Séance en hémicycle du 14 mai 2013 à 15h00

Résumé de la séance

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La séance

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Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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La parole est à Mme Nathalie Kosciusko-Morizet, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le ministre de l'intérieur, vous étiez hier à Lyon, où vous avez tenu une conférence de presse pour vanter les mérites de votre politique.

Il y aurait beaucoup à redire à propos des lauriers que vous vous tressez. Sans doute pensez-vous que l'on n'est jamais si bien servi que par soi-même !

Le même jour avaient lieu dans la capitale des événements graves sur lesquels je veux vous interroger. Des dizaines de milliers de Parisiens étaient rassemblés pour fêter le titre du Paris Saint-Germain.

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Je rends hommage aux joueurs, aux dirigeants du club, à la ferveur des supporters. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Je rends aussi hommage aux forces de police qui, en dépit d'une situation impossible, ont fait ce qu'elles pouvaient.

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Monsieur le ministre, hier, la fête a été gâchée. Elle a tourné à l'émeute. Un quartier de Paris a été livré à des bandes de voyous. Ils ont pu pendant plusieurs heures, quasi impunément, s'en prendre aux Parisiens, aux boutiques, aux vitrines, aux voitures. Bilan : trente-deux blessés. Tout cela du fait du manque de préparation des responsables parisiens de la police, qui n'avaient manifestement pas anticipé ces événements.

Monsieur le ministre, j'étais hier parmi les supporters pour fêter la victoire. (Exclamations et rires sur les bancs du groupe SRC.) J'ai vu leur déception, j'ai partagé leur colère de voir la fête ainsi dévoyée et en fin de compte annulée. J'ai aussi rencontré les victimes place du Trocadéro, et j'ai vu leur écoeurement.

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Aujourd'hui, les Parisiens ne comprennent pas et sont scandalisés. Comptez-vous, comme ils le demandent, lancer sans délai une enquête pour comprendre quels manquements ont pu conduire à de tels débordements ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur plusieurs bancs du groupe UDI.)

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Madame la députée, je veux tout d'abord condamner de la manière la plus ferme les agissements d'ultras, de casseurs, de voyous, qui ont gâché ce qui aurait dû être une grande fête. Ils s'en sont pris aux forces de l'ordre, à des passants, à des touristes, à des commerçants. Parmi les trente-deux blessés, l'on compte trois policiers et gendarmes. Je rends hommage aux forces de l'ordre : huit cents policiers et gendarmes étaient présents sur le terrain. (Applaudissements sur tous les bancs.)

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Malheureusement, ce type d'incident n'est pas nouveau. Faut-il rappeler les débordements bien plus graves qui se sont déroulés au coeur de Paris, en 2010, à l'occasion de la défaite de l'Algérie au mondial de football ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Faut-il rappeler les émeutes de la gare du Nord ? Faut-il rappeler les saccages commis aux Invalides lors des manifestations contre le CPE en 2006 ? (Mêmes mouvements.)

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Et en juin quarante, les Allemands étaient à Paris !

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Cet après-midi, je rencontrerai les dirigeants du Paris Saint-Germain, de la Ligue et de la ville de Paris pour établir ensemble les responsabilités lors de l'organisation de ce type de manifestations, et aussi pour tirer toutes les conséquences.

J'ai déjà demandé au directeur général de la police nationale et au préfet de police de me donner tous les éléments pour mieux comprendre ce qui s'est passé hier.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Incontestablement, il faut le voir en face, la situation a abouti à des événements intolérables.

Pour les raisons que vous avez évoquées, il était difficile d'interdire une telle manifestation. Il est vrai néanmoins que le football, notamment à Paris, est malade (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et nous devons en tirer les conséquences.

Madame la députée, j'ai en charge l'ordre et la sécurité des Français et des Parisiens, et je compte bien poursuivre ma mission avec beaucoup de sérénité et beaucoup de fermeté. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme Catherine Lemorton, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le Premier ministre, vous receviez hier à Matignon les partenaires sociaux pour préparer la seconde conférence sociale qui se tiendra les 20 et 21 juin prochains. (« Allô ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.) Après un an d'action du Gouvernement au service des Français, chacun peut mesurer la pertinence de votre méthode, à savoir le dialogue social. Cette méthode a permis aux partenaires sociaux d'élaborer des compromis utiles…

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…pour mettre en oeuvre les contrats de génération, utiles pour lancer les emplois d'avenir,…

Plusieurs députés du groupe UMP. Cela ne marche pas !

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…utiles pour sécuriser l'emploi, utiles pour conforter le pacte de compétitivité.

Oui, monsieur le Premier ministre, nous sommes fiers d'appartenir à une majorité qui privilégie le dialogue social. Comme vous, nous attendons beaucoup de cette démarche pour réfléchir aux chantiers encore nombreux qui s'ouvrent, car la tâche est immense.

Bien sûr, il y a la crise, bien sûr… mais aussi l'héritage ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Oui, mes chers collègues : l'héritage laissé par dix ans de politique de droite.

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Vous êtes au pouvoir depuis un an, maintenant !

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Monsieur le Premier ministre, l'émergence de la démocratie sociale ne conduit pas à l'effacement du rôle du Parlement. Bien au contraire, il nous revient de peser sur les orientations retenues par les partenaires sociaux, de les inscrire dans la durée et de veiller à leur mise en oeuvre effective.

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La démocratie politique et la démocratie sociale ne sont pas antagonistes. Elles doivent au contraire se compléter et s'enrichir, et c'est la mission que nous nous assignons pour compléter votre action – en tout cas, de ce côté-ci de l'hémicycle.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous éclairer la représentation nationale sur la nature des chantiers qui vont s'ouvrir et le calendrier prévu ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et sur plusieurs bancs du groupe GDR.)

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Madame la présidente Catherine Lemorton, vous avez raison d'insister sur l'importance de la réunion d'hier.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

J'ai reçu, entouré des ministres concernés, chacune des organisations syndicales, patronales et de salariés. Ce moment particulièrement riche et intense a montré l'attachement profond des partenaires sociaux à la démarche initiée par le Gouvernement il y a maintenant un an. Cette démarche a commencé avec la grande conférence sociale dont nous allons tirer le bilan cette année et sera poursuivie par une deuxième étape, la nouvelle conférence sociale qui se tiendra les 20 et 21 juin prochains.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Le dialogue social et la démocratie sociale sont l'une des marques de fabrique de ce Gouvernement. Je revendique haut et fort cette méthode.

Cette deuxième conférence sociale nous permettra de faire le bilan de ce qui a été engagé et qui vous a permis, mesdames et messieurs les députés, de légiférer : les emplois d'avenir (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), les contrats de génération,…

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

…l'accord interprofessionnel sur la sécurisation de l'emploi, le pacte de compétitivité pour la croissance et l'emploi.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Un an après, nous serons en mesure de montrer que c'est la voie du redressement du pays. Chaque organisation syndicale est attachée à ce que cette démarche s'inscrive dans la durée.

Il y a d'autres chantiers. Celui de la formation professionnelle, pour commencer. Celui aussi de l'avenir de notre système de retraite (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP), avec plusieurs défis : assurer le financement des retraites pour aujourd'hui et pour demain, sauver le régime par répartition et corriger les injustices. Tous ces sujets seront à l'ordre du jour de la deuxième conférence sociale.

Notre pays a besoin de réformes profondes. Sur aucun de ces enjeux, le Gouvernement n'a l'intention de renoncer.

Debut de section - Permalien
Jean-Marc Ayrault, Premier ministre

Mais il n'a pas non plus l'intention de passer en force. La voie du dialogue et de la négociation est la voie de la réussite pour le redressement de la France.

Nous ne le ferons pas seuls : les partenaires sociaux sont là. Au-delà de leurs différences, ils partagent la même ambition : réussir la bataille de la croissance, la bataille de l'emploi, la bataille qui permettra aussi de préserver et de sauver le système social et républicain français. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Paul Giacobbi, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste .

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Monsieur le ministre des transports, il y a déjà huit ans, je dénonçais ici même les conditions de la privatisation de la SNCM par le gouvernement de l'époque et le caractère illégal d'une partie de la délégation de service public en vigueur jusqu'à la fin de cette année.

Pour avoir tiré les conséquences de ces positions dans mon action à la tête de l'exécutif de Corse, j'ai fait l'objet d'une campagne calomnieuse (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe UMP), mais les décisions que j'ai prises se trouvent aujourd'hui doublement justifiées par l'Union européenne qui valide le service tel que nous l'avons organisé et rend illégal le service complémentaire auquel nous avons décidé de mettre fin. Par ailleurs, le tribunal de l'Union européenne a annulé l'ensemble des aides d'État accordées lors de la privatisation.

Aujourd'hui, la première phase de la procédure d'attribution de la délégation de service public s'achève sans qu'aucun candidat n'ait remis une offre légalement et financièrement acceptable : elle sera donc déclarée infructueuse et nous relancerons les négociations avec l'ensemble des candidats.

S'agissant de la SNCM, une offre légale et raisonnable n'est possible que dans le cadre d'une restructuration de l'entreprise sur la base d'un projet industriel sérieux qui permettra d'affecter quatre navires mixtes au service public de la Corse et de trouver une autre vocation au reste de la flotte.

Votre serviteur a aussi exploré, étudié puis exposé aux parties prenantes, à commencer par l'État, ce que pourrait être un schéma de restructuration. Nous n'excluons pas d'intervenir dans le renouvellement de la flotte par le biais d'une société d'économie mixte.

Il n'appartient cependant pas au concédant d'organiser l'évolution industrielle de son concessionnaire : cette tâche incombe à ceux qui contrôlent l'entreprise. Il vous appartient donc, monsieur le ministre, d'éclairer la représentation nationale sur vos intentions dans ce dossier dont dépend le sort de 1 400 salariés. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et sur plusieurs bancs du groupe écologiste.)

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La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - Permalien
Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie

Monsieur le député, je vous prie d'excuser Frédéric Cuvillier, qui participe en ce moment au Conseil des ministres européens de la pêche.

Dès son arrivée au pouvoir, le Gouvernement a pris à bras-le-corps le dossier de l'avenir de la SNCM. Je rappelle que notre action a toujours consisté à défendre l'économie maritime française : nous l'avons montré sur plusieurs dossiers comme SeaFrance, My Ferry Link et Brittany Ferries.

S'agissant de la procédure d'attribution de la nouvelle délégation de service public, la Corse est naturellement libre de déclarer cette procédure infructueuse en motivant sa décision, et de relancer la négociation avec l'ensemble des candidats dans des conditions transparentes et équitables.

Concernant la SNCM, la priorité est de construire un plan industriel pérenne en préservant le maximum d'emplois. C'est la priorité du Gouvernement. L'ensemble des actionnaires actuels doivent faire les efforts nécessaires pour construire un avenir à la SNCM ; c'est sur ce projet que la direction de l'entreprise s'est mobilisée depuis plusieurs mois, avec l'ensemble des parties prenantes.

S'agissant de la décision de la Commission européenne sur le service complémentaire de la délégation de service public 2007-2013, le Gouvernement estime que ce service complémentaire, destiné à renforcer pendant les périodes de pointe le service permanent assuré toute l'année, répond à un réel besoin de service public. Nous considérons que la compensation correspondant à ce service est assise sur des paramètres fixés de façon objective et transparente, à la suite d'une procédure de mise en concurrence ouverte à tous. Nous déposerons donc un recours contre cette décision de la Commission devant le tribunal de l'Union européenne.

Le Gouvernement est mobilisé pour l'avenir de la SNCM et examine très attentivement, vous le savez monsieur le député, avec la collectivité territoriale de Corse et les actionnaires tous les moyens de préserver l'activité et l'emploi, pour garantir la continuité territoriale et donc le développement économique de la Corse.

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La parole est à M. Patrice Carvalho, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Monsieur le Premier ministre, vous avez reçu hier les organisations syndicales et patronales afin de préparer la conférence sociale des 20 et 21 juin prochains, qui lancera, en particulier, une nouvelle réforme des retraites. Au-delà des mots, des déclarations, des joutes oratoires, ce que nous entendons concernant les pistes envisagées pour cette réforme n'est guère rassurant. Il est en effet question d'un allongement de la durée de cotisation et d'une baisse éventuelle du montant des pensions. Bref, ce sont une nouvelle fois les salariés et les retraités qui vont trinquer et un nouveau coin va être enfoncé dans notre système de retraite.

Dans ces conditions, ce qui est proposé n'est rien d'autre qu'une réforme Fillon 2. Or, ce dont nous avons besoin, ce n'est pas d'une énième réforme de droite mais d'une réforme de gauche. Cela implique de sortir de l'obsession qui conduit à vouloir, à tout prix, réduire les dépenses, ce qui revient à maintenir au travail des hommes et des femmes âgés alors que le chômage explose et à appauvrir les salariés et les retraités. L'espérance de vie s'allonge et c'est tant mieux. Cela veut donc dire que nous avons besoin de recettes nouvelles.

Le montant des exonérations de cotisations sociales aux entreprises s'élève à 30 milliards d'euros par an. Elles ont fait un bond de 55 % en dix ans. Et la Cour des comptes nous dit, presque chaque année, que cela ne sert en rien l'emploi. Voilà une piste.

Les revenus financiers des entreprises et des banques s'élèvent à 300 milliards par an environ. Si nous les soumettions à cotisation, au même taux que les cotisations sociales existantes, cela rapporterait 24 milliards d'euros. Voilà une autre piste.

Monsieur le Premier ministre, pensez-vous vraiment que le progrès doit obligatoirement desservir l'homme ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député Carvalho, le Président de la République avait pris l'engagement de revoir notre système de retraite.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

À l'évidence, la réforme engagée par la droite n'avait permis ni de garantir son financement dans la durée (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) ni d'introduire des mesures de justice.

Nous avons, monsieur le député, un devoir de vérité. Le courage de la vérité, mesdames et messieurs de l'opposition, c'est de reconnaître que votre réforme n'aura pas permis de financer dans la durée nos régimes de retraite. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Le courage, mesdames et messieurs de l'opposition, c'est de reconnaître que votre réforme était injuste car elle reposait principalement sur celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes.

Le Gouvernement a pris l'engagement d'aller vers une nouvelle réforme des retraites. D'une part, elle devra garantir dans la durée notre système de retraite par répartition solidaire pour faire en sorte que chacune et chacun puisse compter sur la solidarité nationale. D'autre part, il nous faudra inscrire cette réforme nécessaire dans un chemin de justice.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

En effet, il n'est pas juste que les femmes aient une retraite de 50 % inférieure à celle des hommes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Il n'est pas juste que celles et ceux qui ont connu des carrières pénibles aient les mêmes conditions de départ en retraite que les autres. (Mêmes mouvements.) Il n'est pas juste que ceux qui ont connu des carrières heurtées ne trouvent pas de meilleures conditions de départ en retraite que les autres. (Mêmes mouvements.)

Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement a la volonté, dans la concertation et sans passage en force, d'engager une réforme de responsabilité et de justice. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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La parole est à M. Claude Goasguen, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le ministre de l'intérieur, en écoutant votre réponse à la première question, nous avons cru comprendre que vous alliez vous renseigner sur ce qui s'est passé hier ! (Rires sur les bancs du groupe UMP.) Cela ne manque pas de nous rassurer…

Vous allez vous renseigner, monsieur le ministre de l'intérieur, sur des scènes de guerre civile (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) qui se sont déroulées dans une partie de Paris. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Vous allez vous renseigner sur le fait que des forces de l'ordre ont été agressées par des voyous et que deux représentants syndicaux dénoncent l'impréparation de cette manifestation.

Vous allez vous renseigner aussi sur les déclarations du préfet de police, qui déclarait ce matin n'être au courant de rien. (« Incroyable ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Et en outre, vous avez fait l'amalgame entre les malfrats et les supporters du PSG. Ces derniers apprécieront.

Monsieur le ministre, vous avez une fâcheuse tendance à fuir vos responsabilités. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) En général, les responsabilités selon vous sont à mettre au compte du passé, du PSG, des malfrats. En revanche, je note que vous n'avez pas hésité à employer la fermeté lorsqu'il s'agissait de réprimer des familles qui, elles, manifestaient calmement ! (Exclamations sur les bancs du groupe SRC. – Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.) Évidemment, c'est beaucoup plus facile que d'empêcher des malfrats d'agresser la police !

Monsieur le ministre, vous êtes le responsable de l'ordre public. Le préfet de police aussi est responsable, mais vous, vous êtes seul responsable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Cessez de nous faire prendre des vessies pour des lanternes.

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L'insécurité en France augmente. À Grigny, en Corse, à Marseille… partout, elle augmente. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Vous nous prenez pour des naïfs. Assumez vos responsabilités ! Si vous ne vous sentez pas coupable, au moins, soyez responsable, cela nous rassurera ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

J'apprécie toujours le sens de la nuance et du débat constructif qui vous caractérise, monsieur le député. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je veux, car vous ne l'avez pas fait, saluer le travail de la police…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

…et rappeler les faits. Trente-huit individus ont été placés en garde à vue hier,…

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

…trois personnes supplémentaires ont été interpellées ce matin à Noisy-le-Sec grâce à l'apport de la vidéoprotection. Le travail de la police et de la justice se poursuivra car ces agissements, ces faits de violences sont intolérables.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Mais, monsieur le député, est-ce en contestant l'autorité légitime, celle du préfet de police, celle du Gouvernement, que vous pensez servir la République ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Est-ce en mettant en cause les forces de l'ordre, leur travail et leur sang-froid que vous comptez faire respecter l'ordre public ? (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Vous aviez choisi la rue contre le Parlement lors des manifestations contre le mariage pour tous, alors que des groupuscules d'extrême droite violents et déterminés sévissaient. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Aujourd'hui, monsieur le député, on ne vous entend pas concernant les coupables d'hier soir : les ultras et les casseurs qui défient les lois et l'autorité. À l'évidence, dans notre pays, dans la république, l'ordre a changé de camp. Vous êtes pour le désordre et nous, c'est l'ordre républicain que nous défendons. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP. – Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Retrouvons une certaine sérénité, et passons à la question suivante !

La parole est à M. Gilles Bourdouleix, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

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Je souhaite tout d'abord vous dire, monsieur le président, que le groupe UDI s'émeut de la disparition du drapeau européen qui se trouvait derrière vous.

Ma question s'adresse à M. le Premier ministre, chef du Gouvernement. Nous examinerons jeudi matin la proposition de loi du groupe de la Gauche démocrate et républicaine portant amnistie des actes commis dans le cadre de mouvements syndicaux et sociaux.

(Exclamations sur les bancs des groupes UDI et UMP.) Ah, le drapeau était caché ! Nous voilà rassurés, l'Europe est revenue dans cet hémicycle ! (Sourires.)

Le Sénat a voté le texte avec les voix des sénateurs socialistes et avec les félicitations de Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. Mais le 24 avril dernier, le ministre en charge des relations avec le Parlement a indiqué que le Gouvernement s'opposerait dans cet hémicycle à ce texte, aussitôt suivi par le président du groupe socialiste.

Dans la foulée, la porte-parole du Gouvernement a indiqué, pour justifier la volte-face du Gouvernement, que celui-ci avait attendu une amélioration de ce texte au Sénat. Je la cite : « On a travaillé ce texte au Sénat pour essayer de l'améliorer, mais il continue de soulever des difficultés très nombreuses. Nous avons pensé qu'il était préférable de ne pas l'adopter. La position du Gouvernement est assez claire, puisque nous sommes contre toute forme d'amnistie. »

Pourtant, la garde des sceaux avait dit, à l'issue du vote par le Sénat – ni avant, ni pendant : après ! – : « Aujourd'hui, le Sénat accomplit un acte de très grande qualité de justice, un acte qui honore la République. Le Gouvernement est heureux d'y avoir été associé et d'avoir contribué à une écriture plus fine, plus subtile, plus élaborée de ce texte ».

J'ai deux questions, monsieur le Premier ministre. D'abord, pouvez-vous éclairer l'Assemblée nationale sur la cohérence de votre gouvernement ?

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Et pouvez-vous rassurer nos collègues socialistes, qui doivent s'inquiéter ? En effet, si voter ce texte au Sénat honore la République, est-ce que ne pas le voter à l'Assemblée ne serait pas déshonorer la République ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des relations avec le Parlement.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Monsieur le député, une loi d'amnistie est toujours une loi d'exception, puisqu'il s'agit tout simplement, par une décision politique, de remettre en cause un jugement rendu par un tribunal indépendant.

Historiquement, il existe dans notre pays deux types de lois d'amnistie. D'une part, celles qui s'imposent à la suite d'événements exceptionnels ayant créé une fracture dans la société française, tels que ceux intervenus en Algérie ou en Nouvelle-Calédonie.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

D'autre part, il existait traditionnellement des lois d'amnistie dites « présidentielles », qui étaient de plus en plus contestées – nous avions d'ailleurs voté contre celle proposée en 2002.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

En 2007, l'ancien président avait annoncé qu'il y renonçait et le président Hollande, dès son élection, a indiqué qu'il était contre cette loi d'amnistie.

Une proposition de loi sera examinée. La question qui se pose ici est de savoir si les conditions d'exception sont à ce jour réunies pour permettre un avis favorable.

Le Gouvernement considère que ce texte ne relève pas du droit social et que l'engagement social d'un gouvernement ne se mesure pas au vote d'une loi d'amnistie,…

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

…mais plutôt à la confiance accordée aux partenaires sociaux avec le choix de la démocratie sociale, ou encore au texte qui sera proposé par le groupe socialiste sur la reprise des sites rentables.

Par conséquent, en l'état, le Gouvernement n'est pas favorable au principe de la loi d'amnistie.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, ministre délégué chargé des relations avec le Parlement

Dans la situation que connaît la France aujourd'hui, il ne doit y avoir qu'une seule réponse au coeur de la République : c'est le respect de la loi républicaine ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Christian Kert, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Je souhaite tout d'abord dire à M. le ministre de l'intérieur que les ficelles qu'il utilise pour répondre aux questions sur le maintien de l'ordre sont tellement grosses que l'on ne sait s'il s'agit de simple culot ou d'inconscience ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture. Cette semaine, un professionnel reconnu de l'information télévisuelle va jouer sa carrière sur un coup de dés.

Ce journaliste, qui appartient à la rédaction de France 3, a révélé par un reportage en caméra cachée le scandale du « mur des cons » bâti au sein même du syndicat de la magistrature pour caricaturer des personnalités de tous horizons professionnels, mais essentiellement classés ou supposés de droite. Que n'aurait-on dit si l'on avait trouvé un mur de cette nature dans une association proche de l'opposition !

Il a d'ailleurs fallu que nous criions notre indignation ici même pour que Mme Taubira finisse par réagir.

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Le comble : c'est un syndicat de journalistes CGT qui a demandé à la direction de France Télévisions de sanctionner leur confrère, lequel pourrait seulement se voir reprocher, sur le plan professionnel, de ne pas avoir réservé sa découverte à l'une des chaînes publiques !

Qu'un syndicat de journalistes veille à protéger un syndicat de magistrats en dit long sur le mépris dans lequel on tient la lumière de la vérité et de la liberté dans les arcanes qui vous servent ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Vous, madame la ministre, dont l'honneur, plus que tout autre de vos collègues, parce que vous êtes ministre de la culture, est de défendre la liberté d'expression et donc d'information, aurez-vous le courage dans cette affaire d'être la garante de cette liberté ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Merci. La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

Monsieur le député, la liberté de la presse est une valeur fondamentale, et la ministre de la culture et de la communication que je suis en est la garante.

Néanmoins, de quoi s'agit-il dans cette affaire ? Ce journaliste fait aujourd'hui l'objet d'une procédure disciplinaire diligentée par la direction de France Télévisions. À aucun moment, le Gouvernement n'est intervenu dans cette procédure, ni pour la demander, ni pour l'exiger. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

L'interventionnisme en matière d'audiovisuel public, c'était vous ! L'interventionnisme en matière de liberté de la presse – ou plutôt de non-respect de la liberté de la presse – c'était vous ! C'était, il est vrai, il n'y a pas si longtemps…

Sur quels fondements ce journaliste fait-il donc l'objet d'une procédure disciplinaire ? Pas sur les moyens qu'il aurait utilisés pour tourner ces images, ni sur le fait même qu'il les ait tournées, puisqu'elles ont été diffusées par le service public, France 2 comme France 3.

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Vous valez mieux que cela ! Répondez vraiment à la question !

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

La direction de France Télévisions, entreprise publique de l'audiovisuel, et qui mérite à ce titre d'être respectée, reproche aujourd'hui à ce journaliste de ne pas avoir respecté les termes du contrat qui le lie à elle. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Il aura donc toute liberté de se défendre au cours de cette procédure disciplinaire en expliquant la raison pour laquelle il a choisi de donner ces images non pas en priorité à son entreprise, mais à un site internet concurrent du service public de la télévision.

En tant que ministre responsable du suivi du service public de la télévision, je suis attentive à ce que les journalistes du service public travaillent réellement pour le service public, notamment quand ils ont des informations importantes ou intéressantes à communiquer.

Debut de section - Permalien
Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

Quant à l'indépendance de l'audiovisuel, vous examinerez bientôt un projet de loi sur l'indépendance du CSA. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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La parole est à M. Daniel Vaillant, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre de l'intérieur, vous étiez, hier, en déplacement à Lyon avec Mme la garde des sceaux, ministre de la justice, pour une journée bilan des zones de sécurité prioritaires mises en place depuis quelques mois.

En tant qu'élu d'un territoire au croisement de deux ZSP, sur les xviiie et xixe arrondissements de Paris, je suis à la fois acteur et témoin de ce dispositif novateur, qui constitue une véritable rupture.

Cette rupture, elle est d'abord dans l'idée qu'une politique de sécurité de gauche existe et elle sait être efficace. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) L'erreur de Nicolas Sarkozy a été de moquer la proximité et de réduire en même temps par milliers les effectifs des forces de sécurité. On en connaît le bilan : ce fut un échec.

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Et ce qui s'est passé hier soir, ce n'était pas un échec ?

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Les ZSP, comme vous l'avez dit hier, redonnent du souffle à l'initiative locale. Services de l'État, des collectivités, associations, élus, travaillent en partenariat étroit, sur fond de coopération renforcée entre la police et la justice, dont votre déplacement conjoint d'hier était encore un signe fort.

C'est l'esprit même des ZSP que de reconquérir des territoires au service du droit, de la sécurité et donc de la liberté de nos concitoyens.

C'est l'affaire de tous et je me réjouis de l'annonce que vous avez faite hier d'allouer 3 millions d'euros du Fonds Interministériel de prévention de la délinquance, hors vidéoprotection, à ces territoires.

Un certain nombre d'effets positifs commencent à être perçus par nos concitoyens…

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…et je tenais ici à saluer ce travail.

Monsieur le ministre, en ce domaine, vous le savez, il faut faire preuve d'humilité et seul un travail dans la durée peut donner des résultats.

Enfin, pouvez-vous vous engager à augmenter les effectifs et à les sanctuariser sur ces ZSP ?

Par ailleurs, pouvez-vous prendre l'engagement d'allouer des moyens supplémentaires à la police d'investigation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Monsieur le député, oui, nous mettons en oeuvre l'engagement du Président de la République de créer des zones de sécurité prioritaires là où la délinquance est la plus enracinée dans les territoires urbains, périurbains ou ruraux.

