Commission des affaires sociales

Réunion du 3 octobre 2012 à 9h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES SOCIALES

Mercredi 3 octobre 2012

La séance est ouverte à neuf heures dix.

(Présidence de Mme Catherine Lemorton, présidente de la Commission)

La Commission entend M. Jean-Luc Harousseau, président de la Haute Autorité de santé et de MM. Dominique Maigne, directeur, Gilles Bouvenot, président de la commission de la transparence, et Jean-Michel Dubernard, président de la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé, sur le rapport d'activité de la Haute Autorité de santé pour 2011

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Mes chers collègues, nous accueillons ce matin M. Jean-Luc Harousseau, président de la Haute Autorité de santé, accompagné de M. Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité, ainsi que des présidents de deux de ses sept commissions spécialisées : M. Gilles Bouvenot, qui préside la commission de la transparence et qui a été souvent sollicité lors de l'affaire du Mediator ; M. Jean-Michel Dubernard, qui préside la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiTS) et auquel j'adresse un salut particulier puisqu'il a présidé notre commission au cours de la XIIème législature, entre 2003 et 2007.

Créée par la loi du 13 août 2004, la Haute Autorité de santé est une autorité publique indépendante à caractère scientifique. Elle joue un rôle stratégique au sein de notre système sanitaire puisqu'elle tend à renforcer la qualité des soins dispensés à nos concitoyens. À ce titre, la Haute Autorité est notamment chargée d'évaluer scientifiquement l'intérêt médical des médicaments, des dispositifs médicaux et des actes professionnels, de proposer – ou non – leur remboursement par l'assurance maladie, ainsi que de promouvoir les bonnes pratiques et le bon usage des soins auprès des professionnels de santé comme des usagers. Il lui incombe aussi d'améliorer la qualité des soins dans les établissements de santé comme en médecine de ville et de veiller à la qualité de l'information médicale diffusée aux professionnels de santé et au grand public.

La fonction de président de la Haute Autorité est l'une des trois pour lesquelles notre commission doit, en vertu de l'article 13 de la Constitution, donner un avis. C'est du reste ce qu'elle a fait en janvier 2011, lorsque M. Harousseau a été pressenti pour occuper cette fonction. Dès lors, il me paraît justifié que notre commission entende ces personnalités au cours de leur mandat, et c'est pourquoi j'ai accepté la proposition du professeur Harousseau de venir présenter le rapport d'activité de la Haute Autorité pour 2011.

S'il ne me l'avait pas proposé, je l'en aurais d'ailleurs prié compte tenu de la parution récente du livre dangereux de MM. Bernard Debré et Philippe Even. Je n'ose imaginer les conséquences que pourrait avoir cette publication si d'aventure certains patients étaient enclins à la considérer comme la nouvelle bible du médicament !

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Jean-Luc Harousseau, président de la Haute Autorité de santé

Je suis heureux de venir présenter le bilan de la Haute Autorité pour 2011 devant votre commission et je renvoie aux documents qui vous ont été distribués pour le détail des données chiffrées, préférant m'en tenir à quelques observations d'ordre qualitatif.

Je rappelle que l'article L 161-37 du code de la sécurité sociale fait obligation à la HAS d'adresser au Parlement et au Gouvernement un rapport annuel, ce qui a été fait pour 2011.

Comme l'a rappelé Mme la présidente, la Haute Autorité est une institution relativement récente puisqu'elle a été installée en 2005. Les huit membres de son collège sont nommés, deux par le Président de la République, deux par le président de l'Assemblée nationale, deux par le président du Sénat et deux par le président du Conseil économique, social et environnemental. Ce collège que j'ai l'honneur de présider rend environ 2 000 décisions par an. Il s'appuie sur trois directions opérationnelles et un secrétariat général, dirigés par Dominique Maigne, ici présent. Au total, nous avons stabilisé nos effectifs depuis plusieurs années à hauteur de 410 collaborateurs à temps plein et nous disposons de 3 000 experts et professionnels de santé externes, dont près de 700 experts visiteurs chargés de la certification des établissements de santé. En 2011, le budget de la Haute Autorité s'est établi à 58,8 millions d'euros, ce qui représente une diminution de l'ordre de 5 millions d'euros des ressources en provenance de l'État et de l'assurance maladie. Depuis deux ans, nous avons fait un effort particulier pour limiter nos dépenses de fonctionnement, ce qui est très important dans le contexte actuel.

Notre première mission concerne l'évaluation en santé. Je n'insisterai pas sur l'évaluation des médicaments et des dispositifs médicaux, qui est l'objet de rapports spéciaux que vous présenteront les professeurs Bouvenot et Dubernard. L'évaluation des actes professionnels et des technologies de santé est également placée sous l'autorité du Pr Dubernard, car nombre de dispositifs sont implantés dans le cadre d'actes particuliers. Il est donc logique de les étudier conjointement.

En 2011, nous avons établi 22 rapports d'évaluation technologique et 9 documents d'avis. Pour cette activité, nous sommes conduits à solliciter des experts, ce qui peut créer certaines tensions. C'est ainsi qu'un recours devant le Conseil d'État a été déposé contre l'une de nos délibérations concernant les actes de lipolyse. Cela pose le problème de notre indépendance, à laquelle nous sommes bien entendu particulièrement attachés. Il semble inévitable que certaines divergences d'appréciation puissent apparaître à l'occasion de conflits professionnels entre deux grands groupes de métiers, comme dans l'exemple cité.

Avec l'évaluation économique et de santé publique, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2008 nous a confié une nouvelle mission, qui s'est depuis lors fortement développée. L'an dernier, nous avons procédé à 25 évaluations économiques, liées à certaines évolutions dans les stratégies de prise en charge, ou à un nouveau regard médico-économique porté sur certaines classes médicamenteuses, comme pour ce qui concerne le traitement par hormones de croissance des enfants ne présentant pas de déficit particulier sur ce point. Nous avons aussi réévalué plusieurs politiques de santé publique, comme le dépistage des hépatites B et C, des cancers du sein et de la prostate, ainsi que de certaines maladies néonatales.

Le guide de notre action en matière d'évaluation économique que nous venons d'élaborer est important pour l'avenir. En effet, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 a renforcé cette mission de la Haute Autorité en la chargeant d'évaluer certains produits de santé et certains dispositifs médicaux. Le décret d'application de cette disposition n'a pas encore été pris. Outre certaines modalités pratiques, il établira une liste de médicaments devant faire l'objet d'une évaluation médico-économique, en sus de l'évaluation médico-technique incombant à la commission de la transparence. J'insiste sur le fait que cette action vient juste de débuter. S'agissant des primo-inscriptions de nouveaux médicaments, l'évaluation doit être menée rapidement mais nous envisageons aussi de procéder à des ré-évaluations à deux ans qui prendront la forme de véritables analyses médico économiques. Dans le présent contexte budgétaire, il semble pertinent d'évaluer l'efficience de l'ensemble des dispositifs, c'est-à-dire le rapport entre leur efficacité et leur coût.

J'en viens aux missions de la Haute Autorité qui visent à promouvoir la qualité des soins et la sécurité des patients. La première – et la plus connue –, c'est la certification des établissements de santé. Nous certifions l'ensemble des établissements, publics ou privés, de court ou de long séjour, ainsi que les établissements psychiatriques, ce qui représente au total 2 800 structures. L'an dernier, au prix d'un énorme travail des professionnels de santé, nous avons visité près de 1 000 établissements.

La certification des établissements de santé est en train d'évoluer. Elle a fait l'objet en 2011 d'un rapport de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) – en particulier pour ce qui concerne les questions de sécurité – et, en 2012, d'un rapport de la Cour des comptes, les deux documents rendant des conclusions très favorables sur l'action de la Haute Autorité, tant qualitative que quantitative. Ce qui importe à mes yeux, c'est que la troisième itération de cette démarche de certification – la « V 2010 » – participe de la diffusion d'une culture de la qualité dans les établissements de santé, tant au sein des équipes administratives que des équipes soignantes. Dans la perspective de la nouvelle certification qui s'engagera en 2014, nous avons décidé d'arrêter des modalités beaucoup plus tournées vers le patient, en mettant l'accent sur la qualité et la sécurité des soins et en établissant une cartographie des zones à risque dans les établissements. Alors que nous ne les visitons que tous les quatre ans, nous souhaitons aussi rendre le contrôle plus continu afin d'éviter que « le soufflé ne retombe » une fois obtenue la certification.

Parallèlement à la certification des établissements, nous avons mis en place des indicateurs de qualité avec la direction générale de l'offre de soins. Celle-ci recueille des données sur les infections nosocomiales ; la Haute Autorité collecte, elle, d'autres indicateurs, relatifs notamment à la qualité du dossier du patient. Nous y avons ajouté l'an dernier des indicateurs cliniques pour certaines pathologies, comme l'infarctus du myocarde. Tout cela représente beaucoup de travail pour les établissements, chargés au total de suivre une centaine d'indicateurs. C'est pourquoi nous envisageons de leur demander alternativement les indicateurs de procédure et les indicateurs cliniques, de manière à diminuer leur charge de travail.

Je rappelle que la loi nous fait obligation de coordonner et de diffuser au grand public l'information sur les établissements de santé. Ce travail est en cours et j'espère que nous pourrons remplir cette mission début 2013.

Après l'affaire du Mediator, notre mission de certification des moyens d'information médicale a connu un certain retentissement. L'on sait que la visite médicale peut inciter à la prescription, voire induire des déviations de prescription. En partenariat avec le Comité économique des produits de santé (CEPS), nous avons un rôle à jouer en matière de certification des méthodes de la visite médicale. Au 31 décembre 2011, nous avons certifié 132 laboratoires. Comme vous le savez, la loi du 29 décembre 2011 comprend un article relatif à la visite médicale, dont il va vous être proposé d'étendre le champ dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, en vue de privilégier les visites collectives pour éviter les rapports singuliers entre le visiteur médical et le médecin.

Nous sommes également chargés de certifier les très nombreux sites Internet consacrés aux questions médicales. Hélas, ce volet de notre action ne nous satisfait guère dans la mesure où nous nous prononçons davantage sur le contenant que sur le contenu. La loi de sécurité sanitaire nous confie la certification des logiciels d'aide à la prescription : une dizaine sont actuellement certifiés et nous travaillons également sur les logiciels d'aide à la dispensation par les pharmaciens. Avec les professionnels concernés, nous sommes aussi demandeurs d'une action sur le chaînon intermédiaire très important que constituera l'ordonnance numérique.

