Commission des affaires étrangères

Réunion du 29 mai 2013 à 9h45

Résumé de la réunion

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La réunion

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Mandat de négociation de l'accord de libre-échange entre les Etats-Unis et l'Union européenne (n° 1060)

La séance est ouverte à neuf heures quarante-cinq.

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Nous examinons ce matin la proposition de résolution européenne de Mme Seybah Dagoma relative au mandat de négociation à donner à la Commission européenne sur le projet d'accord de libre-échange entre les États-Unis et l'Union européenne.

Ce mandat de négociation qui sera donné au commissaire européen chargé de négocier l'accord au nom de la Commission sera examiné en Conseil des ministres européens du commerce extérieur à Bruxelles le 14 juin prochain.

Nous avons par ailleurs créé un groupe de travail commun à la commission des affaires étrangères, la commission des affaires européennes, la commission des affaires culturelles et la commission des affaires économiques, sur ce sujet. Si le mandat de négociation est adopté le 14 juin prochain, il sera important que ce groupe de travail puisse suivre les futures négociations.

Seybah Dagoma a pris l'initiative de cette proposition de résolution, que la commission des affaires européennes a examinée hier, sur son rapport, et adoptée à l'unanimité, après y avoir introduit quelques amendements.

Il faut que notre commission désigne un rapporteur sur ce texte. J'ai été saisie de la candidature de Mme Seybah Dagoma.

La Commission désigne Mme Seybah Dagoma rapporteure de la proposition de résolution européenne relative au mandat de négociation de l'accord de libre-échange entre les États-Unis et l'Union européenne.

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Je prie tout d'abord les membres de la commission des affaires étrangères qui sont également membres de la commission des affaires européennes de m'excuser si je répète ici un certain nombre de points que j'ai déjà développés hier devant la commission des affaires européennes.

L'idée d'une zone de libre-échange entre les États-Unis et l'Union européenne est ancienne. Déjà en 1997, le ministre des affaires européennes, Hubert Védrine, redoutait l'hégémonie d'une hyper-puissance américaine. Nos réticences à l'égard du projet de partenariat transatlantique du commissaire européen au commerce de l'époque, Sir Leon Brittan, s'expliquaient par notre conception du multilatéralisme : nous considérions qu'un tel accord aurait pu affaiblir l'Organisation mondiale du commerce (OMC) et l'organisme de règlements des différends que nous avions tous appelé de nos voeux.

Le contexte est aujourd'hui extrêmement différent. Les discussions multilatérales du cycle de Doha sont enlisées. Parmi les multiples raisons de blocage, il y a l'attitude des pays émergents qui revendiquent toujours le bénéfice du régime de traitement spécial et différencié, à l'origine destiné à permettre une meilleure intégration des pays en développement dans le commerce international, et refusent toute réciprocité en matière d'accès aux marchés. Cette évolution du rapport de forces a eu pour conséquence de renforcer la convergence euro-américaine. Au sein de l'OMC, nos positions se sont rapprochées, notamment pour ce qui concerne l'accès aux marchés non agricoles, le commerce des services ou encore la facilitation des échanges. L'enlisement du cycle de Doha a aussi conduit l'Union européenne à changer de position. Contrairement aux États-Unis qui ont toujours privilégié le bilatéralisme dans leurs relations commerciales, nous avions, nous, donné la priorité au multilatéralisme. Or, il en va différemment aujourd'hui où nous concluons des partenariats pays par pays. Citons l'accord conclu avec la Corée du Sud, et les négociations en cours avec le Japon et le Canada.

La perspective d'un accord transatlantique a été ouverte en novembre 2011 lors d'une rencontre entre le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy, le président de la Commission européenne, José Manuel Barroso, et le président des États-Unis, Barack Obama, qui ont décidé la mise en place d'un groupe de travail de haut niveau sur la croissance et l'emploi. Ce groupe a rendu un rapport en février dernier, qui conclut à l'opportunité d'un accord transatlantique global sur le commerce et l'investissement.

Jamais sans doute, la perspective d'un accord de libre-échange n'aura suscité autant d'intérêt et de réactions. Le processus est aujourd'hui à une étape cruciale, celle de la définition du mandat de négociation. En mars dernier, la Commission européenne, après une phase de travaux préparatoires, menés sans grande concertation, il faut l'avouer, a transmis aux gouvernements des États membres un projet de mandat qui l'autoriserait à négocier un accord transatlantique au nom de l'Union et fixe le cadre de la négociation. Le Conseil des ministres européens du commerce extérieur doit se prononcer sur ce projet le 14 juin prochain. La semaine dernière, le Parlement européen a donné son feu vert, sous conditions, au lancement des négociations, en adoptant la proposition de résolution du président de sa commission du commerce international, Vital Moreira.

La première question est de principe : l'Union européenne doit-elle ou non s'engager dans une négociation commerciale ambitieuse avec les États-Unis ? Plusieurs études d'impact ont été réalisées, à la demande de la Commission, mais aussi, en France, à la demande de Bercy, et les différents secteurs économiques ont été consultés. On peut certes débattre de ces études, fondées sur des modèles économiques nécessairement réducteurs et des présupposés libéraux quant aux mérites du développement du commerce. On peut ainsi regretter que les effets nocifs de phénomènes comme la volatilité des prix agricoles ne soient pas assez pris en compte. On peut aussi observer que pour justifier les gains annoncés, l'étude européenne a besoin d'envisager un accord transatlantique très ambitieux, comportant un abaissement important des barrières non tarifaires, objectif que nous ne sommes pas sûrs d'atteindre. Il n'empêche que ces études convergent pour avancer des gains économiques potentiels substantiels pour l'Europe et pour la France. Pour l'Europe, ce gain pourrait s'élever à près de 120 milliards d'euros par an.

Les États-Unis et l'Union européenne réalisent à eux deux les deux tiers des dépenses mondiales de recherche et de développement. Cet accord pourrait être l'occasion pour l'Union européenne de forger une nouvelle cohésion en définissant une position de négociation commune et d'affirmer, sur le plan international, le rôle de créateur de normes qu'elle a toujours eu. Les États-Unis et l'Europe pesaient encore pour 60 % dans le PIB mondial en 2005, mais la montée des pays émergents a ramené ce taux à 45 % en 2012 et, au vu des perspectives, ce déclin devrait se poursuivre. Cette négociation est peut-être la dernière chance pour ces deux ensembles d'affirmer une vocation normative internationale dans le domaine économique. Lors des auditions de parlementaires américains auxquelles nous avons procédé avec ma collègue Marie-Louise Fort, nous avons constaté que leur principal sujet de préoccupation est la signature de l'accord de libre-échange transpacifique, en discussion depuis 2009, mais aussi que tous considèrent que la signature parallèle d'un accord avec l'Union européenne leur permettrait de consolider leur position normative dans le monde, faute de quoi dans le futur, les normes risquent d'être imposées par les pays émergents.