Soixante-quatre zones de sécurité prioritaires ont été créées, dont quinze l'été dernier et quarante-neuf autres à la fin de l'année 2012. Incontestablement – mais vous avez raison, soyons modestes – ce dispositif donne des résultats concrets, mesurables, loin des opérations coup-de-poing sans lendemain, loin de l'affichage auquel nos concitoyens ont pu être habitués par le passé.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Ces résultats ont été soulignés hier, en présence de Mme la garde des sceaux, par l'ensemble des acteurs de terrain, policiers, gendarmes, procureurs, associations et élus de tous bords. Car, lorsque nous évoquons ces sujets sur le terrain, on est loin des oppositions que certains cherchent ici à aiguiser. Malheureusement, on oublie trop souvent les résultats du passé. Voilà la situation que nous avons trouvée : une augmentation de plus de 27 % des violences sur les personnes, une police et une gendarmerie exsangues puisque plus de 10 000 postes de policiers et de gendarmes avaient été supprimés. Nous avons arrêté cette hémorragie puisque nous remplaçons les départs à la retraite, et nous créons chaque année cinq cents postes supplémentaires de policiers et de gendarmes. Nous allons affecter ces postes en priorité, dès cet été, dans les territoires qui ont besoin de la police et de la gendarmerie parce que, vous l'avez dit, nous avons la volonté de lutter dans le temps, durablement, en nous appuyant sur le renseignement, sur la police judiciaire, sur la force des policiers et des gendarmes, en travaillant avec les élus et les associations, en impliquant les citoyens, en ayant une police et des forces de l'ordre respectées par les citoyens et respectueuses de ceux-ci. Voilà la politique que nous mettons en oeuvre et elle réussit. C'est cela le changement. La délinquance, nous l'attaquons. La violence recule : c'est notre priorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Patrice Verchère, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le Premier ministre, votre Gouvernement a annoncé, hier, une possible réforme des retraites. Possible, car jusqu'à présent toutes les réformes du système de retraite ont été menées uniquement par des gouvernements de droite.

Si vous allez au bout de la réforme, ce sera la première fois qu'un gouvernement de gauche avance sur un sujet qui vous a toujours embarrassés.

En effet, à deux reprises, des premiers ministres socialistes, Michel Rocard et Lionel Jospin, ont lancé un processus de réforme, avant d'y renoncer, notamment sur les conseils, pour M. Jospin, d'un certain François Hollande, alors premier secrétaire du parti socialiste.

Serez-vous le troisième Premier ministre socialiste à reculer ? Ne dit-on pas « Jamais deux sans trois » ?

D'ailleurs, n'aviez-vous pas, en 2010, avec un certain nombre de vos ministres, défilé bras dessus, bras dessous avec les syndicats pour contester les mesures de bon sens prises à l'époque pour réformer les retraites ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

D'ici à ce que vous veniez nous reprocher de ne pas être allés assez loin alors que vous avez tout fait pour torpiller cette réforme difficile, il n'y a qu'un pas.

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Je rappelle que, sans cette réforme portée par Éric Woerth et mes collègues du groupe UMP, le déficit prévu en 2020 serait multiplié par deux.

Aujourd'hui, monsieur le Premier ministre, vous êtes dos au mur, vous êtes rattrapé par la réalité et par l'Union européenne qui vous demande de conduire enfin des réformes structurelles.

Le cahier des charges que vous avez présenté aux partenaires sociaux précise trois leviers. Pour notre part, comme en 2010, nous refuserons que les pensions des retraités, par la désindexation, servent de variable d'ajustement.

Nous refuserons une hausse des cotisations qui diminuerait encore le pouvoir d'achat des salariés, déjà durement touché par les augmentations d'impôts, (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) et qui pèserait encore sur la compétitivité de nos entreprises.

Monsieur le Premier ministre, pouvez-vous nous en dire plus sur vos réelles intentions ? Pouvez-vous prendre l'engagement devant la représentation nationale que vous ne porterez pas atteinte au pouvoir d'achat des retraités ? Pouvez-vous nous dire si vous envisagez de faire les poches des retraités ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député, on a entendu ce que vous refusez, mais on n'a pas entendu ce que vous proposez ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP – Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

En vérité, la seule chose que vous sachiez proposer, ce sont des mesures injustes, des mesures qui pénalisent celles et ceux qui ont commencé à travailler jeunes (« C'est faux ! » sur les bancs du groupe UMP), celles et ceux qui ont connu des carrières difficiles, les femmes qui continuent à avoir des retraites de 50 % inférieures à celles des hommes, les femmes et les hommes qui ont connu des carrières heurtées.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député, si tout ce que vous avez à nous proposer, c'est la réforme de 2010 menée par le précédent gouvernement, alors nous sommes d'accord avec vous : nous ne l'appliquerons pas, nous ne mettrons pas en oeuvre les recettes que vous avez alors présentées comme définitives, puisque moins de trois ans après nous nous retrouvons à devoir combler un déficit de la sécurité sociale pour les retraites de 20 milliards d'euros à l'horizon 2020 – je dis bien 20 milliards d'euros !

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Comme je l'ai indiqué tout à l'heure en réponse à une question précédente, la volonté de ce Gouvernement est d'abord une volonté de concertation à partir des conclusions qui seront présentées par la commission présidée aujourd'hui par Mme Moreau.

Nous engagerons la concertation sur la base de ce rapport avec les partenaires sociaux et nous ferons des propositions qui permettront de garantir la solidité de nos régimes de retraite dans la durée et d'inscrire cette réforme dans un esprit de justice.

Mais en tout cas, monsieur le député, soyez assuré que ce qui a fondé votre réforme, c'est-à-dire le relèvement de l'âge légal de départ à la retraite, n'est pas la voie qui sera choisie par ce Gouvernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe UMP. Que proposez-vous ?

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La parole est à Mme Geneviève Gaillard, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen

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Ma question s'adresse à madame la ministre des affaires sociales.

Madame la ministre, la péninsule arabique est le foyer d'un coronavirus qui, selon l'Organisation mondiale de la santé, a touché trente-huit personnes depuis le mois de septembre 2012 ; vingt d'entre elles sont décédées.

Un ressortissant français ayant résidé à Dubaï l'a contracté. Son voisin de chambre au centre hospitalier de Valenciennes a lui aussi été touché. Nos deux concitoyens sont désormais suivis au centre hospitalier régional universitaire de Lille.

Samedi 11 mai, à l'occasion d'une visite sur le terrain, vous avez mesuré les efforts de la communauté hospitalière pour suivre ces deux patients. Dans ce contexte, les autorités françaises ont pris les mesures sanitaires et administratives utiles pour contenir l'avancée du virus. Une enquête épidémiologique avait été lancée à la suite de la confirmation, le 7 mai, du premier cas d'infection touchant le patient qui avait voyagé à Dubaï. Quelque cent vingt-quatre personnes au total avaient été identifiées en vue d'investigations. Cette enquête a été étendue aux personnes ayant été en contact avec le deuxième malade.

Néanmoins, la vigilance et la précaution ne doivent pas laisser la place à l'affolement et à la panique, dans un paysage médiatique de plus en plus soumis aux contraintes de l'instant et du sensationnel. Le Gouvernement a adopté des mesures déterminées et efficaces pour contenir l'avancée du virus. Tout est donc mis en oeuvre pour gérer au mieux l'apparition de ce coronavirus en France. Il est donc important de rassurer, de bien communiquer, mais je vous demande, madame, de nous dire quelles mesures ont d'ores et déjà été prises pour protéger les Français d'une contamination. Quelles sont les mesures que vous prônez pour la gestion de cette crise ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Madame la députée Geneviève Gaillard, vous l'avez dit, deux malades sont aujourd'hui en réanimation au CHU de Lille, atteints par le nouveau coronavirus.

Je veux bien évidemment, tout d'abord, assurer leur famille et leurs proches, en mon nom et au nom du Gouvernement, de notre solidarité et de notre soutien dans cette épreuve difficile. Et je veux adresser mes remerciements aux équipes soignantes, pour leur engagement auprès de ces patients.

Ma mobilisation, comme celle des autorités sanitaires, reste aujourd'hui totale. La vigilance reste de mise, mais il ne faut pas céder à l'affolement et vous l'avez fort bien dit.

Plusieurs mesures ont été prises. D'abord, des enquêtes épidémiologiques sont réalisées pour que tous ceux qui ont été au contact des deux malades soient avertis des mesures de précaution qu'ils doivent respecter : ils sont en contact quotidien avec les équipes de l'Institut national de veille sanitaire. Ensuite, un numéro vert a été mis en place qui a reçu jusqu'à mille appels hier et qui permet de répondre aux préoccupations et aux interrogations de nos concitoyens. Enfin, des conseils aux voyageurs ont été apposés dans les aéroports et sont distribués à ceux qui se rendent au Moyen-Orient.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

C'est en effet au Moyen-Orient que se trouve l'origine du virus. Il est donc recommandé de respecter certaines règles d'hygiène et de ne pas entrer en contact avec des animaux.

Une coopération internationale intense s'est engagée afin que nous puissions trouver l'origine de ce virus. Madame la députée, le Gouvernement est pleinement mobilisé. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme Marie-Jo Zimmermann, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, le comité d'étude sur la fiscalité écologique vient de rendre ses conclusions. Selon lui, il faut aligner la taxation du diesel sur les autres carburants.

Or, les moteurs diesel sont aujourd'hui le principal atout de notre industrie pour résister à la concurrence étrangère. Si demain les pouvoirs publics prenaient des mesures intempestives, cela porterait un coup très dur aux constructeurs français. D'ailleurs, en raison des récentes polémiques, les groupes automobiles français enregistrent déjà une baisse très importante de la vente de leurs véhicules diesel, alors qu'ils avaient investi lourdement pour réaliser des moteurs diesel avec des normes supérieures à celles imposées par l'Europe.

Vous êtes, monsieur le Premier ministre, face à un choix décisif, car votre Gouvernement a soufflé le chaud et le froid. D'un côté, votre ministre du redressement productif est conscient des difficultés de l'industrie automobile et surtout, des efforts qu'elle a réalisés pour équiper ses moteurs de filtres à particules. De l'autre, votre ministre de l'écologie minimise la portée des progrès réalisés pour produire des moteurs propres. Quant à votre ministre du budget, il est confronté aux réalités financières et pour lui, toute ressource nouvelle est bonne à prendre.

L'incertitude actuelle devient intenable pour les femmes et les hommes qui travaillent dans les usines automobiles, notamment celle de Trémery en Moselle. Celle-ci est la plus importante d'Europe pour la fabrication de moteurs diesel et ses salariés sont très anxieux car ils savent que leur emploi est suspendu à votre arbitrage.

Monsieur le Premier ministre, ce sont des emplois qui sont en jeu. Ce sont des hommes et des femmes qui attendent votre décision. Je vous demande donc de préciser vos intentions quant à la taxation du diesel. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé du budget.

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Madame la députée, vous m'interrogez sur la fiscalité des carburants pour les années qui viennent et notamment sur l'alignement de la fiscalité du diesel sur celle de l'essence. Vous faites référence aux travaux menés par le comité présidé par l'universitaire Christian de Perthuis.

Comme l'a indiqué le Premier ministre devant la représentation nationale à l'occasion d'une précédente séance, je vous confirme la volonté du Gouvernement de faire en sorte que les prochaines lois de finances, à pression fiscale constante, introduisent des dispositions permettant de faire évoluer notre fiscalité, de la verdir, de manière à ce que nous tenions compte de nos engagements européens sur le plan « Climat ».

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C'est de la folie! Vous détruisez l'industrie française !

Debut de section - Permalien
Bernard Cazeneuve, ministre délégué chargé du budget

Mais pour atteindre cet objectif, nous devons avoir à l'esprit trois éléments de méthode.

D'abord, nous devons absolument tenir compte de ce qu'est la fiscalité des carburants en France par rapport à ce qui se passe dans l'Union européenne. Il y a dix-sept centimes de différence entre la fiscalité du gazole et celle de l'essence en France, contre à peu près onze centimes dans la plupart des pays de l'Union européenne, ce qui pourrait justifier, à terme, une adaptation. Mais comme l'a dit le Premier ministre, notre souci de ne pas augmenter la pression fiscale dans l'année qui vient et de ne pas obérer le pouvoir d'achat des ménages ne nous conduira pas à prendre cette décision en 2014 : nous laissons la question ouverte pour la suite.

Deuxièmement, nous devons avoir le souci de protéger l'industrie. Vous avez dit vous-même que les trois quarts des véhicules produits par notre industrie automobile sont à moteur diesel : par conséquent, nous ne pouvons pas prendre des décisions fiscales qui viendraient mettre à mal une industrie déjà confrontée aux difficultés qu'on sait et à la concurrence internationale.

Enfin, le troisième élément de méthode, c'est la concertation. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) La concertation qui a présidé aux travaux du groupe de Christian de Perthuis, la volonté de faire en sorte que les avancées en matière de fiscalité environnementale – pour financer le CICE notamment – se fassent dans le dialogue et sans augmenter la pression fiscale. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Philippe Vigier, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le Premier ministre, vous venez d'ouvrir le chantier de la réforme des retraites en lançant une consultation de l'ensemble des partenaires du dialogue social. Que de chemin parcouru depuis la campagne présidentielle lorsque François Hollande nous expliquait qu'il reviendrait sur l'intégralité de la réforme décidée par la majorité précédente. Encore une promesse oubliée !

Après le temps de la démagogie, qui vous a vu décider d'une petite amélioration pour les carrières longues, financée par une baisse du pouvoir d'achat et une hausse du coût du travail, il y a eu ensuite le temps de l'injustice, madame Touraine, avec la taxe sur les retraités de 0,3 % décidée en avril dernier.

Aujourd'hui, la réalité vous rattrape : vous êtes est au pied du mur.

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Pour le groupe UDI, cette consultation doit permettre de poser les bases d'une réforme d'envergure. Cette discussion ne peut donc pas faire l'impasse sur des questions que nous avons tous en tête : faut-il accélérer la mise en oeuvre de la réforme de 2010 ? Faut-il allonger la durée de cotisation et repousser l'âge légal de départ à la retraite ? Faut-il instituer un système de retraites à points ? Faut-il mettre en place – j'allais dire : enfin ! – un régime universel égal pour tous, salariés du privé et salariés du public ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.)

Vous avez vidé de son sens le dialogue avec les partenaires sociaux en annonçant d'emblée que vous ne repousseriez pas l'âge légal de départ à la retraite, mais que la durée de cotisation allait augmenter. Ce choix n'est pas le nôtre.

Monsieur le Premier ministre, dites clairement aux Français qu'ils vont devoir choisir entre travailler plus longtemps pour avoir une retraite décente, ou partir plus tôt avec une plus petite retraite. Vous orientez donc le dialogue avec les partenaires sociaux vers deux solutions : la diminution des pensions des retraités et l'augmentation des impôts pour financer les déficits. Ce ne sont pas nos choix.

Ma question est donc simple : quels retraités vont voir leur pension baisser et quelles nouvelles hausses d'impôts allez-vous décider ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UDI et sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député, le Gouvernement engage la réforme des retraites avec la volonté de mettre en oeuvre une réforme de justice (Rires sur les bancs du groupe UMP) qui garantisse à nos concitoyens qu'ils pourront compter sur une retraite solidaire dans la durée.

Vous le savez, monsieur le député : les jeunes, aujourd'hui, ne croient pas que, lorsque viendra pour eux le temps de la retraite, ils pourront compter sur la solidarité nationale. Et si le doute s'est installé sur l'avenir des régimes de retraite, c'est parce que, depuis des années, on leur fait croire que la réforme qu'on leur propose est la dernière et qu'elle va tout régler. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

La dernière en date, en 2010, devait régler les problèmes de nos retraites pour les dix années à venir, et voyez où nous en sommes, monsieur le député, après quelques années à peine.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Nous devons remettre le travail sur l'établi pour faire en sorte que nos concitoyens aient la garantie de pouvoir, à l'avenir, compter sur une retraite solidaire. C'est pourquoi nous avons engagé, dès notre arrivée aux responsabilités, une réforme de justice, en permettant à celles et à ceux qui ont commencé à travailler jeunes de partir à la retraite dès l'âge de soixante ans. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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C'est nous qui avons mis en place ce dispositif !

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Nous allons désormais engager la concertation pour répondre à trois défis, de manière globale et cohérente.

Il s'agit d'abord de faire en sorte que le déficit de nos régimes de retraite soit comblé pour les années à venir. Ensuite, nous devrons consolider dans la durée un régime de retraite solidaire, garanti par la collectivité. Enfin, nous entendons prendre des mesures de justice, notamment en faveur des femmes et en faveur de celles et ceux qui ont exercé des métiers pénibles ou ont commencé à travailler jeunes.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Mesdames et messieurs les députés, le Gouvernement engagera la concertation avec la volonté de mener une réforme durable, responsable et juste.

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La parole est à M. Daniel Gibbes, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

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Monsieur le Premier ministre, le 5 mai dernier, à Saint-Martin, les réjouissances du « Fish Day » – une fête traditionnelle qui s'est toujours déroulée dans un esprit bon enfant – ont tourné au drame quand, en fin d'après-midi, des jeunes, armés, sont venus régler leurs comptes au milieu de la foule. Le bilan n'a pas fait les grands titres de la presse nationale mais il est lourd : un mort et sept blessés dont une femme enceinte.

J'étais présent au moment de ce nouveau drame qui a bouleversé tous les Saint-Martinois.

L'île – une île qui vit du tourisme – a atteint un niveau de violence et de délinquance sans précédent. Monsieur le Premier ministre, est-il normal que, dix jours après cette tragédie, le Gouvernement n'ait envoyé aucun signe à Saint-Martin, n'ait fait aucune déclaration qui condamne cet acte ? Quand vous vous montrez prompts à condamner les meurtres de Marseille ou de Corse, les tragédies lointaines d'outre-mer, elles, semblent avoir bien moins de résonance.

Nos drames, qui trouvent leur source dans un malaise social endémique, dans des économies en désespérance, ne sont pas moins tragiques parce qu'ils surviennent à 8 000 kilomètres de Paris.

L'égalité, ce n'est pas seulement le mariage pour tous, monsieur le Premier ministre, c'est aussi et avant tout l'éducation pour tous (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), quand nos écoles croulent sous le poids de la surpopulation scolaire.

Et c'est aussi la justice pour tous, quand nous réclamons depuis des années la création d'un TPI ou d'une chambre de justice détachée. Justice pour tous également, quand les détenus de Saint-Martin représentent plus de la moitié des détenus de la prison de Basse-Terre tandis que l'on enterre le dossier de la construction d'une prison sur l'île, qui permettrait pourtant, sans nul doute, de mettre un frein au sentiment d'impunité qui y règne et jouerait un rôle précieux en matière de réinsertion.

Et c'est enfin la sécurité pour tous, quand un dispositif de sécurité rural ne parvient plus à répondre à une délinquance urbaine.

Ma question est la suivante : Saint-Martin doit-elle attendre le prochain carnage pour que votre gouvernement s'intéresse enfin à elle ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

Monsieur le député, ma pensée va d'abord à la personne tuée au cours de cette fusillade et aux six blessés par balles. Une information judiciaire a été ouverte et tout doit être fait pour appréhender les auteurs de ce meurtre.

Les premiers témoignages recueillis, vous le savez, montrent que cet acte odieux s'inscrit dans une montée générale des violences entre des bandes issues de différents quartiers, et cela, malheureusement, depuis longtemps.

Debut de section - Permalien
Manuel Valls, ministre de l'intérieur

J'entends l'inquiétude de la population de Saint-Martin, je comprends la vive émotion qu'a provoqué cet événement tragique et je sais que les appels au calme du préfet et des élus locaux étaient nécessaires. Je sais, monsieur le député – et c'est pourquoi je regrette parfois certains arguments que vous avez utilisés –, que vous avez pris votre part dans ces appels au calme.

L'ensemble des forces présentes sur l'île est mobilisé pour mettre fin à cette violence. L'économie illégale et le trafic d'armes qui en découlent sont des fléaux dans tous les territoires de la République et dans celui-ci en particulier, nourris par la situation économique, et le sentiment d'abandon qu'ont pu éprouver depuis longtemps les habitants de l'île.

Vous pouvez compter sur la détermination du Gouvernement et notamment de Victorin Lurel (Sourires sur les bancs du groupe UMP)…

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Manuel Valls, ministre de l'intérieur

…pour répondre à cette situation. Saint-Martin a été trop longtemps abandonnée et le Gouvernement veut répondre à ce défi.

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La parole est à Mme Martine Martinel, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la ministre de la culture et de la communication, comme vous l'avez déclaré : « L'exception culturelle c'est le combat de la France. Défendre et adapter cette exception, c'est aussi oeuvrer pour la croissance et l'emploi. »

Le 18 juillet dernier, vous avez présenté dans cette optique, en conseil des ministres, une communication sur « l'acte II de l'exception culturelle ». Vous avez alors confié à M. Pierre Lescure une mission intitulée « Culture-acte 2 », chargée de préconiser des solutions, afin de concilier accès à la culture et émergence des nouvelles technologies.

Pierre Lescure a remis hier au Président de la République un rapport visant à faire évoluer les outils de la politique culturelle française à l'heure du numérique. Les propositions de ce rapport couvrent un champ très large, du cinéma à la musique, sans oublier la télévision, le livre et la presse, et n'éludent aucune question : accès plus rapide du public aux oeuvres audiovisuelles, lutte contre le piratage, financement de la création, rémunération de la copie privée, rémunération des auteurs et garantie de leurs droits, questions soulevées par les droits voisins.

Ces propositions s'éloignent heureusement de celles, purement répressives, retenues par l'UMP en 2009, qui ont eu pour effet de restreindre les libertés individuelles, sans protéger vraiment les créateurs.

Madame la ministre, pouvez-vous informer la représentation nationale sur les mesures de ce rapport qu'il vous paraît urgent de mettre en place, sur le calendrier d'action du Gouvernement, ainsi que sur la méthode choisie pour la mise en oeuvre de ces actions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme la ministre de la culture et de la communication.

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Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

Madame la députée Martine Martinel, vous l'avez dit, le Gouvernement et le Président de la République sont extrêmement attachés à l'exception culturelle. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle j'ai demandé à mes collègues, ministres de la culture européens, de cosigner avec moi une lettre qui rappelle l'attachement fondamental de l'Union européenne à la défense de l'exception culturelle dans les négociations de l'accord de libre-échange avec les États-Unis. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Le rapport qui a été remis hier par Pierre Lescure au Président de la République va dans ce sens.

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Aurélie Filippetti, ministre de la culture et de la communication

Il vise à adapter les mécanismes qui ont permis à la France d'avoir des industries créatives dynamiques, porteuses d'emplois et de croissance économiques, à l'ère du numérique. Vous le savez, tous les dispositifs mis en place dans les années 1980 par François Mitterrand et Jack Lang ont été perturbés par la révolution technologique du numérique.

Le rapport de Pierre Lescure comporte trois volets.

Il propose d'abord de développer l'offre légale : c'est la meilleure manière de renforcer l'attractivité des oeuvres sur support numérique, tout en respectant le droit des créateurs, par exemple en améliorant et en aménageant la chronologie des médias.

Il propose aussi, et c'est une avancée majeure et un changement radical de point de vue, d'en finir avec la possibilité de supprimer l'accès à internet. C'est une avancée que nous avions défendue dans cet hémicycle en 2009. Il change de logique en matière de protection des droits d'auteur, puisque ce sont les sites contrefacteurs, ceux qui font de l'argent sur le dos des artistes et des créateurs, qui seront ciblés.

Il travaille enfin à une meilleure répartition de la richesse créée, pour que celle-ci bénéficie aux industries créatives qui sont basées en France et en Europe, et non pas aux équipementiers qui importent leurs produits chez nous. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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La parole est à M. Denis Baupin, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Madame la ministre de l'écologie, l'industrie automobile est en crise et, bien qu'écologistes, nous ne nous en réjouissons pas. Les salariés n'ont pas à payer les choix des constructeurs, qui ont privilégié les bénéfices à court terme, au lieu d'anticiper les mutations nécessaires.

Ces mutations étaient pourtant prévisibles, car l'augmentation du prix des carburants est inéluctable. La pression sur le pouvoir d'achat des consommateurs réduit de fait leur droit à la mobilité. Parallèlement, la pollution de l'air et le dérèglement climatique nous imposent d'agir. Madame la ministre, faisons de cette nécessité une opportunité.

Le débat sur l'énergie montre que la mobilité est un secteur stratégique. Cela passe, bien sûr, par les transports collectifs et les circulations douces. Nos services de transport, et notamment la Commission Mobilité 21, doivent faire de l'efficacité énergétique une priorité. Mais cela ne suffira pas : des millions de nos concitoyens continueront d'avoir besoin de véhicules motorisés, s'ils sont à des prix d'achat et d'usage accessibles.

Il est temps de fabriquer enfin des véhicules écologiques : c'est ma mission à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques, avec Fabienne Keller. La négociation européenne en cours sur les émissions des voitures nous offre une opportunité de peser dans ce sens.

Nous accueillerons en 2015 la conférence climatique : vous avez des objectifs ambitieux et, au-delà du paquet énergie climat, le Premier ministre a fixé l'objectif de construire des véhicules consommant 2 litres aux 100.

C'est le moment de donner une impulsion forte et la France doit donc soutenir le Parlement européen pour relever l'objectif de réduction d'émission des voitures à l'horizon 2025. Cet objectif doit être ambitieux, en ligne avec le facteur 4, et il faut en finir avec les dérogations.

Développer la voiture sobre, c'est bon pour l'environnement, c'est bon pour le portefeuille des consommateurs, qui économiseraient 350 à 450 euros par an, et c'est bon pour l'économie et l'emploi, car c'est dans cette économie verte que réside la compétitivité, chère à nos industriels. (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste et sur certains bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.

Debut de section - Permalien
Delphine Batho, ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, monsieur le député Denis Baupin, l'organisation météorologique mondiale vient de confirmer ce que l'on sait depuis quelques jours, à savoir que le seuil de 400 parties par million de concentration de CO2 dans l'atmosphère va être dépassé.

Nous sommes donc aujourd'hui sur la pente d'un réchauffement climatique largement supérieur à 2 degrés, seuil au-delà duquel nous nous entrons, selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, dans une zone dangereuse.

La France, vous le savez, a pris l'engagement de s'inscrire dans le facteur 4, c'est-à-dire de diviser par quatre ses émissions à l'horizon 2050. L'objet du débat national sur la transition énergétique, qui est en cours, est de déterminer comment nous allons atteindre cet objectif. Le secteur des transports est en effet absolument déterminant, puisqu'il s'agit de l'un des principaux secteurs d'émission de gaz à effet de serre. Il est crucial aussi pour la politique énergétique de la France, puisque nos importations d'hydrocarbure pèsent pour 69 milliards dans le déficit de notre balance commerciale. C'est là un enjeu économique majeur.

La politique du Gouvernement consiste à soutenir massivement le développement des voitures écologiques. Je rappelle que nous avons augmenté de 40 % le bonus écologique pour l'achat de véhicules électriques, que nous avons fixé une obligation concernant l'achat de véhicules propres pour le parc de l'État, que nous déployons des bornes de recharge, et que nous soutenons, à hauteur de 50 millions d'euros, les projets des collectivités territoriales pour s'équiper en bornes de recharge électriques.

Pour répondre à votre question sur la révision des règlements européens sur les émissions de CO2 des véhicules particuliers et des véhicules utilitaires, la France soutient la proposition de la Commission européenne. Nous souhaitons que les règlements encouragent les véhicules les plus économes et les moins polluants, émettant 95 grammes de CO2 par kilomètre pour les voitures particulières et 147 grammes par kilomètres pour les utilitaires légers.

Nous sommes défavorables à l'élargissement des dérogations et de ce que l'on appelle les super-crédits. Nous souhaitons aussi fixer un objectif unique pour l'ensemble des véhicules à partir de 2020, ce qui sera aussi un moyen de soutenir notre production industrielle de véhicules économes et moins polluants. Pour la France et pour le secteur automobile, des enjeux industriels majeurs sont liés à cette évolution vers le véhicule écologique. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.)

Normes environnementales dans l'industrie automobile

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La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt, sous la présidence de M. Christophe Sirugue.)

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La Conférence des présidents, réunie ce matin, a arrêté les propositions d'ordre du jour suivantes pour la semaine du 3 juin 2013 :

Deuxième lecture du projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République ;

Proposition de résolution pour une fiscalité écologique ;

Deuxième lecture du projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires ;

Proposition de résolution sur le processus de recrutement à la tête des grandes institutions culturelles.

Il n'y a pas d'opposition ?

Il en est ainsi décidé.

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L'ordre du jour appelle la discussion, sur le rapport de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi portant réforme de la biologie médicale (915).

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La parole est à Mme Ségolène Neuville, rapporteure de la commission mixte paritaire.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, nous allons voter aujourd'hui le texte, issu des travaux de la commission mixte paritaire, de la proposition de loi relative à la réforme de la biologie médicale.