J'en arrive aux actions de la Haute Autorité visant à améliorer les pratiques professionnelles, en commençant par les recommandations de bonne pratique, lesquelles constituent l'une des missions historiques de notre institution. Elles consistent à donner l'état de l'art dans différentes pathologies. Nous en avons traité dix l'an dernier. J'appelle votre attention sur les difficultés liées à l'exercice de cette mission. L'actualisation des données est difficile à conduire compte tenu de notre charge de travail. Mais le problème essentiel qui se pose à nous est de tout faire pour éviter les conflits d'intérêts, tant avec l'industrie pharmaceutique qu'entre professionnels. Nous avons de plus en plus de mal à trouver des experts. Et comme j'ai déjà eu l'occasion de l'évoquer, l'an dernier, le Conseil d'État a annulé l'une de nos recommandations en raison de soupçons sur la déclaration publique d'intérêts des experts que nous avions associés aux groupes de travail. Avec l'accord du collège de la Haute Autorité, j'ai proposé de retirer sept autres recommandations susceptibles de créer les mêmes difficultés. Nous avons pu réécrire celle sur la maladie d'Alzheimer, ainsi que – non sans mal – celle sur le diabète, qu'il fallait revoir en raison de risques de conflits d'intérêts pour les spécialistes et aussi, j'y insiste, de difficultés pour mettre d'accord généralistes et spécialistes.

Compte tenu de la double exigence de rigueur scientifique et d'indépendance, l'édiction de recommandations de bonne pratique peut prendre plus de deux ans. En 2011, nous avons publié une recommandation qui a fait beaucoup parler, au sujet de la prise en charge des enfants atteints d'autisme ou d'autres troubles du développement.

La Haute Autorité intervient dans l'amélioration des pratiques professionnelles, et, en particulier, dans l'accréditation des professionnels exerçant dans des domaines à haut risque tels que l'anesthésie, l'obstétrique, la chirurgie, la chirurgie plastique, etc. Dans ce type de spécialité, les risques professionnels sont tels que les assurances en responsabilité civile professionnelle sont très élevées. L'assurance maladie aide les professionnels concernés, en échange d'un engagement de leur part de demander une accréditation qui concerne des obligations à la fois de formation professionnelle et de gestion des risques, avec, en particulier, l'obligation de déclarer les événements dits porteurs de risque, c'est-à-dire qui n'ont pas entraîné d'effets indésirables mais l'auraient pu. Cela pousse le professionnel vers la qualité et l'incite à s'entourer de toutes les garanties nécessaires à la sécurité du patient. Nous disposons à présent d'une base de données portant sur 40 000 de ces événements porteurs de risques, ce qui nous a permis de tirer la sonnette d'alarme sur une vingtaine d'événements potentiellement dangereux et de modifier les pratiques en conséquence dans six cas.

Nous menons d'autres actions très importantes comme la mise en place d'une check list dans les blocs opératoires comparable à ce qui se pratique dans l'aéronautique. Nous favorisons également le développement de la simulation dans les facultés de médecine, de manière à éviter que les premiers patients du jeune médecin soient exposés à un geste potentiellement dangereux. Enfin, nous avons rédigé divers guides, à l'intention des professionnels et des cadres de santé hospitaliers, notamment sur la sécurité du circuit du médicament.

Nos programmes pilotes thématiques préfigurent les parcours de soins dont je parlerai ultérieurement. Parmi les programmes en cours, outre la prévention des accidents vasculaires cérébraux et de l'infarctus du myocarde, nous travaillons sur la prévention de la iatrogénie et de la surconsommation médicamenteuse chez les personnes âgées. Nous avons la semaine dernière lancé une campagne d'information sur les dangers d'une consommation excessive de benzodiazépines dans cette catégorie de la population.

S'agissant de l'organisation des soins, la coopération entre professionnels de santé constitue une mission relativement récente puisqu'elle procède de l'article 51 de la loi « Hôpital, patients, santé, territoires » (HPST). Elle a du reste suscité certaines inquiétudes de la part des professionnels. Il s'agit d'une délégation dérogatoire de la responsabilité médicale vers d'autres professionnels de santé comme les infirmiers, les kinésithérapeutes ou les manipulateurs de radiologie, selon un protocole qui favorise l'accès aux soins. Eu égard à la désertification médicale de certaines régions et à la diminution du nombre de praticiens dans certaines spécialités, cela constitue à nos yeux une démarche très utile, notre mission étant de vérifier que ces protocoles ne fassent pas courir de risques aux patients, et, au contraire, améliorent leurs parcours de soins.

L'une de nos missions historiques consiste à travailler sur les conditions d'entrée dans la liste de la trentaine de maladies ouvrant droit à une exonération du ticket modérateur, les affections de longue durée. En 2011, nous avons modifié la pratique en rédigeant six guides à destination des médecins et neuf guides à destination des patients qui, au lieu de décrire une pathologie et sa prise en charge globale, mettent plutôt l'accent sur les points critiques de son évolution, les parcours de soins, la coopération entre professionnels. Cela participe de l'amélioration globale de la prise en charge de proximité, via la coordination de parcours de soins individualisés.

Le professeur Bouvenot va vous présenter le rapport spécifique d'activité pour 2011 de la commission de la transparence. J'en profite pour rappeler que la composition de la commission de la transparence et celle de la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (CNEDiMTS) sont réglementées – la Haute Autorité n'y intervient en rien – et que ces commissions rendent des avis autonomes.

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Gilles Bouvenot, président de la commission de la transparence

Je me réjouis que votre commission ait souhaité entendre un rapport sur l'évaluation des médicaments. C'est renouer avec une tradition, puisque ce n'est qu'en 2005 que cette obligation a été levée, pour des raisons que j'ignore.

Régie par un décret de 1999, la commission de la transparence est chargée d'évaluer les nouveaux médicaments et de réévaluer au bout de cinq ans les médicaments déjà inscrits, en vue de se prononcer sur le bien-fondé de leur prise en charge par l'assurance maladie. Elle oeuvre en faveur du bon usage du médicament en produisant des documents d'information destinés aux prescripteurs. Son rôle essentiel consiste par conséquent à rendre un avis, favorable ou non, sur l'inscription ministérielle d'une spécialité au tableau des spécialités remboursables.

La commission est en outre chargée de quantifier le niveau de service médical rendu (SMR) des nouveaux médicaments et de proposer en fonction de ce critère le taux de remboursement adéquat : 65 %, 30 % ou 15 %. Il nous revient également de nous prononcer sur l'apport des nouveaux médicaments par rapport aux anciens, ce qui revient à mesurer le progrès thérapeutique induit, le cas échéant, par leur introduction. C'est la notion d'amélioration du service médical rendu (ASMR) ; selon la note d'ASMR attribuée, le prix du nouveau médicament est établi, sans que ce critère soit exclusif dans le choix tarifaire final du Comité économique des produits de santé.

La commission de la transparence est composée de vingt membres titulaires et de six suppléants, dont tous sont des professionnels de santé. Les administrations associées à ses travaux – direction générale de la santé, direction de la sécurité sociale, caisses d'assurance maladie… – ne prennent pas part aux votes.

2011 a été une année très productive pour la commission, puisque son activité a augmenté de l'ordre de 25 à 30 % par rapport à 2010, à ressources constantes. Parallèlement à notre activité programmée, qui résulte de saisines des pouvoirs publics, nous avons la faculté de nous autosaisir à tout moment pour réévaluer tout médicament en fonction de l'évolution du contexte médical et scientifique.

Cependant, notre activité prépondérante est une activité de guichet, lorsque nous sommes sollicités par l'industrie pharmaceutique pour inscrire des spécialités sur la liste des médicaments remboursables. On appelle « première inscription » l'arrivée à la commission d'un nouveau médicament en vue de son évaluation et « extension d'indication » le fait qu'un médicament se présente avec une nouvelle indication. Tel médicament envisagé au départ comme traitement en première ligne d'un certain type de cancer peut se révéler utile au bout d'un ou deux ans aussi en traitement de deuxième ligne ou dans le cas de métastases. Certains médicaments se présentent donc une, deux ou trois fois en première inscription devant notre commission, en fonction, pour l'essentiel, du nombre d'indications qu'ils ont obtenues de l'Agence européenne du médicament (EMA, European Medicine Agency) ou de l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM). Je signale que les indications d'autorisation de mise sur le marché (AMM) sont aujourd'hui essentiellement déterminées au niveau européen.

En 2011, hors activité programmée, nous avons enregistré 1 274 demandes d'avis, soit une augmentation considérable par rapport à 2010. Dans le cadre des activités programmées, il y a eu deux saisines ministérielles, l'une pour SMR insuffisants, avec 76 dossiers, et l'autre pour SMR faibles, avec 184 dossiers. Le ministre de l'époque souhaitait avoir confirmation de SMR insuffisants au vu de radiations ; pour ce qui concerne les SMR faibles, il s'agissait de la conséquence d'un arrêt du Conseil d'État annulant le passage de 30 % à 15 % du remboursement de 184 médicaments, par anticipation d'une décision ministérielle sur les conclusions de la commission. À l'occasion de 24 réunions, notre commission a examiné 1 078 demandes en 2011, soit 31 % de plus qu'en 2010. Certaines demandes, parvenues en fin d'année, n'ont pu être examinées que début 2012.

Dès lors qu'un nouveau médicament a obtenu une AMM de la part de l'agence européenne et que son fabricant en sollicite le remboursement, une directive européenne déjà ancienne nous fait obligation de le traiter en 90 jours, étant entendu que le délai compris entre le dépôt du dossier à la Haute Autorité et la publication au Journal officiel du prix du médicament ne doit pas excéder 180 jours – 90 jours pour la Haute Autorité et 90 jours pour le Comité économique des produits de santé. Il y aurait d'ailleurs lieu de s'interroger sur ces délais. Les évaluations par la commission de la transparence prennent en effet du temps car, comme l'a dit le président Harousseau, il nous est particulièrement difficile de recruter des experts totalement indépendants. Hors un accident malheureux, 2011 aura été l'année du zéro conflit d'intérêt dans l'évaluation du médicament.

Les trois quarts des dossiers sont traités dans les temps, le délai moyen d'instruction étant de 80 jours et le délai médian de 67 jours. S'agissant des médicaments extrêmement innovants, nous mettons les bouchées doubles et faisons en sorte de les traiter en 40 ou 50 jours.