Un accord transatlantique ne peut toutefois représenter un véritable progrès que sous certaines conditions. Le choix des autorités européennes, légitimé par les études d'impact, est de rechercher un accord global et ambitieux, comprenant en particulier des avancées très substantielles sur l'abaissement des barrières non tarifaires. En effet, les droits de douane entre les États-Unis et l'Europe sont déjà faibles – en moyenne respectivement de 3,5 % et 5,3 % –, même s'il existe de part et d'autre des pics tarifaires, voire des restrictions quantitatives aux échanges, dans le domaine agricole et sur certains produits industriels. Nous avons des intérêts offensifs à défendre – je pense aux vins, aux spiritueux, aux produits laitiers, aux services financiers, à la chimie... Au cours de nos auditions, j'ai constaté que les barrières non tarifaires, en particulier la réglementation, venaient en tête des difficultés soulignées. Le contenu et le mode d'élaboration des réglementations renvoient à des intérêts légitimes tels que protéger la santé, la sécurité, l'environnement, les consommateurs, les travailleurs. Plus fondamentalement, ces règles rendent souvent compte de ce que l'on appelle des « préférences collectives » et de modes de fonctionnement et de pensée profondément ancrés dans les sociétés, qu'il ne peut être question d'aligner vers le bas. Il faut les rapprocher par le haut, ce qui est nécessairement plus difficile. Les rencontres avec des représentants des différents secteurs économiques ont mis en évidence, si besoin était, la multiplicité des problèmes quand on entre dans le vif du sujet. Il y a les « lignes rouges », les règles sur lesquelles nous, ou de l'autre côté les Américains, ne serons pas disposés à transiger, même si cela aboutit à des restrictions au commerce.

Les modes d'élaboration et d'application des réglementations sont aussi très différents des deux côtés de l'Atlantique. Paradoxalement, même si les États-Unis ne constituent qu'un seul État, fédéral certes, quand l'Union européenne en compte 27, l'élaboration des réglementations y est beaucoup plus décentralisée. Dans le processus normatif, on y privilégie les démarches partant des acteurs économiques et le secteur privé s'y voit dévolu un rôle important. L'autorité de réglementation se situe souvent au niveau des États fédérés, et non de l'État fédéral, ou bien c'est une autorité administrative indépendante qui exerce la compétence. Cela crée une difficulté. En effet, la signature du gouvernement fédéral, qui négociera l'accord, n'engagera pas nécessairement les autorités publiques compétentes sur les réglementations.

L'intégration est déjà considérable entre les deux rives de l'Atlantique, avec 700 milliards d'euros de flux commerciaux bilatéraux. La France n'est pas en reste, avec une soixantaine de milliards d'euros de flux croisés. Les États-Unis demeurent la première destination des investissements directs français à l'étranger et le premier investisseur étranger en France. Les entreprises américaines emploient environ 450 000 personnes en France et les entreprises françaises sans doute autant aux États-Unis. Paradoxalement, c'est précisément parce que les échanges et l'intégration sont déjà intenses entre les deux rives de l'Atlantique, que la négociation sera difficile. Les points de divergence et de conflit sont souvent des « points durs », connus depuis longtemps et sur lesquels aucune des parties n'envisage réellement de concessions.

La négociation risque aussi de s'ouvrir de façon asymétrique. La première des asymétries porte sur l'envie de négocier. Dans son discours sur l'état de l'Union, le président Obama avait indiqué que l'Union européenne était plus en demande de négociation que son pays – il avait dit « hungrier », qui signifie plus affamé. Cela signifie sans doute que les États-Unis attendent que nous fassions davantage de concessions. La deuxième asymétrie tient à ce que les États-Unis ont une position plus forte sur le plan économique, dans la mesure où ils ont retrouvé une croissance, actuellement de 2 %, favorisée par la révolution énergétique liée à l'exploitation du gaz de schiste ; le gaz y est trois à quatre fois moins cher qu'en Europe. Une troisième asymétrie concerne la transparence, l'affichage des priorités et des lignes rouges de la négociation. L'Union européenne dira tout dans le projet de mandat qui sera adopté le 14 juin prochain alors que les États-Unis n'ont pas officiellement de lignes directrices, même si l'on peut deviner leurs intérêts offensifs et défensifs essentiels.

Pour autant, l'Europe n'a pas à aborder cette négociation en position de faiblesse. Elle est en effet le premier marché mondial avec 500 millions de consommateurs à fort pouvoir d'achat et, en tant que zone intégrée, le premier PIB mondial. Il s'agit de négocier un accord entre partenaires qui traitent d'égal à égal, représentant des parts sensiblement égales de la production et du commerce mondiaux, de l'ordre de 20 % du PIB chacun. Selon que l'on tient compte ou non des flux commerciaux intracommunautaires, les deux parties représentent 28 % ou 40 % des flux commerciaux mondiaux. Les États-Unis ne doivent pas considérer qu'ils pourront jouer du rapport de forces, comme ce fut le cas pour l'accord de libre-échange nord-américain, l'ALENA.

Le mandat éventuellement donné à la Commission européenne doit être clair, précis et exigeant. Tel est l'enseignement que nous tirons de la négociation sur l'accord de libre-échange avec le Canada où, faute que les incertitudes aient été levées préalablement et qu'un mandat parfaitement clair ait été donné, les difficultés et les blocages s'accumulent en fin de négociations.

Le projet de mandat actuel, tel que préparé par la Commission, comporte des points satisfaisants, mais aussi des formulations molles, des lacunes et certains points inacceptables.

Sur quatre points, il est inacceptable. Tout d'abord, il inclut le secteur des biens et services culturels dans le champ de la négociation. Il inclut également les préférences collectives européennes, ainsi que les marchés de défense et de sécurité. Enfin, il renvoie à l'arbitrage pour régler les litiges entre les investisseurs et les États.

Je ne m'étendrai pas sur la protection à accorder au secteur des services culturels, dont nous avons déjà parlé lors de l'examen de la proposition de résolution européenne de Danielle Auroi et Patrick Bloche. La position constante de la France sur ce point est connue. Et un amendement à la proposition de résolution du Parlement européen, présenté à l'initiative d'un parlementaire français, a été adopté, tendant à exclure les services culturels et audiovisuels du mandat de négociation. Dans un champ voisin, celui de la protection de la vie privée, nous devrons être très exigeants. Le projet de révision de la directive de 1995, présenté par la Commission en 2009, suscite de vives inquiétudes aux États-Unis, qui ont l'intention d'être très offensifs sur ce point – toutes les ONG nous l'ont confirmé. Nous ne devons pas faire de concessions sur la conception européenne de la protection des données personnelles.

Le mandat de négociation doit aussi clairement exclure nos préférences collectives. Cet accord ne doit pas être l'occasion pour les États-Unis d'exporter en Europe des produits contenant des OGM, du bétail cloné, du boeuf aux hormones ou du poulet lavé au chlore. Pourtant, la principale organisation agricole américaine (le Farm Bureau) affiche clairement l'objectif d'accroître les flux commerciaux agricoles des États-Unis vers l'Europe. Cela exigerait de conclure un accord « SPS plus » très offensif de la part des Américains avec une demande de levée des restrictions européennes sur les viandes traitées aux hormones de croissance, celles ayant subi un traitement antimicrobien ou de réduction des agents pathogènes, ainsi que sur l'absence d'étiquetage spécifique des produits contenant des OGM. De façon générale, les États-Unis sont opposés au principe de précaution qui prévaut en Europe et font valoir que seules peuvent être retenues les réglementations étayées par des arguments scientifiques. Le respect des choix de société et la liberté pour chaque partie d'analyser et de gérer les risques à sa manière devront être reconnus. Sur ce point, on peut légitimement s'inquiéter que la Commission européenne ait par avance fait une concession en autorisant la pratique américaine de nettoyage des carcasses de viande à l'acide lactique.