Contrairement à ce que pourrait laisser entendre son titre, cette réforme ne se limite pas à une profession médicale : elle intéresse tous les Français, car elle est nécessaire à la qualité des soins, donc à la sécurité des patients. Les biologistes médicaux ont participé activement à la rédaction de cette proposition de loi, car ils attendent depuis plusieurs années un cadre juridique clair leur permettant d'exercer leur profession. Au terme d'un long travail, nous sommes parvenus à un texte équilibré, qui pose les bases d'une biologie médicale moderne, au service des patients.

Je veux affirmer à nouveau, devant vous, que l'on ne devient pas biologiste médical par hasard. Comme pour les autres professions de santé, on choisit d'être biologiste médical d'abord parce que l'on souhaite soigner les gens, ensuite parce que l'on souhaite contribuer à notre système de santé, qui est exceptionnel à bien des égards, enfin parce que l'on souhaite faire progresser l'accès aux soins pour tous. Le patient est en permanence au coeur des préoccupations de tous les professionnels de santé. Aujourd'hui, il est au coeur de nos préoccupations de législateurs.

La France se distingue par un nombre de biologistes largement supérieur aux autres pays européens : 16,5 pour 100 000 habitants, contre 5,8 en moyenne dans les États membres de l'Union européenne. La biologie médicale française se distingue aussi par un nombre important de structures de proximité. Comparativement aux autres pays européens, les laboratoires sont très nombreux et de plus petite taille. Aujourd'hui, 58 % des laboratoires sont de petites structures de moins de dix salariés.

Ces quinze dernières années, une diminution du nombre de laboratoires s'est très nettement amorcée, du fait de regroupements et de rachats. Malgré des baisses de tarifs, l'attractivité du secteur reste grande et a provoqué une forme accrue de financiarisation du secteur. C'est aussi contre cette financiarisation que nous légiférons aujourd'hui, car la biologie médicale n'est pas un commerce. Certes, nous vivons en économie libérale, mais la santé n'est pas un bien de consommation. Il ne faut pas oublier que les laboratoires de biologie sont rémunérés en grande partie par l'assurance maladie : il n'y a aucune raison pour que cet argent enrichisse des groupes financiers.

Revenons au texte : lors des travaux de la commission mixte paritaire, les articles 1er à 3 n'ont pas été discutés, ayant été votés conformes par les deux assemblées. Les dispositions de ces articles ratifient l'ordonnance du 13 janvier 2010 et précisent la définition de l'examen de biologie médicale, tout en excluant l'anatomo-pathologie.

L'article 4, qui précise l'encadrement juridique du prélèvement d'un examen de biologie médicale et accorde une dérogation à l'Établissement français du sang pour son implantation territoriale, a été adopté par la CMP dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale. La principale modification apportée par l'assemblée résidait dans le remplacement de l'expression « phase pré-analytique » par le terme « prélèvement », de façon à limiter la partie de l'examen réalisable en dehors du laboratoire au seul prélèvement. Cette modification, qui va dans le sens de la médicalisation de la profession, a fait consensus au sein de la CMP.

L'article 5 n'a pas été discuté par la CMP, car il avait également été voté conforme par les deux assemblées. Il rétablit l'interdiction des ristournes, afin d'éviter que les établissements de santé aient recours préférentiellement à certains laboratoires privés en mesure d'accorder des remises sur les tarifs.

L'article 6, qui avait été supprimé par le Sénat puis rétabli par l'Assemblée, a été adopté par la CMP. Il s'agit de laisser la possibilité à certains médecins ou pharmaciens titulaires d'une discipline mixte – comme, par exemple, l'hématologie – mais non titulaires du diplôme de biologie médicale d'exercer la biologie médicale dans les centres hospitaliers universitaires.

L'article 7 a été adopté par la CMP dans la version issue des travaux de l'Assemblée nationale. Cet article contient une des avancées majeures de cette loi : il s'agit de la qualité des examens et de leur accréditation. L'objectif d'accréditation de 100 % des examens a donc été fixé pour 2020, avec plusieurs paliers intermédiaires. Certains ont demandé : pourquoi fixer cet objectif à 100 %, alors que 90 % pourraient suffire ? Je leur pose à mon tour une question : si vos parents, vos enfants ou vous-mêmes faisiez réaliser un examen par un laboratoire, accepteriez vous que cet examen fasse partie des 10 % non accrédités ? Surtout, comment choisir les examens qui ne nécessiteraient pas d'accréditation ? S'agit-il d'examens moins importants, moins utiles que d'autres ? Mais s'ils sont moins importants ou moins utiles, est-il légitime de les réaliser ?

Certains ont estimé que cette accréditation serait trop coûteuse. Je comprends cet argument, comme l'ensemble de la CMP. Mais pouvons-nous nous permettre de sacrifier la qualité au coût ? L'accréditation est la meilleure façon de réaffirmer le caractère médical de la profession, sans quoi nous risquerions de devoir nous aligner sur les autres pays européens, pour lesquels les actes de biologie sont des prestations de service effectués par de grands groupes.

Par l'article 8, nous réaffirmons qu'il faut limiter la financiarisation du secteur, car elle est dangereuse pour les patients qui risquent, si nous ne faisons rien, d'être renvoyés vers des plateformes techniques et de perdre les laboratoires de proximité. Un amendement à cet article a été adopté par la CMP : il vise à fixer une participation minimale pour les jeunes biologistes associés. Cette modification fait elle-même l'objet d'un amendement du Gouvernement que nous examinerons aujourd'hui.

La CMP a adopté l'article 10 dans sa rédaction issue des travaux de l'Assemblée nationale, et a maintenu la suppression de l'article 10 bis, qui réglementait les tarifs du COFRAC, organisme indépendant chargé de l'accréditation. Néanmoins, pour plus de transparence quant au coût de l'accréditation, l'ensemble de la CMP soutient pleinement la proposition du sénateur Jacky Le Menn de faire figurer ce sujet parmi les enquêtes sollicitées auprès de la Cour des comptes.

En conclusion, l'objectif de ce texte est de poser les bases d'une biologie médicale où l'humain passe avant le reste. Je crois que c'est là l'essentiel. À vrai dire, s'il ne fallait retenir qu'une phrase de mon exposé – qui est, je le reconnais, assez technique –, ce serait celle-ci.

Enfin, je tiens à remercier et à féliciter tous ceux et toutes celles qui ont travaillé avant moi sur cette réforme avec le souci commun de l'intérêt du patient. Ne perdons pas de vue que notre objectif commun doit être le patient, toujours le patient ! Garantir la qualité des soins, renforcer le caractère médical de la profession et sécuriser les laboratoires : toutes ces mesures ont pour point commun de garantir partout et pour tous l'accès à des soins de qualité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, madame la rapporteure, au terme de cette lecture, vous serez appelés à vous prononcer sur une proposition de loi qui a pour ambition – comme vient de le rappeler Mme la rapporteure – de préparer la biologie médicale française de demain. Près de quarante années se sont écoulées sans qu'aucune réforme d'ampleur soit menée pour permettre à ce secteur de relever le double défi auquel il est aujourd'hui confronté : celui de la qualité et celui de l'efficience.

Cette proposition de loi, que je vous appelle à soutenir, est un aboutissement : elle est le fruit d'un travail parlementaire engagé depuis un certain temps, et qui s'est révélé constructif. Il pourrait servir d'exemple dans bien d'autres domaines. Les membres des groupes socialistes de l'Assemblée nationale et du Sénat ont été à l'origine de ce texte, qui fait suite à une proposition de loi que la fin de la législature précédente avait rendue caduque.

Je tiens à saluer l'engagement et le travail de la présidente de la commission des affaires sociales, Catherine Lemorton, de la rapporteure à l'Assemblée nationale, Ségolène Neuville, et du rapporteur au Sénat, Jacky Le Menn, qui ont pleinement contribué à son élaboration.

Les échanges et les débats qui ont eu lieu, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, les amendements qui ont été déposés, ont permis d'améliorer, d'enrichir le texte initial de la proposition de loi. Les travaux de la commission mixte paritaire, réunissant les représentants des deux chambres, ont permis de forger une position commune. Ils ont ainsi consolidé un équilibre qui renforce les principes et les ambitions de cette réforme essentielle pour les patients.

La première exigence de ce texte est d'assurer la qualité des examens en biologie médicale. Nous connaissons tous – vous l'avez d'ailleurs rappelé, madame la rapporteure – la place centrale des biologistes médicaux dans la prise en charge des patients. Leur travail est déterminant pour élaborer et formuler avec certitude un diagnostic, et donc pour assurer la qualité des soins partout sur notre territoire.

C'est bien là le sens, l'enjeu de l'accréditation. Nous devrons faire en sorte que, dans tous nos laboratoires et sur l'ensemble de notre territoire, cette accréditation donne au patient la garantie de résultats fiables et de qualité. Ainsi, et tel est notre objectif, 100 % des examens devront être accrédités d'ici à 2020. C'est là la condition sine qua non de la qualité des prises en charge.

Par ailleurs, et je m'en réjouis, vous avez souhaité, en CMP, préserver l'article 6 qui ouvre à des médecins ou à des pharmaciens recrutés en centre hospitalier universitaire l'exercice des fonctions de biologiste médical, et ce même s'ils ne sont pas titulaires d'un diplôme de cette spécialité. Cela permettra à des professionnels de santé de répondre aux besoins de leur activité en exerçant exclusivement dans leur champ de compétence. Il était essentiel, aux yeux du Gouvernement, que cet article figure dans le texte final, dans l'intérêt même des patients.

La seconde exigence est celle de l'efficience. Nous devons permettre au secteur de la biologie médicale de se structurer économiquement, sans être soumis aux abus de la financiarisation qui guette le monde de la santé. L'article 8 en est l'expression. Il vise à assurer aux biologistes médicaux la maîtrise de leur instrument de travail. Cet article autorise également une mise en conformité progressive, afin de ne pas déstabiliser le secteur. Enfin, il consolide la transparence des conventions et des contrats signés dans le cadre des sociétés d'exercice libéral.

En commission mixte paritaire, vous avez souhaité introduire dans l'article 8 de nouvelles dispositions, regroupées aux alinéas 7, 8 et 9, visant à fixer un seuil minimal de détention du capital social pour chaque biologiste médical exerçant au sein d'une société d'exercice libéral. Ce dispositif me semble toutefois difficilement compatible avec les exigences du droit communautaire. Il crée en effet une restriction aux libertés de circulation, dont la liberté d'établissement. Il n'apparaît pas, au demeurant, proportionné à l'objectif de santé publique recherché, qui est celui d'une biologie médicale de qualité, seul susceptible d'être invoqué auprès des instances communautaires. C'est pourquoi le Gouvernement a souhaité déposer un amendement de suppression de ces alinéas, amendement que nous examinerons dans quelques instants.

Mesdames et messieurs les députés, avec cette lecture, nous arrivons au terme de la procédure parlementaire. Nous pouvons être fiers du travail important ainsi accompli, car il représente une avancée majeure pour le secteur de la biologie médicale, donc pour l'ensemble de notre système de santé. À chacune et à chacun j'adresse, une fois de plus, mes remerciements les plus chaleureux pour son engagement. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Dans la discussion générale, la parole est à Mme Dominique Orliac.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, mes chers collègues, il nous revient, après l'accord intervenu lors de la réunion de la commission mixte paritaire chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi portant réforme de la biologie médicale, d'examiner et de nous prononcer sur les modifications apportées par la CMP, figurant dans le rapport rédigé par nos collègues rapporteurs membres du groupe socialiste, Ségolène Neuville pour l'Assemblée Nationale et Jacky Le Menn pour le Sénat.

Comme je l'avais annoncé, lors de l'examen en première lecture le 25 mars dernier, cette proposition de loi a pour objectif de réformer, enfin, la biologie médicale qui pâtissait d'une réglementation obsolète, puisque la dernière modification de fond du régime juridique applicable à la profession remonte à la loi du 11 juillet 1975 relative aux laboratoires d'analyses de biologie médicale et à leurs directeurs et directeurs adjoints. Après plus de cinq passages devant le Parlement sans jamais aboutir à une quelconque réforme, il est temps de mettre à jour cette loi et de la moderniser.

Le groupe RRDP est tout d'abord satisfait que l'article 1er ait été conservé par les deux chambres du Parlement. L'ordonnance du 13 janvier 2010, issue du rapport Ballereau et non encore ratifiée, avait pour objet de mettre en place une accréditation obligatoire des laboratoires de biologie médicale, de les responsabiliser tout en maîtrisant les dépenses de santé et de mieux organiser l'offre de soins en fonction de l'intérêt du patient. La présente proposition de loi, en ratifiant ladite ordonnance, met fin à cette situation d'insécurité juridique, où le texte organisant la profession n'a que valeur réglementaire. Elle garantit la sécurité et la qualité des examens par l'accréditation et permettra également de limiter la financiarisation du secteur libéral.

S'agissant du renforcement de la médicalisation de la profession, abordée par les articles 4 à 6, nos remarques sont les suivantes. Les propositions tendant à limiter aux prélèvements la partie hors laboratoire étaient, à nos yeux, beaucoup trop restrictives, car il est très courant que les professionnels de santé, notamment les infirmiers, soient conduits à transporter directement au laboratoire les prélèvements qu'ils sont chargés d'effectuer. Nous sommes donc satisfaits que des dispositions moins contraignantes, faisant référence au seul prélèvement, aient été retenues par la commission mixte paritaire.

Il est satisfaisant de noter que l'article 5 a fait consensus. Ainsi, les ristournes accordées en vertu de contrats signés alors qu'elles étaient autorisées, c'est-à-dire avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance de 2010 et dans la période courant entre l'entrée en vigueur de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et l'entrée en vigueur de la présente proposition de loi, continueront à être pratiquées jusqu'à l'expiration de ces contrats, ménageant une phase de transition avant l'interdiction totale de ces ristournes, en cohérence avec la médicalisation de l'analyse biologique comme avec le principe de tarification des actes médicaux.

Tout en ayant pris connaissance de la contestation exprimée par la conférence des doyens des UFR de médecine et de pharmacie et par celle des présidents de commission médicale d'établissement des centres hospitaliers, nous déplorons la réintroduction de l'article 6 qui avait été supprimé par le Sénat. Nous continuons de croire qu'il y a quelque paradoxe à prévoir un diplôme d'études spécialisées et à considérer que celui-ci n'est pas forcément nécessaire pour obtenir un poste en CHU. Cette réintroduction de l'article 6 tel que voté par l'Assemblée nationale ne nous satisfait aucunement, comme nous l'avions déjà exprimé dans la discussion générale le 25 mars 2013.

Nous persistons à penser qu'il n'y a pas de raison objective de créer une voie dérogatoire nouvelle pour l'exercice de la biologie médicale, car différentes voies sont d'ores et déjà prévues par l'ordonnance que le texte de loi vient justement ratifier. Il y a possibilité de dérogation pour les médecins et pharmaciens non titulaires du DES de biologie médicale après obtention de la qualification en biologie médicale par les ordres respectifs ; possibilité pour les personnels enseignants et hospitaliers des CHU de continuer à réaliser des activités d'enseignement et de recherche fondamentale et appliquée après nomination par le CNU ; possibilité, enfin, pour les biologistes non titulaires du DES d'exercer la biologie médicale dans un domaine de spécialisation. Je veux le rappeler ici : nous sommes attachés à la pratique hospitalo-universitaire fondée sur le triptyque soins-enseignement-recherche. Nous estimons par conséquent que les soins ne doivent, dès lors, pas être relégués.

Concernant les articles 7 et 7 bis, nous sommes satisfaits de la décision de la CMP de retenir les propositions de l'Assemblée nationale. Coeur de la présente réforme, l'accréditation obligatoire garantira la qualité de tous les actes biologiques sur l'ensemble du territoire. Elle permettra également d'assurer la permanence des procédures, la qualité du matériel, bref, un degré de qualité globale en ce qui concerne les laboratoires. Mais, si nous savons que cette accréditation peut paraître onéreuse pour les laboratoires les plus modestes, les paliers fixés successivement à 50 % des actes en 2016, à 70 % des actes en 2018 et à 100 % des actes en 2020 nous semblent être un bon compromis. Cela devrait permettre aux laboratoires les plus modestes de s'organiser afin d'obtenir leur accréditation. Celle-ci portant notamment, pour ne citer que ces exemples, sur le niveau de qualité du matériel d'analyse, des machines ou des procédures, elle contribuera également à renforcer la confiance des citoyennes et citoyens dans les laboratoires et la qualité des services proposés.

Je dirai, enfin, quelques mots de l'article 9, qui tend à renforcer la régulation de l'offre de biologie médicale sur le territoire et à préciser les attributions reconnues à ce titre aux agences régionales de santé. Comme je l'ai déjà dit, le dispositif qui complète les dispositions du code de la santé publique posant le principe de l'interdiction pour un investisseur de prendre part au capital de société de biologie médicale lorsque cette opération lui permet de contrôler une part, fixée à 33 %, de l'offre de biologie médicale sur un même territoire de santé, semble satisfaisant. Il s'agit d'affirmer plus fortement l'indépendance des professionnels et de préserver le maillage territorial face aux regroupements imposés. Les intérêts financiers ne doivent pas avoir un champ d'application illimité, dans le domaine de la santé en particulier comme dans d'autres ! Dès lors, nous sommes satisfaits que cet article soit resté inchangé. La préservation de laboratoires indépendants et de proximité est un objectif indissociable de la politique que soutient le groupe RRDP.

Pour conclure, les députés du groupe RRDP, s'ils se félicitent que le cadre juridique de la biologie médicale soit enfin actualisé et sécurisé, s'abstiendront majoritairement sur ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

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Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, nous parvenons au terme des tribulations d'une volonté de réforme du secteur de la biologie médicale, commencée par la voie d'une ordonnance et déjà manifestée par plusieurs textes.

Pour tenir compte du règlement européen du 9 juillet 2008 qui impose un organisme d'accréditation unique dans chaque pays, le rapport Ballereau, présenté en septembre 2008, a fixé les objectifs et tracé les contours d'une vaste réforme de la biologie médicale dans notre pays.

Le précédent gouvernement a, tout d'abord, introduit dans la loi HPST – Hôpital, patients, santé, territoires – la possibilité de recourir à des ordonnances. À l'époque, nous avions vivement dénoncé l'utilisation de l'article 38 de la Constitution qui, au lieu de permettre une application rapide de l'ordonnance du 13 janvier 2010, a surtout contribué à créer une instabilité juridique dont personne ne peut se réjouir.

Les principales dispositions de cette ordonnance introduites par voie d'amendements à la proposition de loi Fourcade ayant été censurées par le Conseil constitutionnel, la réforme a fait son retour dans une proposition de loi de nos collègues Préel et Boyer, adoptée à l'Assemblée nationale, mais non transmise au Sénat, ce qui explique le dépôt de ce nouveau texte.

Ce cheminement difficile ne résulte pas tant de la complexité technique de la réforme que de la difficulté de concilier deux objectifs qui, pourtant, devraient être complémentaires : mettre un frein à la financiarisation du secteur libéral de la biologie médicale et renforcer la sécurité des examens pratiqués, dont chacun mesure, je le pense, la place de plus en plus importante qu'ils revêtent aujourd'hui pour les diagnostics et les traitements.

Nous demeurons très réservés sur le fait qu'en application de l'ordonnance que l'article 1er de la proposition de loi vise à ratifier, un laboratoire d'analyses médicales pourra, demain, être considéré comme une seule structure constituée d'un ou plusieurs sites où sont susceptibles d'être effectués les examens de biologie médicale. Cette organisation juridique présente le risque de transformer certains laboratoires existants en de simples structures de prélèvements dont les analyses seraient effectuées ailleurs, ce qui, outre les difficultés inhérentes à l'éloignement et au transfert de ces prélèvements vers le centre d'analyses, risque de poser des problèmes de santé publique et de sécurité sanitaire pouvant engager, dans certains cas, le pronostic vital. J'ajoute que les dispositions introduites au Sénat visant à prendre en compte le traitement des situations d'urgence ne nous paraissent pas très convaincantes.

Je rappelle que la profession de biologiste est médicale, et non pas technique.

Notre seconde préoccupation, que cette proposition de loi entendait pourtant endiguer mais qui reste présente, est naturellement la financiarisation du secteur de la biologie médicale.

Nul n'ignore que des groupes financiers, fonds d'investissement ou fonds de pension tels que Labco, Duke Street, Capio ou encore ACCOLAB, groupe financier de laboratoires d'analyses médicales contrôlé par le fond de pension Allegro Investment Fund, basé aux îles Caïmans, sont aux aguets, quand ils ne sont pas déjà à la manoeuvre pour transformer la biologie médicale ou d'autres secteurs de la santé en « machine à cash ».

Pour ces nuisibles, la santé n'est qu'un marché, qui plus est solvabilisé par la sécurité sociale et, par conséquent, sans risque financier, dont les professionnels ne sont que les opérateurs. Le métier de ces grands groupes, c'est la finance, et ils y sont très compétents. Nul doute qu'ils contourneront sans difficultés les quelques dispositions de cette proposition de loi.

Enfin, la procédure d'accréditation continue de susciter notre inquiétude. Si nous sommes évidemment très attachés, comme tous ici, je suppose, à la sécurité sanitaire et au renforcement de la qualité – et, de ce point de vue, nous apprécions les dispositions accordant des délais et prévoyant des paliers pour permettre à tous les laboratoires, notamment aux plus petits, aux plus modestes, de se mettre en conformité –, nous continuons de penser que les dispositions du texte peuvent renforcer le risque de financiarisation, être le cheval de Troie de la concentration des sites.

En effet, un grand nombre d'établissements de proximité ne pourront supporter la charge des travaux, équipements et mises aux normes exigés pour être accrédités. Ils n'auront plus alors que deux solutions : fermer, en étendant davantage encore les déserts sanitaires que nous combattons, ou vendre aux groupes financiers, avec le risque de voir l'activité de leur laboratoire se réduire aux seuls prélèvements.

Fondé sur un principe de sécurité sanitaire incontestable, mais dépourvu d'accompagnement particulier, notamment financier, le passage des normes existantes à celles requises pour l'accréditation pourrait conduire au résultat inverse de celui que nous recherchons. C'est en tout cas une inquiétude que nous tenons à souligner encore aujourd'hui.

De même, ainsi que je l'avais indiqué en première lecture, si la suppression des ristournes sans compensation, que nous ne contestons pas dans son principe, renforce la médicalisation de la profession, elle fragilisera également les centres de santé et les hôpitaux qui en bénéficient actuellement.

Pour conclure, nous partageons les objectifs annoncés, mais le texte ne permet pas de les atteindre. C'est pourquoi les députés du Front de Gauche maintiendront leur vote d'abstention.

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Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais souligner combien il est agréable, au bout de plusieurs décennies d'attente, de consacrer le fait que la biologie médicale est maintenant mieux reconnue, qu'elle sera mieux protégée et sécurisée sur le plan juridique.

Je salue le grand rôle joué par Mme la rapporteure, grâce à un travail rigoureux, après des auditions multiples permettant de tenir compte de tous les points de vue, pour aboutir à un texte d'équilibre.

Le travail réalisé à l'Assemblée nationale et au Sénat a progressivement enrichi la proposition de loi. Le texte proposé par la CMP semble très satisfaisant pour les professionnels, soucieux d'assurer l'avenir à long terme de cette activité, mais également pour les patients et les associations de malades, légitimement désireux de bénéficier d'une qualité contrôlée pour tous les tests sur l'ensemble du territoire national.

Ce texte est en effet protecteur.

Il protège les patients. Avec une accréditation à 100 % en 2020, tous les tests, dans chacun des territoires de notre pays, auront une fiabilité absolue. Ainsi, il n'y aura plus d'inégalités entre les laboratoires selon leur taille ou leur région géographique. Nous devons cela à nos patients, car une erreur de diagnostic à la suite d'un mauvais test biologique est aussi grave qu'une erreur thérapeutique avec un médicament dangereux. De même qu'il est inopportun de donner un traitement non utile dont l'innocuité n'est pas suffisamment garantie, un test dont le résultat n'est pas fiable est un élément très dangereux dans la prise en charge d'un patient.

Bien sûr, nous avons entendu les préoccupations de certains responsables de petits laboratoires d'analyses médicales qui redoutaient le coût futur de l'accréditation, mais la progression par paliers jusqu'à 2020 leur donne sept ans pour s'adapter et provisionner les frais d'accréditation.

Je rappelle que 60 % des diagnostics reposent principalement sur un examen biologique. La biologie est donc au coeur de 60 % des diagnostics de maladies. Je rappelle aussi que, selon une évaluation récente, il y a près de 10 % d'erreur dans les tests, pourcentage qu'il faut évidemment faire reculer.

Ce texte protège également les professionnels, puisque la financiarisation progressive est enfin endiguée. Il protège le modèle français, fondé sur des laboratoires répartis sur tout le territoire et contribuant à l'aménagement sanitaire dudit territoire. Il protège, en l'affirmant, le caractère médical par essence de l'activité.

Il protégera, enfin, la biologie hospitalière et permettra à chacune des spécialités d'examens biologiques ainsi qu'à la recherche hospitalière attenante de d'atteindre un niveau de qualité de plus en plus exigeant.

Il a été tenu compte des besoins de chacun, laboratoires de ville et de CHU, patients, professionnels, et ce dans les localités de toutes tailles. Nous sommes arrivés ainsi à un équilibre, et l'amendement du Gouvernement le rendra même parfaitement conforme aux exigences européennes.

C'est en luttant contre la financiarisation qui, petit à petit, se mettait en place, contre une concentration excessive et contre des ristournes inopportunes, que nous garantirons la pérennité de la biologie de proximité telle qu'elle existe en France aujourd'hui et lui assurerons une qualité exemplaire.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, si 1975 a vu une première réforme relative aux laboratoires d'analyses de biologie médicale et à leurs directeurs et directeurs adjoints, et si, par la suite, près de quarante ans se sont écoulés sans que de nouvelles modifications ou changements réels soient apportés, le texte examiné aujourd'hui est le cinquième concernant la biologie médicale à avoir été inscrit à l'ordre du jour du Sénat en quatre ans.

Les conclusions du rapport commandé par le précédent gouvernement à Michel Ballereau ont démontré que l'évolution rapide des connaissances scientifiques et technologiques au cours des dernières années appelait des adaptations et des modifications. Il s'en est suivi, vous le savez, l'ordonnance qui comportait deux avancées principales : la médicalisation par la réaffirmation du rôle du biologiste médical dans le parcours de soins ; l'accréditation par l'élévation des exigences de qualité des examens, qui doivent répondre à des impératifs de preuve et de traçabilité.

Ces deux mesures ayant de grandes conséquences, tant sur la réorganisation au sein des laboratoires de biologie médicale que sur la réorganisation territoriale de ces laboratoires entre eux, de nombreuses difficultés sont apparues dans la mise en application de l'ordonnance du 10 janvier, qui n'a donc pas été ratifiée.

Le groupe UMP avait voté, dans la loi Fourcade de 2011, un article portant ratification de l'ordonnance, mais en y apportant de nombreuses modifications proposées par les biologistes, comme la réintégration des cabinets infirmiers dans les lieux de prélèvement pré-analytique autorisés ou le report de la date d'accréditation COFRAC. Ce texte répondait également au risque de financiarisation de la profession de biologiste en interdisant la détention d'actions par des actionnaires non biologistes, qui aurait pu leur assurer une position dominante. En d'autres termes, il fallait protéger la profession en la laissant aux mains de professionnels : c'est une exigence de qualité et de transparence sur laquelle notre groupe s'était engagé.

Le texte ayant été censuré pour des raisons de forme, Valérie Boyer et Jean-Luc Préel avaient déposé une proposition de loi reprenant l'essentiel de ces dispositions. Votée en première lecture, elle était en attente au Sénat.

Bref, une réforme de la biologie médicale était nécessaire, et attendue par l'ensemble de la profession. C'est pourquoi nous nous félicitons que la proposition de loi du groupe socialiste soit pour l'essentiel tirée de celle déposée en son temps par le groupe UMP.