Bien qu'ayant obtenu une autorisation de mise sur le marché, nombre de médicaments ne sont pas proposés au remboursement, voire sont passibles d'un déremboursement. Plusieurs facteurs expliquent cette situation. Pour la commission de la transparence, 2011 a été une année de réflexion, à l'occasion de laquelle nous avons rédigé en quelques pages – que vous trouverez dans le rapport d'activité écrit – ce que nous appelons notre doctrine. Cette doctrine était réclamée à la fois par les pouvoirs publics, pour plus de transparence et de prévisibilité de nos avis, et par les industriels. Lorsque la jurisprudence ne suffit plus, il est nécessaire d'écrire quelques principes noir sur blanc et de les faire connaître largement.

En effet, les industriels sont souvent surpris que des produits ayant obtenu une AMM au niveau européen ne soient pas pour autant proposés au remboursement par notre commission. Même avec un rapport bénéfices-risques globalement favorable, ce qui suffit pour obtenir une autorisation de mise sur le marché, l'apport thérapeutique d'un produit n'est pas forcément important. En outre, chaque fois qu'un nouveau médicament arrive et induit un progrès, que deviennent les anciens, menacés d'obsolescence ? Or, dans le souci constant d'amélioration de la qualité des soins sur lequel a insisté le président Harousseau, nous n'imaginons pas de proposer aux patients des médicaments obsolètes ! Dès lors qu'existent des médicaments plus performants, ce sont ceux-là qu'il faut utiliser. Ce que les industriels considèrent souvent comme de la sévérité ne procède en réalité que d'un souci de qualité des soins et d'équité.

Notre doctrine évolue puisque la Haute Autorité envisage de proposer aux pouvoirs publics de nouveaux critères d'évaluation du médicament, dans le cadre d'une comparaison avec l'existant et non in abstracto. Au reste, la commission de la transparence n'avait pas attendu la loi du 29 décembre 2011 pour tenir ce langage. Lorsqu'un nouveau médicament nous est apporté, soit il est meilleur et nous proposons un avis favorable, soit il est strictement équivalent et nous donnons également un avis favorable tout en laissant aux pouvoirs publics le soin de déterminer si nous devons avoir en France cinq ou six médicaments analogues, soit il est moins bon que l'existant – et cela arrive car l'autorisation européenne n'est pas une garantie d'efficience – et nous formulons les réserves d'usage.

Nos statistiques relatives au SMR semblent traduire un accroissement de notre sévérité. En réalité, 2011 n'aura pas été un grand cru médical ! Avec le recul d'un an, nous pouvons affirmer que les performances des nouveaux médicaments n'ont rien eu d'extraordinaire. La commission n'a pas été sévère, elle a été juste, du moins a-t-elle cherché à l'être. Les nouveaux médicaments arrivent dans un contexte d'abondance. Il y a vingt ans, presque chaque nouvelle spécialité apportait un progrès thérapeutique. À notre époque – et je parle sous le contrôle de M. Bapt –, dans des domaines comme le traitement de l'hypertension artérielle, il faut se « lever très tôt » pour enregistrer des améliorations notables.

Sur 240 avis rendus, 191 ont constaté un SMR important justifiant un remboursement à hauteur de 65 %, 19 un SMR modéré motivant un remboursement de 30 %, 10 un SMR faible appelant un remboursement de 15 % et 27, soit plus de 10 %, un SMR insuffisant. Sur les 27 médicaments présentant un SMR insuffisant, 16 ont été reconnus comme tels de manière définitive, les 11 autres ayant été retirés par les industriels à la seule vue du projet d'avis de SMR insuffisant, pour que cette évaluation a priori défavorable n'apparaisse pas.

Il n'y a pas lieu de dissimuler nos avis et nous avons modifié notre règlement intérieur de telle manière qu'il nous soit désormais loisible de les publier même lorsqu'ils ne sont pas définitifs ou que la firme a retiré son dossier. Nous n'entendons pas subir la loi du marketing en passant sous silence des SMR insuffisants.

J'en viens aux produits que les industriels considèrent comme particulièrement prometteurs et qui ont été évalués dans le cadre de ce que nous appelons une procédure complète. En 2011, il y en a eu 41 et le pourcentage d'avis défavorables au remboursement pour SMR insuffisant s'est établi à 17,1 %, ce qui constitue à l'évidence un changement.

D'autres facteurs attestent que 2011 a été une année d'étiage pour les industriels. Parmi les quelque 200 produits que nous avons vus, un seul a obtenu la note « progrès thérapeutique majeur », aucun celle de « progrès thérapeutique important », deux celle de « progrès thérapeutique modéré » et vingt celle de « progrès minime ».

Nous ne sommes pas chargés que d'évaluer ou de réévaluer les médicaments en vue de leur inscription ou de leur maintien dans la liste des spécialités remboursables puisque nous oeuvrons aussi au bon usage du médicament. L'an dernier a vu se poursuivre une initiative lancée en 2010, celle de la publication de synthèses d'avis. De quoi s'agit-il ? D'un document d'une page et demie, disponible sur notre site en deux clics pour donner les informations essentielles sur l'évaluation d'un nouveau médicament. Outre leur lisibilité, l'intérêt de ces synthèses est qu'elles sont produites avant même que ne soit fixé le prix du médicament, c'est-à-dire avant sa commercialisation. Dans les centres hospitaliers, les prescripteurs juniors sont donc mis au courant de ce que nous pensons des nouveaux médicaments avant que les visiteurs médicaux ne viennent leur en chanter les louanges. Nous avons établi une fiche de bon usage du médicament en collaboration avec le Pr Dubernard sur les hémostatiques chirurgicaux. Nous en avons également rédigé une sur les médicaments destinés à combattre la maladie d'Alzheimer.

Enfin, une obligation réglementaire nous conduit à produire, pour publication au Journal Officiel, des fiches d'information thérapeutiques, hélas peu lisibles. Elles concernent les médicaments dits d'exception, d'indication extrêmement ciblée ou coûteux, et sont destinées à donner aux prescripteurs des directives très strictes pour leur bon usage.

La commission de la transparence de la Haute Autorité travaille dans des conditions d'équité et de justice qui ne sont plus à démontrer.

En conclusion, j'appelle votre attention sur le recrutement des experts. Force est en effet d'admettre que nous ne les attirons plus. En outre, liés par leurs intérêts, certains sont récusés. Nous avons décidé de rechercher le zéro lien d'intérêt. Pour autant, nous ne sommes pas maximalistes. Je pense en particulier aux maladies orphelines appelant des traitements de même nature. Les médicaments orphelins peuvent concerner 100 à 300 patients – voire moins comme dans le cas de la maladie de Pompe – et leurs spécialistes se comptent sur les doigts d'une demi-main ! Étant les seuls à connaître la maladie, tous ont participé à l'évaluation des médicaments et comment pourrait-il en être autrement ? Cependant, nous le déclarons et nous en tenons compte. Pour difficile que cela soit, nous parvenons à recruter des experts sans liens. Cela prend du temps et cela peut expliquer que, dans certains cas, la durée d'évaluation puisse dépasser 90 jours.

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Jean-Michel Dubernard, président de la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé

Le rôle dévolu à la Haute Autorité à l'unanimité par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale au moment de sa création est le décideur à prendre ses décisions sur des bases scientifiques.

La commission nationale d'évaluation comprend 19 membres, dont 4 suppléants, ainsi que des représentants avec voix consultative des administrations, de l'assurance maladie, des organisations syndicales de fabricants… Bien que nous en soyons demandeurs et que cela soit prévu, il n'y a pas de représentants des patients.

Les dispositifs médicaux recouvrent un champ extrêmement hétérogène. Même Pierre Morange ne sait pas combien il en existe ! Il y en a entre 160 et… 800 000. Cela va des compresses aux défibrillateurs en passant par les matelas adaptés, les prothèses rétiniennes ou les valves cardiaques. Le montant des dépenses correspondantes est estimé à 7,1 milliards d'euros mais il progresse continûment et se rapproche plutôt de 10 milliards d'euros.

S'agissant de l'analyse du service rendu (SR) par rapport au service attendu (SA), la Haute Autorité a rendu 149 avis en 2011. De 2008 à 2010, 82 % d'avis de SASR suffisants ont été prononcés contre seulement 64 % en 2011. Sans doute faut-il y voir un certain parallélisme avec ce qui se passe dans le domaine du médicament.

J'en viens à l'amélioration du service attendu (ASA) et à l'amélioration du service rendu (ASR). Comme cela vous a été présenté pour le médicament, on parle d'« ASA 1 » lorsqu'est escompté un progrès thérapeutique majeur. Les statistiques montrent que très peu de dispositifs entrent dans cette catégorie – je pense en particulier aux valves cardiaques par voie fémorale. Ce qui domine malheureusement, ce sont les « ASA 5 », qui ne correspondent qu'à un progrès minime.

Nous disposons d'un délai de 90 jours pour instruire les demandes de première inscription d'un dispositif médical. Bien qu'il soit presque impossible à tenir, nous y parvenons depuis deux ans, malgré les difficultés sur lesquelles je souhaite insister à mon tour pour recruter des experts, surtout en trois mois ! Il me semble impératif d'en tenir compte.

Quinze catégories de dispositifs médicaux ont été revues en 2011 et la refonte des descriptions génériques a représenté 50 % à 60 % de notre travail. Par ailleurs, les catégories prises en charge dans les groupes homogènes de séjour (GHS) posent un problème majeur. La loi impose de réviser les dispositifs médicaux intragénériques, ce qui est essentiel si l'on songe que certains dispositifs, comme les tulles gras, datent de plus d'un siècle. C'est un travail énorme mais il faut revoir tout cela.

Parmi les facteurs conduisant à un niveau de service attendu ou de service rendu suffisant, la commission nationale d'évaluation tient compte de la panoplie disponible, notamment dans les cas où les alternatives sont peu nombreuses et où le besoin thérapeutique n'est pas – ou insuffisamment – couvert.

S'agissant des aides techniques destinées à la compensation d'un handicap, l'évaluation des produits, qu'il s'agisse ou non de dispositifs médicaux, doit tenir compte des besoins de la personne handicapée, de son projet de vie et de son environnement. Lorsque je présidais cette commission, nous avons beaucoup travaillé dans ce domaine avec Mme Carrillon-Couvreur et avec M. Chossy, je voulais le rappeler. Gilles Bouvenot s'est exprimé sur les maladies orphelines. Lorsque les populations cibles sont très faibles, la commission tient compte des possibilités de recrutement limitées pour les études. Je pense notamment aux prothèses épirétiniennes, qui, dans certains cas, permettent à des personnes qui ont perdu la vue de récupérer une vision sommaire.