La Commission voudrait inclure les marchés publics de défense et de sécurité dans son mandat, alors que jusqu'à présent, ils ne l'ont jamais été dans aucune négociation commerciale. Il faut rappeler que l'Union européenne commence tout juste à ouvrir ces marchés entre États membres, en application d'une directive de 2009 qui prévoit cette ouverture afin de renforcer la base industrielle et technologique de l'Union dans ce domaine. L'ouverture aux pays tiers n'est pas prévue car elle irait à l'encontre de cet objectif. Elle serait également contraire à celui de préserver une capacité stratégique relevant d'enjeux de souveraineté. Quant à l'ouverture des marchés américains, elle serait illusoire. J'en veux pour preuve l'annulation en 2011 d'un contrat de 35 milliards de dollars portant sur des avions ravitailleurs, initialement remporté par EADS et finalement revenu à Boeing. Enfin, du fait des dépenses militaires du pays, l'industrie de défense américaine profite d'économies d'échelle sans comparaison avec celles de l'industrie de défense européenne. Ouvrir les marchés publics de défense créerait des conditions de concurrence inégales et condamnerait l'industrie européenne au déclin. Les chiffres parlent d'eux-mêmes. Alors que le budget américain de la défense s'élève à 680 milliards de dollars, le budget consolidé de défense des membres de l'Union européenne ne dépasse pas 220 milliards d'euros.

Quant au recours à l'arbitrage, il ne me paraît pas souhaitable, pour plusieurs raisons. La société américaine est d'ailleurs très critique sur ce mécanisme. Les arbitrages rendus dans le cadre de l'ALENA depuis vingt ans sont riches d'enseignements. Les résultats pour les partenaires des États-Unis sont pour le moins mitigés en termes d'équité, de coûts et surtout de respect de la souveraineté ; jamais les États-Unis n'ont perdu devant les tribunaux arbitraux lorsqu'ils ont été attaqués par des entreprises canadiennes ou mexicaines. L'arbitrage est en outre très coûteux, si bien que seuls les grands groupes peuvent y recourir. Enfin, l'arbitrage entraîne des risques de coûts non négligeables pour les finances publiques en cas de condamnation dans la mesure où le tribunal arbitral a toute latitude pour fixer le montant de l'indemnisation. Par exemple, si la procédure d'arbitrage était retenue, les entreprises américaines concernées pourraient intenter un recours contre l'État français du fait de l'adoption en 2011 de la loi interdisant la fracturation hydraulique et obtenir de substantiels dédommagements.

Sur d'autres points, le projet de mandat est insuffisant. Je propose donc dans ce projet de résolution de le compléter et de le renforcer. Le mandat doit d'abord prévoir que la négociation avancera parallèlement sur les différents volets : accès aux marchés, barrières non tarifaires et règles communes pour répondre aux défis du commerce mondial. Le principe d'un engagement unique sur ces trois volets doit être affirmé. De même, le mandat doit comporter des exigences claires en matière de réciprocité. Avec Marie-Louise Fort, nous avons présenté il y a quelque temps une proposition de résolution relative à l'instrument de réciprocité sur les marchés publics. Les marchés publics européens sont potentiellement ouverts à 85 % tandis que les marchés publics américains ne le sont qu'à 32 %. Seuls 37 des États fédérés américains sont partie à l'accord multilatéral sur les marchés publics, dont, de surcroît, 12 excluent certains produits comme l'acier de construction, le charbon ou encore les véhicules à moteur, sans compter les marchés attribués à certaines entreprises, notamment celles détenues par des personnes issues de minorités ou opérant dans des zones défavorisées. Cet accord doit être l'occasion d'établir une véritable réciprocité.

Il faut enfin, comme je l'ai indiqué précédemment, que l'accord engage toutes les administrations des deux parties, y compris les États fédérés américains et les autorités et agences indépendantes du pays. C'est aussi une exigence-clé dans le domaine des services financiers. Nous avons un intérêt offensif à ce que ceux-ci soient inclus dans la négociation et à ce que l'on aboutisse à une convergence des normes comptables et prudentielles. En effet, l'accès au marché américain est encore limité pour les entreprises européennes dans les secteurs de la gestion d'actifs et de l'assurance. Ce sont les États fédérés qui ont compétence pour réglementer le secteur de l'assurance et certains imposent des obligations particulières en matière de réassurance, notamment sur les collatéraux ; conformément à la loi américaine, certains États fédérés attribuent le statut de « qualified jurisdiction » – qui permet d'alléger ces obligations – à des États membres de l'Union, dont l'Allemagne et le Royaume-Uni, mais pas la France. Les difficultés se sont par ailleurs accrues avec le projet de transposition du Dodd-Frank Act par la Réserve fédérale, qui imposerait un traitement discriminatoire aux banques étrangères installées aux États-Unis en ce qui concerne les exigences prudentielles. Là aussi, nous devons être très exigeants. Le Trésor américain ne souhaite pas que les services financiers soient inclus dans la négociation et le négociateur explique qu'il n'a pas d'autorité sur les organismes de régulation. Mais un éventuel accord s'appliquerait en revanche à l'ensemble des États membres de l'Union européenne et de leurs autorités de régulation et il faut donc trouver un équilibre.

Notre position doit être forte également sur la protection et la reconnaissance des indications géographiques, essentielles pour nos consommateurs et nos agriculteurs. C'est, on le sait, un sujet ancien de litiges avec les États-Unis. Le système de protection américain repose sur les marques alors que le nôtre, sui generis, est indépendant du droit des marques.

Certaines filières agricoles et agro-alimentaires ne peuvent pas être compétitives face aux filières américaines, vu la disparité des coûts de production, liée notamment au respect de certaines normes et bien-être animal, ainsi qu'au coût de l'énergie. Il faut pouvoir préserver une protection tarifaire pour ces filières et produits sensibles. Les éleveurs, les producteurs de maïs et d'amidon notamment sont très inquiets, nous l'avons constaté au cours de nos auditions.

Enfin, cet accord, qui servira de référence dans les négociations commerciales futures, se doit d'être très exigeant sur le respect de nos services publics et services d'intérêt général ainsi que des normes sociales et environnementales. Dans leurs différents accords de libre-échange, les États-Unis ont inclus des clauses environnementales et sociales, mais sans référence aux textes adoptés dans le cadre des instances multilatérales. Les États-Unis n'ont ratifié que deux des conventions fondamentales de l'Organisation internationale du Travail (OIT), celles relatives à l'abolition du travail forcé et des formes les plus inacceptables du travail des enfants. De même, en matière environnementale, ils n'ont ratifié ni le protocole de Kyoto ni la convention de Rio relative à la biodiversité, ni la convention de Stockholm relative aux polluants organiques persistants. Et ils ont jusqu'à présent refusé toute contrainte en matière de lutte contre le réchauffement climatique et tout engagement de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. Les ONG américaines que nous avons rencontrées attendent de l'Union européenne qu'elle ne baisse pas la garde et comptent sur elle pour élever le niveau d'exigence des normes sociales et environnementales outre-Atlantique. Ces ONG citent souvent le règlement européen REACH sur les substances chimiques comme un exemple de protection des citoyens qui pourrait être étendu. On voit aussi que certains États fédérés limitent actuellement les droits des syndicats.