Même si l'essentiel n'est pas la totalité, et si le texte peut encore être complété et amélioré, nous nous réjouissons qu'il y ait eu quelques avancées en CMP, notamment sur l'article 6 permettant la nomination dans les CHU de personnes non titulaires du diplôme d'études spécialisées de biologie médicale, ce qui stimulera l'excellence de la recherche et de l'enseignement dans les centres universitaires. Par ailleurs, l'article 8 relatif aux modalités de participation au capital d'une société exploitant un laboratoire de biologie médicale sera amendé par le Gouvernement, et nous nous félicitions naturellement des avancées obtenues en CMP.

Pour des raisons de cohérence et de responsabilité, nous voulons combler le vide juridique qui existait pour les professionnels de santé, notamment les biologistes médicaux. C'est pourquoi le groupe UMP, dans sa grande majorité, votera cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, un peu plus de trente ans après la loi du 11 juillet 1975 ayant posé le cadre de la biologie médicale, la proposition de loi que l'Assemblée nationale s'apprête à adopter est, cela a été rappelé, le cinquième texte en quatre ans sur l'avenir de la biologie médicale.

Cette réforme apporte une réponse ambitieuse aux évolutions technologiques et économiques ayant marqué ce secteur depuis quelques années et engage le tournant de la médicalisation pour garantir une biologie de qualité et de proximité. Rappelons l'engagement du gouvernement précédent, celui de Valérie Boyer et de Jean-Luc Préel qui ont déposé une proposition de loi.

Cette réforme, vous le savez tous, met un terme à l'insécurité juridique provoquée par la caducité de l'ordonnance de janvier 2010. La ratification de cette ordonnance – rappelons le travail considérable accompli par Michel Ballereau – était d'autant plus importante qu'un amendement l'abrogeant avait été adopté à l'Assemblée nationale en 2011, en première lecture du projet relatif à la bioéthique. Si cette disposition avait ensuite été retirée, il était néanmoins important de stabiliser les dispositions législatives. C'est pour ces raisons que le groupe UDI apporte son soutien à ce texte.

Un mot sur l'accréditation à 100 %. Si, à nos yeux, il était indispensable de viser un objectif de 100 % pour renforcer la médicalisation de la profession et répondre aux exigences croissantes de qualité et de traçabilité, il était néanmoins nécessaire de prendre en compte les difficultés d'application pouvant survenir lorsqu'un laboratoire se lance dans l'accréditation. C'est pourquoi des délais ont été introduits et nous avons soutenu l'amendement de Mme la rapporteure.

Je suis par ailleurs heureux que l'article 5 interdise les ristournes en imposant de facturer les examens au tarif de la nomenclature. Les ristournes sont contraires, non seulement au principe de tarification des actes médicaux, mais également à l'objectif de médicalisation, et laissent penser que les analyses biologiques sont des prestations de service commercialisables. En outre, cette pratique peut – on l'a vu par le passé – conduire les laboratoires à augmenter artificiellement le nombre d'actes pratiqués, occasionnant ainsi des dépenses supplémentaires injustifiées pour l'assurance maladie.

Je me suis néanmoins opposé à certaines des orientations défendues par la majorité malgré les mises en garde persistantes de la profession et des parlementaires éclairés sur leurs conséquences délétères.

Il s'agit tout d'abord du problème d'une biologie médicale à deux vitesses. C'est l'affaire de l'anatomo-cyto-pathologie, pour laquelle il faudra engager une démarche d'accréditation. J'ai posé la question et n'ai pas reçu de réponse à ce jour. Vous le savez, madame la ministre, ces disciplines sont des spécialités médicales différentes mais parfois confondues. Or l'article 3, dans sa rédaction actuelle, crée une distinction inacceptable entre les qualités requises pour exercer l'anatomo-cyto-pathologie selon que cet exercice est réalisé dans un laboratoire de biologie médicale ou un autre lieu.

En effet, dans les laboratoires de biologie médicale, l'exercice de l'anatomo-cyto-pathologie sera réservé aux titulaires de la spécialité uniquement. En dehors d'un laboratoire de biologie médicale, des non-titulaires de la spécialité pourront en revanche continuer à réaliser de tels actes. Cette distinction dévalorisera la spécialité lorsqu'elle est effectuée en dehors d'un laboratoire de biologie médicale. Notre collègue a parlé des erreurs qui peuvent survenir dans les laboratoires de biologie médicale : il s'en produit également dans les laboratoires d'anatomo-cyto-pathologie.

J'en viens aux dérogations accordées à l'Établissement français du sang. L'article 4, dans sa rédaction initiale, aménageait les règles d'implantation territoriale des établissements de transfusion sanguine afin qu'ils puissent disposer de sites localisés sur plus de trois territoires de santé, par exception à la règle générale s'appliquant aux laboratoires de biologie médicale.

Le rapporteur de la commission des affaires sociales du Sénat a précisé que la dérogation en matière d'implantation territoriale serait limitée aux actes de biologie qui relèvent du monopole de l'EFS, en faisant référence à la « qualification biologique du don ».

En séance publique, le Gouvernement a étendu la dérogation en matière d'implantation territoriale aux actes de biologie médicale, arguant du fait que ces laboratoires réalisent des analyses qui vont au-delà des simples analyses biologiques d'immunologie cellulaire et humorale, de cytologie hématologique, d'hémostase ou encore de biologie moléculaire, et se livrent donc à des activités qui relèvent de spécialités différentes.

La commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, enfin, a adopté un amendement prévoyant que seuls les examens d'immuno-hématologie et d'histocompatibilité, qui sont, chacun me l'accordera, indissociables du traitement transfusionnel, entreront dans le champ de cette dérogation. Elle a également prévu une dérogation applicable au nombre de transmissions d'échantillons biologiques faites par les laboratoires de biologie médicale des établissements de santé aux établissements de transfusion sanguine en vue de réaliser des examens d'« immuno-hématologie receveur ».

Le groupe UDI a défendu des amendements visant à supprimer les dérogations successives accordées à l'EFS. Tout d'abord, la dérogation pour les examens de qualification du don prévue par la commission des affaires sociales du Sénat n'a pas lieu d'être, car ces analyses, je le répète, ne sont pas des examens de biologie médicale.

La dérogation pour les examens de biologie médicale introduite à l'initiative du Gouvernement n'a pas plus de sens, puisqu'une dérogation territoriale est déjà rendue possible par l'article L. 6222-5 du code de la santé publique : cet article permet au directeur général de l'ARS d'accorder des dérogations à la règle des trois territoires dans une procédure transparente, que ce soit pour l'EFS ou les laboratoires de biologie médicale.

La dérogation introduite à l'initiative de la commission des affaires sociales pour les examens d'immuno-hématologie et d'histocompatibilité n'a pas de raison d'être non plus puisque ce sont, cette fois, des examens de biologie médicale : une telle dérogation est donc déjà rendue possible par l'article L. 6222-5.

Enfin, la dérogation applicable au nombre de transmissions d'échantillons biologiques faites par les laboratoires de biologie médicale des établissements de santé aux établissements de transfusion sanguine en vue d'examens d'immuno-hématologie ne saurait être justifiée par la particularité des missions et du fonctionnement de l'EFS. Il n'existe donc aucune raison que des transmissions puissent excéder le pourcentage compris entre 10 et 20 % du nombre total d'examens de biologie médicale.

Je regrette que vous n'ayez pas entendu nos arguments sur cet article, et ce pour deux raisons. Tout d'abord, de telles dérogations contreviennent aux objectifs de proximité – vous avez prononcé le mot à plusieurs reprises – et de qualité de la biologie médicale poursuivis par la présente loi. Enfin, ces dérogations étaient déjà prévues à l'article L. 6222-5 ; il n'était donc pas nécessaire d'y revenir.

Un mot sur le recrutement de professeurs des universités et maîtres de conférences praticiens hospitaliers. Vous connaissez notre opposition sur ce point. L'article 6, rétabli dans sa version initiale par un amendement gouvernemental, permettra le recrutement de professeurs non titulaires du diplôme d'études supérieures de biologie médicale. Où est l'attractivité pour les jeunes biologistes ? Est-ce là la reconnaissance qu'il s'agit d'une discipline médicale à part entière, quand on sait le rôle qu'elle joue notamment dans la phase de diagnostic médical ? On réduit d'une certaine façon la biologie médicale à une sous-discipline et on altère la médicalisation de cette profession, qui était en marche.

En ce qui concerne la lutte contre la financiarisation, je souhaite également dire un mot de l'article 8, qui définit les modalités de participation au capital d'une société exploitant un laboratoire de biologie médicale. Cet article vise à encadrer et limiter les formes de participation au capital d'une société exploitant un laboratoire de biologie médicale afin de limiter le risque de financiarisation du secteur. Je suis d'accord avec Mme Fraysse : il faut éviter que cette financiarisation continue de se développer. Pour autant, l'article ne présentait pas de garanties suffisantes pour que les jeunes biologistes médicaux ne soient pas exclus du capital social des sociétés exploitant un laboratoire de biologie médicale et ainsi privés de la possibilité d'exercer leur profession en tant qu'associés au sein d'une telle structure. C'est tout le danger de l'actionnariat ultra-minoritaire.

Les nombreuses solutions proposées pour remédier à ces insuffisances n'ont pas permis de s'assurer que des effets contraires à l'objectif poursuivi ne surviendraient pas. La commission mixte paritaire, qui s'est réunie le 10 avril, a même adopté un amendement auquel j'étais opposé. Nous sommes donc favorables, madame la ministre, à l'amendement que vous proposez ; le groupe UDI le soutiendra.

Pour autant, cette carence de la proposition de loi ne doit pas être ignorée ou oubliée. Je vous engage à trouver, avec les syndicats représentatifs des internes, et en particulier de ceux qui sont dans la biologie médicale, une solution équilibrée, car nous sommes face à une instabilité. L'accès sans statut ultra-minoritaire au capital des laboratoires est fondamental pour un exercice apaisé de leur profession.

J'ai souligné les points positifs de cette proposition de loi. J'ai également souligné certaines insuffisances, comme celle relative à l'ultra-minoritariat pour les jeunes internes, que corrigera l'amendement du Gouvernement. Ce texte mettant fin à une insécurité juridique, nous le voterons.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Monsieur le président, madame la ministre, madame la rapporteure, chers collègues, l'examen du texte issu de la commission mixte paritaire doit enfin permettre d'oeuvrer pour la réforme de la biologie médicale. Depuis 2008 et le rapport Ballereau qui préconisait cette réforme, le débat a eu lieu à de nombreuses reprises au sein du Parlement. Malgré l'ordonnance du 10 janvier 2010 destinée à réformer la biologie médicale, aucun de ces débats n'aura abouti à une véritable concrétisation de cette réforme.

Nous avons désormais l'occasion d'adopter cette proposition de loi qui permettra d'atteindre les deux objectifs que je rappelais lors de la première lecture de ce texte dans notre hémicycle, le premier étant de garantir la qualité et la sécurité des examens par l'accréditation, le second de limiter la financiarisation du secteur libéral, dont les bénéfices attirent des investisseurs extérieurs aux professions de santé. Comme l'a rappelé Jean-Louis Touraine en CMP, la sécurité de la biologie médicale n'est pas moins importante que la sécurité médicamenteuse. Aussi était-il important de légiférer.

Lors de son adoption en première lecture dans notre hémicycle, la proposition de loi était équilibrée, fruit d'un travail parlementaire riche et important, aussi bien au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. Le texte issu de la commission mixte paritaire illustre d'ailleurs la qualité de ce travail, ainsi que le consensus qui a pu être trouvé autour de certains articles, puisque, sur les neuf restant en discussion, quatre ayant été adoptés conformes, seuls les articles 8 et 9 ont été modifiés par la CMP ; les sept autres ont été confirmés dans la version issue de l'Assemblée.

Ainsi, le texte issu de la commission mixte paritaire conserve cet équilibre et cette ambition. L'article 4 est maintenu dans les termes que nous avions adoptés. La dérogation accordée aux laboratoires de l'Établissement français du sang est conservée et précisée en termes d'implantation géographique. Cette dérogation s'appliquera ainsi uniquement aux cas justifiés par les missions de service public de l'établissement, dans le cas des examens menés en immuno-hématologie et histocompatibilité. Cela permettra de limiter les risques de distorsion de concurrence avec les laboratoires publics et privés effectuant les mêmes examens, tout en prenant en considération les spécificités de l'EFS. Bien entendu, il nous faudra être vigilants sur l'application concrète de cette dérogation et nous assurer que le risque de distorsion est bel et bien évité.

Toujours à cet article 4, le remplacement de tout ou partie de la phase pré-analytique par le simple prélèvement, comme autorisation d'un examen conduit en dehors d'un laboratoire de biologie médicale, est une bonne chose. Beaucoup d'acteurs craignaient que le champ d'examens menés hors de la spécialité soit trop élargi. Le restreindre au simple prélèvement permet de garantir la qualité de la biologie médicale et d'assurer aux praticiens le rôle, la responsabilité de véritables spécialistes médicaux qui leur incombe. Aussi, la formulation de l'article L. 6211-13 du code de la santé publique telle que définie par le présent texte est la meilleure.

Concernant l'article 6, je n'y suis pas plus favorable que je ne l'étais lors de sa réintroduction par voie d'amendement gouvernemental. La biologie médicale est une spécialité à part entière, pratiquée par ceux qui ont réussi un concours spécifique et sont détenteurs d'un DES de biologie médicale. Ouvrir une dérogation permettant le recrutement en CHU de personnes n'ayant pas ce diplôme risque de dévaluer celui-ci.

En revanche, l'article 7 est particulièrement intéressant, en ce qu'il rétablit les paliers provisoires pour l'obtention d'accréditations. Le calendrier échelonné est plus que raisonnable : 50 % en 2016, 70 % en 2018, 100 % en 2020. S'il est nécessaire qu'à plus ou moins long terme les laboratoires voient leurs examens accrédités à 100 %, un échelonnement raisonné est intelligent et rassurant, notamment pour les plus petits établissements.

Enfin, l'article 8 est extrêmement important. Il vise à lutter contre la financiarisation du secteur, des laboratoires, notamment des plus modestes. Si l'on souhaite conserver de la proximité dans la médecine, il est primordial de protéger les plus petits laboratoires d'une financiarisation excessive, d'une absorption par des grands groupes. La formulation actée par la CMP est le fruit de nombreuses discussions, toutes très intéressantes.

Aussi le texte issu de la commission mixte paritaire est-il resté tout à fait équilibré, et le groupe écologiste y est-il donc favorable.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Nous voici une nouvelle fois réunis autour du projet de loi portant réforme de la biologie médicale, au terme du processus législatif puisque toutes les étapes ont été successivement franchies. Les heures d'échanges et de débats que nous avons eues sur ce vaste sujet témoignent de son importance, rappelée par de nombreux collègues et dont nous avons tous conscience, pour avoir été interpellés par divers interlocuteurs, qu'il s'agisse des professionnels de la biologie médicale ou de nos concitoyens, attachés à leur laboratoire d'analyse médicale et à ses services.

L'ampleur du débat est à la hauteur de l'attente considérable qui existe chez les professionnels d'une législation adaptée, dans un domaine qui a considérablement évolué au cours de ces dernières décennies et dont la dernière loi, comme beaucoup l'ont rappelé, date de 1975.

Si d'aucuns ne souhaitaient pas d'évolution et se sont montrés, dès le commencement du débat, réticents voire opposés au texte, beaucoup d'interlocuteurs se sont montrés attentifs, constructifs et soucieux.

Je ne reprendrai pas les arguments déjà développés sur l'intérêt que représente ce projet de loi, notamment pour garantir la sécurité des examens, limiter la financiarisation du secteur libéral de la biologie médicale et interdire la pratique des ristournes. À l'issue de ce travail parlementaire, l'essentiel est entendu et sur les points en débat, un compromis a été trouvé, témoignant d'une volonté commune de maintenir le modèle français de la biologie médicale.

Je souhaiterais, en revanche, me faire le relais de quelques inquiétudes que j'ai pu recueillir et qui nécessitent l'attention de tous. Je ne reviendrai pas sur les objectifs, qui ont été largement rappelés et qui ont fait l'objet d'un consensus. Par contre, beaucoup ont souligné le coût de l'exigence du 100 % d'accréditation : nous avons trouvé une solution équilibrée, avec un échelonnement rassurant, comme vient de le rappeler Véronique Massonneau.

Quelques inquiétudes toutefois demeurent sur la définition de la notion d'examen innovant, présente dans la loi : elle sera déterminante. Beaucoup ont attiré notre attention sur le fait de ne pas figer les choses, pour laisser une marge de manoeuvre afin de pouvoir répondre aux évolutions technologiques. Cela va également dans l'intérêt du patient.

Tout a été dit sur l'article 8 et je n'y reviendrai pas, même si les points de vue divergent. En revanche, je veux revenir sur la capacité d'installation dans les secteurs ruraux ou les zones urbaines sensibles, pour laquelle le rôle des agences régionales de santé sera déterminant. Il faudra également nous montrer vigilants sur le problème des laboratoires qui ont dû fermer et qui pourraient peut-être, à la faveur de cette loi, trouver d'autres modalités de fonctionnement. Nous devrons envisager la question, en tenant compte de la situation de ces quartiers et de ces secteurs et de l'histoire de ces laboratoires.

Je vous remercie, madame la ministre, car je sais l'attention toute particulière que vous portez à ce dossier. Les décrets d'application auront une grande importance pour régler certains points. Dans nos territoires, nombre de nos concitoyens attendent du ministère les preuves d'un souci de proximité, adapté aux situations particulières.

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Puisqu'il m'est donné de m'exprimer le dernier dans cette discussion générale sur la loi portant réforme de la biologie médicale, dont chacun a rappelé la nécessité et la qualité de ses avancées incontestables, je tiens à m'élever contre le climat délétère que certains, ultra-minoritaires certes, ont tenté d'instaurer autour de nos débats. Nous avons été inondés de mails et de courriers particulièrement outranciers, dont certains propos ont été malheureusement relayés dans la presse. Pire encore, Catherine Lemorton, présidente de notre commission, mais aussi Ségolène Neuville, notre rapporteure, ont été directement victimes de ces agissements. De tels dérapages n'ont évidemment rien à voir avec le débat serein qui a été mené, et ils ont heureusement été très largement dénoncés et condamnés par l'ensemble des syndicats représentatifs, qu'ils soient hospitaliers ou libéraux, et par les syndicats d'internes.

J'en viens à l'article 6 qui, jusqu'en CMP, a fait couler beaucoup d'encre. Il permet aux CHU de maintenir l'existant, à savoir la possibilité de recruter des professionnels, médecins ou pharmaciens très spécialisés, non titulaires du DES de biologie médicale, dans des services de biologie sur des postes de praticiens hospitalo-universitaires, et sur des critères très stricts arrêtés conjointement par les ministres de la santé et de l'enseignement supérieur et de la recherche.

Cet article a connu, chacun l'a rappelé, une vie mouvementée. Je ne méconnais pas les inquiétudes, largement exprimées par les jeunes biologistes titulaires du DES, tant sur leur place à l'hôpital que sur leur intégration au sein de laboratoires de ville – la plupart d'entre eux se destinant en effet à un exercice libéral.

Je ne méconnais pas non plus le phénomène de cooptation qui peut exister au sein de nos CHU : le contester serait contraire à la vérité, ou le signe d'une grande naïveté. Pour autant, mettre en accusation, avec quelques facilités de langage, tout un processus de décision qui serait par nature défavorable aux jeunes biologistes souhaitant accéder à la carrière hospitalo-universitaire serait également trahir la vérité.

En première lecture, à l'occasion de sa défense de l'amendement rétablissant l'article 6, Marisol Touraine nous a rappelé que les dérogations étaient au nombre d'une centaine par an avec des garde-fous indispensables, dont l'agrément d'une commission spécialisée. Chaque année, sur 240 internes de médecine et de pharmacie inscrits dans les DES de biologie médicale, 70 sont nommés à des postes de PU-PH, ce qui constitue, pour les CHU, une proportion élevée, qu'on ne retrouve dans aucune autre spécialité.

Cet article 6 a été soutenu ici, en mars, des deux côtés de l'hémicycle par Jean-Louis Touraine et par Arnaud Robinet, dont chacun sait, en toute transparence, qu'ils sont impliqués professionnellement dans des CHU. J'ai retenu la pertinence de leur argumentation qui prend en compte la spécificité et la spécialisation de quelques laboratoires de CHU concernés et la nécessité de garder à ces laboratoires l'excellence qu'ils ont acquise.

Ce même article a été combattu jusqu'en CMP avec la même vigueur par Philippe Vigier et Jean-Sébastien Vialatte, qui ont mis au service de nos débats leur expertise de biologistes libéraux et leur engagement sur ce texte ; mais je ne partage pas leurs arguments quand ils affirment qu'un tel amendement servirait la cause de quelques mandarins voire qu'il inscrirait dans la loi une concurrence déloyale.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Ils défendent le côté indépassable du DES de biologie médicale pour les PU-PH en CHU. Cette conception est envisageable, et partagée notamment par Véronique Massonneau ou Dominique Orliac, mais ce n'est pas mon avis.

Heureusement, malgré nos différends sur cette interprétation de l'article 6, le texte a reçu l'assentiment d'une majorité et il assure un haut niveau de qualité à la biologie française, tout en respectant sa spécificité, et cela au seul service des patients. C'est sans la moindre difficulté que le groupe SRC soutiendra l'amendement du Gouvernement et votera ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Nous en venons au texte de la commission mixte paritaire, conformément à l'article 113, alinéa 3 du Règlement. Auparavant, je vais appeler l'Assemblée à statuer sur l'amendement dont je suis saisi.

La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l'amendement n° 1 .

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Cet amendement vise à supprimer les alinéas 7 à 9 de l'article 8, introduits par la commission mixte paritaire.

Les dispositions qui figurent dans ces alinéas ont pour objectif de fixer un seuil minimal de détention du capital social pour chaque biologiste médical exerçant au sein d'une société à exercice libéral, en précisant que le seuil serait précisé par décret en Conseil d'État. Elles prévoient également que les sociétés concernées doivent s'y conformer dans un délai d'un an.

Le mécanisme proposé ne constitue pas une réponse efficace à l'enjeu de l'ultra-minoritariat, enjeu réel qui est soulevé par les jeunes biologistes. Au contraire, il suscite des réserves de compatibilité avec le droit communautaire, à un moment où la législation française relative à la biologie médicale est observée avec une attention particulière par les autorités communautaires.

Indépendamment de cet argument juridique, qui n'est pas négligeable et qui a d'ailleurs fait l'objet d'une alerte du Secrétariat général aux affaires européennes, je doute de l'efficacité d'un dispositif de seuil de détention individuel. La garantie collective qui est prévue, d'une détention de la majorité du capital par les exerçants, est déjà de nature à servir l'objectif de lutte contre l'ultra-minoritariat : on voit mal comment l'ajout d'un nouveau seuil constituerait une garantie supplémentaire.

L'instauration d'un seuil individuel pourrait même se révéler contre-productive, puisque des exerçants, dépourvus de la capacité financière fixée par le seuil, seraient écartés de facto du capital de la société. Non sans paradoxe, ce sont donc les jeunes biologistes qui seraient les premiers pénalisés, puisqu'ils se trouvent à un moment de leur carrière où ils ne disposent pas nécessairement du capital suffisant pour atteindre ce seuil minimum.

Enfin, même si cela est d'une importance moindre, le dispositif, en imposant un délai d'un an de mise en conformité, apparaît excessivement ambitieux, car ce délai, très rapide, ne permettrait sans doute pas l'adaptation des structures concernées.

Pour toutes ces raisons, je vous demande de bien vouloir adopter l'amendement du Gouvernement qui vise à supprimer les alinéas 7, 8 et 9 de l'article 8, alinéas qui, je le répète, ont été introduits par la commission mixte paritaire.

(L'amendement n° 1 , accepté par la commission, est adopté.)

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Je mets aux voix l'ensemble de la proposition de loi, compte tenu du texte de la commission mixte paritaire, modifié par l'amendement adopté par l'Assemblée.

(L'ensemble de la proposition de loi est adopté.)

Vote sur l'ensemble

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La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures trente, est reprise à dix-sept heures quarante.)

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L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger, et du projet de loi, adopté par le Sénat après engagement de la procédure accélérée, relatif à la représentation des Français établis hors de France.

La Conférence des présidents a décidé que ces deux textes donneraient lieu à une discussion générale commune.

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des Français de l'étranger.

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger

Monsieur le président, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les députés, pendant quelques heures, nous parlerons dans cet hémicycle des Français établis hors de France et de leur représentation politique. C'est cette communauté qui permettait à Lamartine de dire : « Ma patrie est partout où rayonne la France, où son génie éclate aux regards éblouis », ou qui plus simplement nous permet aujourd'hui de considérer que c'est par l'application de nos valeurs républicaines comme par la pratique de la démocratie élective, que la France est plus grande que la France.

Le projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France que j'ai l'honneur de vous présenter, après son examen par le Sénat les 18 et 19 mars derniers, est l'expression d'une triple volonté que la gauche n'a eu de cesse de porter depuis la fin de la guerre et que votre rapporteur a si bien présenté dans son rapport : démocratiser les règles de représentation des Français établis hors de France ; moderniser les institutions par la décentralisation du pouvoir politique ; assurer une citoyenneté effective à chacun, quelle que soit sa situation personnelle, notamment géographique.

Claude Cheysson, qui avait appris auprès de Pierre Mendès France l'importance d'une France ouverte sur le monde, le rappelait lors de l'examen de ce qui allait devenir la loi du 7 juin 1982 relative au Conseil supérieur des Français de l'étranger : « Il faut établir en cette matière de façon parfaite et démocratique des règles qui permettent aux Français se trouvant à l'étranger de faire entendre leur voix sur les affaires les concernant. Notre tradition démocratique est là. » Certes, le constat était facile tant le système de représentation pouvait apparaître comme profondément injuste. Les membres du Conseil supérieur des Français de l'étranger, faut-il le rappeler, étaient, pour une partie d'entre eux, nommés par le ministre des affaires étrangères sur proposition des ambassadeurs. Outre le vote plural dont certains membres bénéficiaient, leur qualité d'élus dépendait ainsi d'une nomination discriminatoire par l'autorité administrative, tant celle-ci pouvait être partisane.

C'est donc la gauche, mesdames, messieurs les députés, qui a mené le combat pour une plus grande démocratie dans la représentation des Français établis hors de France. J'en citerais brièvement les principales étapes : publication, sous la présidence de Vincent Auriol,…

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger

…des décrets du 7 juillet 1948 et du 10 décembre 1949 instituant le Conseil supérieur des Français de l'étranger et en fixant le statut ; adoption de la loi du 7 juin 1982, portée par François Mitterrand, et qui permit l'élection des membres de ce conseil au suffrage direct ; loi du 18 mai 1983 qui réserve l'élection des sénateurs représentants les Français établis hors de France aux seuls membres élus du CSFE.

J'y ajouterais volontiers la loi du 9 août 2004 portant création de l'Assemblée des Français de l'étranger car ce texte a en effet résulté de l'examen simultané de deux propositions de loi, dont l'une portée dans la Haute Assemblée par les sénateurs socialistes Monique Cerisier-Ben Guiga et Guy Penne, et qui tendait à tirer les conséquences d'un groupe de travail mis en place au sein du CSFE à la demande des ministres des affaires étrangères Hubert Védrine puis Dominique de Villepin, et que présidait alors l'ancien conseiller de François Mitterrand. Quant à l'élection de députés français de l'étranger permise par la modification en 2008 de l'article 24 de la Constitution, elle mit fin à cette « demi-citoyenneté » – pour reprendre le mot du sénateur Richard Yung –, la représentation de cette communauté étant jusqu'alors amputée d'une partie de son expression, et correspondait aussi à un engagement de François Mitterrand.

La gauche, monsieur le président, mesdames, messieurs les députés, a donc toujours revendiqué cette modernisation de la vie publique que le gouvernement de Jean-Marc Ayrault assume de nouveau au bénéfice de nos compatriotes établis hors de France. Aujourd'hui comme hier, ce gouvernement a l'ambition de renforcer les liens de solidarité entre tous les Français qui vivent sur notre sol ou à l'extérieur de nos frontières. C'est cette solidarité, expression intime de l'unité de la nation, qui permet en effet de faire vivre la République.