Le rapport qui vous a été distribué recense les facteurs conduisant à un niveau de service attendu ou rendu insuffisant. Les problèmes de méthodologie sont souvent prépondérants. L'industrie du dispositif médical s'est effondrée dans notre pays. Il n'y a plus aujourd'hui un seul fabricant français d'instruments de chirurgie alors qu'il y en avait encore une bonne vingtaine il y a quelques décennies. Qu'attendons-nous pour nous mobiliser en vue de relancer cette branche ?

Je conclus par les fiches de bon usage. En 2011, un seul dispositif médical a fait l'objet d'un document. Par contre, nous avons rédigé 62 synthèses d'avis à destination des professionnels en vue de leur présenter la stratégie d'utilisation des nouveautés. Enfin, 8 fiches d'information thérapeutique ont été établies entre 2005 et 2011 afin de préciser l'indication concernée.

Permalien
président de la Haute Autorité de santé

On dit souvent que la Haute Autorité a beaucoup de missions. Cela est vrai, mais toutes convergent dans l'objectif d'améliorer la qualité des soins et la sécurité des patients.

L'évaluation et l'amélioration des pratiques professionnelles sont à mes yeux indissociables. Si plusieurs missions nouvelles nous ont été confiées au fil du temps par le Parlement, c'est que nous rendons un service spécifique, lié à notre rigueur scientifique et à notre indépendance intellectuelle. Vous aurez sans doute compris que nous tenons beaucoup à ces deux qualités qui nous sont propres.

Nous espérons que nos missions seront confortées, dans le but d'améliorer la prise en charge des patients et de mieux utiliser les ressources de l'assurance maladie. Ceux d'entre vous qui ont assisté devant votre commission au début de l'année 2011 se rappellent peut-être que j'avais mis en exergue trois mots clés : réactivité, complémentarité et lisibilité.

L'exigence de réactivité doit nous conduire à être plus rapides. Nous avons notamment beaucoup travaillé sur la pertinence des actes et des séjours hospitaliers. Nous souhaitons aider nos partenaires à définir au mieux la durée optimale d'un acte ou d'un séjour à l'hôpital. S'il nous est souvent reproché d'être un peu lents, les professeurs Bouvenot et Dubernard ont indiqué que les avis étaient rendus dans les délais, en dépit des restrictions budgétaires que nous subissons.

La complémentarité, nous la devons aux professionnels de santé comme aux patients. Elle est aussi de règle avec nos partenaires institutionnels, qu'il s'agisse des ministères ou de l'assurance maladie. Notre objectif n'est pas de rester dans notre tour d'ivoire ou de nous retrancher sous la toge de la rigueur académique.

Enfin, l'attente de lisibilité nous commande de simplifier nos messages. Nous travaillons quotidiennement à l'amélioration de la présentation de nos documents et de notre site Internet. Dans la législature précédente, votre collègue Yves Bur avait remis un rapport sur les relations entre les différentes agences sanitaires. Ce sujet revient à l'ordre du jour à la suite d'un rapport de l'Inspection générale des finances. Nous souhaitons que nos missions soient bien précisées et que celles des autres institutions le soient aussi. Nous voulons éviter les doublons et souhaitons travailler avec tous ceux qui partagent nos préoccupations.

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Le sujet est complexe, technique, ésotérique même parfois pour les non-spécialistes. Les industriels du médicament l'avaient bien compris qui, des années durant, ont exploité les failles du dispositif, laissées béantes, il faut le reconnaître, par des gouvernements de tous bords, s'immisçant partout où cela était possible dès lors qu'il y avait un médicament à mettre sur le marché.

La Haute Autorité n'a pas attendu la loi relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament pour améliorer l'évaluation, avez-vous dit, monsieur Bouvenot. L'opposition sous la précédente législature non plus ! Elle avait présenté deux amendements, soutenus par le groupe SRC et le groupe GDR, proposant qu'avant leur commercialisation, les médicaments soient désormais évalués contre comparateur et qu'ils soient systématiquement réévalués tous les cinq ans, même en l'absence d'alertes de pharmacovigilance en provenance du terrain. Vous avez été des visionnaires, messieurs, mais nous vous avions accompagnés. Il a, hélas, fallu attendre le scandale du Mediator pour que cette démarche devienne une évidence.

La tâche de la Haute Autorité est importante. Il y va de la santé de nos concitoyens, mais aussi, devant l'importance de la panoplie thérapeutique aujourd'hui à disposition, de la santé de nos comptes publics. Vos missions n'ont cessé d'être étendues, mais n'était-ce pas logique après la survenue d'un drame ? Quant à la difficulté dont vous nous avez fait part de trouver des experts sans liens d'intérêt, sans doute tient-elle au fait que notre système était à la dérive depuis des décennies. Notre collègue Gérard Bapt et moi-même alertions depuis longtemps sur ce sujet.

Je tiens à saluer tout particulièrement le travail que vous avez mené sur les stratégies thérapeutiques non médicamenteuses. Le rapport que vous avez remis sur le sujet aidera à sortir de l'approche « tout médicament », trop systématique dans notre pays.

D'une manière générale, je salue votre travail. J'en mesure toute la difficulté, entre d'un côté les exigences légitimes des parlementaires, et de l'autre, les souhaits par exemple des associations de patients – dont certaines sont pour partie financées par l'industrie pharmaceutique – qui peuvent exercer sur vous de fortes pressions lorsque vous réévaluez certains médicaments. On l'a vu avec les hormones de croissance et les anti-Alzheimer.

Je n'aurai que deux questions. Comment évaluez-vous les biosimilaires qui commencent d'envahir le marché et ne peuvent pas être tout à fait évalués comme le sont des génériques par rapport à la molécule princeps ?

Sur proposition du groupe SRC, un amendement avait été adopté lors de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012, confiant à la Haute Autorité la mission de « coordonner l'élaboration et assurer la diffusion d'une information adaptée sur la qualité des prises en charge dans les établissements de santé, à destination des usagers et de leurs représentants », Les usagers n'étant pas représentés à la Haute Autorité – tous nos amendements en ce sens ont toujours été repoussés –, comment garantir leur bonne information, tant sur la qualité des établissements que sur la pertinence des protocoles de soins ?

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L'évaluation médico-économique, dimension nouvelle de l'activité de la Haute Autorité qui vous occupe beaucoup, répond aussi à notre préoccupation de bonne gestion des comptes de l'assurance maladie. Après s'être attachée à la qualité, la Haute Autorité doit maintenant s'attacher aussi à l'efficience de ce qu'elle évalue, notamment les schémas thérapeutiques et les actions de santé publique. L'efficience de ces dernières est ainsi souvent contestée, y compris par des économistes de la santé. Je ne citerai que l'exemple, éternel serpent de mer, du dépistage du cancer de la prostate et des alternatives thérapeutiques dans cette pathologie.

J'ai bien noté qu'avec la recherche d'absence de tout conflit d'intérêt chez les experts – depuis l'année dernière seulement, ce qui prouverait, contrairement à ce qu'affirme aujourd'hui un quotidien du matin, que l'affaire du Mediator n'a pas été qu'un « pétard mouillé » - la détermination de l'amélioration du service médical rendu (ASMR), dont dépendent l'admission au remboursement et le taux de remboursement, sera nécessairement plus rigoureuse. Le chantier de la politique du médicament est encore devant nous.

Alors que les autorisations de mise sur le marché étaient autrefois presque automatiquement délivrées à vie et que les produits en disposant étaient tout aussi automatiquement admis au remboursement, une nouvelle culture se fait jour. Le retrait d'un médicament ne sera plus un parcours du combattant lorsque des risques auront été mis en évidence. Mais ne vous heurtez-vous pas à une incohérence avec l'échelon européen ? Un produit autorisé à l'échelon européen, qui peut donc être commercialisé dans l'ensemble des pays européens, d'une part n'est pas nécessairement remboursé en France – je pense à l'un en particulier, de fabrication française. La détermination de son prix peut par ailleurs être difficile, puisqu'on se réfère toujours au prix sur le marché. Une plus grande harmonisation au niveau européen ne serait-elle pas nécessaire ?

Enfin, monsieur le professeur Dubernard, après le scandale des prothèses mammaires PIP, la France a proposé des réformes. A-t-on avancé en matière de qualité de la certification européenne et de conduite des essais cliniques ? Je pense bien sûr tout particulièrement aux dispositifs implantables, qui peuvent présenter des risques sanitaires graves en cas de mauvaise qualité.

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Je salue la qualité des rapports d'activité, précis et complets, qui nous ont été présentés. On mesure au travers des chiffres qui y sont communiqués le volume de travail de la Haute Autorité. Même si notre système de santé est souvent, à juste titre, loué pour sa qualité, il n'en reste pas moins perfectible. La Haute Autorité contribue à en améliorer sans cesse la qualité, gage de sécurité.

Vu l'importance des tâches d'évaluation, n'y aurait-il pas intérêt à une plus large coopération au niveau européen ? Vous avez parlé de complémentarité avec les autres acteurs institutionnels, les professionnels de santé et les usagers. Ne faudrait-il pas aller plus loin encore ?

Vous avez évoqué la difficulté de trouver des experts indépendants. Sept recommandations de bonnes pratiques ont ainsi dû être retirées, et c'est tout à l'honneur de la Haute Autorité de l'avoir fait, parce que les experts associés aux travaux ne présentaient pas les garanties d'indépendance suffisantes. Il faudrait autant que faire se peut s'assurer au préalable de cette indépendance, de façon à éviter de travailler en vain. Même si cela doit allonger le délai de 90 jours, dans lequel doivent normalement être rendues les décisions, il faut absolument privilégier l'indépendance des experts.

Comment expliquez-vous qu'il n'y ait pas eu beaucoup de médicaments réellement innovants en 2011 ?

Le nombre de médicaments disponibles dans notre pays n'alourdit-il pas considérablement votre tâche, s'il ne la rend tout simplement pas impossible ? Pourrait-on le réduire ?

La certification des sites Internet d'information médicale à laquelle procède la Haute Autorité, ne garantit, hélas, ni la qualité, ni la transparence ni la lisibilité de leur contenu, vous l'avez vous-même regretté. Comment pourrait-on améliorer cette certification, de façon à garantir la qualité de l'information délivrée par ces sites ?