Ce projet d'accord pourrait enfin être l'occasion d'introduire dans le cadre des négociations commerciales des problématiques nouvelles essentielles comme le dumping monétaire. Sur ce sujet, nous avons auditionné des représentants de l'OMC, du FMI et de la Banque mondiale. L'article 15 du GATT (General Agreement on Tarifs and Trade) interdit toute manipulation monétaire destinée à entraver le commerce international. Or, l'OMC décline sa compétence pour appliquer cette disposition, soulignant notamment qu'il n'existe pas de jurisprudence sur le sujet. Le Brésil avait demandé qu'un groupe de travail soit mis en place, en partenariat avec le FMI, mais sa demande n'a pas abouti. Les économistes du FMI que nous avons rencontrés nous ont expliqué que l'organisation avait à déterminer ce qui était, en aucun cas à apporter des éléments tendant à prouver qu'un État manipule sa monnaie. La preuve de la manipulation est de toute façon très difficile à établir et, en tout état de cause, les décisions devraient être prises par le conseil d'administration, où siègent justement des États soupçonnés de recourir à de telles pratiques…

La présente proposition de résolution reprend tous ces points, avant de conclure sur la nécessité d'un cadre de négociation qui permette un contrôle démocratique. En effet, la Commission européenne est compétente pour négocier au nom des États. Conformément au traité de Lisbonne, le Parlement européen, dont la résolution n'est pas contraignante, sera tenu informé de l'évolution des négociations et devra ratifier l'accord. Quant aux parlements nationaux, ils ne seront consultés qu'au moment de la ratification. Il est donc important que, dès la définition du mandat, nous défendions nos positions avec force. Les 26 autres États-membres sont favorables à l'entrée dans les négociations, mais nous n'avons pas nécessairement la même position qu'eux sur un certain nombre de points. Ainsi, le premier ministre britannique, David Cameron, s'est-il déclaré favorable à ce que tout soit mis sur la table des négociations. Ce n'est absolument pas notre position. De même, la Chancelière allemande, Angela Merkel, influencée par son lobby industriel, est très allante sur cet accord. L'Allemagne exporte un million de voitures par an aux États-Unis : cet accord constituerait donc pour elle une opportunité.

En conclusion, les États-Unis considèrent cet accord nécessaire parce qu'ils refusent que les futures normes mondiales soient établies par les pays émergents. Pour notre part, nous avons des intérêts offensifs à défendre – le secteur de la chimie par exemple nous a dit être très favorable à cet accord. Mais nous ne devons pas nous engager dans les négociations en position de faiblesse. Nous devons défendre nos intérêts. (applaudissements)

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Ces applaudissements sont mérités. Nous en venons aux questions de nos collègues.

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Je tiens à féliciter la rapporteure pour son excellent travail, qu'il s'agisse de son rapport écrit ou de la présentation orale qu'elle vient d'en faire.

S'agissant des relations commerciales multilatérales, la question du mandat de négociation est essentielle. Faute d'avoir été vigilants au début des années 1990, notamment sur les questions agricoles, nous avons eu beaucoup de mal à remonter la pente par rapport aux positions, imprudentes mais délibérées, du négociateur européen. Cette expérience nous a appris combien il était important d'encadrer strictement le mandat de négociation. Cela le sera d'autant plus en l'espèce que les États-Unis sentent l'Union européenne plus « affamée » qu'eux-mêmes de cet accord. Mais est-ce vraiment les nations européennes qui en ont faim ou tel responsable actuellement en poste qui poursuit une stratégie et un intérêt personnel ? Il ne s'agit pas de critiquer le président de la Commission en lui-même, mais ne soyons pas naïfs. Il faut être extrêmement ferme et vigilant sur le mandat de négociation.

Méfions-nous également des données macro-économiques brandies comme argument en matière de négociations commerciales multilatérales. En effet, l'avenir est systématiquement présenté comme radieux avec une augmentation des échanges, de la croissance et des créations d'emplois à en attendre. Mais cet argument d'autorité, en général asséné comme une vérité d'évidence, n'a jamais été prouvé. Souvenons-nous de ce qui fut dit en son temps du coût de la non-Europe ou des arguments avancés en faveur du cycle de Doha. Les négociations dans le cadre de l'OMC ont achoppé. Le monde ne s'est pas écroulé pour autant et le protectionnisme ne s'est pas généralisé. Il faut donc raison garder. Vous citez avec justesse dans votre projet de rapport, madame, les travaux approfondis du Mouvement pour une organisation mondiale de l'agriculture (MOMAGRI) qui montrent qu'il faut se méfier de ces projections généralistes, souvent produites seulement pour impressionner.

Vous avez parfaitement recensé les intérêts de l'Union européenne en cette affaire. L'agriculture tout d'abord. Sur ce point, la négociation avec le Canada peut constituer un utile round d'observation, qu'il faut suivre de très près car elle pourrait faire jurisprudence. Il y a bien sûr aussi la défense de l'exception culturelle et tout ce qui concerne l'ouverture des marchés publics.

Au total, je n'ai rien à redire à ce projet de résolution qui liste parfaitement les sujets sur lesquels il nous faut être vigilant.

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La qualité du rapport de Seybah Dagoma et la limpidité de sa présentation autorisent que nous soyons brefs dans nos interventions. Je la félicite également de la diligence avec laquelle ce rapport a été élaboré.

Le mandat de négociation qui sera donné à la Commission européenne doit être impératif. Il y va de la défense des intérêts de l'Union, et de ceux de la France.

S'agissant des préférences collectives, je rappelle que le principe de précaution a valeur constitutionnelle en France.

Dernière remarque : j'aurais apprécié qu'on n'utilise pas d'expressions anglo-saxonnes dans ce projet de résolution. Pourquoi, aux alinéas 42, 44 et 68, invoquer la procédure intitulée « trade promotion authority » ou « fast track » ou bien les « international financial reporting standards » ? Je propose donc trois amendements rédactionnels pour supprimer ces expressions. Ce serait le début d'une contre-attaque en faveur de la langue française.

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Hier, la commission des affaires européennes a adopté le rapport de Seybah Dagoma à l'unanimité. Les quelques modifications que nous avons souhaité y apporter y ont déjà été intégrées.

La Commission européenne s'est lancée de manière imprudente en cette affaire, sans tirer les leçons de la négociation en cours avec le Canada, où un mandat flou avait été donné, si bien que maintenant les négociations achoppent presque sur chaque point. Ne commettons pas de nouveau la même erreur avec les États-Unis.

Pur ce qui concerne l'exception culturelle, on a l'impression que la Commission choisit elle-même d'aller à Canossa. Pourquoi irions-nous nous pendre alors que les États-Unis ne nous ont même pas donné la corde ? Steven Spielberg lui-même n'a-t-il pas rendu hommage à l'exception culturelle européenne lors du dernier festival de Cannes ? Au-delà de l'exception culturelle, il y va du modèle européen tout entier et de tout ce à quoi les citoyens européens sont attachés. Il faut tenir compte des différences dans la façon de travailler, de produire, de penser même, entre l'Europe et les États-Unis. Sur les gaz de schiste, dont, nous, écologistes, mais aussi d'autres, jugeons des plus contestables les techniques d'exploitation, les États-Unis n'hésitent pas à foncer. Cela leur permet de disposer provisoirement d'une énergie bon marché, ce qui profite immédiatement au consommateur américain. C'est le seul point qu'ils prennent en considération. Tant pis si du fait de l'exploitation du gaz de schiste, la mythique route 66 de Jack Kerouac, qui les traverse de part en part, s'est effondrée ! Ils ne soucient plus non plus de leurs centrales nucléaires. Ce n'est pas du tout la logique européenne, beaucoup plus régalienne.

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Vous êtes donc favorable aux centrales nucléaires ?

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Je ne suis favorable ni au nucléaire ni aux gaz de schiste. Je milite pour les énergies et les techniques propres, ainsi que pour l'efficacité énergétique, ce qui permettrait de surcroît de créer des emplois.