Léon Blum écrivit à la fin de la guerre que « faire de la politique, c'est agir pour maintenir la cohésion de la société, c'est s'adapter au cours des événements, c'est employer la force fraîche des générations montantes ». La volonté du gouvernement auquel j'ai l'honneur d'appartenir n'est pas différente à l'égard de la communauté de nos compatriotes expatriés : il s'agit de maintenir sa cohésion avec la communauté nationale, de nous adapter à son évolution, de permettre aux générations montantes de la faire vivre et de nous enrichir de son expérience. Ce triple objectif me semble rempli par le projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France, et dont l'étude par votre rapporteur a permis de prévenir certains risques d'ordre juridique voire constitutionnel.

Avant d'en venir à l'essentiel, qu'il me soit permis, afin de répondre à certaines interrogations émises en commission, de préciser que l'objet central de cette réforme est la création des conseils consulaires. La suite de nos débats n'en sera que facilitée, même s'il me faut pour cela revenir préalablement sur les traits principaux que présente la communauté des Français établis hors de France.

En dépit des clichés, les Français de l'étranger ne sont ni des exilés fiscaux, ni des jeunes fuyant la République en quête d'une reconnaissance ou d'un statut qu'elle leur refuserait, ni de vieux expatriés aux retraites confortables.

Non, cette communauté française établie hors de France, ainsi que votre rapporteur l'a si clairement mis en évidence, est désormais celle de jeunes actifs souvent binationaux dont le nombre a presque doublé en quinze ans : 1,611 million d'entre eux étaient ainsi inscrits dans les consulats fin 2012. On estime cependant à plus de 2,5 millions le nombre de Français réellement installés à l'étranger, l'inscription étant facultative. Ajoutons que 10 % d'entre eux, âgés de 18 à 25 ans, s'expatrient dans le cadre de leurs études et partent pour une durée de trois à cinq ans mais sans objectif d'installation définitive.

Par sa vitalité même, cette communauté est plurale. Elle me semble cependant, mesdames et messieurs, présenter trois caractéristiques.

D'abord cette communauté est assurée des valeurs qu'elle porte. S'expatrier c'est partir avec une culture, avec une sensibilité, une somme de valeur que l'on fait vivre. Par ce qu'il est, un Français de l'étranger exprime la créativité, la capacité et la générosité de son pays. La France doit ainsi lui être instantanément redevable du rayonnement qu'il assure à ses idées.

S'exprimant à Rabat en décembre dernier devant la communauté française réunie, le Premier ministre le constatait en déclarant : « C'est un idéal de liberté et de fraternité, c'est ce principe même d'égalité qui est à la base de ce nous sommes, que vous contribuez à faire vivre. »

Il faisait ainsi écho aux propos du chef de l'État qui, lors d'un de ses déplacements, relevait qu'il avait « une grande reconnaissance pour ces deux millions de compatriotes qui vivent à l'étranger et qui contribuent à marquer l'influence de la France, sa présence, le rayonnement de ses valeurs ».

Ensuite, cette communauté a la volonté, par ses compétences et par ses qualités, d'aider la République. L'idée d'une diplomatie économique, avancée par Laurent Fabius, signifie que chacun à sa place, lorsqu'il est dans un pays qui n'est pas le sien, doit participer à ces échanges, à cette influence que la France peut espérer à travers la propre participation de ses expatriés. La France était en 2012 le quatrième pays pour les investissements à l'étranger. Gageons que nous le devons à nos compatriotes qui sont alors nos premiers ambassadeurs.

Cette communauté, enfin, est attachée à conserver un lien avec la France. Nos compatriotes ne tournent pas le dos à la France. Vos déplacements et les échanges que vous pouvez avoir avec eux doivent vous en convaincre, mesdames et messieurs les députés. Nos compatriotes qui vivent à l'étranger veulent pouvoir exercer leur citoyenneté. Non sans humour, le Premier ministre le constatait à Rabat en décembre dernier : « Être expatrié, c'est conserver le plaisir de retrouver la France qu'on ne quitte jamais », disait-il. C'est conserver, en quelque sorte, un désir de la France tout au long de la vie.

Jeune, engagée, diverse et généreuse, telle est cette communauté. Ce n'est pas le moindre des paradoxes, dans ces conditions, de constater que son taux de participation aux élections politiques est généralement inférieur de 30 % à celui de la métropole et dépasse rarement 20 %, comme en 2009 à l'élection de ses représentants, les membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.

On peut, comme certains s'y sont essayés, en accuser l'AFE elle-même. Peu connue, elle serait victime de son manque de notoriété et de visibilité. C'est faire peu de cas, cependant, de l'engagement, de la présence et de la disponibilité de ceux qui y siègent. Pour avoir participé à ses travaux durant quatorze ans, je puis vous en assurer.

Se refusant à cette dénonciation, le Gouvernement a préféré réfléchir, poursuivant d'une certaine façon le mouvement initié en 1982, à une décentralisation du pouvoir politique afin de susciter un regain d'intérêt de nos compatriotes pour le débat public. Lorsque l'on est Français et que l'on réside à l'étranger, l'exercice de la citoyenneté passe en effet par la démocratie de proximité, telle que représentée par les conseils municipaux pour nos concitoyens métropolitains. Or pour que celle-ci ait un sens, il faut que l'élection s'organise au plus près.

Elle prendra ici la forme de conseils consulaires, c'est-à-dire d'instances locales qui rendront plus lisible à nos expatriés l'action de leurs représentants. Qu'il me soit permis d'en dire deux mots.

Le texte qui vous est soumis crée 444 conseillers consulaires, élus au suffrage universel direct dans le cadre de 130 circonscriptions consulaires. S'inspirant de la structure de notre réseau diplomatique, les circonscriptions seront créées là où la France possède une activité consulaire parce que nous y avons une communauté importante.

C'est en effet à ce niveau-là que s'exprime la réalité des besoins et des désirs de nos compatriotes. Fort justement, la sénatrice Monique Cerisier-Ben Guiga le relevait en 2004 à l'occasion du débat portant création de l'Assemblée des Français de l'étranger. Parce qu'ils sont soumis à la loi de leur pays de résidence, les expatriés français, déclarait-elle, « ne peuvent trouver un pouvoir protecteur et bénéfique dans un cadre français qu'auprès de l'administration consulaire, l'élu jouant alors le rôle d'intercesseur ».

L'instauration d'une démocratie locale par l'élection de conseillers représentant les populations expatriées auprès de l'administration consulaire, au plus près de la décision à prendre, constitue donc bien l'essentiel de ce projet. Contrairement à ce qui a pu être écrit, l'adoption de ce texte ne laissera pas nos concitoyens démunis dans leurs contacts avec l'administration centrale alors qu'il tend précisément à leur donner des interlocuteurs locaux capables de relayer directement leurs préoccupations.

Au Brésil, les 30 000 résidents français sont ainsi représentés par trois élus. Avec la réforme qu'il vous est proposé de voter, cette communauté sera désormais représentée par dix élus locaux qui devront résider dans les circonscriptions des consulats auprès desquels les conseils seront installés. Et parce que la représentativité de ces conseils doit être incontestable, la quasi-totalité des membres sera élue au scrutin proportionnel à la plus forte moyenne.

Je crois utile d'ajouter que les communautés françaises pouvant évoluer rapidement, au gré des aléas de la vie internationale et du changement parfois soudain des données politiques, le projet prévoit que le nombre des conseillers sera fonction du nombre d'inscrits. La proximité, c'est cela.

Ces conseillers formeront 130 conseils consulaires qui remplaceront les comités qui, en matière sociale, pour l'attribution des bourses, ou pour les questions de formation professionnelle ou d'emploi, assistent aujourd'hui nos chefs de poste.

Lieux d'information et de participation des citoyens à la prise de décision, les conseils consulaires, par une extension des compétences matérielles des comités existants, participeront par exemple à la mise en place de politiques publiques en matière d'enseignement, d'aides sociales, mais aussi de toutes politiques relatives au travail, à l'emploi et la formation professionnelle, à la sécurité et à tout autre sujet d'ordre économique, éducatif ou culturel intéressant les Français de l'étranger. Ils assureront en outre un lien entre nos concitoyens avec les autorités administratives tant françaises que locales.

Tirant leur force de leur légitimité électorale, ces conseils seront obligatoirement consultés dans leur domaine de compétence. Ils pourront aussi donner leur avis sur toute question concernant les Français de l'étranger. Ajoutons que ces conseils, présidés par le chef de poste, pourront inviter des personnalités qualifiées et des experts. Il conviendra d'en préciser la composition exacte par décret.

Monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés, les auditions auxquelles vous avez procédé en commission vous ont permis de constater que la création de ces conseils consulaires avait fait consensus au Sénat. Je ne pense pas que ce point fasse débat à l'Assemblée.

Il en va de même, me semble-t-il, du rôle du Haut Conseil des Français de l'étranger. Perdant, avec la création des conseils, cette compétence consulaire que ses élus exerçaient hier au niveau local, cette assemblée pourra se recentrer sur sa fonction de conseil et d'expertise, tant auprès du Gouvernement que des assemblées parlementaires. Cette assemblée aux compétences élargies et à l'autonomie renforcée notamment par l'élection de son président sera composée de 102 membres issus des conseils consulaires.

C'est ce double mouvement – création de conseils consulaires, renforcement des compétences consultatives d'un organe de niveau national – qui semble être le mieux à même de tirer parti de l'élection des députés des Français de l'étranger. Ceux qui siègent sur vos bancs ont pu vous en assurer.

Deux points me semblent cependant faire encore ici débat : le nom de cette assemblée ; le mode de désignation de ses membres.

S'agissant du premier point, je m'en remettrai à votre sagesse. Rapporteur de la loi du 9 août 2004 portant création de l'AFE, le sénateur Christian Cointat expliquait alors que le changement de nom de conseil supérieur s'imposait car le sigle n'étant ni significatif ni porteur en termes d'image, il pouvait avoir contribué à la désaffection des électeurs. À le suivre, le changement de nom s'imposerait donc de nouveau.

Plus simplement, il me semble important, quel que soit le nom que vous retiendrez, d'avoir à l'esprit le désir de reconnaître et de valoriser au mieux le travail de ceux des conseillers consulaires qui prendront sur leur temps pour apporter au bénéfice de l'État leur connaissance intime des problématiques transversales qui nous intéressent tous.

Cependant, il est certain que le nom de l'instance ne saurait se confondre avec ses compétences qui d'ailleurs augmentent ; affirmer le contraire et laisser croire que le premier point conditionnerait le second est malhonnête.

Venons-en au mode de désignation de ses membres. Par simplicité et afin d'éviter un mode de scrutin que risquait d'entacher la violation du principe d'intelligibilité et de respect de la sincérité du vote, le Gouvernement est favorable aux amendements qui ont été adoptés par votre commission pour revenir à un mode de scrutin indirect.

Je sais et je comprends l'attachement sincère de tout élu à sa désignation directe par les électeurs, mais un maire ne me semble pas moins légitime que n'importe quel membre du conseil dont il est élu, la simplicité du mode de désignation contribuant aussi à l'acceptation de cette réforme.

J'ajoute que, sans parti pris, votre rapporteur s'est efforcé de rechercher une autre solution, permettant de tenir compte des modifications apportées par le Sénat. Fort logiquement, votre rapporteur, mesdames et messieurs les députés, vous propose de passer de vingt à cinq circonscriptions continentales, pour cette désignation au suffrage universel indirect des membres du HCFE.

La discussion générale qui va s'engager permettra également de revenir sur l'objet et le contenu du rapport annuel remis par le chef de poste aux membres des conseils consulaires. Tout ce qui peut faire vivre la démocratie locale doit être encouragé, même si beaucoup de ce qui peut être fait relèvera du domaine réglementaire.

Dernier point : la création de ces conseils consulaires permettra mécaniquement, oserai-je dire, d'élargir le collège électoral sénatorial. Il sera désormais constitué de l'ensemble des conseillers consulaires auxquels s'ajouteront les onze députés ainsi que 65 grands électeurs supplémentaires. Leur nombre s'élèvera ainsi à 520.

Alors qu'en septembre dernier, l'Assemblée des Français de l'étranger votait à l'unanimité un voeu tendant au doublement de ce collège, le Gouvernement le triple. Son avis était utile ; il a été pris en compte.

Le travail de la commission des lois, monsieur le président, monsieur le rapporteur, a permis une nouvelle évolution du projet porté par le Gouvernement. Ce dernier, je puis vous l'assurer, aborde ce débat dans le même esprit qu'au Sénat, avec disponibilité et ouverture, son seul souci étant de parvenir à la meilleure réforme possible, à budget constant cependant. J'écouterai avec la plus grande attention les interventions des députés inscrits dans la discussion.

Un mot enfin sur le projet de loi qui vous est soumis portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger, renouvelable au mois de juin prochain.

Afin de permettre l'élection de l'ensemble des conseillers consulaires avant l'été 2014, il est proposé que le mandat des conseillers de la série B – Asie et Europe – soit prolongé d'une année. Cette prorogation répond à un motif d'intérêt général, dans la mesure où ces élections n'auraient pas eu de sens car nous examinons aujourd'hui un projet portant réforme globale de la représentation des Français de l'étranger. L'idée agitée par certains selon laquelle ce projet serait inconstitutionnel sera donc aisément écartée.

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, Théophile Gautier, grand écrivain et voyageur déclarait : « Je suis un homme pour qui le monde extérieur existe. » C'est avec ce regard que je vous demande de voter le projet de loi aujourd'hui soumis à votre examen. Vous manifesterez ainsi à nos compatriotes expatriés que l'attachement qu'ils portent à la France n'a d'égal que la considération que vous avez pour eux. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Hugues Fourage, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

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Notre assemblée est aujourd'hui saisie, en première lecture et après engagement de la procédure accélérée, du projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France et du projet de loi portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger, l'AFE. L'objet de ces deux textes est d'engager une nouvelle étape dans la poursuite de la démocratisation des instances représentatives des communautés françaises vivant à l'étranger.

Déposés par le Gouvernement sur le bureau du Sénat le 20 février 2013, ces deux projets de loi ont été adoptés en séance publique par la Haute assemblée le 19 mars 2013 et par la commission des lois de notre assemblée le 3 avril dernier.

Ces deux textes visent un triple objectif.

D'abord, il s'agit de mettre fin au déficit de représentation dont souffrent, au niveau local, les Français établis hors de France.

Ce déficit explique pour une large part la désaffection continue de ces citoyens pour l'élection des conseillers à l'AFE, laquelle ne permet pas aujourd'hui d'assurer une réelle représentation de proximité des communautés françaises auprès des ambassades et postes consulaires. Les circonscriptions au sein desquelles sont élus les conseillers à l'AFE sont très vastes et recouvrent des réalités aussi bien géographiques que démographiques très inégales, certaines zones n'étant pas couvertes alors que d'autres sont, à l'inverse, surreprésentées. Afin d'assurer auprès des ambassades et des postes consulaires une véritable représentation de proximité des Français établis hors de France, les projets de loi que nous examinons créent des conseils consulaires, dont une partie des membres sera élue au suffrage universel direct.

Il s'agit ensuite de tirer les conséquences de l'instauration de onze députés élus par les Français établis hors de France.

En améliorant la représentation dont bénéficient au Parlement dans son ensemble les Français établis à l'étranger, la réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008 a fait émerger deux niveaux de représentation parfois concurrents : d'une part, les députés, d'autre part les conseillers à l'AFE. Dans cette perspective, les textes que nous examinons redéfinissent la place et les missions de l'AFE – désormais recentrée sur sa mission consultative auprès du Gouvernement – et de ses membres, afin de mieux articuler leurs interventions, sur le terrain et auprès des administrations, avec celles des députés des Français de l'étranger et de donner ainsi une nouvelle cohérence d'ensemble au dispositif de représentation des communautés françaises vivant à l'étranger.

Dernier objectif : remédier à l'étroitesse du collège électoral prévu pour l'élection des douze sénateurs représentant les Français établis hors de France.

En effet, en l'absence de toute intervention du législateur d'ici à septembre 2014, chacun des six sénateurs représentant les Français de l'étranger, dont le siège sera alors soumis à renouvellement, serait élu par à peine vingt-huit grands électeurs.

Pour remédier à cette situation, les projets de loi que nous examinons élargissent la composition du collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France en y incluant désormais, aux côtés des députés élus au niveau national par les Français de l'étranger, les conseillers et délégués consulaires qui, à l'issue de la présente réforme, seront élus en même temps, localement, au suffrage universel direct.

Le Sénat, en particulier à l'initiative de son rapporteur, M. Jean-Yves Leconte, dont je tiens à saluer le travail, a apporté de nombreuses améliorations à ces deux textes. Je souhaite pour ma part revenir sur les améliorations qui résultent des travaux de notre commission. Elles ont, à mon sens, permis de donner sa pleine mesure à cette nouvelle étape de la démocratisation de la représentation des Français de l'étranger.

Première amélioration : le changement de dénomination de l'AFE.

Afin de tenir compte du changement de composition et de rôle de cette instance représentative des Français établis hors de France, qui sera désormais recentrée sur sa mission de conseil et d'expertise transversale auprès du Gouvernement, comme la ministre l'a rappelé tout à l'heure, la commission a décidé de renommer l'AFE « Haut conseil des Français de l'étranger ».

Ensuite, la commission des lois a choisi de rétablir l'élection au suffrage indirect des membres du HCFE. À rebours du dispositif proposé par le Sénat, ces derniers seront donc élus par et parmi les conseillers consulaires, dans les trois mois suivant le renouvellement général.

Notre commission n'a pas souhaité retenir le système de bulletin de vote unique proposé par le Sénat, compte tenu du fort risque de censure constitutionnelle qu'il encourait en raison notamment de son inintelligibilité pour l'électeur et de l'atteinte qu'il portait au pluralisme et à la liberté de candidature.

Le texte adopté par le Sénat prévoyait en effet que la déclaration de candidature vaudrait simultanément pour les élections des conseillers consulaires et des conseillers à l'AFE. Ce faisant, pour déposer une candidature, il aurait été nécessaire dans certaines circonscriptions de présenter jusqu'à 112 candidats et de former des listes complètes dans l'ensemble des circonscriptions consulaires. Un candidat isolé, ne disposant pas de l'appui d'une formation politique, n'aurait eu dans ces conditions aucune chance de fédérer 112 personnes pour former une liste. Dès lors, le risque d'une censure du dispositif par le Conseil constitutionnel, en vertu des principes constitutionnels de pluralisme et d'égalité d'accès aux mandats électifs, ne pouvait être écarté.

Par ailleurs, le dispositif retenu par le Sénat n'était pas pleinement intelligible pour l'électeur : lorsque celui-ci aurait voté pour sa circonscription consulaire, il aurait dû comprendre qu'il votait, dans le même temps, pour la circonscription à l'AFE, dans un ordre différent et sans véritable connaissance de celui qu'il élirait réellement. En outre, comme les mandats de conseiller consulaire et de conseiller à l'AFE étaient liés, si une personne bien placée sur une liste pour l'AFE n'était pas élue conseiller consulaire, le premier conseiller élu à l'AFE aurait été le n° 2 de la liste. Il était par conséquent impossible pour un électeur de savoir quelles seraient les conséquences de son vote pour l'AFE, ce dernier dépendant in fine du résultat, au niveau local, d'une autre circonscription consulaire. Ces dispositions étaient dès lors de nature à porter atteinte à l'objectif à valeur constitutionnelle d'intelligibilité de la loi.

Enfin, le système retenu par le Sénat prévoyait que, si une liste pour l'AFE n'avait pas suffisamment de candidats élus conseillers consulaires, les voix bénéficieraient alors à une autre liste pour l'AFE : les voix des électeurs seraient alors reportées sur une liste pour laquelle ils n'avaient pourtant pas voté. J'y ai vu une méconnaissance pour le moins sérieuse du suffrage des électeurs et donc des exigences de clarté et de loyauté du scrutin.

Si je n'ignore pas les avantages d'une élection au suffrage universel direct des membres du Haut conseil et des conseillers consulaires, je ne peux pas pour autant, à la lumière des diverses difficultés juridiques que je viens d'exposer, souscrire au dispositif retenu par le Sénat. Au cours de mes travaux, je me suis constamment efforcé de rechercher une solution alternative qui permette de combiner d'une part l'élection au suffrage universel direct des membres du HCFE et d'autre part le cumul institutionnalisé entre le mandat de conseiller consulaire à l'échelon local et les fonctions de membre du Haut conseil à l'échelon central.

Aucune des solutions envisageables ne m'est apparue en mesure d'atteindre ce double objectif de manière satisfaisante, tant d'un point de vue juridique que budgétaire. Dans ces conditions, le rétablissement d'une élection au scrutin indirect des membres du Haut conseil s'est révélé être la solution médiane la plus raisonnable. Elle offre la meilleure sécurité juridique et permet de surcroît d'intégrer les autres améliorations apportées par le Sénat aux présents textes.

Troisième amélioration : un découpage mieux adapté des circonscriptions d'élection des membres du HCFE.

Si le nombre des circonscriptions électorales consulaires et celui des conseillers consulaires ainsi élus sont restés inchangés – 130 circonscriptions et 444 conseillers – la commission des lois a fait le choix, sur mon initiative, de ramener de vingt à cinq le nombre des circonscriptions pour l'élection des 102 membres du HCFE, afin de tirer les conséquences du rétablissement du suffrage indirect pour ce dernier scrutin. Ce découpage est le résultat d'un compromis équilibré entre le souhait formulé par certaines des personnes entendues par votre rapporteur de créer deux zones – « Europe » et « reste du monde » – et la proposition initiale du Gouvernement de seize zones géographiques cohérentes. Cette délimitation respecte en outre le ratio de représentation d'environ un élu pour 16 000 inscrits, sauf pour la circonscription de l'Asie-Océanie, mais avec un écart à la moyenne de seulement 7 %. Ces cinq circonscriptions électorales ainsi redéfinies présentent enfin l'avantage de supprimer les circonscriptions à seulement deux membres élus au scrutin de liste à la représentation proportionnelle.

Quatrième amélioration : la clarification des règles de fonctionnement et d'organisation des conseils consulaires.

Sur proposition de Pierre-Yves Le Borgn', la commission a prévu que, chaque année, l'ambassadeur ou le chef de poste consulaire présente au conseil consulaire un rapport sur la situation de la circonscription et dresse un état des lieux des actions menées dans l'ensemble des domaines entrant le champ de la compétence consultative dudit conseil : protection et action sociales, emploi, formation professionnelle, apprentissage, enseignement du français à l'étranger et sécurité. Cette présentation permettra aux conseillers consulaires d'avoir une vision globale de la circonscription et de discuter de cet état des lieux.

Cinquième amélioration : la reconnaissance du rôle majeur joué par les associations représentatives au niveau national des Français de l'étranger.

Consciente de l'importance de leur place dans l'organisation du débat public à l'étranger, la commission a adopté un amendement qui consacre leur rôle dans l'exercice des droits civiques et la participation des expatriés à la vie démocratique de la nation.

En revanche, la commission a estimé dans le même temps qu'il ne convenait pas d'autoriser les associations représentatives des Français établis hors de France à participer au financement des campagnes électorales à l'étranger. L'introduction d'une telle possibilité a été jugée trop dérogatoire aux règles légales de financement des campagnes électorales telles qu'elles sont définies pour les élections nationales et locales par la loi du 11 mars 1988, dans le souci de garantir le mieux possible la transparence des financements.

Si la loi réserve aujourd'hui aux seuls partis politiques le droit de financer les campagnes électorales, c'est qu'elle leur impose dans le même temps un certain nombre d'obligations de transparence quant aux conditions dans lesquelles ils mobilisent des fonds.

Or le texte initialement proposé par le Sénat aurait permis à des associations, qui ne sont pas soumises à ces règles, de financer des campagnes électorales sans qu'il soit pour autant possible de disposer d'informations précises sur l'origine des fonds mobilisés.

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Pour l'ensemble de ces raisons, la commission a supprimé, sur proposition de M. René Dosière, la possibilité pour les associations représentatives au niveau national des Français de l'étranger de participer au financement des campagnes pour l'élection des conseillers consulaires et des membres du HCFE.

En conclusion, les deux textes qui nous sont aujourd'hui soumis sont des textes équilibrés, qui portent une réforme ambitieuse des instances représentatives des Français établis hors de France. Si je ne doute pas que la commission mixte paritaire nous permettra, en lien avec nos collègues sénateurs, d'améliorer ces textes sur plusieurs points, je vous invite, mes chers collègues, à adopter à ce stade de nos travaux ces deux projets de loi, dans le respect des grands équilibres qui ont été définis par notre commission des lois. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

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J'ai reçu de M. Christian Jacob et des membres du groupe de l'Union pour un mouvement populaire une motion de renvoi en commission déposée en application de l'article 91 alinéa 6 du règlement, sur le projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France.

La parole est à Mme Claudine Schmid.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, par cette motion de renvoi en commission, je m'adresse à vous pour que la réforme de l'Assemblée des Français de l'étranger corresponde à notre communauté établie hors de France.

Vous l'avez bien noté, ce n'est pas une motion de rejet. En effet, une réforme est nécessaire et l'UMP se félicite qu'ensemble, nous puissions y travailler. Mais les amendements que la commission des lois a votés ont modifié fondamentalement la petite loi. Tout en respectant l'indépendance de nos travaux, le rapporteur au Sénat a fait connaître sa surprise que le texte ait été amendé à ce point.

Suite à tant de critiques, il serait sage que les membres de la commission des lois se réunissent à nouveau, d'autant que nous ne sommes pas à quelques jours près.

En effet, s'il était vraiment question d'une réforme de l'AFE, voulue par tous, il y aurait nécessité, mais pas urgence. Pour utiliser la procédure accélérée, il faut croire que l'intérêt est grand de déposer ces deux projets de loi. N'y a-t-il pas d'autres dossiers qui, eux, mériteraient la procédure accélérée ? Quelle urgence y a-t-il, si ce n'est celle de ne pas mettre en oeuvre la concertation ?

Il y a eu des consultations, mais sans concertation. Vous n'avez d'ailleurs qu'à peine évoqué ce thème, madame la ministre, au cours de votre intervention lors de la réunion de l'AFE en mars. Vous n'y avez consacré qu'une minute, durant laquelle nous avons appris : qui était le rapporteur du texte au Sénat ; les dates prévues des débats dans les deux chambres ; et que votre action politique était transversale.

Nous aurions pu mettre en oeuvre la réforme de notre représentation en poursuivant le consensus qui existait à l'AFE entre tous les conseillers et les sénateurs, consensus auquel vous et moi, madame la ministre, participions et qui nous était cher, puisque nous avons toutes les deux été vice-présidente de cette assemblée.

Cette réforme consensuelle aurait pu être valable à compter de la fin du mandat des élus de la zone A, Amériques-Afrique.

L'ensemble des membres était d'accord pour élargir le collège des grands électeurs des sénateurs des Français établis hors de France. Nous pourrions débattre et voter une loi conforme à nos attentes pour une entrée en vigueur lors des sénatoriales de 2017. À moins que la seule urgence soit d'envisager la modification politique des grands électeurs pour les sénatoriales de 2014 ?

Nous sommes donc appelés à débattre de deux projets de loi.

Le premier aura pour conséquence de prolonger à nouveau, d'un an, un mandat électoral qui avait déjà été allongé précédemment. Sur ce point, madame la ministre, nous ne partageons pas la position que vous avez tenue lors de votre intervention.

Cette prorogation viole à la fois le droit des électeurs à exercer leur suffrage et le principe de sincérité du scrutin. Après le vote de cette loi, le mandat aura ainsi été de huit ans. Pour rappel, celui du Président de la République a été raccourci de sept à cinq ans et celui des sénateurs de neuf à six ans. Plus personne n'est élu en France pour une telle durée.

S'il était accepté, votre projet augmenterait le mandat des élus d'un tiers. Il est beaucoup question de « choc de moralisation », mais où est la moralisation en l'espèce ? N'est-ce pas plutôt un petit arrangement entre amis, un non-respect du peuple par la caste politique ?

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Si aujourd'hui les élus PS venaient à voter un tel texte, ils seraient en désaccord total avec les protestations de moralisation de leurs dirigeants. Ils confirmeraient aussi l'adage : « Faites ce que je dis, pas ce que je fais. » L'UMP ne votera pas un texte entraînant la prorogation d'un tiers du mandat.