Les établissements de santé ne sont visités que tous les quatre ans en vue de leur certification. Ce délai est long. Ne pourrait-on pas envisager entre-temps une procédure de suivi des recommandations éventuellement formulées ? La Haute Autorité prend-elle en compte les schémas régionaux de santé dans sa démarche de certification des établissements ainsi que dans les recommandations qu'elle peut leur faire ?

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Monsieur le président, vous avez par avance répondu à nombre des questions que je souhaitais vous poser. Je vous en remercie.

Professeur Dubernard, les failles constatées dans le contrôle des dispositifs médicaux, en particulier implantables, avec des organismes certificateurs rémunérés par les industriels, ne doivent-elles pas conduire à revoir la procédure de mise sur le marché de ces dispositifs. Une véritable autorisation de mise sur le marché ne devrait-elle pas remplacer le simple marquage CE.

Monsieur le président de la commission de la transparence, il existe déjà des divergences de position entre les différentes instances nationales ayant à traiter des produits de santé. S'y ajoutent des divergences avec les instances européennes. Un cadre franco-français n'est sans doute pas le plus pertinent pour traiter ces questions. Ne serait-il pas plus efficace qu'une commission unique, rassemblant des représentants de toutes les agences nationales, travaille directement en lien avec l'échelon européen ? Étant entendu que le Comité économique des produits de santé devrait, lui, rester strictement national car ses décisions touchent à notre politique de santé et à notre politique industrielle et qu'il ne faudrait pas que nous nous trouvions, à terme, tributaires d'autres pays.

Est-ce un manque de moyens de la Haute Autorité qui explique la longueur du délai des décisions de déremboursement de certains médicaments à service médical rendu (SMR) insuffisant ? Il arrive qu'examinés en commission en juillet, ils ne fassent l'objet d'une décision qu'en novembre ! Entre-temps, l'assurance maladie aura eu à rembourser durant plusieurs mois supplémentaires des produits peu efficaces, dont certains cesseront ensuite définitivement d'être remboursés.

Sous le ministère de M. Xavier Bertrand, vous avez procédé à de nombreux déremboursements. On a, à cette occasion, pu relever, concernant par exemple la famille des chondroïtines sulfates, des différences entre la volonté de la commission d'autorisation de mise sur le marché de l'agence du médicament, qui aurait souhaité le déremboursement de toute cette classe thérapeutique alors que votre commission, elle, n'a déremboursé qu'un seul produit, alors que d'autres, en particulier un qui coûtait 40 % plus cher, sont restés remboursés. Comment expliquez-vous ces discordances ?

Ne pensez-vous pas qu'attribuer une note de SMR 5 à un médicament ayant une autorisation européenne de mise sur le marché, qui fait qu'il ne sera plus remboursé dans notre pays, c'est exclure les patients français de nouvelles thérapeutiques ? De mars 2010 à septembre 2011, la Haute Autorité a évalué 16 médicaments bénéficiant d'une autorisation européenne et jugé que le SMR de cinq d'entre eux était insuffisant. Est-elle donc plus sévère que l'Agence européenne du médicament, puisque ces produits sont commercialisés dans le reste de l'Europe ? De telles divergences ne sont-elles pas de nature à porter atteinte à l'égalité d'accès aux soins, à laquelle sont légitimement attachés nos concitoyens ? Est-il cohérent qu'il existe cinq niveaux de SMR et quatre niveaux de remboursement alors que l'évaluation du SMR conduit à la fixation du niveau de remboursement ? N'y a-t-il pas un lien entre tous les déremboursements opérés sous la précédente législature, dont nous avions dénoncé le caractère discutable, le ministre de la santé de l'époque reconnaissant lui-même qu'il n'en attendait pas beaucoup d'économies, et le fait qu'un tiers de nos concitoyens disent aujourd'hui avoir dû renoncer à des soins ou les reporter ?

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Je voudrais revenir sur les conclusions du professeur Harousseau concernant les délais dans lesquels la Haute Autorité rend ses décisions. La remise de certains avis ou recommandations ne comporte aucune contrainte de délai, d'autres si. La réactivité de la Haute Autorité doit être exemplaire, avez-vous dit. Que faire pour aller en ce sens ? Est-il envisageable concrètement d'instaurer une obligation de respect de délai ?

Plusieurs rapports, notamment le rapport d'information de notre collègue Yves Bur sur les agences sanitaires et celui de l'Inspection générale des finances consacré au même sujet, ont pointé une ligne de partage floue entre les missions et compétences des différentes agences. Avez-vous l'impression qu'il y a des doublons ? La dispersion des agences est-elle dommageable ? Que fait la Haute Autorité pour que l'ensemble des acteurs se coordonne mieux ? Quel coût représente cette coordination ?

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Il serait nécessaire de confirmer tous les quatre ans l'accréditation des établissements, avez-vous dit, monsieur le président. À la lumière de l'affaire des sur-irradiés du centre hospitalier d'Épinal, sur laquelle je ne m'exprimerai pas vu qu'une procédure judiciaire est en cours, on peut en effet s'interroger sur le suivi des accréditations et le respect des bonnes pratiques dans l'utilisation de certains dispositifs médicaux. Quel est le rôle exact de la Haute Autorité dans ces procédures ? Que faire pour éviter que ne se reproduise une affaire aussi grave ?

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Pour l'accréditation des établissements de santé, la Haute Autorité a-t-elle des relations directes avec les agences régionales de santé (ARS) ou a-t-elle pour seuls interlocuteurs le ministère de la santé et l'assurance maladie ?

La coordination de l'information destinée au grand public est capitale. L'excellent travail de la Haute Autorité n'est pas assez connu. Nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à pratiquer l'automédication, notamment après s'être renseignés sur des sites Internet. Les titres de certains hebdomadaires, dont l'un vient de faire grand bruit, peuvent aussi influer sur le comportement des patients. Quel est votre sentiment sur tout cela ?

Existe-t-il un profil-type des médecins qui s'engagent dans l'amélioration des pratiques ?

La Haute Autorité évalue les médicaments en eux-mêmes. Évalue-t-elle aussi leur conditionnement ? Pourquoi ne pas suggérer aux industriels des conditionnements mieux adaptés aux prescriptions, de façon à éviter les gaspillages ? Chacun sait que les boîtes contiennent souvent trop de comprimés.

Les génériques seraient en recul dans notre pays. Est-ce vrai ? Si oui, comment contrer cette évolution ?

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Lors de votre audition par mes collègues Gérard Bapt, Christian Paul et moi-même dans le cadre de la préparation du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2013, vous nous avez dit, professeur Harousseau, qu'il faudrait refondre la grille actuelle d'évaluation des produits de santé et évaluer ceux-ci en fonction d'un index thérapeutique relatif (ITR). Cet index unique ferait disparaître l'indicateur SMR et marquerait un progrès dans l'indicateur ASMR. Les produits, notés selon le nouvel index, continueraient d'être transmis au Comité économique des produits de santé, chargé de fixer leur prix. Pensez-vous qu'il faille restreindre le pouvoir de ce comité ?

Vous souhaitez avancer sur ce qu'on appelle les dialogues préalables au niveau national et européen, ce qui modifierait radicalement la démarche des laboratoires, puisqu'ils s'adresseraient à la Haute Autorité dès les essais de phase I d'un médicament. N'est-ce pas trop tôt dans la mise au point d'un médicament, même si une réévaluation ultérieure est toujours possible ? Que pensent les industriels de cette préconisation ? Ne risque-t-on pas de les décourager ?

Vous semblez vous inquiéter de la pérennisation des moyens financiers de la Haute Autorité. Pourriez-vous nous en dire davantage ?

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Bien que le scandale du Mediator ait incontestablement ébranlé la confiance de nos concitoyens dans les médicaments, la France demeure le pays européen où le taux d'automédication est le plus élevé, et ce n'est pas là le moindre des paradoxes. Le travail que mène la Haute Autorité doit, entre autres, permettre de restaurer cette confiance.

Je ne reviens pas sur la désignation des experts qui avait fait l'objet d'un large débat entre la majorité et l'opposition de l'époque. La loi s'impose désormais à tous. Je rappelle seulement que certains auraient souhaité que les experts soient salariés à temps plein de la Haute Autorité, exclusivement rémunérés par l'État. D'autres auraient souhaité plus de souplesse et d'ouverture.

Il semble que certaines missions de la Haute Autorité en matière de médicament se recoupent avec celles du Comité économique des produits de santé et de l'Agence nationale de sécurité du médicament, en particulier la commission d'autorisation de mise sur le marché de cette dernière. N'y aurait-il pas tout à gagner à une clarification des compétences de chacun ?

La France a pris beaucoup de retard en matière de génériques. En dépit d'une décennie d'efforts, la pénétration des génériques y demeure nettement inférieure à ce qu'elle est dans les pays voisins. Elle recule même pour certaines classes thérapeutiques. Cela s'expliquerait en grande partie par le développement des contre-génériques et l'absence de tarif forfaitaire de responsabilité généralisé. L'application d'un prix unique pour un princeps, ses génériques et les équivalents thérapeutiques que sont les me too et les contre-génériques serait-elle une solution pour relancer les génériques ?

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Comment la Haute Autorité entend-elle développer l'information des patients dans le cadre des parcours de soins ? Quelles pistes propose-t-elle pour qu'ils soient mieux associés à leur prise en charge dans le cadre d'un véritable contrat de confiance avec les professionnels de santé ?

Pour la mise en oeuvre des grands plans nationaux comme les plans cancer ou Alzheimer, comment aider les différentes structures, y compris celles, quelque peu oubliées, du secteur social et médico-social, à mieux se coordonner ?

En dépit de la loi de 2005 sur le handicap, notre pays a pris du retard pour les produits de compensation du handicap. La demande est forte et sept ans après le vote de la loi, beaucoup, sinon tout, reste à faire. Quelles sont les perspectives ? Il faudrait vraiment avancer sur le sujet.

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Un quotidien médical a titré que les généralistes étaient « les grands oubliés des recommandations médicales ». Et dans l'une de ses études, le Centre d'analyse stratégique a relevé qu'il pouvait y avoir loin des recommandations aux pratiques chez les généralistes. Comment améliorer la perception que ceux-ci peuvent avoir des recommandations de bonnes pratiques ?