La commission des affaires européennes a voté ce projet de résolution à l'unanimité parce qu'il est prudent et qu'il donne à la Commission un mandat très restrictif, dans le respect de l'identité et de la diversité européenne.

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Je souligne à mon tour l'exceptionnelle qualité du travail de la rapporteure.

Peut-on aujourd'hui défendre des présupposés idéologiques allant à l'encontre de l'expérience et de ce que nous a appris la science économique depuis un siècle et demi ? Prétendre que les vertus du libre-échange ne sont vantées que par « des modèles économiques réducteurs aux présupposés libéraux », c'est faire fi du mouvement de pensée, qui a débuté avec David Ricardo, Stuart Mill et Adam Smith, dont les idées ont fait leurs preuves de manière incontestée, comme en atteste l'exemple de l'Angleterre où est née la révolution industrielle et de l'Empire britannique. Votre argument, madame la rapporteure, risque de ne pas rencontrer grand succès dans une négociation internationale. En outre, l'arbre ne doit pas cacher la forêt. La liberté des échanges a certes conduit, je ne le conteste pas, à des effets pervers, des inégalités, voire des drames. Pour autant, l'expérimentation inverse, que nous avons connue avec l'économie fermée et le rouble non convertible de l'Union soviétique, n'a eu que des succès bien moindres. Ne risquons donc pas le ridicule ! Un accord de libre-échange entre les États-Unis et l'Union européenne est une chance pour les deux entités.

Pour ce qui est de la localisation des investissements, notre commission pourra travailler dans le cadre de la mission commune créée avec la commission des affaires économiques sur l'investissement étranger, présidée par notre collègue François Scellier.

Il faut se garder d'énormes contre-sens sur les différences entre l'Europe et les États-Unis en matière fiscale et sociale. Les charges sociales conventionnelles sur le travail ne sont pas outre-Atlantique ce que l'on a tendance à croire en France, le droit du travail américain non plus. La CGT n'oserait même pas proposer la clause d'exclusivité syndicale (« union shop »), en vigueur dans un grand nombre d'États fédérés américains !

Vous avez raison, madame la rapporteure, de faire allusion aux différences de politique monétaire entre les deux rives de l'Atlantique, et vous abordez le sujet avec justesse. Il y a le rôle des banques centrales, les politiques de change, mais surtout des différences structurelles fondamentales. L'appel public à l'épargne représente 80 % du concours à l'économie aux États-Unis et les concours bancaires 20 %. C'est l'inverse en Europe, ce qui rend difficile toute comparaison.

Ce qui est demandé à l'alinéa 64 du projet de résolution reviendrait à exiger une réforme fondamentale de la Constitution des États-Unis, puisque cela remet en cause rien moins que leur structure fédérale. Je doute donc de la possibilité d'atteindre l'objectif !

Enfin, s'agissant des recommandations du comité de Bâle, dites Bâle III, les États-Unis et l'Europe ont une approche très différente. Les États-Unis souhaitent en théorie interdire le trading pour compte propre. C'était l'un des objectifs du Glass-Steagall Act. En France, le projet de loi de séparation et de régulation des activités bancaires n'a, hélas, introduit cette disposition que de façon homéopathique. Cela étant, les États-Unis n'ont pas encore appliqué la Volcker Rule, introduite dans le Dodd-Franck Act de juillet 2010 et qui vise à limiter les investissements spéculatifs des banques.

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À mon tour, j'adresse mes compliments à notre rapporteure pour la qualité et la pertinence de ses analyses. Le marché transatlantique favorise les fusions-acquisitions d'entreprises, si bien que les multinationales contrôlent de plus en plus l'économie et la finance. En 2005, les 500 plus grandes entreprises au monde contrôlaient déjà la moitié du commerce mondial. Le futur accord de libre-échange ne risque-t-il pas d'accentuer cette tendance, au détriment des PME et des indépendants ? Quelle est la position des représentants du patronat sur cet accord ? Vous les avez certainement auditionnés.

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Je salue moi aussi le travail de la rapporteure. Pour autant, je ne partage pas le consensus général. Je ne crois pas à un mandat impératif que le Parlement français pourrait donner à l'exécutif, et encore moins au mandat impératif que l'exécutif français pourrait imposer à Bruxelles.

La négociation sera inégale et extrêmement difficile avec les États-Unis, entité économique et politique soudée, alors que les 27 États-membres de l'Union ont des positions divergentes sur de nombreux points. Pensons à l'attitude du Royaume-Uni ou de la Pologne.

Il aurait fallu dresser un bilan préalable du libre-échangisme et du libéralisme et analyser leurs conséquences sur les politiques européennes. On espère que le développement des relations économiques avec les États-Unis permettra de gagner quelques points de croissance. Il est étonnant que l'Union européenne, première économie mondiale, s'en remette ainsi aux États-Unis pour la relance de sa croissance.

Je souscris en revanche au projet de résolution. Je suis d'accord sur les limites à poser, mais ne pense pas, hélas, que ce texte puisse infléchir en quoi que ce soit l'attitude du Conseil européen ni ultérieurement la négociation. Or, il est inquiétant que M. Barroso défende l'idée d'inclure le secteur audiovisuel dans le champ de la négociation ou que M. Cameron souhaite que tout soit mis sur la table. Nous avons raison de résister et de tenter d'imposer un mandat offensif, à défaut qu'il puisse être impératif. Bon courage aux négociateurs pour obtenir des États-Unis qu'ils ouvrent leurs marchés publics ! Nul n'ignore non plus que des mesures protectionnistes y ont été prises dans plusieurs secteurs, comme celui de l'acier. On sait aussi ce qui est advenu du marché des avions ravitailleurs.

Bien qu'ils en partagent la philosophie, les députés du Front de gauche ne voteront pas ce projet de résolution, convaincus que l'avis, fût-il généreux, de notre Parlement ne comptera pas.

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Je crains de partager l'avis de M. Asensi sur ce projet de résolution, qui risque de n'être pas d'un grand poids. Je n'en félicite pas moins Mme Dagoma, que j'ai eu la chance de connaître lorsqu'elle était élue municipale dans la première circonscription de Paris dont je suis l'élu. Elle vient de nous présenter avec beaucoup d'intelligence et compétence un rapport d'une très grande technicité.

Je milite depuis longtemps en faveur d'un accord de libre-échange transatlantique. Depuis l'échec du cycle de Doha, le commerce international s'organise par le biais d'accords régionaux, sub-régionaux et inter-régionaux. Il est indispensable que les deux zones historiquement liées que sont l'Union européenne et les États-Unis aillent au-delà des accords de défense de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) afin de consolider une relation économique, déterminante pour l'économie européenne et pour l'économie française, qu'il s'agisse des exportations ou des investissements.

Le commerce extérieur est, hélas, une compétence totalement fédéralisée en Europe. Une fois la position française arbitrée au niveau interministériel et après notre intervention – pour autant que nous ayons le temps pour cela –, elle sera transmise à Bruxelles. Une fois connus les différents mandats que chacun des États membres souhaite donner à la Commission, le commissaire Karel de Gucht arbitrera et élaborera le mandat de négociation européen. Il est donc fondamental que nous fassions connaître préalablement d'éventuelles lignes rouges. En effet, la négociation aura ensuite lieu hors du contrôle des États et bien sûr des Parlements nationaux. À cet égard, je souhaiterais savoir de l'équipe de Bercy si tous les secteurs-clés de l'économie française ont bien été consultés en amont. Je crains que quelques-uns n'aient été oubliés, tant on s'est saisi tardivement du sujet.