N'aurait-il pas été conforme à la Constitution de soumettre au Parlement un projet de loi proposant que le mandat des conseillers de la zone B, Europe-Asie-Océanie, élus en juin 2013 soit de trois ans et de les laisser s'exprimer ?

Vous auriez ainsi respecté le suffrage des électeurs de la zone A qui avaient donné mandat à leurs élus de les représenter jusqu'en 2017. Ainsi vous auriez évité une saisine du Conseil constitutionnel.

Avez-vous aussi mesuré les conséquences d'un tel projet de loi ? Je n'évoque que les difficultés dans lesquelles vont se trouver les postes consulaires et vos services pour organiser en juin 2014 les élections européennes et celles à l'AFE, deux élections aux modes de scrutin différents et aux listes électorales elles aussi bien différentes.

Par la loi du 15 juin 2011, le Parlement a déjà prorogé le mandat au motif que les consulats n'étaient pas en mesure d'organiser en même temps les élections législatives et celles à l'AFE. Comment pourront-ils alors organiser les élections européennes et celles à l'AFE ? Demanderez-vous une troisième prorogation ?

Comme vous le constatez, les difficultés d'une telle prorogation sont multiples et, à ma connaissance, aucune étude d'impact n'a été effectuée.

C'est donc parce qu'une autre possibilité existe que l'UMP demande un renvoi en commission.

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Ce n'est pas en commission qu'on fera avancer les choses !

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Pour ce qui est du second projet de loi, je reste tout d'abord perplexe devant le fait que vous n'ayez pas amendé le texte. En effet, il ne s'inscrit pas dans la volonté exprimée par le Gouvernement de renforcer l'expression de la démocratie de proximité telle que vous l'avez présentée en décembre dernier devant le bureau de l'AFE.

Le texte qui nous est soumis ne correspond plus au projet initial, ni à celui voté au Sénat.

Votre projet a été entièrement retravaillé et amélioré par les sénateurs, toutes tendances politiques confondues. Le texte qu'ils ont voté correspondait à une réalité, au vouloir de nos compatriotes. Il aurait même été voté par toutes les familles politiques si vous n'aviez pas inventé – écoutez bien ! – la proportionnelle dans les circonscriptions à deux sièges.

Les députés UMP étaient disposés à suivre les orientations issues du vote au Sénat. Mais si le texte qui nous est soumis maintient l'essentiel des dispositions relatives aux règles statutaires des instances représentatives des Français établis hors de France et conserve la structure formelle du projet de loi : composition, pouvoirs et rythme des sessions, quelle ne fut notre surprise de constater qu'en revanche, il transforme l'AFE en Haut conseil ! J'ai bien noté que la ministre s'en remettait à la sagesse de l'Assemblée sur ce point, ce qui est de bon augure pour le vote des amendements qui vont suivre.

Ce texte revient aussi sur l'élection au suffrage universel direct de ses membres, acquise il y a trente ans sur décision de François Mitterrand, comme vous l'avez rappelé dans votre communiqué de presse du 20 février 2013. Il modifie également fondamentalement les circonscriptions. À titre d'exemple, l'une d'elles passe de deux à quarante États.

Au vu de ces amendements de la commission des lois, nous pouvons donc estimer que nous sommes en première lecture. Une commission mixte paritaire peut en effet travailler sur la rédaction différente d'un ou de quelques articles, mais pas sur des textes antinomiques.

Pour ne citer qu'un seul exemple, prenons l'article 1er. Le changement de dénomination porte atteinte à plusieurs dispositions de lois organiques qui non seulement mentionnent expressément l'Assemblée des Français de l'étranger, mais encore lui confèrent des attributions précises, de niveau organique.

Le changement opéré par la commission des lois empiète sur les dispositions de deux lois organiques. Le Conseil constitutionnel sera sur ce point aussi appelé à se prononcer, à moins que nous ne trouvions un accord lors du vote des amendements.

En effet, il est de jurisprudence constante que le législateur ordinaire ne peut empiéter sur les compétences du législateur organique. Il ne s'agit pas là d'une simple question technique qui sera réglée ultérieurement. Le Conseil constitutionnel a jugé que des dispositions qui ont pour objet de faire une application anticipée de règles organiques ne peuvent trouver place dans une loi ordinaire.

Il en est de même de plusieurs autres articles modifiés, qui trahissent soit un non-respect des textes par la commission de lois, soit une méconnaissance des textes relatifs à la communauté expatriée – je vous laisse juges. Il s'agit de ceux qui suppriment l'élection des membres de l'AFE au suffrage universel direct pour la remplacer par une désignation par les conseillers consulaires.

Il nous restera également à étudier l'article 37. Outre la suppression des renouvellements partiels, cet article prévoit qu'il soit mis fin aux mandats en cours à compter des élections de juin 2014. Cela équivaut à une dissolution de l'AFE. Or une dissolution n'est pas prévue par la loi du 7 juin 1982, pas plus que par le décret du 6 avril 1984.

En conséquence, le groupe UMP vous invite à voter le renvoi en commission de ce texte. Ce sera tout à l'honneur de notre assemblée. Et ce vote ira dans votre sens, madame la ministre, puisque le 7 mars dernier, devant les élus à l'AFE, vous déclariez : « Les réformes institutionnelles qui touchent à notre communauté sont rares. Elles sont d'autant plus importantes. » Alors, chers collègues, faisons-les correctement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Le groupe SRC ne votera pas cette motion de renvoi en commission, qui est ici instrumentalisée afin de retarder les débats parlementaires.

En effet, le renvoi de ce texte en commission ne se justifie en rien. Je vous rappelle que le rapporteur a effectué de nombreuses auditions, avec notamment les représentants et les élus des Français établis hors de France, qu'ils soient de gauche ou de droite. Vous avez eu vous-même, madame Schmid, l'occasion d'être entendue.

Cette motion, je le répète, n'est qu'un artifice procédural pour retarder le débat. Nous n'y céderons pas car nous croyons qu'une réforme de la représentation des Français établis hors de France est nécessaire pour aller vers plus de démocratie, plus de proximité et plus de représentativité.

Le temps de l'immobilisme est dépassé. Je pense que la nécessité d'une réforme de la représentation du 1,6 million de Français inscrits au registre des Français établis hors de France est partagée sur beaucoup de bancs de l'hémicycle.

Alors, mes chers collègues, je vous invite à laisser les conservatismes et les préjugés derrière vous et à entrer de plain-pied dans ce débat, qui doit apporter à nos concitoyens vivant à l'étranger une meilleure représentation dans le souci d'une plus grande efficacité de notre pays au bénéfice de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Sur la motion de renvoi en commission, je suis saisi par le groupe socialiste, républicain et citoyen d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

La parole est à M. le rapporteur.

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Je souhaite répondre à ma collègue qu'un large consensus s'est dégagé lors de l'examen de ce projet de loi. Les concertations ont été nombreuses, puisque j'ai longuement reçu les deux associations représentant les Français de l'étranger, ainsi que l'ensemble des députés de l'Assemblée nationale représentant les Français de l'étranger – le travail s'est donc également fait avec vous.

Je suis donc surpris de vos propos, d'autant que vous n'étiez pas en commission lorsque nous y avons débattu de ce projet de loi.

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Peut-être n'avez-vous donc pas toutes les données. Vous évoquiez notamment la question de la représentation proportionnelle lorsqu'il y a deux élus. Je vous rappelle que parmi les propositions que j'ai faites à la commission figure justement la disparition de ce mode d'élection, du fait de la baisse du nombre de circonscriptions, qui passe de vingt à cinq.

Nous avons donc essayé de tenir compte de beaucoup de choses.

Pour ce qui est des modifications apportées au texte issu du Sénat, il est de tradition que nos deux assemblées travaillent sans que l'une n'exerce de tutelle sur l'autre. La commission mixte paritaire est justement faite pour rapprocher les points de vue.

Je remercie l'ensemble des collègues qui ont mené un travail approfondi en commission. Il serait dommage de ne pas aller jusqu'au bout.

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Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger

La procédure accélérée a été régulièrement engagée. Le Gouvernement a indiqué à maintes reprises les contraintes de calendrier auxquelles nous étions soumis. Souvenez-vous que l'élection sénatoriale aura lieu en septembre 2014 et qu'il faut donc que le collège électoral soit en place au plus tard au printemps 2014. Il est donc important que cette loi soit votée maintenant, afin de laisser une année entière entre son adoption et la mise en place du dispositif.

Je ne pense pas que la procédure accélérée ait entaché le débat parlementaire. Vous l'avez rappelé vous-même, madame Schmid : un grand nombre d'amendements ont été déposés. Le texte initial du Gouvernement a été profondément remanié, ce qui montre bien que la procédure accélérée n'a en rien contraint le débat parlementaire.

Ce texte est présenté dans un esprit d'ouverture. Il est très important pour nous de continuer la concertation. Vous avez dénoncé l'absence d'une telle concertation, mais je vous rappelle que c'est en septembre 2012 que j'ai annoncé cette réforme pour la première fois !

Le Gouvernement est donc bien sûr défavorable à cette motion de renvoi en commission.

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Le groupe SRC ayant déjà prononcé son explication de vote, la parole est à M. Sergio Coronado, pour le groupe écologiste.

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Je partage l'opinion d'Anne-Yvonne Le Dain : les motions de procédure comme cette motion de renvoi sont souvent des artifices pour éviter le débat. J'espère donc, chers collègues de la majorité, que vous aurez la même position jeudi prochain lors de la discussion concernant l'amnistie sociale, qui aura lieu dans le cadre de la niche du groupe GDR.

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C'est ce type de démarche, auquel certains groupes de cette assemblée nous ont parfois habitués, que nous déplorons. Quand le débat est prévu, que les parlementaires sont présents, il est utile de discuter les points qui restent en suspens ou qui nécessitent quelques approfondissements.

Certes, monsieur le rapporteur, Mme Schmid n'était pas en commission, mais j'y étais. La majeure partie des amendements qui seront débattus aujourd'hui en séance ont été déposés après l'audition de la ministre. Nous les avons étudiés aujourd'hui : entre quatorze heures quarante-deux et quatorze heures cinquante-deux… Une discussion sans aucun doute riche et fructueuse !

Je ne reprendrai pas par ailleurs les propos du président Urvoas. Je suis souvent d'accord avec lui pour regretter l'usage de la procédure accélérée : quand on est parlementaire, on préfère une procédure qui laisse du temps au Parlement. En l'occurrence, le texte issu des travaux du Sénat – je ne juge pas l'autre chambre, ni mes collègues sénateurs : nous travaillons de manière autonome – ne ressemble pas à celui qui est sorti de notre commission. En ce sens, je peux rassurer Mme Schmid : je ne vois pas comment la commission mixte paritaire pourrait trouver un compromis !

Nous aurons donc à nouveau l'occasion de débattre de ce texte. C'est pourquoi il est sain que le débat commence aujourd'hui. Il faut examiner les amendements qui ont été déposés. Après la CMP, nous aurons à nouveau l'occasion d'approfondir la question importante de la représentation des Français établis hors de France.

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La parole est à M. Thierry Mariani, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Mon intervention sera brève, car nos arguments ont été excellemment défendus par Claudine Schmid. Je veux simplement dire qu'elle n'était pas en commission parce qu'elle n'en est pas membre.

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Nous sommes tous sollicités par de multiples réunions, et je veux donc que cela figure au procès verbal : Mme Schmid n'a pas participé à cette réunion de la commission parce qu'elle n'en est pas membre.

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M. Marsaud n'en est pas membre non plus et pourtant, il était présent !

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Je mets aux voix la motion de renvoi en commission.

(Il est procédé au scrutin.)

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Voici le résultat du scrutin sur la motion de renvoi en commission :

Nombre de votants 55

Nombre de suffrages exprimés 55

Majorité absolue 28

Pour l'adoption 17

contre 38

(La motion de renvoi en commission n'est pas adoptée.)

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Dans la discussion générale commune, la parole est à Mme Anne-Yvonne Le Dain.

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C'est d'un sujet d'importance que traitons aujourd'hui. Je peux en témoigner personnellement, pour des raisons professionnelles. En tant que scientifique, j'étais fréquemment amenée à me rendre à l'étranger pour rencontrer des collègues français établis hors de France dans des laboratoires ou dans des entreprises, sur tous les continents. Ils sont principalement en Europe, bien sûr, mais aussi de plus en plus sur l'ensemble des cinq grands continents que vous avez définis, madame la ministre, comme les espaces de vote et d'organisation de la communauté des Français établis hors de France. Je peux vous dire qu'ils sont véritablement demandeurs d'une relation de proximité avec l'État français. Et qui, hors de France, représente l'État français, sinon l'ambassadeur ?

Vous avez donc, madame la ministre, rétabli dans ce texte l'idée selon laquelle la proximité est un enjeu stratégique, non seulement pour l'avenir de notre pays mais également pour celui de nos compatriotes établis à l'étranger. Ils sont au nombre de 2,5 millions, dont 1,6 million inscrits sur les listes électorales. C'est une communauté importante. C'est aussi la preuve de la vitalité de notre pays et du fait que nous autres, Français, n'hésitons pas à nous expatrier avec notre langue, notre culture, notre formation, nos talents et parfois aussi nos faiblesses ; nous n'hésitons pas à aller hors de France dire ce que nous sommes, assumer ce que nous serons et construire une économie et une société avec nos valeurs. C'est donc un moment important que nous vivons ici aujourd'hui, et je voulais en témoigner.

Une réforme importante a été réalisée il y a quelque temps. Vous le savez tous : nous avions déjà 12 sénateurs, sur 348, représentant les Français établis hors de France. Nous avons désormais 11 députés sur 577, ce qui n'est pas anodin.

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Ces députés sont élus au suffrage universel direct. C'est une grande nouveauté institutionnelle, qui impose, de fait, une transformation de cette ancienne enceinte des Français établis hors de France qu'était l'Assemblée des Français de l'étranger, pour éviter toute confusion entre cette dernière et les députés et sénateurs. Le projet de loi dont nous discutons constitue donc une clarification des rôles et des fonctions entre une représentation de niveau national, avec le Haut conseil des Français établis hors de France, et une représentation de proximité, avec les conseillers consulaires…

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…qui s'occuperont des vrais problèmes et questions auxquels sont confrontés nos concitoyens établis hors de France. Ces problèmes portent sur les grands points évoqués à l'instant par le rapporteur : la proximité et l'action sociale, l'emploi, la formation professionnelle, l'apprentissage, la sécurité et bien sûr la promotion et l'usage de notre langue…

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…qui est un patrimoine à part entière, que nous devons défendre et développer.

Entre une représentation nationale pour répondre aux besoins de la nation et une représentation de proximité pour répondre aux besoins de nos concitoyens, ces projets de loi définissent une organisation en cinq grands continents…

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Des circonscriptions autour des grands continents géographiques, c'est-à-dire de l'image que nous avons de notre planète. Avec ce nouveau concept, avec ces projets de loi dont nous discutons, nous instaurons véritablement une nouvelle manière de travailler avec et pour nos concitoyens.

Il s'agit donc d'un moment important. La France change, le monde aussi. Deux millions et demi de nos compatriotes sont établis hors de France – beaucoup en Europe, bien sûr, mais de plus en plus dans le reste du monde. Il n'y a pas si longtemps, on parlait peu de pays comme le Burkina Faso, la Malaisie ou l'Indonésie. Nous ne pensions grosso modo qu'aux grands pays de l'OCDE et, depuis une dizaine d'années, aux pays émergents ; mais tant d'autres pays sont en train de changer la face de la planète, et tant de Français y sont établis et contribuent à ces transformations !

Il était donc important d'accepter que le monde change. Il était temps que le dispositif qui représente en France les Français de l'étranger change. Madame la ministre, c'est ce que vous avez décidé d'orchestrer.

Le dispositif que nous examinons comporte un élargissement important de la base électorale des sénateurs. Nous savons que ce n'est pas simple, mais il faut le faire, parce que les parlementaires doivent représenter le peuple et la nation…

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…au Parlement, que ce soit au Sénat ou à l'Assemblée. Les députés existent, et sont élus au suffrage universel ; il faut donc également élargir la base d'élection des sénateurs. Cette disposition est nécessaire et, tout simplement, démocratique.

C'est un beau texte que vous nous offrez là, madame la ministre. C'est un beau texte sur lequel la commission des lois a travaillé, avec son rapporteur Hugues Fourage. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Madame la ministre, j'étais inquiet. Je le suis moins maintenant, parce que je vous connais et que je sais que vous êtes de bonne foi. J'ai écouté votre discours : vous avez expliqué que beaucoup de choses avaient été faites pour les Français de l'étranger, mais seulement par la gauche. Je me suis dit qu'il manquait tout de même quelques éléments à votre propos… Mais heureusement, j'ai retrouvé une page qui a forcément dû s'échapper de votre discours et où figurent les cinq points qui vous auraient permis d'être complète et parfaitement objective.

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Il est vrai qu'en matière d'objectivité, vous êtes un modèle !

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Bien sûr que la gauche a fait des choses, mais la droite aussi, et un certain nombre ! Permettez-moi de rappeler simplement ces cinq points qui manquaient dans votre énumération.

Le premier, je le rappelle au nom de mes collègues Alain Marsaud et Claudine Schmid, c'est la réforme constitutionnelle de 2008, que la gauche n'a pas votée et qui permet à onze députés des Français de l'étranger de siéger dans cet hémicycle et à 2,5 millions de nos concitoyens d'être représentés.

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C'est une avancée décisive et ma mémoire me laisse penser – mais le président de la commission des lois pourra me corriger – que vous ne l'avez pas votée.

Ensuite, c'est le gouvernement de Nicolas Sarkozy qui a instauré pour la première fois, que je sache, un poste ministériel spécifiquement dédié aux Français de l'étranger.

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Secrétaire d'État ou ministre délégué, pour avoir été les deux, je sais qu'il y a peu de différences : un ministre délégué dispose simplement d'un cabinet un peu plus nombreux – et c'est nécessaire – qu'un secrétaire d'État.

Je me souviens des remarques de M. Hamon – mais ne serait-il pas un de vos collègues, madame la ministre ? – qui trouvait que ce poste ministériel était un gadget électoral absolument inutile. Heureusement, vous avez maintenu cette réforme mise en place par la droite, et je vous en félicite. On est toujours trahi par les siens !

Troisième point : suite à la réforme constitutionnelle de 2008, onze députés représentent désormais les Français de l'étranger. C'est une leçon pour chacun : finalement, quel que soit le découpage, le suffrage universel est imprévisible ! Ou plutôt, s'il y a une vague au niveau national, elle s'observe également dans les circonscriptions des Français de l'étranger. Sur onze députés, huit ont été élus à gauche et trois à droite. La majorité de ces députés est donc représentative de la majorité du moment.

J'en arrive à la quatrième modification que vous avez oubliée, madame la ministre, et je pense que M. Urvoas vous l'aurait rappelée si je n'avais pas retrouvé cette page car c'est une réforme que nous avons réalisée ensemble, alors que nous étions députés moi de la majorité et lui de l'opposition. Ensemble donc, nous avons déposé une proposition de loi qui permet à nos concitoyens français de l'étranger hors d'Europe de voter aux élections européennes. Cette proposition de loi consensuelle a été reprise par le Gouvernement.

La cinquième action de la précédente législature, et elle mérite d'être signalée, est un effort sans précédent pour les bourses. Il s'agit de la mise en place contestée – j'y reviendrai tout à l'heure – de la prise en charge de la scolarité au lycée.

Bref, je tenais à lire cette page qui a échappé de votre main, madame la ministre, et qui, ajoutée à votre discours, brosse un panorama honnête et complet de ce que la gauche et la droite ont fait pour une meilleure représentation des Français de l'étranger.

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Je crois que c'est nécessaire. Que les résultats des dernières élections permettent une représentation de la gauche et de la droite est à mon avis, pour les Français de l'étranger, quelque chose de salutaire.

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Sur ce sujet, il est temps d'en finir avec le manichéisme qui avait cours à une époque. Les Français de l'étranger ne sont ni de gauche, ni de droite, ils sont comme les autres Français : quand il y a une vague de gauche, ils sont à gauche et quand il y aura une vague de droite, j'espère qu'ils seront à droite !

Ce sont des concitoyens qui ne doivent pas être oubliés : je me félicite donc de l'existence de ces projets de loi. Il y a sincèrement urgence sur ce texte, mais nous avons eu l'impression que pour la majorité, l'urgence n'était que dans les mots. Heureusement que le mariage homosexuel n'a pas été suivi d'un autre texte qui aurait repoussé ces projets de loi aux calendes grecques ! Nous devions en effet nous réunir il y a un mois sur ce sujet, et nous ne le faisons finalement qu'aujourd'hui.

C'est la première fois qu'un texte traite spécifiquement des Français de l'étranger dans cette législature, mais ce n'est pas la première fois que l'on en parle.

Je reviendrai sur les détails du texte durant le débat. Mais, je vous rassure, je serai bref, Claudine Schmid ayant brillamment exposé les enjeux du projet.

Depuis onze mois, la situation des Français de l'étranger a été évoquée à plusieurs reprises dans l'hémicycle, notamment en juillet dernier. La première mesure qui fut prise alors a consisté à …

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…à soumettre les revenus immobiliers à la CSG et la CRDS. C'est une initiative marquante par son injustice.

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Grâce à votre gouvernement, pour la première fois, des concitoyens contribuent à une prestation sociale dont ils ne sont pas bénéficiaires ! Les Français de l'étranger qui ne cotisent pas ne bénéficient en effet pas du même régime social que nos compatriotes de métropole. Mais grâce à vous, ils vont quand même cotiser à la CSG et à la CRDS !

Je me souviens que le ministre du budget de l'époque, dont je ne citerai pas le nom, m'expliquait qu'il fallait sévir contre tous ces Français de l'étranger qui allaient « planquer » leurs capitaux… En tant que président de la commission des finances, il avait proposé de soumettre les Français de l'étranger à une imposition spécifique – et la CSG et la CRDS n'étaient qu'une première étape ! Quand on connaît la suite, l'histoire prend une dimension freudienne… C'était en tout cas plus l'attitude de quelqu'un qui cherche à expier sa faute cachée que d'un ministre responsable.

L'autre mesure qui a touché les Français de l'étranger fut la suppression du dispositif de « prise en charge » des frais de scolarité – la PEC. Je le regrette, car cela représentait un réel progrès, mais je ne vous condamne pas car vous aviez annoncé cette suppression tout au long de la campagne électorale. En revanche, vous n'aviez pas précisé que le dispositif serait supprimé dès l'été. Un certain nombre d'élus, de gauche comme de droite, se sont élevés contre cette mesure précipitée qui mettait en difficulté les familles, forcées d'acquitter au retour des vacances des frais de scolarité non prévus.

Surtout, vous n'avez pas tenu une promesse ! Le 10 juillet 2012, à Londres, François Hollande déclarait que les sommes économisées par l'abandon de la règle de la gratuité seraient entièrement investies dans le mécanisme des bourses.

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On aurait alors dû retrouver 125 millions d'euros dans le budget, correspondant aux bourses et à la PEC version Sarkozy. Or il n'y a que 110 millions, madame Lemaire.

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Les chiffres, vous les manipulez. Il est vrai que la gauche fait preuve d'une imagination extraordinaire en matière de vocabulaire. Dès qu'elle utilise un mot compliqué d'ailleurs, il faut se demander où est le mistigri…

L'expression en vogue donc, c'est le triennum. À droite, on est idiot, on n'avait pas compris que la somme serait rétablie dans le triennum ! Pendant trois ans, la somme ne sera pas rétablie telle qu'elle existait. Dès cette année, la baisse de la somme totale est de 12,5 %. C'est la première fois…

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Non, et vous le savez très bien ! C'est la première fois depuis des années que le budget d'aide à la scolarité directe pour les Français de l'étranger diminue. Vous pouvez toujours mettre en avant que jamais les bourses n'ont été aussi importantes, ce qui est vrai, mais vous oubliez de dire que la promesse de François Hollande le 10 juillet 2012 à Londres consistant à reporter l'intégralité des sommes n'a pas été tenue !

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Le 19 juillet dernier, vous avez préféré faire un cadeau aux sans-papiers…

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…en supprimant la franchise et faire en sorte qu'ils ne paient pas l'AME.

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Le vôtre, c'est de faire des cadeaux aux riches.

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Le 19 juillet en tout cas, les Français de l'étranger ont vu qu'il valait mieux être étranger et sans-papiers que Français de l'étranger. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Le rappel du contexte n'était pas inutile !

Vous avez d'ailleurs beaucoup oeuvré pour faire en sorte que de plus en plus de Français partent pour l'étranger. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Tous ceux qui veulent investir ou entreprendre en France se disent qu'il vaut mieux, hélas, tenter cette expérience à l'étranger !

Pour ce qui est des textes donc, vous avez décidé d'étendre la base sénatoriale pour l'élection des sénateurs. C'est une bonne chose. Vous avez souhaité non la doubler, mais la tripler et cela va dans le bon sens. Nous ne pouvons qu'y souscrire.

En revanche, j'espérais que le texte permettrait de rapprocher la représentation électorale dans l'ancienne AFE. Or, le vote par continent contribuera à l'éloigner. Il y aura des listes par partis politiques, ce qui est logique pour les continents, mais les petits pays ne seront jamais représentés. Dans ma zone, je crains que seuls deux ou trois grands pays ne soient représentés dans les assemblées, alors que le découpage permettait aux petits pays de l'être. Mais nous en discuterons plus loin.

Je vous donne donc quitus pour l'élargissement du corps électoral mais pour ce qui est de la liste, on sait très bien qu'on y fera figurer les pays qui représentent le plus d'électeurs et que les pays qui en représentent un peu moins risquent de disparaître de l'AFE – ou quel que soit le nom qu'on lui donne. C'est dommage. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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Après la réforme constitutionnelle de 2008 – M. Mariani a rappelé que la majorité d'aujourd'hui ne l'avait pas votée, mais s'en félicite aujourd'hui – qui prévoyait la mise en place des onze députés élus des Français de l'étranger qui siègent désormais à nos côtés, les textes dont nous sommes aujourd'hui saisis proposent de réformer notre système de représentation, avec l'objectif ambitieux d'engager une nouvelle étape dans la démocratisation de la représentation des Français de l'étranger.

Rappelons avant tout que ce système est le résultat d'une évolution historique qui s'est peu à peu inscrite, depuis 1948, dans le sens d'une démocratisation constante. Avec une institution spécifique, l'Assemblée des Français de l'étranger, avec une présence désormais assurée au sein de nos deux assemblées, ce système peut faire figure de modèle en Europe.

Pour autant, personne ne le contestera, la représentation des quelque 2,5 millions de nos compatriotes établis hors de France est encore perfectible. Souffrant d'un déficit de démocratie, marqué par un abstentionnisme électoral élevé, un manque de notoriété et de visibilité, notre système de représentation ne recueille qu'un faible intérêt des communautés françaises.

Partant de ces constats, nous partageons a priori les objectifs de ces deux projets loi : mettre fin au déficit de représentation dont souffrent, au niveau local, les Français établis hors de France, améliorer la représentation dont bénéficient, au Parlement dans son ensemble, nos compatriotes vivant à l'étranger, et remédier à l'étroitesse du collège électoral pour l'élection des douze sénateurs.

Nous devons parachever ce système pour assurer au mieux la représentation de nos concitoyens. En revanche, une telle réforme ne pourrait s'en tenir à une modification des modes de scrutin, à un affaiblissement du rôle de l'assemblée des Français de l'étranger, sans une évaluation préalable et approfondie des insuffisances du système de représentation des Français de l'étranger.

Or les solutions qui nous sont proposées s'apparentent, à l'instar notamment mais pas seulement du récent projet de loi sur les conseillers territoriaux, à un énième tripatouillage électoral, à une énième modification des modes de scrutin, sans réelle prise en compte des véritables enjeux et sans vison globale.

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En premier lieu, afin d'assurer une véritable représentation de proximité des Français établis hors de France, le projet de loi prévoit de créer des conseils consulaires auprès de chaque ambassade et de chaque poste consulaire, composés notamment de 444 conseillers consulaires.