S'agissant des produits de compensation du handicap, notre pays n'est pas en retard en matière de recherche fondamentale. Il l'est en revanche pour les transferts de technologie et l'industrialisation de la fabrication. Nous importons aujourd'hui la plupart des produits. Et, ce qui est profondément choquant, certains sont vendus en France cinq fois plus cher qu'ils ne le sont aux États-Unis par exemple, pour la seule raison qu'ils sont remboursés par l'assurance maladie.

Ma troisième question a trait aux problèmes éthiques que peuvent éventuellement soulever certains avis de la Haute Autorité, comme celui qu'elle a rendu sur les pilules contraceptives de troisième génération. Prescrites à de très jeunes femmes, ces pilules peuvent, en cas d'hypercoagulabilité, être à l'origine de problèmes graves, voire de décès. Après votre avis, la ministre chargée de la santé a décidé de mettre fin au remboursement de ces pilules à compter du 30 septembre 2013. On avait jusque là seulement édicté des recommandations sur ces produits, lesquelles n'avaient d'ailleurs pas été suivies dans notre pays puisque c'était cette classe de pilules qui était délivrée dans les centres de planification familiale, à un public qui n'aurait surtout pas dû la prendre ! Au Royaume-Uni au contraire, les recommandations ont été suivies et d'ailleurs, à la suite d'un scandale, beaucoup de femmes ont arrêté de prendre la pilule, à tel point qu'on a observé un pic de demandes d'interruptions de grossesse. Je souhaiterais connaître votre avis sur ce problème spécifique des pilules de troisième génération.

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Vos propos, messieurs les présidents, ainsi que votre présentation nous confortent dans l'idée que la Haute Autorité joue un rôle essentiel pour faire de la qualité un élément clé de la régulation de notre système de santé.

La Haute Autorité a reçu mission de suivre l'expérimentation des parcours de soins. De premiers résultats sont-ils disponibles ?

Après l'affaire du Mediator et les évolutions législatives qui s'en sont suivies, la notion de SMR a été remise en question. Où en est-on du projet d'index thérapeutique relatif unique qui permettrait d'évaluer l'intérêt clinique d'un nouveau médicament par comparaison à une stratégie thérapeutique de référence ?

Le professeur Dubernard, que nous sommes particulièrement heureux de retrouver ce matin dans cette commission qu'il a longtemps présidée, a rappelé que les dispositifs médicaux représentent une charge croissante pour l'assurance maladie. La dépense s'est élevée à plus de sept millions d'euros en 2011. Les évaluations conduites par la Haute Autorité rendent-elles envisageables des économies en ce domaine, dans l'objectif de maîtrise des dépenses de sécurité sociale ?

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Certains médicaments, très utiles et pourtant sans substitut, ont été retirés du marché au motif qu'ils étaient détournés de leur usage par des toxicomanes. Le Di-Antalvic, qui associait dextropropoxyfène et paracétamol, a ainsi été remplacé par des produits très mal tolérés par certains patients.

Des laboratoires cessent aussi de commercialiser des médicaments pourtant efficaces, simplement parce qu'ils les jugent insuffisamment rentables. Ils les remplacent par des produits prétendument plus élaborés, mais surtout beaucoup plus chers. L'oméprazole, passé en vente libre, a ainsi été remplacé par un isomère, pas plus efficace mais deux fois plus cher. Et bien entendu cet isomère, lui, est remboursé !

Il est très difficile de trouver des médicaments utilisables chez la femme enceinte et l'enfant de moins de trois ans, l'immense majorité d'entre eux étant contre-indiqués chez ces catégories de la population.

Par ces trois exemples, je veux seulement illustrer l'extrême difficulté de prescrire aujourd'hui pour les médecins.

S'agissant des génériques, qui visent, ne l'oublions pas, à permettre des économies, ne faudrait-il pas, comme je l'ai souvent proposé, n'admettre au remboursement que le seul médicament le moins cher d'une même classe thérapeutique ? Si le patient en souhaite un autre, plus cher, il devrait payer la différence de sa poche. Dans les hôpitaux, les médecins n'ont bien à leur disposition qu'un médicament par classe – le moins cher !

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Nous avons, avec un collègue, été alertés par plusieurs personnes s'inquiétant des possibles effets secondaires de la Ritaline, médicament utilisé notamment pour le traitement de l'hyperactivité chez l'enfant. Il semble que les agences sanitaires aient elles-mêmes été saisies à plusieurs reprises et que le produit ait été placé sous surveillance. Où en est-on ?

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Qu'est-ce qui empêcherait de mettre aujourd'hui sur le marché des conditionnements adaptés aux prescriptions ?

Alors que l'homéopathie constitue une alternative intéressante et qu'elle est source d'économies pour l'assurance maladie, pourquoi ses produits sont-ils régulièrement menacés de déremboursement ? Quelle est l'approche de la Haute Autorité sur le sujet, de même que, d'une manière plus générale, sur les médecines douces ?

de la Haute Autorité de santé. Je veux tout d'abord remercier les membres de la commission pour leurs nombreuses questions, qui témoignent de l'intérêt qu'ils portent aux questions de santé en général et à l'action de la Haute Autorité en particulier.

Je laisserai Gilles Bouvenot répondre aux questions sur le médicament et Jean-Michel Dubernard à celles sur les dispositifs médicaux. Je demanderai enfin à Dominique Maigne de parler du budget de la Haute Autorité.

Plusieurs questions ont été posées concernant le parcours de soins, qui est une priorité pour le nouveau Gouvernement. La Haute Autorité est bien placée pour participer à la mise en route de parcours de soins coordonnés et faisant l'objet d'un protocole, dans le double objectif de mieux soigner le patient et d'optimiser l'utilisation des ressources. Édictant en effet des recommandations de bonnes pratiques, elle peut indiquer, avec les professionnels, le parcours optimal pour un malade ou les parcours optimaux dans le cas de polypathologies. Elle coordonne les délégations de compétences entre professionnels de santé. Elle évalue, en liaison avec les agences régionales de santé, les programmes d'éducation thérapeutique des patients. Enfin, elle a reçu mission d'évaluer les expérimentations prévues par l'article 70 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 et visant à optimiser le parcours de soins des personnes âgées en risque de perte d'autonomie. Travaillant à la fois avec les professionnels, l'assurance maladie et les agences régionales de santé, elle est au centre du dispositif et est la mieux à même d'imbriquer toutes les pièces du puzzle.

La Haute Autorité travaille déjà en lien étroit avec les agences régionales de santé dans le cadre de la certification des établissements de santé, ainsi que sur les programmes de coopération entre professionnels et les programmes d'éducation thérapeutique des patients. Elle souhaite renforcer encore ces liens avec les agences régionales. Ainsi après avoir organisé plusieurs Rencontres annuelles au niveau national, le collège de la Haute Autorité a-t-il opté pour une démarche différente, plus proche des territoires, en organisant des rencontres régionales.

Existe-t-il un profil-type des médecins s'engageant dans l'amélioration des pratiques ? Je rappelle tout d'abord que la Haute Autorité accrédite les professionnels des spécialités considérées comme à risque, essentiellement des praticiens exerçant dans le privé, afin qu'ils puissent bénéficier d'un meilleur tarif pour leur assurance de responsabilité civile professionnelle. Cette accréditation doit être l'occasion pour ces médecins de remplir leur obligation, prévue par la loi, de développement professionnel continu, le fameux DPC qui devrait voir le jour en 2013. La Haute Autorité participe à sa mise en place. Elle est notamment chargée de fixer les modalités retenues pour définir les critères d'un développement professionnel continu. Nous souhaiterions que cette accréditation ne soit pas limitée aux professionnels des disciplines à risque et lier les deux processus de certification des établissements de santé et d'accréditation des équipes soignantes qui y travaillent. En effet, il pose problème de certifier un établissement sur le fondement de ses procédures sans être sûr de la qualité de ses équipes.

Je suis convaincu qu'on n'imposera pas contre leur gré de recommandations de bonnes pratiques à des professionnels de santé. En tout cas, ce n'est pas la publication de recommandations qui modifiera les pratiques si les professionnels ne se les approprient pas. Nous souhaitons impliquer toutes les parties prenantes, notamment les généralistes, dans la rédaction des recommandations. Cela soulève parfois des problèmes : ainsi dans la prise en charge de la maladie d'Alzheimer, leur avis diffère-t-il de celui des neurologues. Il nous revient de rechercher un consensus. Nous souhaiterions surtout impliquer les professionnels dans la diffusion des recommandations à l'élaboration desquels auraient participé leurs conseils nationaux professionnels – pour les généralistes le collège de la médecine générale.

S'il nous est difficile de trouver des experts, c'est pour des raisons techniques mais aussi psychologiques. Les sociétés savantes et les conseils nationaux professionnels renâclent à nous en adresser, nous reprochant de nous défier d'eux. Nous avons vraiment connu des difficultés dans certaines disciplines, même si la situation s'améliore grâce à un effort de pédagogie. S'il faudra demeurer d'une extrême rigueur pour la commission de la transparence, il faudra, pour les recommandations de bonnes pratiques, faire preuve de discernement, en n'hésitant pas à faire appel aux experts possédant les compétences dont nous avons besoin même s'ils peuvent avoir des conflits d'intérêt par exemple avec l'industrie pharmaceutique.

La loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 a donné mission à la Haute Autorité de coordonner l'ensemble des acteurs publics participant à l'information du grand public et de participer à la diffusion de l'information. Nous nous sommes attelés à la tâche, en lien avec la Direction générale de l'organisation des soins et l'ATIH, l'Agence technique de l'information sur l'hospitalisation. Nous travaillons à l'outil qui permettra d'intégrer l'ensemble des données dont nous disposons – leur collecte représente un gros travail – et surtout de diffuser une information à la fois fiable et neutre, reposant sur les éléments scientifiques que nous recueillons. J'espère qu'en 2013 ou 2014, nous pourrons associer des indicateurs cliniques, comme ceux de mortalité, de morbidité ou de réhospitalisation.

Notre homologue au Royaume-Uni, le National Institute for Health Clinical Excellence (NICE), délivre sur son site de l'information à destination non seulement des professionnels mais aussi du grand public. La collecte des données et leur traduction en langage compréhensible de tous exigent un investissement financier important. Nous avons pour l'instant renoncé à cette tâche, qui ferait pourtant partie de nos missions, pour des raisons budgétaires. Nous nous entourons de représentants des usagers pour traduire en langage accessible au grand public l'information générale qui figure sur notre site. Nous y travaillons avec le Collectif interassociatif sur la santé, le CISS, présidé par M. Christian Saout. Nous avons également commencé d'élaborer toute une documentation sur les parcours de soins et mis au point, pour les malades atteints de maladies chroniques, le programme personnalisé de soins, document remis au patient lui expliquant quelle sera sa prise en charge, et partagé avec les professionnels afin de coordonner au mieux leurs interventions.