L'attitude de certains partenaires européens, quand les intérêts de leur pays sont en jeu, m'inquiète. Je pense par exemple à ce qui s'est passé en Allemagne lors de la visite du Premier ministre chinois en Allemagne la semaine dernière. Après des années d'hésitation sur la question des panneaux solaires – la France avait plaidé, sans succès, en faveur d'un durcissement de la position européenne – et devant l'effondrement de son industrie en ce domaine, l'Union européenne a décidé d'augmenter de 40 % les droits de douane sur les panneaux en provenance de Chine, après que les États-Unis ont, eux, décidé de les taxer à 250 %. Mais d'éventuelles sanctions ont été bloquées par l'Allemagne, qui exporte l'essentiel de ses véhicules en Chine, ces exportations représentant plus de la moitié des 180 milliards de son excédent commercial.

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Nous n'avons pas tous les mêmes intérêts et nous voulons faire l'Europe ! Le découvrez-vous seulement aujourd'hui ?

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Plusieurs responsables français, dont la ministre du commerce extérieur, sont tentés d'exclure a priori certains secteurs comme l'agriculture et les biens culturels. Cela serait contre-productif. En effet, le Congrès américain fera alors de même de son côté, et le champ de la négociation se réduira comme peau de chagrin. Dussé-je être le seul de cet avis ici, je pense qu'il faut tout mettre sur la table des négociations, notamment le secteur de la défense. Ne nous leurrons pas, il n'y pas de marché unique pour l'industrie militaire en Europe, seulement des morceaux d'industries nationales qui sont en train d'être rachetés par les États-Unis. Si nous voulons pouvoir intervenir demain sur le marché américain, il faut faire tomber les barrières non tarifaires. Cet accord le permettra. Sinon, autant renoncer de suite à cet objectif !

Il faudrait éviter que le projet de résolution n'énonce une série de voeux pieux. Que les États-Unis ne jouent pas du niveau du dollar en fait partie. Qui pourrait croire que cet accord est de nature à modifier la politique de change des États-Unis ou à les conduire à réviser leur Constitution ? Si on trouve l'euro trop fort, c'est à la Banque centrale européenne qu'il faut demander d'intervenir ! Et si on veut ouvrir les marchés de tel ou tel État fédéré, il suffit d'appliquer le principe de réciprocité. Il faut en avoir la volonté politique et faire pression sur la Commission. On fait bien jouer cette clause avec le Canada, lorsque Bombardier gagne des marchés de renouvellement des trains en banlieue parisienne et que la France ne peut toujours pas exporter les siens dans certaines régions canadiennes.

J'en viens au suivi parlementaire. Le Congrès américain suit de très près tous les accords commerciaux internationaux et les parlementaires n'hésitent jamais à réclamer une mesure protectionniste pour protéger une production de leur État. Je souhaiterais que nous fassions de même. Madame la présidente, notre commission peut se donner les moyens de suivre étroitement la négociation. Il suffit d'en avoir la volonté politique. Mettons en place une sous-commission qui en sera spécifiquement chargée. À défaut, ne nous plaignons pas que le Congrès américain soit plus efficace que nous !

En conclusion, il me paraît bien tardif de traiter seulement aujourd'hui de ce sujet alors que le Conseil européen doit se prononcer le 14 juin. Je ne suis pas certain non plus que tout le travail de concertation en interne côté français ait été fait. Il faudra négocier fermement à Bruxelles pour que d'autres États ne risquent pas d'imposer des points que nous refusons. Il faudra ensuite assurer le suivi parlementaire étroit que j'appelle de mes voeux. Enfin, ne nous berçons pas d'illusions, plus de secteurs auront été exclus du champ de la négociation, plus cela sera favorable aux États-Unis. Il faut au contraire tout mettre sur la table et ensuite ne pas hésiter à faire des « deals ».

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Soyez rassuré, cher collègue, un suivi est bien prévu, aux modalités duquel nous réfléchissons.

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Je m'associe aux félicitations déjà adressées à Seybah Dagoma. Au-delà de cet accord de libre-échange et du mandat de négociation à donner à la Commission européenne, regardons le cadre plus général dans lequel tout cela s'inscrit. On ne joue pas aux billes, mais aux échecs. C'est une guerre commerciale. Cet accord aura des répercussions sur les pays émergents, notamment la Chine, la Russie, l'Inde et le Brésil. Sa perspective préoccupe d'ores et déjà les autorités chinoises. Avons-nous une véritable stratégie permettant de parvenir à terme à réguler vraiment l'ensemble du marché mondial ?

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À mon tour de féliciter Seybah Dagoma pour la qualité de sa proposition de résolution. Comme mon collègue François Asensi, je doute fort qu'en dépit de sa qualité, ce texte puisse influencer la position du Conseil des ministres européen, d'autant que le président Barroso pousse cet accord pour des raisons n'ayant rien à voir avec la libéralisation des échanges.

Nous nous sommes battus à la fin des années 1990 contre l'accord multilatéral sur les investissements (AMI), que le Premier ministre Lionel Jospin avait, à juste titre, stoppé. Nous sommes aujourd'hui face à un accord du même type par lequel les États-Unis espèrent modifier certains règlements afin de pouvoir pénétrer plus facilement le marché chinois et également nous envahir de certains produits. Ils sont en train d'utiliser cet accord sur le dos de l'Union européenne. L'exemple de l'ALENA est éclairant. Aujourd'hui, une entreprise peut se battre contre un État, alors que les règles de l'OMC exigent que les différends soient réglés d'État à État. Avec le futur accord transatlantique, des multinationales pourront s'attaquer directement à des États au motif qu'elles ne peuvent pas faire tous les profits qu'elles souhaiteraient ou engager des plans sociaux à leur convenance.

Le groupe Vert au Parlement européen se battra avec détermination contre ce projet d'accord qui, en réalité, ne vise pas à accroître les échanges de part et d'autre de l'Atlantique puisqu'un tiers du commerce mondial déjà est transatlantique et que les barrières tarifaires ne sont pas très élevées, mais à modifier les normes et les règlements. Danielle Auroi a évoqué les OGM. On pourrait citer aussi l'exception culturelle, pour la défense de laquelle nous nous sommes trouvé un allié formidable en la personne de Steven Spielberg, président du dernier festival de Cannes !

Qu'on ne s'y trompe pas, les États-Unis cherchent à pénétrer les marchés européens, pas seulement dans le domaine agricole. Pour nous, la priorité devrait être à l'intégration européenne. Comment favoriser une Europe qui soutienne l'industrie et l'innovation, qui produise moins de CO2 et donc contribue moins au réchauffement climatique, qui soit capable d'éradiquer les paradis fiscaux en son sein et d'aller vers l'harmonisation fiscale, qui ait les moyens de stopper des crimes contre l'humanité, ce qui se suppose qu'elle se dote d'une véritable politique étrangère et d'une politique de défense commune ? Là est la priorité.

Je suis hostile à cet accord qui, sous un habit différent, ressemble à s'y méprendre au défunt AMI. Nous ferons tout pour nous y opposer. En revanche, je voterai le projet de résolution, même si j'en connais les limites – comme vous d'ailleurs, madame la rapporteure.

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Beaucoup de choses ont déjà été dites que je partage, notamment par Hervé Gaymard. On a raison de balayer un champ assez vaste dans ce projet de résolution. Plus nous fournirons d'éléments à la Commission, plus nous aurons de chances d'en voir retenus.