Tout d'abord, il convient de souligner que le fait de multiplier ainsi le nombre d'élus se traduira inévitablement, à budget constant, par une importante diminution des moyens qui leur seront alloués. La création de ces postes supplémentaires ne saurait suffire à favoriser l'émergence d'élus de proximité s'ils ne sont pas dotés d'un réel pouvoir décisionnel. Or le texte prévoit de donner aux conseils consulaires un rôle uniquement consultatif, sans aucune compétence nouvelle : ils seront chargés de formuler des avis sur les questions consulaires ou d'intérêt général, et pourront être consultés sur des questions aussi vastes et imprécises que la protection et l'action sociale, l'emploi ou encore l'enseignement… On ignore tout des attributions, de l'organisation et du fonctionnement, qui ne seront précisés qu'ultérieurement par décret.

De toute évidence, ces dispositions risquent de donner naissance à des élus isolés, dont le rôle sera cantonné à une participation plus honorifique qu'efficace et concrète aux conseils consulaires.

Quant à leur représentativité, elle ne sera guère améliorée : le nombre de conseillers consulaires pourra varier de 1 à 9 suivant les circonscriptions électorales. Tandis que les communautés concentrant les plus fortes populations d'expatriés continueront d'être surreprésentées, les plus petites d'entre elles, qui auraient parfois davantage besoin de représentants élus, n'en compteront qu'un seul.

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Aucun, dans le pire des cas.

En second lieu, le texte propose de rétablir une cohérence entre les deux niveaux de représentation des Français établis hors de France, députés et conseillers à l'Assemblée des Français de l'étranger, en recentrant l'AFE, rebaptisée par notre commission Haut conseil des Français de l'étranger, sur sa mission consultative auprès du Gouvernement.

En d'autres termes, sous prétexte de tirer les conséquences de l'instauration, par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, de onze députés élus par les Français de l'étranger, on privera cette assemblée représentative – car démocratiquement élue – de ses prérogatives actuelles.

En outre, il est prévu de modifier le mode de désignation des conseillers au Haut conseil des Français de l'étranger. Mais une telle réforme sera vaine si elle s'accompagne d'un affaiblissement des compétences de cette institution.

En réalité, au lieu de rapprocher le rôle des élus des Français de l'étranger de celui des élus en France, au lieu d'améliorer un système dont la qualité est reconnue à travers l'Europe, on choisit de réduire les capacités d'action de cette assemblée, laissant ainsi planer le doute sur une éventuelle suppression pure et simple de cette institution spécifique de représentation.

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Enfin, le projet de loi entend élargir la composition du collège électoral des sénateurs représentant les Français établis hors de France. Ces derniers seraient élus par un collège électoral composé des onze députés élus par les Français de l'étranger, des conseillers consulaires ainsi que, de manière inédite, de délégués consulaires, en vue de corriger les déséquilibres démographiques. Cet élargissement peut être envisageable – la commission Jospin avait d'ailleurs fait état d'une « étroitesse » – mais la solution préconisée est insuffisante. Conjuguée à des mesures inadaptées, elle ne permettra pas d'assurer une représentation de proximité des Français de l'étranger.

En définitive, le groupe UDI considère cette réforme comme une occasion manquée. Elle aurait pu être l'occasion d'améliorer un système dont la qualité est reconnue, je le souligne à nouveau, par nos voisins européens. Elle aurait pu être l'occasion de renforcer les compétences des élus locaux des Français de l'étranger, d'améliorer le mode d'exercice de leurs mandats. Au lieu de cela, ces deux projets de loi ne font qu'apporter des solutions hâtives à des problèmes pourtant bien réels. Ils multiplient les élus dont nous savons qu'ils disposeront de compétences et de moyens très réduits. Ils bouleversent une fois encore les calendriers électoraux et les modes d'élections.

Pour l'ensemble de ces raisons, le groupe UDI votera contre le projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France et bien sûr contre celui qui en découle et qui prévoit la prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, la représentation des Français de l'étranger a une longue histoire – moins polémique et moins partisane que ce que j'ai pu entendre à cette tribune – et dont la dernière étape a été l'élection de onze députés représentant les Français de l'étranger en juin dernier.

La participation à la vie démocratique de nos concitoyens établis hors de France s'est d'abord traduite par la création d'une instance spécifique dans l'immédiat après-guerre : le Conseil supérieur des Français de l'étranger, institué par décret en 1948. Sa mission se cantonnait alors à émettre des avis sur les questions et les projets soumis au Parlement par le ministre des affaires étrangères.

Le Conseil supérieur des Français de l'étranger disposait de pouvoirs restreints. Il était, pour l'essentiel, une assemblée de notables dans son recrutement comme dans sa composition : y siégeaient en effet les conseillers de la République chargés de représenter les Français de l'étranger, le président et le directeur de l'Union des Français de l'étranger, le président de la Fédération nationale des anciens combattants résidant hors de France, le président de l'Union des chambres de commerce françaises à l'étranger et le président de la Fédération des professeurs français résidant à l'étranger.

Seuls vingt de ses membres devaient être élus afin de représenter les organismes français de l'étranger, selon des conditions strictes déterminées par arrêté ministériel.

La composition de l'actuelle Assemblée des Français de l'étranger, avec notamment la distinction entre membres de droit, personnalités qualifiées désignées par le ministre et membres élus, est d'une certaine façon un vestige de cette époque.

En 1948, la loi relative à l'élection des conseillers de la République prévoit que trois conseillers représenteront ces Français, élus par les députés de l'Assemblée nationale au scrutin majoritaire à deux tours parmi neuf candidats présentés par les organismes français de l'étranger. Sept ans plus tard, les membres élus du Conseil supérieur des Français de l'étranger sont autorisés eux aussi, enfin, à présenter des candidats.

L'article 24 de la Constitution de 1958 confirme la représentation des Français de l'étranger au Sénat, élus par le Conseil. Mais il faudra attendre le premier gouvernement de gauche de la Ve République, avec l'accès au pouvoir de François Mitterrand, pour que l'étape de la démocratisation soit véritablement franchie.

En 1982, par décret, le Gouvernement prévoit que les membres élus du Conseil supérieur des Français de l'étranger le soient désormais au suffrage universel direct, sur la base du scrutin de liste proportionnel. Ces membres élus sont désormais les seuls à participer à l'élection des sénateurs. Ces règles sont ensuite validées par la loi du 7 juin 1982.

En 1983, la loi dispose que les sénateurs sont élus au scrutin proportionnel de liste, par un collège électoral composé des seuls membres élus du Conseil supérieur. Les sénateurs représentant les Français de l'étranger sont depuis cette époque au nombre de douze.

La démocratisation de l'instance s'est accentuée, et sa place dans l'espace public a pris de l'ampleur : à partir de 1984, le Conseil supérieur est représenté au sein du Conseil économique et social, de la Caisse des Français de l'étranger, du Conseil pour la protection sociale des Français de l'étranger, de l'Agence française pour l'enseignement à l'étranger ainsi que dans des organismes consulaires et dans les commissions locales.

Si l'on étend, en 1986, le mode de scrutin majoritaire à un tour aux circonscriptions élisant jusqu'à quatre membres, la réforme de 1990 fait passer le nombre d'élus à cent cinquante, pour désormais six ans, ce qui constitue un réel renforcement de la fonction.

En 2003, une révision constitutionnelle donne force équivalente aux instances représentant les Français de l'étranger et aux collectivités territoriales, conduisant le Conseil supérieur des Français de l'étranger à proposer d'être renommé « Assemblée des Français de l'étranger », ce qui fut fait en 2004.

En 2005, la réforme démocratique du système est achevée par une normalisation des listes électorales, désormais listes consulaires établies pour l'élection du Président de la République.

La révision de 2008 introduit enfin la nouvelle fonction de député des Français de l'étranger dans le corps électoral des sénateurs.

Comme vous le voyez, d'un conseil de notables, nous en sommes donc arrivés à une assemblée élue ; d'un établissement de nature réglementaire, nous sommes parvenus, grâce aux révisions constitutionnelles de mars 2003 puis de juillet 2008, à une reconnaissance constitutionnelle. Environ 2,5 millions de Français établis hors des frontières de notre pays bénéficient ainsi d'une citoyenneté pleine et entière.

Le développement des moyens de communication, l'essor de la mobilité, la mondialisation, doivent nous conduire à toujours mieux intégrer nos concitoyens expatriés à la vie politique et démocratique de notre pays.

Qu'ils soient établis en Europe, pour la plupart, en Amérique du Nord, au Moyen-Orient, en Afrique ou en Amérique latine, ces Français sont partie prenante de la nation.

Véritables acteurs de l'influence et du rayonnement de la France, ces Français établis hors de nos frontières nous représentent. Ils sont aussi, d'une certaine manière, un visage de la mondialisation : celui du cosmopolitisme, si précieux en ces temps de repli et de nationalismes exacerbés. Plus de la moitié de ces Français est binationale. Leur attachement à la France est profond, et leur volonté d'exercer pleinement leur citoyenneté est totale.

Le projet de loi dont nous discutons aujourd'hui devrait donc constituer le parachèvement de la démocratisation progressive de l'instance représentant les Français de l'étranger.

Il aurait dû, pour cela, procéder d'une vision claire, partagée, des objectifs de cette réforme ; et c'est sans doute là que le bât blesse. Autant le texte portant prorogation du mandat des conseillers ne pose aucune difficulté, autant le texte portant réforme de la représentation suscite quelques débats.

Si la représentation au plus près des populations, avec la mise en place de conseillers consulaires, et l'élargissement du corps électoral des sénateurs sont autant de points d'accord, le reste du texte est discutable.

La mise en place d'un réseau de conseillers consulaires concrétise l'idée d'une démocratie de proximité, et c'est une bonne chose. Elle constitue une avancée démocratique aussi bien qu'une clarification du rôle des instances au niveau consulaire. Mais votre projet de loi, madame la ministre, est un vrai caméléon : à chaque étape du processus parlementaire, il s'est transformé, son point d'équilibre s'est déplacé.

Vous semblez avoir hésité : fallait-il mettre fin à l'Assemblée des Français de l'étranger, alors que conseillers consulaires, sénateurs et députés peuvent, selon certains, faire l'affaire ? Fallait-il s'engager dans l'amélioration et le renforcement d'une assemblée dont le fonctionnement doit être transformé et amélioré ? Ce point de vue se défend également.

Il faut toutefois bien considérer que toute proposition revenant à la fois sur les compétences et sur la dénomination de l'Assemblée des Français de l'étranger, aujourd'hui transformée en Haut conseil, sera perçue, que vous le vouliez ou non, comme un réel retour en arrière.

Les amendements que j'ai déposés défendent la vision d'une assemblée représentative, élue au suffrage universel direct par scrutin de liste, ainsi que cela a été proposé tant par le Sénat que par l'Assemblée des Français de l'étranger elle-même.

Pour le député des Français établis hors de France que je suis, le travail avec les élus de l'Assemblée des Français de l'étranger a été précieux et indispensable, leur connaissance du terrain a constitué une richesse et, indépendamment des appartenances partisanes, leur légitimité et la mienne se sont complétées.

Je propose également, dans le même esprit, de conserver la dénomination d'« Assemblée des Français de l'étranger », qui correspond mieux à une assemblée de représentants élus : on ne parle plus d'un collège de notables.

Enfin, les errements sur la délimitation des circonscriptions électorales prouvent que le temps de la réflexion, de la concertation et de l'élaboration n'a pas suffi.

Pour être franc, la logique du découpage proposé par le rapporteur, et que vous avez accepté, méconnaît tant la réalité de la représentation des Français établis hors de France que la logique territoriale introduite par l'élection des députés des Français de l'étranger.

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En multipliant les circonscriptions, vous brouillez les pistes, vous affaiblissez l'acquis et le résultat sera malheureusement une désaffection électorale, que vous regretterez sans doute ensuite.

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La démocratisation de l'Assemblée des Français de l'étranger doit enfin s'effectuer dans le cadre d'une démocratie exemplaire. Pour cela, il faut limiter les mandats dans le temps, établir des règles plus claires sur l'usage des listes, notamment électroniques, clarifier les règles du financement des campagnes.

Je crains en effet que le texte issu de nos travaux, si différent, pour ne pas dire si contraire à l'esprit et à la lettre de celui issu du Sénat, ne conduise à une situation de confusion pour nos compatriotes. J'espère que nos travaux démentiront cette crainte.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, les deux projets dont nous sommes saisis, après engagement de la procédure accélérée, ont pour objet, je cite notre collègue Fourage, « d'engager une nouvelle étape dans la poursuite de la démocratisation des instances représentatives des communautés françaises vivant à l'étranger ».

Plus prosaïquement, il s'agit de tirer les conséquences de l'instauration, par la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, de onze députés élus par nos compatriotes établis à l'étranger, et de l'accentuation des inégalités de leur représentation au sein de l'ensemble du Parlement français qui en résulte directement. L'objectif est également de proroger d'un an le mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.

Dans l'urgence, alors que l'élection des conseillers de la série B devait avoir lieu en juin 2013 – la loi du 15 juin 2011 avait déjà reporté d'un an, de juin 2012 à juin 2013, le mandat de l'ensemble des conseillers, pour cause d'élections présidentielle et législatives –, le projet de loi n° 900 prolonge encore d'un an le mandat de ces conseillers, dans l'attente de la mise en place de la réforme de l'Assemblée des Français de l'étranger, objet du second texte de loi – Assemblée des Français de l'étranger qui se nommera désormais « Haut conseil des Français de l'étranger », après avoir remplacé le « Conseil supérieur des Français de l'étranger ».

Ce nouveau Haut conseil, plus autonome, à l'effectif resserré, aux fonctions mieux définies, devrait donner une mission claire à cette instance de représentation consultative, dont l'utilité a pu être discutée et la pérennité remise en question par l'institution, aux côtés des douze sénateurs, des onze députés représentant les Français vivant à l'étranger.

Le choix a donc été de maintenir cette instance représentative. Le nombre de ses membres passera de cent quatre-vingt onze à cent deux, alors que le texte initial du projet de loi prévoyait un effectif de quatre-vingt un membres.

Si la commission des lois a suivi le Sénat qui, par un amendement de notre collègue Catherine Tasca, avait augmenté sensiblement le nombre de membres du Haut conseil, elle a préféré ramener le nombre de circonscriptions à cinq, au lieu des vingt votées par la Haute assemblée, tirant ainsi les conséquences du rétablissement, heureux et logique, du suffrage universel indirect pour l'élection des membres.

Le ratio de représentation d'environ 16 000 inscrits sur les listes consulaires par élu au Haut conseil, pour l'ensemble des cinq continents correspondant à chacune des circonscriptions, peut être considéré comme satisfaisant.

La situation sera plus satisfaisante qu'aujourd'hui, même si, selon le constat dressé dans l'exposé des motifs du projet de loi, le déficit de représentativité au niveau local du dispositif de représentation des Français hors de France risque de perdurer avec ces nouvelles dispositions.

Cependant, et dès lors que le Gouvernement se propose de faire des conseillers consulaires le corps électoral des sénateurs représentant les Français de l'étranger – la faiblesse du corps électoral de nos collègues sénateurs représentant nos compatriotes à l'étranger, de l'ordre de quelques dizaines d'électeurs, a été maintes fois soulignée –, le dispositif permettra une amélioration substantielle du rapport de représentativité grâce à l'élection de délégués consulaires membres du collège électoral des sénateurs.

Le problème du chevauchement des circonscriptions nées du présent texte et de celles qui résultent du tableau actuel, présidant à l'élection de nos collègues députés des Français de l'étranger, sera abordé plus tard.

Comme le précise l'étude d'impact, la question d'un éventuel redécoupage des circonscriptions législatives pour l'élection des députés par les Français établis hors de France sera examinée ultérieurement par le Gouvernement. Est-ce à dire que le Gouvernement entend fixer le nombre des circonscriptions législatives au même niveau que celui des circonscriptions sénatoriales, s'agissant des Français de l'étranger ?

L'on ne peut estimer que la représentation de nos compatriotes établis hors de France soit satisfaisante. Issue de réformes successives, dont la dernière en date, la création de députés des Français de l'étranger en 2008, nous avait retenus de longs moments dans cet hémicycle, ainsi que cela a été rappelé tout à l'heure, cette représentation comporte désormais plusieurs étages : l'échelon local formé par quatre cent quarante-quatre conseillers consulaires élus dans cent trente circonscriptions ; l'échelon central formé par cent deux conseillers consulaires élus dans cinq circonscriptions, membres du Haut conseil ; et l'échelon national, formé des douze sénateurs et des onze députés des Français de l'étranger.

Avec cet ensemble, la France fait figure d'exception quand d'autres pays, nations traditionnellement d'émigration plus que d'immigration, se contentent d'un ou de deux échelons. Pourtant, malgré ce maillage, la participation électorale est faible et la cohérence de certaines de ces institutions peut poser question.

Certains de nos collègues, commissaires aux lois, se sont posé la question de l'utilité des instances représentatives des Français de l'étranger. N'est-il pas encore abusif de parler de démocratie de proximité à l'échelle du monde entier où nos compatriotes sont répartis ? Les conseillers consulaires auront-ils les moyens d'être ce relais local utile à nos collègues parlementaires, ainsi qu'à nous tous, qui sommes députés de la nation avant d'être les représentants d'un territoire ? Cette acception de la nation, concept unifiant du peuple français, communauté de choix telle que l'a théorisée Renan lors de sa célèbre conférence à la Sorbonne en 1884, prend ici toute sa signification. Nous représentons, nous aussi, les Français de l'étranger au même titre que nous représentons les électeurs métropolitains.

Nous pourrons donc juger de l'efficacité du maillage territorial ainsi mis en place. Ne préjugeons pas de l'avenir et donnons leur chance au futur Haut conseil des Français de l'étranger et aux conseillers consulaires. Qui peut le plus peut le moins : l'augmentation du nombre de grands électeurs composant le collège électoral des sénateurs des Français de l'étranger est encourageante.

Madame la ministre, les membres du groupe RRDP voteront le projet de loi.

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Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, plus de deux millions de citoyens français ont fait le choix de vivre à l'étranger.

Malgré l'éloignement, nos compatriotes expatriés ont le droit de participer à la vie politique du pays. La nation est un « vouloir vivre ensemble » qui fait fi des frontières et des distances. Il était donc légitime d'accorder aux Français de l'étranger une instance de représentation démocratique, qui défend les intérêts des expatriés, relaie leurs préoccupations auprès des pouvoirs publics et donne son avis sur les grandes orientations politiques du pays.

C'est ainsi que fut créé, dès 1948, le Conseil supérieur des Français de l'étranger, remplacé en 2004 par l'Assemblée des Français de l'étranger.

Les deux projets de loi dont nous discutons aujourd'hui, dans le cadre d'une discussion commune, visent à modifier le mode de représentation des Français de l'étranger, pour y introduire à la fois plus de proximité et de démocratie.

Le premier projet de loi qui nous est soumis proroge le mandat des membres de l'AFE jusqu'en 2014 pour les élus de la zone B, c'est-à-dire de l'Europe, de l'Asie et du Levant. Ce texte ne pose pas de problèmes particuliers dans la mesure où il s'agit d'une simple modification du calendrier juridique permettant de prendre en compte les dispositions de la réforme discutée aujourd'hui.

La modification du mode de représentation de nos compatriotes expatriés était devenue une nécessité. En effet, le découpage actuel de l'Assemblée des Français de l'étranger en cinquante-deux circonscriptions était inadapté. Les zones géographiques retenues étaient à la fois peu cohérentes et trop étendues, ce qui nuisait forcément à la représentativité des Français établis hors de France.

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Le manque de proximité, lié notamment aux conditions géographiques, était un défaut clairement identifié du système en place jusqu'à maintenant et qui, assurément, n'était pas un gage de vitalité démocratique. Il suffit de voir les taux d'abstention particulièrement élevés des élections des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger pour s'en rendre compte.

Aussi, la création par le présent projet de loi de conseillers consulaires semble aller dans le bon sens. Au nombre de 444, ces conseillers élus au suffrage universel représenteront les Français de l'étranger sur une base territoriale consulaire. Ils seront chargés de relayer les préoccupations des Français de leur circonscription et d'élire en leur sein les élus qui siégeront à l'Assemblée des Français de l'étranger.

En théorie, cette nouvelle catégorie d'élus permettra de restaurer un lien de proximité entre les expatriés et leurs représentants. Le découpage des circonscriptions sur la base du consulat semble pertinent puisqu'il s'agit de l'administration référente pour la plupart des expatriés. Ce découpage permet en outre de répondre aux besoins spécifiques de nos citoyens, nécessairement différents selon qu'on habite à New York, Brasília ou Alger.

Les conseillers consulaires sont présentés comme des interlocuteurs privilégiés auprès des différentes administrations, services consulaires comme services diplomatiques.

Pour autant, si une réforme est nécessaire, il n'en reste pas moins que le nouveau mode de représentation des Français établis à l'étranger n'est pas sans susciter un certain nombre d'interrogations.

Tout d'abord, on ne peut qu'être frappé par la complexité du système d'élection de l'Assemblée des Français de l'étranger, qui combine à la fois le suffrage universel direct et indirect. Il y a fort à parier que les électeurs auront bien du mal à s'y retrouver dans ce maquis. Difficile, dans ces conditions, de ramener nos compatriotes expatriés vers le vote.

La réforme proposée par le Gouvernement aurait sans doute gagné à plus de simplicité. Par ailleurs, je déplore que les instances de représentation des Français de l'étranger soient limitées à un simple pouvoir consultatif n'ayant aucun véritable pouvoir de décision.

Les conseillers consulaires peuvent certes être consultés par les représentants de l'État, ambassadeurs et consuls, mais sans qu'aucune garantie vienne véritablement encadrer cette mesure. Pourtant, il semblerait logique d'impliquer les représentants des citoyens français lorsque des décisions importantes, qui intéressent directement nos compatriotes expatriés, sont mises en oeuvre par les représentants de l'État.

Prenons un exemple concret. L'ambassadeur de France à Berlin vient d'annoncer par voie de presse la fermeture de l'Institut français pour raisons budgétaires et le rapatriement de ses activités au siège de l'ambassade de France. Une décision d'une telle ampleur mériterait, à mon sens, une large consultation des élus représentants les Français établis en Allemagne. Or l'alinéa 2 de l'article 2 se borne à déclarer que : « Les conseils consulaires peuvent être consultés sur toute question concernant les Français établis dans la circonscription et relative à la protection sociale et à l'action sociale, à l'emploi, à la formation professionnelle et à l'apprentissage, à l'enseignement français à l'étranger et à la sécurité. »

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Dès lors, il n'est pas certain que le présent projet de loi permette plus de consultation, plus de démocratie dans de telles situations qui touchent directement à la vie quotidienne de nos compatriotes expatriés.

J'en viens maintenant à la question de la représentation des Français de l'étranger au Parlement qui n'est pas sans appeler un certain nombre de remarques.

L'élargissement du collège électoral pour l'élection des sénateurs était certes nécessaire. Comment se prévaloir d'une légitimité démocratique lorsque les sénateurs sont élus par un collège de grands électeurs composé de 155 membres seulement ?

Le passage à un corps électoral de 520 grands électeurs n'est pourtant qu'une avancée a minima. L'introduction d'un vote à la proportionnelle aurait été en revanche la solution idoine pour donner plus de légitimité démocratique aux élus et garantir une meilleure représentation de l'ensemble des tendances politiques.

Il en va de même pour les députés de l'étranger dont les circonscriptions gigantesques ont peu de sens. Un de mes collègues qui s'est exprimé avant moi l'a très bien démontré. Le taux moyen de participation d'environ 20 % montre bien que cette solution n'est pas la bonne. Comment voulez-vous mobiliser lorsque des circonscriptions sont à cheval sur plusieurs pays, voire plusieurs continents ? Une élection à la proportionnelle aurait donné une tout autre visibilité au scrutin et accordé une meilleure légitimité démocratique aux élus.

D'une manière générale, le mode de représentation des Français de l'étranger symbolise bien ce qu'est la ve République, à savoir un système politique qui favorise un bipartisme asséchant, avec des institutions taillées sur mesure pour les deux partis majoritaires. Il est temps de changer de logiciel et d'instaurer cette vie République, sociale et écologique, pour laquelle le Front de gauche milite depuis longtemps.

Outre le vote à la proportionnelle, une autre réforme promise par le Gouvernement se fait toujours attendre : celle du droit de vote des étrangers.

Comment accepter que des personnes exilées fiscales dont le lien avec la France est parfois pour le moins distendu puissent participer à la vie démocratique de notre pays alors que l'on refuse toujours ce droit à des gens qui vivent depuis des décennies en France, y travaillent et y payent leurs impôts ?

La France est en retard sur cette question. Des pays comme la Suède, l'Irlande, les Pays-Bas, la Belgique ou la Slovénie ont déjà instauré le droit de vote des étrangers. Qu'attend le Gouvernement pour envoyer un signal positif en direction de tous ces hommes et ces femmes qui souhaitent enfin pouvoir voter ? Aujourd'hui, les dernières déclarations du chef de l'État nous font craindre un renoncement à l'égard de ce qui était l'un des principaux engagements pris par le chef de l'État lors de la campagne électorale.

Pour en revenir au coeur de notre sujet, les députés du Front de gauche, en lien avec ses représentants dans les circonscriptions de l'étranger, saluent la volonté de réformer le système de représentation des Français de l'étranger qui n'était assurément pas adapté à une bonne expression démocratique de nos concitoyens installés à l'étranger. Cependant, nous déplorons à la fois le manque d'ambition de ce texte et sa complexité.

Enfin, il ne faut pas oublier que cette réforme a été financée à moyens constants, dans un contexte d'austérité qui réduit de manière drastique les moyens de la France à l'étranger, avec des budgets en baisse depuis plusieurs années.

Malgré des améliorations par rapport à la situation qui prévalait auparavant, nous attendons de voir comment va se dérouler le débat avant de nous prononcer définitivement sur le vote de ce projet de loi.

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Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, plus de 1,6 million de Français sont officiellement enregistrés à l'étranger. Cela représente l'équivalent démographique d'une petite région de notre pays, une région dynamique, jeune, diverse, métissée, entreprenante, solidaire, une région qui compte pour l'avenir de la France, une région qui requiert une action publique déterminée, pour protéger, pour encourager. Je pense ici à l'école, à l'action sociale, à la protection consulaire, à la sécurité, à la fiscalité et aux droits.

Vous nous proposez, madame la ministre, un important projet de réforme de la représentation des Français de l'étranger. Je le salue et j'en soutiens la philosophie. Agir au plus près des faits, c'est une saine et juste politique. Français à l'étranger, nous avons trop longtemps souffert de mesures pensées à distance, sans prise avec les réalités, inutiles et parfois contre-productives. J'attends de votre projet qu'il présente une valeur ajoutée pour tous nos compatriotes et que le débat de ce soir vous permette, à l'écoute de l'Assemblée nationale, de préciser en quoi l'action publique sera concrètement plus efficace après l'entrée en vigueur de la réforme qu'elle ne l'est actuellement.

C'est cette recherche de la valeur ajoutée, et elle seulement, qui guide mon appréciation. Comme vous, madame la ministre, j'ai construit ma vie citoyenne et d'élu à l'étranger. Comme vous, je suis attaché à l'Assemblée des Français de l'étranger. Nous y avons siégé ensemble de longues années.

J'ai été durant dix ans, à l'égal de tant d'autres auxquels je songe ce soir, un conseiller passionné, écumant les réunions consulaires et parcourant sa circonscription. Je sais ce qu'un élu de proximité peut faire. Je sais aussi ce que le travail délibératif de l'Assemblée des Français de l'étranger a produit. En témoigne la fusion des listes électorales consulaires, étape sans laquelle il n'y aurait aujourd'hui aucun député des Français de l'étranger.

Cette fidélité à l'institution, aux femmes et aux hommes qui la font vivre depuis plus de trente années, m'a valu dans ce débat une certaine forme de solitude que je n'avais ni anticipée, ni encore moins recherchée. J'entends vous soutenir. Je veux aussi pouvoir vous interroger pour me laisser convaincre et amender le projet en tant que de besoin.

