Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Catherine Troallic
Question N° 91733 au Ministère des affaires sociales


Question soumise le 8 décembre 2015

Mme Catherine Troallic attire l'attention de Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la pratique de la contention en milieu psychiatrique. Dans son rapport sur la santé mentale et l'avenir de la psychiatrie remis à Mme la ministre en décembre 2013, le député socialiste Denys Robiliard notait « un recours problématique à la pratique de la contention et à l'isolement thérapeutique » avec l'augmentation et la banalisation des pratiques d'enfermement, d'immobilisation et d'attachement des personnes malades à l'hôpital. Il regrettait, en outre, qu'il n'existe que de rares statistiques dans ce domaine et l'absence totale de suivi au niveau national, avec des situations très différentes d'une région à une autre. Pour de nombreux spécialistes, la recrudescence de ces pratiques sur notre territoire s'explique notamment par l'absence de protocole, le manque de formation des infirmiers et des jeunes médecins, la configuration des lieux ou encore la féminisation des équipes. Lors d'un colloque organisé au Sénat, les professionnels membres du Collectif 39 ont lancé un appel : « Dire non aux sangles qui font mal, qui font hurler, qui effraient plus que tout, c'est dire oui à un minimum de fraternité, c'est réaffirmer qu'il est possible de faire autrement. Dire non c'est remettre au travail une pensée affadie, devenue glacée, c'est poser un acte de régénérescence ». Aux yeux de ces psychiatres, il y a urgence. « La contention est un indicateur de la bonne ou de la mauvaise santé de la psychiatrie », souligne le Dr Jean-Claude Pénochet, président du Syndicat des psychiatres des hôpitaux. « Plus elle va mal, plus la contention sera utilisée ». Mme la députée se réjouit donc que M. Denys Robiliard ait réussi à faire adopter un amendement au projet de loi de modernisation de notre système de santé, afin d'encadrer sévèrement le recours à la contention : elle est à présent qualifiée de « pratique de dernier recours » et les mises en isolement et en contention devront être consignées dans un registre. En revanche, elle s'interroge concernant la contention chimique, pour laquelle nous manquons également d'indicateurs et de données. Elle souhaiterait avoir des informations sur la situation de ces patients endormis par les médicaments, qui lui apparaît inquiétante. Il ne faudrait pas que la contention chimique devienne une alternative à la contention physique maintenant que cette dernière est strictement encadrée. En outre, elle souhaiterait savoir si des dispositifs vont être mis en place face au départ massif des psychiatres à la retraite et si la formation des infirmiers soignants pourrait être repensée pour une meilleure prise en charge de l'agitation et de l'agressivité dans un souci de respect de la dignité des malades. Enfin, elle souhaiterait savoir si une interdiction totale et définitive du recours à la contention pourrait être envisagée dans les années à venir.

Réponse émise le 22 mars 2016

La loi de modernisation de notre système de santé prévoit une mesure destinée à assurer la transparence des pratiques de recours aux chambres d'isolement et à la contention dans les établissements de santé accueillant des personnes en soins psychiatriques sans consentement. Cette disposition fait suite aux recommandations, en 2013, du contrôleur général des lieux de privation de liberté, sur la tenue d'un registre spécialement dédié aux placements à l'isolement - préconisation reprise par la mission parlementaire d'information sur la santé mentale et l'avenir de la psychiatrie – par l'inscription dans la loi de l'obligation de traçabilité des mesures d'isolement et de contention. La tenue d'un registre dans chaque établissement de santé autorisé en psychiatrie, et désigné par le directeur général de l'agence régionale de santé pour délivrer des soins psychiatriques sans consentement, a pour objectif d'assurer la traçabilité de chaque mesure de contention. Seront mentionnés sur le registre le nom du psychiatre l'ayant décidée, la date, l'heure, la durée ainsi que le nom des professionnels de santé l'ayant surveillée. Le registre doit être présenté, sur leur demande, à la commission départementale des soins psychiatriques, au contrôleur général des lieux de privation de liberté ou à ses délégués, et aux parlementaires. Dans le cadre des prises en charge de patients présentant des troubles du comportement, la prise en charge est globale et associe généralement plusieurs dimensions : prise de médicaments, approches psychodynamiques de la maladie… Un travail est engagé depuis plusieurs années avec la haute autorité de santé (HAS) afin de mieux encadrer ces situations difficiles et prévenir, chaque fois que possible, les situations présentant des troubles du comportement violents. C'est dans ce cadre que la HAS vient de publier un guide intitulé « Mieux prévenir et prendre en charge les moments de violence dans l'évolution clinique des patients adultes lors des hospitalisations en services de psychiatrie ». Ces travaux se poursuivent avecl'inscription au programme pluriannuel de la HAS, de recommandations sur le recours à la contention et en chambre d'isolement dont la publication est attendue cette année. Ces évolutions permettront de soutenir les politiques déjà engagées en matière de formation des professionnels de santé afin de prévenir et mieux répondre aux situations de violence. Concernant la démographie médicale, il convient de rappeler que le nombre de psychiatres en France reste bien plus important que dans les autres pays européens mais trop de postes restent vacants dans les établissements de santé. C'est pourquoi la ministre de la santé a présenté un plan d'actions en faveur de l'attractivité à l'hôpital notamment destiné à apporter des solutions aux spécialités en tension.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette question.

Inscription
ou
Connexion