L'Union européenne part avec un handicap dans cette négociation. Ayant accompagné la rapporteure la semaine dernière aux États-Unis, j'ai pu constater que nous y sommes perçus comme demandeurs. Les parlementaires que nous avons rencontrés sont plus préoccupés pour l'instant par l'accord transpacifique.

Il y a des lignes rouges à ne pas franchir, dans le domaine de l'agriculture et du cinéma – que les États-Unis appréhendent comme une industrie, alors que nous l'abordons, nous, plutôt sous l'angle de l'exception culturelle. Le monde agricole français s'inquiète de la préservation de la souveraineté alimentaire de l'Europe. Les éleveurs sont très inquiets.

Il faut tendre à une convergence réglementaire entre les États-Unis et l'Union européenne. Les droits de douane étant déjà très faibles, l'essentiel de l'enjeu porte sur la suppression des barrières non tarifaires qui pèsent sur la compétitivité des entreprises européennes et constituent autant d'obstacles au commerce. Cela dit, l'industrie automobile française est extrêmement réservée sur cet accord.

Pour le reste, il serait présomptueux de penser pouvoir obtenir des États-Unis qu'ils modifient la répartition des compétences entre État fédéral et États fédérés. Au travers de nos rencontres avec diverses organisations professionnelles et ONG américaines, nous avons ressenti qu'elles comptaient sur l'Union européenne pour faire avancer leurs problématiques. Pour autant, elles ne se font pas d'illusions. Les OGM aussi bien que le gaz de schiste sont vraiment entrés dans les mentalités américaines, et on aura beaucoup de mal à peser sur ces sujets-là aux États-Unis.

Pierre Lellouche a raison, nous nous y prenons un peu tard par rapport à la date du 14 juin. Mais dans l'esprit des Américains, il est clair que la négociation prendra du temps et que Barack Obama aura sans doute terminé son mandat avant qu'elle ne soit bouclée.

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Bon an mal an, le commerce mondial croît d'environ 7 % chaque année. Ne faisons donc pas croire que ce type d'accords de libre-échange serait indispensable à sa santé. Indépendamment de tous accords, il se porte bien. Et s'il y a actuellement des difficultés En Europe, c'est plutôt à cause de la récession dans la zone euro. Ne perdons jamais de vue que le commerce extérieur représente 10 % du PIB aux États-Unis, contre 23 % à 24 % chez nous.

Je suis effaré par les propos que j'entends ce matin s'agissant du mandat de négociation de la Commission. Vous avez tous voté les traités européens. Ne venez pas déplorer maintenant le fonctionnement fédéral de l'Union européenne ! Soyez cohérents ! « Dieu se moque de ceux qui chérissent les causes de leurs malheurs », écrivait Bossuet. Ou bien on accepte une Union fédérale, ou bien on exerce son droit de veto. Ce qui s'est passé récemment avec l'Allemagne montre que les règles adoptées ne sont pas appliquées.

S'agissant des industries de défense, je suis en désaccord total avec Pierre Lellouche. Libéraliser ce secteur, ce serait condamner les industries d'armement européennes à disparaître. Les États-Unis ont en effet d'importants surplus et ils gagneront toujours les marchés, comme ils l'ont fait en Pologne, parce que leurs prix sont imbattables grâce à leur complexe militaro-industriel.

Si on se contente de signer un accord avec le département d'État sans qu'il soit ratifié par le Congrès, cela ne sera que poudre de perlimpinpin car il ne liera pas les États fédérés. Si nous ne pouvons modifier la Constitution américaine, nous pouvons exiger que l'accord soit sanctionné par un vote du Congrès.

Il faut absolument que la réglementation bancaire issue de Bâle III figure dans la négociation. Les États-Unis viennent d'interdire aux banques européennes, considérées comme des banques étrangères, de lever des dollars américains. Ce n'est autre que du protectionnisme.

En conclusion, ne nous lamentons pas sur le fonctionnement de l'Union européenne. Vous l'avez voulu, moi pas. Ne nous étonnons pas aujourd'hui de nous retrouver Gros-Jean comme devant.

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Je félicite moi aussi la rapporteure pour la présentation de son rapport, assurément l'un des plus beaux que nous ayons eu à examiner depuis le début de la législature.

Même s'il est arrivé que l'Union européenne fasse preuve de naïveté, ne soyons pas naïfs aujourd'hui, mais pragmatiques. La situation respective des balances commerciales des États-Unis et de l'Union européenne est aussi différente que celle des différents États membres de l'Union. Or, l'analyse de chacun dépend d'abord de la situation de son commerce extérieur.

Un mandat de négociation constitue une opportunité. Encore faut-il avoir confiance dans les négociateurs. Pour le reste, des inconnues importantes demeurent, notamment sur l'application des normes et la traçabilité. La Chine, qui ne participe pas à cette négociation, se tient à l'affût, prête à tirer les marrons du feu.

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J'adresse moi aussi mes félicitations à la rapporteure. La question n'est pas de savoir si on est pour ou contre le libre-échange, mais si on continue à signer des accords déséquilibrés instaurant un libre-échange déloyal qui tue notre économie. Être naïf dix fois de suite, c'est un suicide. Le problème est que le mandat de négociation va être confié à des personnes qui ne défendent pas les intérêts européens, mais sont soumises à des intérêts extérieurs et défendent une vision personnelle. Je vois un symbole dans le fait que nous examinions cette proposition de résolution en ce 29 mai, alors que voilà huit ans, jour pour jour, le peuple français rejetait le projet de Constitution européenne. Le pouvoir est certes passé outre ce rejet en signant le traité de Lisbonne qui a supprimé le droit de veto des nations, qui était pourtant le seul levier d'action et qui a permis en son temps de sauver certaines négociations.

Pour le reste, je suis ravi que l'on défende l'exception culturelle, mais il m'étonnera toujours que dans notre pays, les ouvriers n'aient pas la chance d'être défendus comme les acteurs. J'aimerais que l'on étende le protectionnisme qui a sauvé le cinéma français au reste de l'économie, au lieu de se contenter de défendre un pré carré.

Une fois n'est pas coutume, je rejoins Noël Mamère. Ce projet de résolution, aussi louable soit-il, ne suffira pas. Il ne s'agit pas d'aménager cet accord transatlantique, mais de le combattre ainsi que ses présupposés. Ce sera l'un des éléments-clés du débat politique dans les années à venir, car sa négociation va durer. Ce sera l'occasion de voir si les États démocratiques peuvent encore s'opposer aux multinationales qui font les normes. Ne laissons pas la Commission européenne continuer de ruiner nos nations.

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J'adresse tous mes compliments à notre rapporteure pour la densité et la lucidité de son rapport. Elle a bien mis en évidence le haut degré d'exigence qui doit être le nôtre dans la négociation. Il est un point néanmoins sur lequel je nous trouve timorés. L'Union européenne arrivera à la table des négociations avec une position commune, espérons-le. Les États-Unis, eux, pourront toujours trouver des échappatoires par le biais des États fédérés pour ne pas appliquer l'accord, leur droit constitutionnel leur permettant de jouer entre le niveau fédéral et le niveau des États. Ce n'est pas acceptable. Pourquoi serait-il impensable de faire évoluer la Constitution américaine ? Qu'y aurait-il d'infâmant à dire aux États-Unis que pour qu'il soit possible de conclure un accord avec eux, il faudrait qu'à l'instar de ce que fera l'Union européenne, ils aient une position unique, commune à tous leurs États ?

