment sur des cas concrets et des illustrations de terrain, qui ont été largement diffusées. Pour 81 % des parcelles qui ont fait l’objet d’une visite dans le cadre de la phase pilote, l’ASP a validé le prorata déclaré par l’exploitant agricole. Il ressort donc que l’exercice a globalement été bien compris par les agriculteurs lors de leur déclaration, grâce notamment au guide national et à l’appui technique des organisations professionnelles agricoles, des chambres d’agriculture et des autres organismes de service. Toutefois, dans certains cas, une différence entre le prorata déclaré par l’agriculteur et celui retenu par l’administration est apparue, qui peut éventuellement se traduire par des pénalités conduisant à réduire l’aide attribuée en 2015. Il s’agit là d’une règle fondamentale de la PAC. Le montant des aides 2015 sera déterminé en fonction de la surface définitivement fixée par l’administration à l’issue des visites de terrain. En cas de différence avec la surface résultant de la déclaration de l’agriculteur, des pénalités pourront être appliquées, qui seront progressives selon l’ampleur de l’écart entre la surface déclarée et la surface retenue. L’écart sera apprécié sur le total des surfaces éligibles de l’exploitation pour chaque aide concernée, et non pas à l’échelle d’une seule parcelle. Ainsi, lorsque l’agriculteur a déclaré un prorata supérieur à celui constaté sur une seule de ses parcelles, mais que les autres parcelles sont conformes, l’écart total sera probablement faible. Si l’écart est inférieur à 3 %, il n’y a pas de pénalité supplémentaire. Si la surface déclarée par l’agriculteur est supérieure à la surface retenue par l’administration, et que l’écart est compris entre 3 et 20 %, une pénalité supplémentaire correspondant au double de cet écart sera appliquée. Au-delà de 20 % d’écart, le montant d’aide est réduit à zéro. Cette application de pénalités vaut pour les aides 2015. Pour les aides 2016 (et de même pour celles des années suivantes), si l’agriculteur déclare en 2016 un prorata conforme à celui retenu in fine en 2015, sa déclaration sera sécurisée. Comme cela a déjà été indiqué à de nombreuses reprises aux acteurs concernés, tant qu’un agriculteur ne s’est pas vu notifier par courrier une remarque sur une de ses parcelles ou une annonce de visite rapide, il peut modifier la déclaration qu’il a faite avant le 15 juin 2015. Il peut revoir ses prorata pour diminuer la surface admissible de ses parcelles. Il peut aussi découper si besoin, au sein de ses parcelles initialement déclarées, des parcelles homogènes plus petites pour leur affecter de nouvelles valeurs de prorata (l’admissibilité totale des nouvelles parcelles devant être inférieure ou égale à l’admissibilité de la parcelle initialement déclarée). Dans le cas où l’exploitant a un doute sur sa déclaration, il lui est conseillé de réexaminer sa déclaration à l’aide du référentiel national et, s’il le souhaite et selon sa situation, en prenant conseil auprès de son organisme de service, de la chambre d’agriculture ou d’une organisation professionnelle. Le ministre en charge de l’agriculture a demandé aux chambres départementales d’agriculture de se mobiliser. Elles organisent ainsi une information des agriculteurs et un appui auprès de ceux qui souhaiteraient modifier leurs déclarations. Le ministre en charge de l’agriculture recommande à chacun de prendre toute la mesure de ces dispositions, certes techniques, mais qui sont à même d’assurer une prise en compte des surfaces pastorales de manière sécurisée vis-à-vis du droit européen. Enfin, en dehors de cas particuliers, et malgré la proratisation de ces surfaces, les exploitations concernées seront bénéficiaires des effets de la réforme de la PAC, en particulier grâce à la convergence des aides, au renforcement de certaines aides couplées, et au renforcement significatif de l’indemnité compensatoire de handicap naturel.

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