Avant de laisser la parole à Gilles Bouvenot pour répondre aux questions concernant le médicament, je ferai quelques observations générales sur le sujet. Monsieur Bapt, la Haute Autorité a déjà une mission d'évaluation médico-économique sur les grandes stratégies de santé et les grandes classes thérapeutiques. Nous avons débuté une évaluation de ce type pour certains produits en lien avec le Comité économique des produits de santé. Lorsqu'une firme demandera pour la première fois l'admission d'un produit au remboursement, nous utiliserons le guide de l'évaluation médico-économique qui aura été rédigé à l'intention du comité. Nous vérifierons notamment que les hypothèses médico-économiques de la firme sont correctes. Mais il est impossible, à ce stade, d'effectuer de véritable évaluation médico-économique du rapport coûtefficacité puisqu'on ne connaît encore ni le prix du produit ni sa prescription dans la réalité. Une réévaluation aura donc lieu au bout de deux ou trois ans pour les médicaments dits d'intérêt, qu'ils soient susceptibles d'induire des dépenses importantes pour l'assurance maladie, qu'ils modifient les stratégies thérapeutiques ou qu'ils présentent un intérêt thérapeutique particulier par rapport à l'existant. Cette réévaluation médico-économique sera associée à celles, techniques, effectuées par la commission de la transparence ou la commission d'évaluation des dispositifs médicaux.

Je ne souhaitais pas parler de l'index thérapeutique relatif unique auquel plusieurs d'entre vous ont fait allusion. En effet, après six mois de travail, nous sommes en cours de discussion avec le ministère. Je vais néanmoins résumer la philosophie de cet index qui supplanterait les deux indicateurs actuels du SMR et de l'ASMR : on ne peut plus en 2012 évaluer un médicament comme en 1990, les possibilités thérapeutiques étant beaucoup plus larges. L'intérêt thérapeutique d'un médicament ne peut plus être évalué dans l'absolu mais seulement de manière relative, par comparaison à ce qui existe déjà. Le nouvel indicateur sera le plus quantifié possible afin de faciliter la tâche de la commission de la transparence. Celle-ci aura un rôle très important pour définir le comparateur, les modalités de l'évaluation et évaluer de façon semi-quantitative les différents paramètres.

Plusieurs d'entre se sont interrogés sur la place de la Haute Autorité en Europe, demandant s'il ne serait pas possible de conduire des évaluations communes au niveau européen. Nous avon pris l'initiative d'entrer en contact avec nos homologues européens pour voir s'il était possible d'uniformiser nos pratiques. Nous considérons que pourraient être définis à l'échelle européenne le comparateur, ainsi que les méthodes et critères d'évaluation. Cette réflexion, dans laquelle nous avons été pionniers et leaders, a abouti dans tous les pays, à l'exception notable du Royaume-Uni, à l'adoption du concept d'efficacité relative (relative efficacy assessment). Tous les pays partagent l'objectif même si chacun conserve une approche spécifique au regard de la configuration de son propre marché.

Je ne pense pas qu'un dialogue avec les firmes pharmaceutiques soit prématuré lors des essais de phase I. C'est lorsque les industriels préparent leur plan de développement qu'on discute avec eux pour savoir quelle est l'étude la meilleure pour obtenir une admission au remboursement. Ils sont d'ailleurs demandeurs d'un tel partenariat : ils souhaitent savoir précisément sur quoi ils vont être jugés, bref connaître les règles du jeu. Nous avons engagé de tels dialogues précoces, en liaison avec les autres agences européennes. Sans nous lier pour l'avenir, ils nous permettent de donner de premières indications.

La Haute Autorité est également leader en Europe pour l'amélioration de la qualité des soins. Tout comme il existe un réseau des agences d'évaluation des produits de santé, il en existe un des agences travaillant à l'amélioration de la qualité des soins. La HAS, qui exerce les deux missions, travaille dans les deux.

Deux remarques générales en conclusion. La première concerne la dispersion des moyens et la nécessité, souhaitée par tous, d'une clarification des missions des différentes instances. J'ai déjà eu l'occasion de le dire, la Haute Autorité n'a aucun désir de phagocyter quelque autre instance que ce soit. Mais nous ne pouvons que constater que certaines de nos missions sont très proches de celles d'autres.

Dans le domaine du médicament, les choses sont désormais très claires : l'Agence nationale de sécurité du médicament, l'ANSM, l'ex-AFSSAPS, est chargée du contrôle de l'ensemble des produits de santé, médicaments comme dispositifs médicaux. C'est à elle que remontent toutes les alertes de pharmacovigilance, matériovigilance, etc. Elle évalue le rapport bénéfices-risques des produits de santé tout au long de leur vie. Elle accorde et retire les autorisations de mise sur le marché, lesquelles sont toutefois maintenant pour l'essentiel délivrées au niveau européen. La Haute Autorité, elle, par le biais des deux commissions spécialisées présidées respectivement par Gilles Bouvenot et Jean-Michel Dubernard, étudie les produits pour les admettre ou non au remboursement et fixer leur taux de remboursement. Bien que complémentaire, ce travail est tout à fait différent de celui de l'ANSM. Il n'y a donc pas de chevauchement de compétences ni de compétition entre les deux instances. Il faut signaler que l'édiction des recommandations de bon usage des produits a été transférée de la nouvelle agence du médicament à la Haute Autorité.

La Haute Autorité ne souhaite pas non plus se substituer au Comité économique des produits de santé, qui fixe le prix des médicaments. Nous souhaitons seulement qu'il le fasse en tenant compte des éléments que lui transmettent la commission de la transparence et la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux. Gilles Bouvenot vous parlera plus en détail de la politique des prix. Je dirai seulement qu'il n'est pas absurde d'envisager des prix conditionnels liés aux résultats du médicament dans la réalité. Le comité a déjà travaillé sur ce type d'approche.

Restent en revanche à clarifier les rapports de la Haute Autorité avec certaines autres instances dont les missions sont assez comparables aux siennes. Je pense par exemple à l'Agence nationale de l'évaluation et de la qualité des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ANESM), qui certifie les établissements médico-sociaux, métier très proche du nôtre. Cette agence élabore d'ailleurs souvent ses recommandations en concertation avec nous.

Le Haut conseil de la santé publique a des missions pour partie redondantes avec les nôtres, notamment celles ayant trait aux grandes missions de santé publique, aux vaccinations et aux maladies chroniques.

Certaines des missions de l'Institut national du cancer (INCa) sont également très proches des nôtres. Nous élaborons d'ailleurs nos recommandations de bonnes pratiques en ce domaine en concertation avec l'Institut et nous validons mutuellement nos recommandations. Il serait envisageable de mutualiser au moins les moyens des deux instances.

La Haute Autorité travaille aussi avec l'Agence nationale d'appui à la performance des établissements de santé et médico-sociaux (ANAP), notamment sur le développement de la chirurgie ambulatoire. Certains aspects de nos tâches peuvent être communs, quand d'autres, comme le travail sur le terrain avec les établissements, sont une mission bien spécifique de l'agence, que la Haute Autorité n'est de toute façon pas en mesure de remplir pour l'instant.

Enfin, en matière de prévention, l'Institut national de prévention et d'éducation pour la santé (INPES) s'occupe de la prévention primaire alors que la Haute Autorité formule des recommandations relevant de la prévention secondaire, en particulier pour les dépistages.

Je terminerai par la question de l'éthique soulevée à propos des pilules contraceptives de troisième génération. La commission de la transparence ne rend qu'un avis médico-technique sur l'efficacité d'un médicament, sa place dans la stratégie thérapeutique et ses risques potentiels, essayant de déterminer s'il apporte un progrès dans le service médical rendu. C'est ce qu'elle a fait pour les pilules de troisième génération, les comparant aux pilules de deuxième génération. La commission n'a en revanche aucune compétence pour aborder la question sous l'angle social, psychologique ou éthique. C'est à la commission d'évaluation économique et de santé publique, autre commission de la Haute Autorité qu'il reviendrait d'envisager ces aspects-là. Les réévaluations de classe, comme pour les pilules de troisième génération ou les médicaments anti-Alzheimer, comportent un aspect technique qui relève de la commission de la transparence et un aspect plus général, social, financier, éthique, qui relève de la commission d'évaluation économique et de santé publique. Pour ce type de décision, il ne serait pas inutile que le collège de la Haute Autorité fasse la synthèse des avis des deux commissions spécialisées.

de la commission de la transparence. Vous nous avez interrogés, madame la présidente, sur l'évaluation des biosimilaires. D'une manière générale, la Haute Autorité n'a pas à connaître des génériques. Ceux-ci n'ont aucune raison d'être évalués dans la mesure où, équivalents au princeps, ils ne peuvent par définition ne lui être ni inférieurs ni supérieurs. Après que leur bioéquivalence a été examinée par l'agence nationale de sécurité du médicament, ils passent directement devant le Comité économique des produits de santé qui en fixe le prix, en général inférieur de 50 % à 60 % à celui du princeps.

La Haute Autorité n'est amenée à connaître d'un générique que dans deux cas. Le premier est lorsqu'un générique comporte un excipient à effet notoire potentiellement moins bien toléré : nous le considérons alors comme moins performant. Le second cas, ubuesque ou kafkaïen je ne sais, est lorsqu'à la suite d'une autorisation européenne de mise sur le marché, un générique se trouve n'avoir pas les mêmes indications que le princeps. Lorsqu'un générique obtient au niveau européen des indications plus larges que celles d'un princeps national, il nous est très difficile de procéder à une évaluation. Nous soulignons alors cette difficulté avant de conclure éventuellement que le SMR est insuffisant dans ces extensions d'indication.

Si la Haute Autorité n'a normalement pas à connaître des génériques, sauf dans les deux cas cités, c'est elle néanmoins qui en propose l'agrément aux collectivités.

Elle est en revanche saisie des biosimilaires. Leur autorisation de mise sur le marché comporte en effet une obligation d'avoir un dossier car un biosimilaire peut être fabriqué par un autre être vivant que le princeps et donc présenter de petites différences. De parti pris, nous attribuons à ces biosimilaires une ASMR 5 : en effet, ils ne peuvent pas apporter de progrès et donc, aux termes du code de la sécurité sociale, doivent coûter moins cher à l'assurance maladie.