Les conseils consulaires sont une formidable initiative citoyenne. Ils n'auront, certes, qu'une capacité consultative, mais la dynamique de chaque conseil et la qualité de la relation avec le chef de poste seront les clés de la valeur ajoutée de l'action publique à laquelle je reviens encore. C'est à ce titre que j'ai déposé un amendement requérant qu'un rapport sur l'état de la circonscription soit présenté chaque année au débat du conseil consulaire.

Un peu plus de cent conseillers consulaires seront par ailleurs élus pour siéger dans une assemblée nouvelle, compétente pour avis sur des sujets aussi importants et nouveaux que le budget du ministère des affaires étrangères. Le ministre lui présentera un rapport annuel. Elle élira son président parmi les élus. Autant de progrès dont nous devons nous féliciter.

Mais pourquoi exclure que ces élus à la nouvelle assemblée puissent émaner du suffrage universel direct, comme cela se pratiquera l'an prochain pour les élections aux communautés de communes ? Pourquoi imaginer d'immenses régions continentales qui rendent illusoire toute cohérence territoriale dans l'action ? Pourquoi refuser à ces élus une modeste fonction régionale, qui autoriserait leur participation à certaines réunions, à quelques réunions de conseils consulaires et nourrirait ainsi le travail de synthèse préalable aux réunions parisiennes ? Enfin, pourquoi refuser que la consultation de la nouvelle assemblée soit de droit, si nous nous accordons tous à souligner la valeur attendue de ses avis ?

Voilà, madame la ministre, les interrogations qui sont les miennes. Vous les savez sincères. Nous en avons souvent parlé.

Je terminerai en saluant le rôle des associations reconnues d'utilité publique. Elles n'ont pas à être brocardées, mais au contraire encouragées. Elles ont tant fait pour la vie démocratique et citoyenne de nos communautés ! Je présenterai un amendement soulignant leur rôle fondamental pour l'exercice des droits civiques et la participation démocratique. Nous avons besoin d'elles.

J'espère que nous trouverons ici, à l'Assemblée nationale, et plus tard avec le Sénat, les éléments d'un accord large et peut-être même consensuel. Pour ce qui me concerne, j'y suis prêt et je souhaite que les compromis nécessaires puissent être faits. Votre réforme, madame la ministre, a un grand potentiel. Libérons-le. Libérez-le ! Agissons pour qu'élus locaux et parlementaires de l'étranger ensemble, nous soyons à vos côtés les partenaires d'une action publique efficace au service des Français du monde. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

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Nous voici en fin de journée à étudier deux projets de lois concernant notre communauté établie hors de France. J'espère, madame la ministre, que vous ne profitez pas du calme de cette fin de journée pour faire passer ces deux projets en catimini ou pour nous endormir.

La communauté des Français de l'étranger ne dort jamais. Elle est bien éveillée car, le décalage horaire aidant, elle est toujours en activité, toujours là au service de notre pays. J'en profite pour saluer tous ceux qui suivent nos débats. Ils sont nombreux, car sa représentation soumise au vote ne leur correspond pas. Ils approuvent une réforme de l'Assemblée des Français de l'étranger, mais pas une suppression. Oui, une suppression ! C'est à cela que conduisent ces deux projets de loi.

Je ne reprendrai pas les arguments avancés sur les deux textes dans la motion de renvoi en commission. Ils sont valables aussi pour cette discussion générale.

Sur la loi demandant la prorogation du mandat des membres de la zone B – Europe, Asie, Océanie –, j'ajouterai que cette loi ne respecte pas le droit des électeurs à élire leurs conseillers selon une périodicité raisonnable. Cette accumulation de reports n'est pas crédible pour les électeurs, qui ne pourront à l'avenir que mettre en doute la durée réelle du mandat que leurs élus accompliront. Cela est conforté par le fait qu'en votant cette loi, nous anticipons l'amputation de deux ans du mandat des élus de la zone A – Afrique Amérique. Un tel procédé n'est ni correct, ni respectable.

Sur la loi sur la réforme de l'AFE, j'ajouterai que le Gouvernement ne fixe pas les objectifs, ni ne renforce les moyens accordés aux élus. Nous ne savons rien non plus des missions qui seront celles des conseillers consulaires et des membres de l'AFE – j'anticipe le vote des amendements sur le nom.

Quelle proximité auront les membres de l'AFE avec nos compatriotes, alors qu'ils ne seront pas élus par eux ? Quel rôle sera le leur, alors qu'ils ne géreront pas de budget ni ne seront investis de missions ?

Prévoyez-vous, madame la ministre, d'ôter à l'AFE son unique fonction, qui est d'être le collège électoral des sénateurs des Français établis hors de France ? En plus clair, pour les non-initiés, êtes-vous en train de prévoir la suppression de ces sièges ? Si tel n'est pas le cas, la réforme telle qu'elle nous est soumise est incompréhensible.

Tellement incompréhensible que la France prend le risque de se couper des Français de l'étranger, mes collègues l'on dit précédemment. En effet, si cette réforme est votée en l'état, vous allez perdre en chemin la communauté française de l'étranger, qui ne comprendra plus pour qui elle vote et, par conséquent, ne votera plus.

Je regrette que vous n'ayez pas marché sur les traces de vos prédécesseurs qui avaient fait aboutir des réformes successives ; celles de 1946, portant création des sièges de nos sénateurs, de 1948, portant création du Conseil supérieur des Français de l'étranger, de 1982, modifiant le mode d'élection des membres de ce conseil en le mettant au suffrage universel direct, puis de 2004, créant l'AFE ; réformes abouties grâce à une large concertation.

Je comprends néanmoins la hâte que vous avez à faire voter ce texte, car une autre difficulté se fait jour maintenant : les électeurs qui devaient se prononcer mi-juin n'ont pas été convoqués par le pouvoir exécutif, alors qu'il a l'obligation d'appliquer le cadre juridique en vigueur. Là est une responsabilité qui vous revient, madame la ministre.

Daniel Pennac écrivait, dans Au bonheur des ogres : « Les batailles se perdent dans la précipitation. » Je le regrette, car c'est une victoire que nous aurions pu remporter en votant ensemble une réforme voulue de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Nous discutons aujourd'hui d'un projet de loi important pour les quelque 2,5 à 3 millions de Français qui résident à l'étranger. Les réformes concernant leur représentation politique ont été peu nombreuses. Celle qui vit la création d'un Conseil supérieur des Français de l'étranger, transformé en une organisation consultative composée de membres élus, remonte à plus de trente ans. Plus récemment, la création de circonscriptions législatives à l'étranger a permis l'élection de députés représentant ces Français établis hors de France. Avec mes collègues ici présents dans l'hémicycle, nous sommes la preuve, la preuve bien vivante, de cette nouvelle étape de la représentation politique et j'aimerais profiter de l'occasion qui m'est donnée de remercier chaleureusement, et de manière solennelle, Nicolas Sarkozy pour ses choix électoralistes qu'il regrette sans doute aujourd'hui, mais qui ont permis notre élection. (Sourires sur les bancs du groupe SRC.)

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Pour bien comprendre les enjeux, il est essentiel de revenir aux raisons qui ont pu pousser notre pays à octroyer des droits électoraux à des citoyens qui ne résident pas sur le territoire national. Nous considérons en effet que l'exercice de la citoyenneté ne se rattache pas aux frontières et qu'il s'affirme de plus en plus, dans les faits, au-delà des frontières. En 2013, un Français qui habite l'Alsace, la Bretagne ou le Languedoc-Roussillon peut facilement avoir passé une période de sa vie à l'étranger, et la probabilité qu'il y retourne ou que l'un de ses enfants ou de ses proches y séjourne, de manière temporaire ou définitive, est plus importante qu'auparavant. Les déplacements plus faciles, les nouveaux outils de communication, l'internationalisation du marché de travail comme de l'espace d'études et de recherche, les difficultés en France, le nombre croissant de couples binationaux, tous ces phénomènes ont contribué à accroître la mobilité des Françaises et des Français qui commencent ainsi, peu à peu, à sortir de la sédentarité qui les caractérisait et qui faisait d'eux l'un des peuples européens les moins mobiles, en particulier par rapport à nos voisins allemands et britanniques. Ce constat d'une normalisation de la composition de la population française à l'étranger, dont le profil s'éloigne des schémas traditionnellement véhiculés sur les expatriés, les coopérants, les personnels diplomatiques et les exilés fiscaux, obligeait à adapter nos institutions à cette nouvelle réalité.

La réforme de l'AFE a ainsi ce mérite d'apporter une meilleure représentativité de la nouvelle sociologie française à l'étranger, qui se rajeunit, qui se féminise, qui se diversifie, puisque cette réforme élargit le nombre d'élus locaux pour le porter à 444, sur une base antérieure de 155 élus à l'Assemblée des Français de l'étranger. Avec les députés de l'étranger, la représentation est désormais complète au niveau national en France. Avec cette réforme, madame la ministre, elle est parachevée au niveau local à l'étranger.

Le premier enjeu de cette réforme, c'est la démocratie. Tel est l'objectif poursuivi par ce texte : rapprocher les citoyens des instances décisionnelles. Nous passons d'une assemblée centralisée à Paris, au rôle mal connu et souvent ignoré des personnes qu'elle est censée représenter, coûteuse, pour créer plus d'une centaine de conseils consulaires répartis sur les territoires à l'étranger, au sein desquels nos élus auront un poids réel aux côtés des chefs de poste diplomatique ou consulaire. Ils seront amenés à se prononcer sur des sujets relatifs aux questions consulaires et d'intérêt général, notamment culturelles, économiques, sociales et éducatives. La culture politique, celle de la discussion, du débat, de la confrontation des points de vue et du contrôle, rencontrera ainsi celle de la diplomatie.

La démocratisation du dispositif de représentation s'opère également par l'élargissement du collège électoral des sénateurs de l'étranger, grâce la multiplication du nombre de délégués consulaires : cela permet là aussi d'asseoir la crédibilité de nos instances représentatives à l'étranger.

L'enjeu de cette réforme, c'est également la transparence : nous avons eu raison, en commission des lois et sur la proposition de notre collègue René Dosière, de revenir sur l'amendement défendu par le Sénat concernant le fonctionnement des campagnes électorales à l'étranger. Les associations d'utilité publique, qui agissent au quotidien aux côtés de nos concitoyens pour les conseiller et les accompagner, n'ont pas vocation à participer au financement de campagnes électorales sur des fonds publics. Nous ne pouvons pas, parce que nous sommes à l'étranger, déroger au droit électoral qui s'applique en France.

Pour clarifier les compétences et les niveaux d'intervention, il faut aussi soutenir le projet de Mme la ministre de confier aux élus du futur Haut Conseil la tâche d'émettre des avis techniques et politiques sur le budget, l'administration consulaire, le réseau éducatif, comme le ferait un Conseil économique et social des Français de l'étranger. Ce rôle ne doit pas être sous-estimé, puisque c'est désormais le ministre des affaires étrangères qui devra répondre de son action et expliquer le budget de son administration devant les élus de la future instance.

Pour finir, Thucydide, dans son Histoire de la guerre du Péloponnèse, nous apporte la démonstration exemplaire que l'exercice de la démocratie n'est pas forcément lié au territoire national. Au printemps 411 av. J.-C., alors que la guerre contre Sparte se déroule mal, un coup d'État a lieu à Athènes où le régime démocratique est remplacé par l'oligarchie des Quatre Cents.

Mais l'essentiel de la flotte athénienne, plus de quatre-vingts vaisseaux, se trouve alors dans le port de l'île de Samos, une des alliées d'Athènes. Aux nouvelles du coup d'État, les soldats et marins, tous citoyens, se réunissent en assemblée et décident d'élire de nouveaux dirigeants, tout en prêtant serment de fidélité à la démocratie.

Eh bien, cette idée que l'état démocratique, la cité, existe avant tout par ses citoyens et non pas par son territoire, vous la défendez, madame la ministre, vous la défendez localement à l'étranger. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et RRDP.)

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Je n'utiliserai pas la totalité de mon temps de parole, afin de ne pas répéter ce que certains de mes collègues ont déjà dit et ce que d'autres ne manqueront pas de dire.

Je veux juste signaler qu'après l'élection de députés au suffrage universel, qui est une grande avancée démocratique, nous pouvons tous nous satisfaire que, pour la première fois, 2,5 millions de nos compatriotes, jusqu'alors exclus de fait de la représentation nationale, soient désormais, comme tous nos autres concitoyens, eux aussi dépositaires d'une part de la souveraineté nationale.

Nous avons tous concouru, élus des Français de l'étranger, à cette belle aventure électorale, à cette belle aventure citoyenne. Je voudrais en profiter pour saluer la présence dans les tribunes de Corinne Narassiguin, qui a pris part à cette aventure et qui mérite aussi, par le combat qu'elle a mené, qu'un hommage lui soit rendu : elle a contribué pleinement à la représentation des Français qui vivent en Amérique du Nord. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Je veux faire le lien entre cette avancée démocratique qu'est l'élection de députés au suffrage universel pour les Français de l'étranger et la réforme, la refonte de l'AFE. Ce désir, cette envie, ce besoin, cette ambition de proximité est une nécessité absolue. Il y avait deux possibilités. La première s'inscrivait dans une logique de déconcentration qui ferait la part belle à un statut renforcé des consuls honoraires. La seconde, que vous avez choisie madame la ministre, est plutôt la voie de la décentralisation, en tout cas dans son esprit, par un renforcement de la démarche électorale et la désignation de ces différents conseillers et délégués consulaires.

Je pense qu'il est trop tôt, objectivement, pour tirer toutes les leçons des bienfaits, des limites ou des failles d'une nouvelle disposition. Il faudra donc le temps de l'expérimentation pour pouvoir régulièrement recadrer le dispositif et vous interpeller afin de vous informer de ce qui fonctionne ou non.

Je constate en tout cas, dans ma circonscription, la nécessité du renforcement de ce maillage de proximité. Prenons l'exemple des membres de la communauté éducative du lycée d'Agadir : pour traiter leurs questions, ils ont besoin du relais d'un député, membre à part entière de la représentation nationale. De la même manière, lorsque, en tant que parlementaire, je suis saisi de cas individuels à propos des bourses, des procédures administratives et civiles, je me rends compte de l'utilité de renforcer ce maillage territorial, cette proximité avec la communauté française.

Bien des objections ont été formulées, c'est vrai, et cela fait partie du débat propre à l'Assemblée des Français de l'étranger dont les membres souhaitent améliorer le dispositif que vous présentez. Je ne doute pas que les amendements pertinents dont j'ai pris connaissance seront discutés et, pour la plupart, votés afin d'enrichir le dispositif.

Je souhaite pour ma part bonne chance à une représentation renouvelée, pleinement démocratique, qui réponde au souci de proximité qui est notre philosophie : il s'agit de renforcer le lien, la solidarité avec les Français de l'étranger afin de donner toute sa légitimité à la représentation citoyenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Monsieur le président, madame la ministre, chers collègues, le présent projet, relatif à la représentation des Français établis hors de France, vise à améliorer la représentation de ces Français dont je fais partie et qui vivent en dehors du territoire national tout en continuant à entretenir un lien fort avec notre patrie la France.

En constante augmentation, cela a été rappelé, ces Français sont très loin du cliché d'exilés fiscaux cherchant à fuir leur pays. Dans ma circonscription, il s'agit souvent de familles binationales installées de longue date, héritières d'une histoire parfois difficile avec des régimes qui n'étaient pas des démocraties, de gens qui ont cherché à fuir et sont venus se réfugier dans notre culture, dans notre langue et qui font aujourd'hui partie intégrante de notre communauté, même si certains, par le passé, ont voulu dénigrer ces binationaux. Je suis ravi que nous ayons une position forte et je me félicite de cet apport à la communauté nationale.

Quel que soit son profil, cette diaspora française – je pense qu'il faut employer ce mot –, estimée à plus 2 millions de personnes, parle la même langue, partage notre culture, et a tissé avec la France des liens économiques très forts. À ce jour, on l'a dit et on l'a ressenti au cours des dernières campagnes électorales, cette communauté est relativement méconnue, sous-estimée et sous-exploitée – dans le bon sens du terme (Sourires).

Ces Français sont de véritables têtes de pont d'un réseau ad hoc d'affaires économiques, d'affaires culturelles. Je m'arrêterai quelques instants sur un pays souvent cité en exemple : l'Allemagne. Chacun envie ses résultats économiques ; or ils s'expliquent aussi par la puissance de ses communautés historiques installées à l'étranger, issues des grandes vagues d'émigration du XIXe siècle. Ce rappel historique m'amène à m'opposer au discours des déclinologues qui nous expliquent que chaque départ de la jeunesse de France est un drame. Non, messieurs ! La jeunesse qui « s'exporte », la jeunesse qui va se confronter à la mondialisation, s'armer pour vivre dans une mondialisation qui ne fera que s'accentuer dans les décennies à venir, voilà un signe d'optimisme et de confiance – deux denrées si rares aujourd'hui, dans notre contrée, et qu'il est nécessaire de renforcer massivement.

La force de notre culture – l'histoire le démontre et nous sommes plusieurs sur ces bancs qui vivons à l'étranger depuis plusieurs années voire plusieurs décennies –, nous permet de maintenir un lien qui ne se rompt jamais.

Jusqu'en 2012, la représentation des Français établis hors de France se faisait par l'Assemblée des Français de l'étranger et ses 155 conseillers élus, et par douze sénateurs. La création de onze circonscriptions et l'élection de députés au suffrage universel direct est venu compléter ce dispositif, tout en mettant en évidence l'obligation d'une réforme visant à une mise en conformité démocratique du collège électoral des sénateurs et à la mise en place d'un échelon de représentation locale mieux identifié et mieux réparti.

La création de conseils consulaires répond aux exigences de proximité et de reconnaissance accrue de nos communautés en dehors des seules capitales. Je ne peux que m'en réjouir et je m'en félicite.

J'émettrai cependant deux réserves. La première concerne le champ d'intervention des conseils consulaires. En effet, les actuels conseillers ont fait la preuve de leur efficacité, de leur utilité et de leur connaissance des communautés françaises installées sur leur territoire. Tout cela va bien au-delà des domaines prévus par le texte. Je prendrai l'exemple du droit de la famille. Nous sommes tous confrontés, dans nos circonscriptions, au désarroi de couples binationaux qui vivent des situations dramatiques, notamment lors de divorces, de déchirements avec des enlèvements d'enfants qui se multiplient, notamment dans l'espace européen. Nous pourrions tirer bénéfice de l'expérience acquise par de nombreux conseillers pour étendre le champ d'application de leurs compétences.

La seconde réserve touche à l'absence de mention et de proposition d'articulation des futurs conseillers consulaires avec le député de la circonscription, en particulier en ce qui concerne le libre arbitre qui sera laissé aux postes consulaires – nous allons créer quelques difficultés que nous pourrions éviter si le texte gagnait en clarté.

Pour finir, je tiens à souligner qu'avec ce projet de loi la France reste en tête des pays européens et même du monde en termes de représentation de sa diaspora. Je vous remercie, madame la ministre, d'avoir porté haut les couleurs des Français installés hors de France. Nous voterons ce projet avec enthousiasme. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Philip Cordery, dernier orateur inscrit.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, chers collègues, depuis son arrivée au pouvoir en juin dernier, la gauche accorde une attention particulière et sans précédent aux Français de l'étranger : un ministère leur est dédié, la priorité à l'éducation donnée par le Gouvernement est déclinée pour les Français établis hors de France, une nouvelle orientation économique a été donnée à la diplomatie française et, plus généralement, les députés des Français de l'étranger que nous sommes proposent une déclinaison adaptée des législations nationales pour les Français établis hors de France à chaque fois que cela est pertinent. Je tiens à saluer l'action de Mme Hélène Conway-Mouret qui connaît les attentes de nos concitoyens, pour avoir elle-même vécu à l'étranger, et qui impulse cette politique avec détermination.

La réforme de l'Assemblée des Français de l'étranger s'inscrit dans cette dynamique. En créant les conseils consulaires, cette réforme renforcera la proximité entre la France et nos compatriotes résidant à l'étranger, de plus en plus nombreux. Les Français de l'étranger sont des Français à part entière et ils aspirent à une pleine citoyenneté.

La réforme permettra aussi une meilleure articulation et une bonne complémentarité entre leurs représentants nationaux, députés et sénateurs, et leurs représentants locaux, les conseillers consulaires.

La première qualité de cette réforme est donc le renforcement de la démocratie de proximité avec la création des conseils consulaires, grande innovation de ce projet de loi. Au niveau de chaque poste consulaire et diplomatique seront créés des conseils consulaires dont les membres seront élus au suffrage universel direct pour six ans. Ces 444 conseillers consulaires formuleront des avis sur les questions particulières qui touchent les Français de l'étranger, que ce soit en matière de protection sociale, d'emploi, de sécurité, de formation professionnelle, d'enseignement français à l'étranger, de bourses scolaires, bref sur toutes les questions d'intérêt général. De plus, chaque chef de poste devra présenter un rapport annuel sur la situation de sa circonscription consulaire.

Plus concrètement, un citoyen français établi hors de France trouvera dans le conseiller consulaire l'interlocuteur de terrain sur les questions de retraites, de sécurité sociale ou d'éducation ; il pourra également s'adresser à son parlementaire pour transmettre ses problèmes à la représentation nationale.

L'Assemblée des Français de l'étranger elle-même ne disparaît pas, elle est même renforcée. Quelle que soit sa dénomination finale, l'essentiel repose dans le renforcement de ses attributions et dans sa démocratisation. Jusqu'à présent, l'assemblée des Français de l'étranger comprenait en son sein des personnalités non élues, ce qui ne sera plus le cas. Désormais, seuls des conseillers consulaires élus au suffrage universel siégeront dans cette instance, renforçant ainsi son caractère démocratique.

En outre, ses compétences seront renforcées : chaque année, le Gouvernement devra présenter un rapport sur la situation des Français de l'étranger et sur les politiques spécifiques menées à leur égard. Ce rapport donnera lieu à un débat et à un avis. De plus, chaque année, au moment de la présentation du projet de loi de finances, le Gouvernement sera tenu d'informer cette instance des mesures budgétaires et fiscales concernant directement les Français de l'étranger. Un amendement proposé par le groupe SRC propose aussi que le Parlement puisse saisir cette instance sur toutes questions relatives aux Français de l'étranger, renforçant ainsi les liens entre représentation locale et nationale.

Ce projet de loi introduit plus de transparence lors des élections en normalisant les règles de financement des campagnes électorales en les calquant sur les règles nationales. Pour favoriser la transparence des débats des conseils consulaires, un amendement a été déposé visant à les rendre publics.

Pour rendre exemplaires les élections des conseils consulaires et dans la droite ligne des mesures de non-cumul qui seront soumises au Parlement, j'ai déposé un amendement visant à limiter le cumul des mandats. Cet engagement de campagne du candidat François Hollande doit être tenu à la fois pour les élections en France et à l'étranger.

Pour conclure, le présent texte, complété par le travail en commission réalisé avec talent par le rapporteur Hugues Fourage, et par les amendements que défendront en séance les élus de la majorité, permettra une meilleure représentation de nos concitoyens qui vivent à l'étranger et qui participent au rayonnement de la France.

En introduisant plus de proximité, plus de lisibilité, plus d'attributions et plus de transparence dans la représentation des Français de l'étranger, nous répondons à leurs demandes légitimes d'une meilleure prise en compte de leurs préoccupations quotidiennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La discussion générale commune est close.

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger.

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je ne réagirai pas à chacune des très nombreuses prises de parole. Je remercie tous les intervenants et tous les députés, les sénateurs et les conseillers de l'Assemblée des Français de l'étranger qui, par leur engagement et leurs contributions ont permis de réaliser un travail de qualité. La consultation a été engagée il y a neuf mois et force est de constater que nous avons parcouru un très long chemin depuis.

Je me réjouis du consensus qui règne, à part quelques exceptions, bien sûr, sur les avancées que ce texte apporte en termes de démocratie de proximité et d'élargissement du collège électoral pour les sénateurs représentant les Français de l'étranger. Nous avons également voulu tenir compte de l'élection des onze députés des Français de l'étranger : il s'agira à l'avenir d'articuler leur travail avec celui des élus locaux que seront les conseillers consulaires.

Le dernier objectif consistait à renforcer l'indépendance de l'instance nationale que sera le Haut conseil des Français de l'étranger, à définir et clarifier ses compétences d'expertise.

Le texte permettra d'atteindre ces objectifs. Il modifie profondément l'architecture de cette représentation et, comme cela a été noté, il renforce la démocratie locale.

Je répondrai à quelques points soulevés par certains députés. Je commencerai par M. Bourdouleix : non, il n'y aura pas de tripatouillage électoral, à moins de considérer que l'élargissement du collège électoral des sénateurs serait une atteinte à la démocratie.

Je tiens à rassurer les députés Gérard Charasse et Patrice Carvalho : les conseils consulaires et leurs membres auront les moyens d'exercer leur mandat.

M. Sergio Coronado a parlé de confusion et d'absence de concertation, mais je pense que les cinq cents amendements qui ont été déposés dans les deux chambres témoignent du travail approfondi accompli par les parlementaires.

Je m'adresserai, pour finir, à M. Le Borgn' : les conseillers à la nouvelle assemblée ne peuvent pas avoir de compétences régionales, puisque, comme vous le savez, il n'existe pas de politique régionale pour les Français de l'étranger. Cela n'empêchera évidemment pas les conseillers consulaires d'une zone géographique déterminée d'être invités par leurs collègues élus dans d'autres conseils consulaires.

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J'appelle en premier lieu, dans le texte de la commission, l'article unique du projet de loi portant prorogation du mandat des membres de l'Assemblée des Français de l'étranger.

Je suis saisi d'un amendement n° 1.

La parole est à Mme Claudine Schmid, pour le soutenir.

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Puisque j'ai déjà exposé longuement le contenu de cet amendement dans le cadre de la motion de renvoi en commission, je ne vais peut-être pas le développer à nouveau…

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…même s'il n'est peut-être pas inintéressant de savoir que ce projet de loi enfreint plusieurs principes constitutionnels.

Il vise à proroger le mandat de la moitié des conseillers à l'AFE, dont le mandat passera ainsi de six à huit ans, soit une augmentation d'un tiers, ce qui est loin d'être négligeable. Jusqu'à présent, le Conseil constitutionnel a toujours rejeté la succession des prorogations. Tous les détails se trouvent dans l'exposé sommaire, qui offre également une définition exacte de la jurisprudence constante du Conseil constitutionnel.

Une autre solution aurait consisté à confier aux élus de la série B, Europe-Asie-Océanie, qui auraient dû être élus au mois de juin, un mandat de trois ans, pour mettre en oeuvre la réforme voulue par tous à partir de 2017. Voilà qui aurait été beaucoup plus cohérent, et qui aurait évité d'amputer de deux ans le mandat des élus de la série A, Afrique-Amérique.

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Défavorable, monsieur le président.

Le Conseil constitutionnel exige que la prolongation de mandats politiques ait un caractère exceptionnel et transitoire et qu'elle soit strictement nécessaire à la réalisation de l'objectif de la loi. C'est bien le cas ici et le présent projet de loi paraît satisfaire à l'ensemble de ces exigences.

Il y a un motif d'intérêt général, Mme la ministre l'a rappelé tout à l'heure, et par voie de conséquence la commission émet un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Hélène Conway-Mouret, ministre déléguée chargée des Français de l'étranger

Le Gouvernement a lui aussi émis un avis défavorable.

Cette prorogation est justifiée par un motif d'intérêt général, puisque le projet de loi relatif à la représentation des Français de l'étranger présenté par le Gouvernement propose une profonde réforme de la représentation des Français à l'étranger.

Or le Gouvernement a estimé que les élections de juin 2013 risquaient d'être gravement perturbées, du fait de la difficulté à mobiliser en nombre suffisant des candidats appelés à ne siéger que pendant une année. Cela risquait, en outre, de susciter une abstention encore plus forte que celle précédemment observée pour l'élection à l'Assemblée des Français de l'étranger.

(L'amendement n° 1 n'est pas adopté.)

(L'article unique est adopté.)

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :

Suite du projet de loi relatif à la représentation des Français établis hors de France.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures cinq.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Nicolas Véron