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Je remercie Mme Dagoma pour son rapport. La presse a essentiellement mis en avant les exclusions que la France et ses partenaires européens souhaitent dans cet accord, comme celles des biens culturels et de l'audiovisuel. Cette proposition de résolution demande que soient également exclus les secteurs de la défense et de la sécurité et que les dispositions communautaires relatives au clonage du bétail, à l'utilisation des hormones de croissance dans les élevages, aux OGM ou bien encore à la décontamination chimique des viandes ne soient pas remises en question. Les États-Unis de leur côté souhaitent-ils exclure certains secteurs du champ de la négociation ? Sait-on déjà les points de blocage qui pourraient freiner la négociation, sachant que sa durée probable est aujourd'hui estimée à deux ans ?

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L'administration américaine semble souhaiter exclure les services financiers.

Je souscris à la philosophie consistant à instaurer des garde-fous et établir des lignes rouges dans cette négociation asymétrique, comme l'a excellemment rappelé la rapporteure. Je salue son travail et l'approche collective qu'elle a permise sur ces sujets.

Nous soutiendrons le Gouvernement français dans sa demande que les services et biens culturels, les préférences collectives et les industries de défense soient exclus. Nous sommes très attachés à ce que tous les volets de la négociation – barrières tarifaires, barrières non tarifaires et ouverture des marchés publics – soient examinés parallèlement. Rien ne doit être conclu sur aucun point tant que tout n'a pas été traité.

Le projet de mandat du commissaire Karel de Gucht est extrêmement large, n'excluant aucun domaine du champ de la négociation. La semaine dernière, le Parlement européen a adopté un projet de résolution, à la demande des parlementaires socialistes français, qui en exclut le secteur culturel, donc protège l'exception culturelle, point qui ne figurait pas initialement dans le projet de mandat. Une résolution du Parlement européen pèse peut-être davantage qu'un ensemble de résolutions des États membres. Il faudrait donc mieux se coordonner avec les députés européens. Comment travailler avec eux ? C'est indispensable pour être plus efficace.

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Nous souscrivons au rapport qui nous est présenté et que nous aurions pu cosigner. Il est important que les secteurs des biens et services culturels, de l'agriculture et de la défense soient exclus du champ de la négociation de cet accord – auquel je suis favorable. Un important travail a été mené au Parlement européen entre le Parti populaire européen (PPE) et le Parti socialiste européen (PSE) sur le sujet de l'exception culturelle et c'est à une très large majorité que le Parlement s'est prononcé en faveur de la position française. Il faudra en effet voir comment assurer le suivi de cet accord en liaison avec les députés européens.

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Un suivi sera organisé, en liaison avec les parlementaires européens. Nous réfléchissons à ses modalités. Le groupe de travail qui est en place est tout à fait désigné pour en être le lieu. Un point sur l'état d'avancement des négociations sera aussi régulièrement fait devant notre commission.

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Je remercie l'ensemble des intervenants. Monsieur Giacobbi, nous ne sommes pas en Corée du Nord ! Nous ne sommes pas hostiles aux échanges mondiaux. Nous considérons simplement qu'ils doivent être justes et la situation actuelle ne nous paraît pas satisfaisante.

Les accords commerciaux sont normalement votés à la majorité qualifiée au sein de l'Union. Mais comme cet accord transatlantique touche aux aspects commerciaux de la propriété intellectuelle et aux investissements directs, il semblerait qu'une décision à l'unanimité soit requise. La question est en débat. De toute façon, comment pourrait-on avancer si la France d'emblée posait son veto ?

Nous demandons dans ce projet de résolution que soit adoptée la procédure de fast track – je vous prie d'excuser cette expression anglo-saxonne, monsieur Dufau –, qui habilite le président des États-Unis à négocier l'accord, le Congrès, qui a compétence en matière de commerce international, ne pouvant ensuite que l'approuver ou le refuser, sans pouvoir l'amender.

Je ne partage pas le point de vue selon lequel, au motif que le libre-échange est critiquable, mieux vaudrait pratiquer la politique de la chaise vide. Il faut entrer dans la négociation et y défendre nos intérêts. J'entends bien l'argument selon lequel les États-Unis ne vont pas réformer leur Constitution pour conclure un accord de libre-échange. Mais si aucune réciprocité n'est possible, il faudra être dur. Telle est en tout cas ma position.

Je ne reviens pas sur le recours à l'arbitrage. Il doit absolument être exclu du mandat de négociation.

Comment cet accord s'inscrit-il dans le contexte mondial ? Les parlementaires américains que nous avons rencontrés ne nous ont pas caché que leur priorité était l'accord transpacifique, auquel seront parties tous les États de la zone, sauf la Chine. Or, le déficit commercial des États-Unis vis-à-vis de la Chine s'élève à 315 milliards de dollars. Nous avons, pour notre part, un accord de libre-échange en négociation avec le Japon, partie prenante à l'accord transpacifique. Le Japon se trouvera donc en quelque sorte en position d'arbitre.

Je ne partage pas du tout l'avis de M. Lellouche selon lequel tout devrait être mis sur la table des négociations, y compris le secteur de la défense. Il doit absolument en être exclu.

Lors de nos auditions, nous avons rencontré les représentants des PME, notamment la CGPME. Ils nous ont exposé les problèmes structurels qu'ils rencontrent pour exporter et ont insisté sur le coût que représentent les barrières non tarifaires, notamment les procédures administratives.

Monsieur Giacobbi, si j'ai qualifiée de « réducteurs » les modèles sur lesquels se fondent les études d'impact, c'est que seulement vingt secteurs ont été décrits et que le monde y a été divisé en onze zones. Quant aux « présupposés libéraux » de ces études, c'est que la concurrence y est supposée « pure et parfaite » et que la question des inégalités de revenus comme celle de la répartition des gains éventuels du libre-échange y sont totalement ignorées.

La traçabilité est un sujet important. Pour l'alimentation, notre système repose sur une traçabilité et des contrôles « de la fourche à la fourchette ». Le système américain est totalement différent : on s'y moque de l'étape de la production mais à l'autre bout de la chaîne, on décontamine à l'eau de Javel. Nos conceptions sont radicalement opposées. Il faudra tenir bon sur les nôtres.

Les négociateurs américains disent pour l'instant que tout est mis sur la table. Je pense pourtant que le secteur financier sera exclu, de même que ce qui touche aux transports maritimes et aériens. La négociation sera aussi très dure sur l'ouverture des marchés publics.

En conclusion, je pense qu'il faut entrer dans cette négociation. La France ne peut pas s'isoler en la refusant seule. Mais le mandat doit être strict et exigeant. Nous verrons bien ensuite ce qui adviendra. Nous défendrons nos intérêts, les États-Unis défendront les leurs. Après les auditions que nous avons eues là-bas, je pense que si l'accord devait être conclu aujourd'hui, il ne faudrait pas, en l'état, le signer. Mais négocions. Il sera toujours temps de prendre position à la fin des négociations.

La commission adopte les amendements rédactionnels AE 1, AE 2 et AE 3 de M. Jean-Pierre Dufau.

La commission adopte l'article unique de la proposition de résolution ainsi modifiée.

Information relative à la commission

Au cours de sa première séance du mercredi 29 mai 2013, la commission des affaires étrangères a nommé Mme Seybah Dagoma, rapporteure sur la proposition de résolution européenne sur le mandat de négociation de l'accord de libre-échange entre les États-Unis et l'Union européenne (n° 1060).

La séance est levée à onze heures vingt.