Des arguments s'opposent, dont nous essayons de faire abstraction pour nous déterminer. Certains font valoir qu'introduire un nouveau produit sur le marché, c'est augmenter la charge de l'assurance maladie car cela s'accompagnera nécessairement de visite médicale, de marketing et de promotion. D'autres estiment au contraire que plus on aura de produits à disposition, moins ils coûteront au final puisqu'une décote est chaque fois appliquée sur le prix.

Oui, monsieur Bapt, les notes d'ASMR actuelles sont plus rigoureuses que par le passé. Dans la mesure où la pharmacopée est beaucoup plus fournie et que le besoin thérapeutique est, sauf exception, presque toujours satisfait, nous sommes plus exigeants avant de conclure qu'un produit apporte un progrès.

Quant aux éventuelles incohérences, elles ne sont que de façade et il n'est pas difficile de les lever. Les missions de la commission d'autorisation de mise sur le marché de l'ANSM et de la commission de la transparence de la Haute Autorité sont différentes. Je reviens sur le Multaq, que vous évoquiez…

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Gilles Bouvenot, président de la commission de la transparence

Tout à fait, vous êtes plus prudent que moi. Le Multaq, utilisé dans le traitement de l'arythmie cardiaque, est une dronédarone, c'est-à-dire une cordarone désiodée, ce qui laisse espérer qu'il n'affecte pas la thyroïde, contrairement à la cordarone chez certains sujets. Si le projet partait d'une bonne intention du laboratoire, le dossier du Multaq fait état d'un essai comparatif avec l'ancien produit où il se révèle moins bon que celui-ci. Face à cela, la commission de la transparence agit comme si l'index thérapeutique relatif était en vigueur. Concluant que le nouveau produit est inférieur, elle ne l'admet pas au remboursement. Ce n'est pas incohérent avec le fait qu'il ait reçu une autorisation de mise sur le marché. Le Multaq la mérite sans nul doute car ses bénéfices l'emportent sur ses risques. Mais la commission de la transparence, elle, a pour rôle de n'admettre au remboursement que les produits les meilleurs. Vu les incidences économiques et financières de ses décisions, cette mission ne peut être remplie que par une structure que le législateur a voulu en 2004 totalement indépendante. Il n'y a aucune incohérence pour un nouveau médicament à posséder une autorisation européenne de mise sur le marché et n'être pas admis au remboursement dans notre pays. C'est tout simplement qu'il n'est pas assez efficace ou pas plus efficace que les produits existants.

S'agissant des pilules contraceptives de troisième génération, je ne peux que confirmer les propos de Jean-Luc Harousseau. Nous n'avons jamais dit qu'elles devaient être retirées du marché. Outre qu'une telle décision de toute façon ne nous incomberait pas, nous ne souhaiterions pas ce retrait. Mais les comparant à celles de deuxième génération, nous avons constaté que le risque de phlébite et d'embolie pulmonaire était doublé. D'où notre avis de ne plus les admettre au remboursement. Il faut d'ailleurs souligner que beaucoup de fabricants n'avaient pas sollicité leur inscription au tableau des spécialités remboursables afin de pouvoir en fixer librement le prix. Nous n'en aurions jamais proposé le déremboursement si les pilules de deuxième génération n'avaient pas existé, sans compter qu'il existe d'autres moyens de contraception. La ministre de la santé a reporté la décision de déremboursement au 30 septembre 2013, souhaitant que la Haute Autorité procède à une revue d'ensemble des moyens contraceptifs en même temps que l'ANSM réexaminera leur rapport bénéfices-risques. Bien que la commission de la transparence, qui se contente d'éclairer la décision publique, ne commente jamais les décisions de déremboursement, je dirai ici que nous avons apprécié le report de la décision car le danger n'est pas tel que les femmes qui prennent une pilule de ce type doivent arrêter immédiatement leur traitement. Je le redis, notre seule préoccupation est que ne soient proposés au remboursement que les produits les meilleurs.

Je n'ai aucune légitimité pour m'exprimer ni sur l'Agence européenne du médicament ni sur son homologue française. Leurs relations sont ce qu'elles sont. Simplement n'oublions pas que les décisions d'autorisation de mise sur le marché sont désormais prises au niveau européen.

Pourquoi certaines de nos décisions tardent-elles ? Leurs incidences économiques et financières lorsqu'il s'agit d'évaluation des produits de santé sont telles que les firmes pharmaceutiques n'hésitent pas à déposer un recours devant le Conseil d'État dès qu'une occasion leur en est donnée, notamment si les procédures réglementaires n'ont pas été strictement respectées. Une fois que nous avons rendu un projet d'avis, elles ont le droit de le contester au terme d'une période dite contradictoire. Durant cette période, elles peuvent être auditionnées, éventuellement accompagnés de leurs propres experts. Lorsque nous rendons un avis mi-juillet, vu que la période contradictoire peut durer un mois et demi ou deux, il est quasi-certain, avec les congés d'été, que l'audition est reportée à septembre, ce qui peut donner l'impression que la décision définitive traîne. Soyez rassurée, madame la députée, il n'y a dans ces délais rien de dilatoire, en tout cas, ajouterai-je, faisant cette fois preuve de la même prudence que M. Bapt, de notre côté.

S'agissant des anti-arthrosiques que vous avez évoqués, oui, nous avons immédiatement demandé le déremboursement de l'un d'eux alors que nous attendons pour les autres les résultats d'une étude. Celui que nous pouvons donner l'impression d'avoir traité plus sévèrement est un produit qui, dans le cadre d'un essai comparatif, n'a pas apporté la preuve qu'il était au moins équivalent aux autres. Vu que nous sommes en période contradictoire, je ne peux en dire davantage – sauf à risquer un recours de la firme devant le Conseil d'État ! La commission de la transparence a voulu réévaluer ces médicaments pour voir s'il était toujours pertinent qu'ils soient remboursés mais aussi parce que les rhumatologues faisaient valoir qu'ils étaient surtout pris par des personnes âgées, auxquelles les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont vivement déconseillés vu leurs potentiels effets indésirables – hémorragie digestive, perforation de l'estomac, hypertension, insuffisance cardiaque, insuffisance rénale. Nous nous sommes dit que si nous démontrions que la prise des anti-arthrosiques visés pouvait éviter aux sujets âgés de prendre ces anti-inflammatoires, il vaudrait peut-être la peine de ne pas les dérembourser. Les laboratoires, qui ont pris le sujet à coeur, ont mené une étude post-inscription tout à fait éclairante, qui n'aura vraisemblablement pas montré ce que tout le monde espérait dans l'intérêt des patients. Voilà donc pour ce qui concerne le Structum, le Chondrosulf et alii.

Mme Orliac déplore que nos concitoyens puissent parfois n'avoir pas accès à un médicament ayant obtenu une autorisation européenne de mise sur le marché et donc disponible dans les autres pays européens alors qu'il ne l'est pas en France au motif qu'il a reçu une AMSR 5. Permettez-moi de vous dire que les choses ne se passent pas tout à fait ainsi. Lorsque la commission de la transparence donne une ASMR 5 à un produit, elle n'est pas défavorable à son remboursement, elle dit simplement que, comme il n'apporte pas de progrès, il doit, aux termes mêmes du code la sécurité sociale, coûter moins cher. Pour autant, vous n'avez pas tort, madame Orliac : ce que vous regrettez arrive parfois. La négociation entre la firme et le Comité économique des produits de santé peut en effet achopper et si la firme refuse le prix qu'on lui propose, elle peut décider de ne pas commercialiser le produit.

Je souhaiterais ici appeler solennellement l'attention de la représentation nationale : la commission de la transparence ne peut pas servir de variable d'ajustement dans la politique du médicament. Cette commission rend, comme l'a dit le président Harousseau, des avis strictement médico-techniques, fondés sur des arguments scientifiques. C'est le cas de l'avis qu'elle a rendu sur saisine du directeur général de la santé au sujet des pilules de troisième génération. Je n'ai aucune réticence à dire que le collège de la Haute Autorité aurait pu ou aurait dû se prononcer après les commissions compétentes. Seulement il se trouve que ce n'est pas lui qui a été interrogé, mais la commission de la transparence. Les pouvoirs publics souhaitaient sans doute tirer eux-mêmes les conséquences de notre avis, en prenant en compte diverses considérations d'ordre sociétal et éthique. Ils ont d'ailleurs fait connaître très vite leur décision, le soir même de notre rendu d'avis.

Sommes-nous plus sévères en France que ne l'est l'Agence européenne du médicament ? Je ne sais. Toujours est-il que l'égalité d'accès aux soins entre les différents pays européens me paraît satisfaisante. Je souligne ici, sans nul chauvinisme, qu'en matière de médicaments, y compris pour les maladies orphelines, la France est « bonne mère », pour reprendre une expression de votre ancien collègue Yves Bur. Nous n'avons vraiment pas à rougir. Je n'ai pas connaissance d'un seul cas où un médicament de valeur exceptionnelle serait disponible dans un autre pays européen et ne le serait pas en France. Si d'aventure le cas se présentait, je demanderais à savoir pourquoi et je pense que la situation ne serait pas imputable à la Haute Autorité.

Un tiers de nos concitoyens aurait, dites-vous, dû renoncer à des soins. La commission de la transparence, qui veille à ne céder à aucune des nombreuses pressions qui s'exercent sur elle, de la part des associations de patients, des professionnels de santé ou des industriels du médicament, a pleinement conscience des conséquences de ses avis. Mais je ne vois pas d'exemple de maladies sérieuses qui ne seraient pas prises en charge et dont ceux de nos concitoyens qui en sont atteints ne pourraient être soignés. Des traitements qui coûtent jusqu'à 12 000 euros par an et par personne sont disponibles sans rationnement pour ceux qui en ont besoin.

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président de la Haute Autorité de santé

C'est surtout à des soins mal ou non remboursés par l'assurance maladie, comme les soins dentaires, que nos concitoyens peuvent être amenés à renoncer. En revanche, l'égalité d'accès aux soins pour les maladies chroniques et les maladies graves est garantie. Cela ne signifie pas qu'il n'existe pas d'inégalités sociales qui demandent à être corrigées en matière de santé. On sait en effet que les couches les plus défavorisées de la population sont plus souvent malades et frappées de maladies graves. Mais le remboursement des soins et des médicaments, y compris des plus coûteux, ne nous semble pas un facteur d'inégalité.

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Gilles Bouvenot, président de la commission de la transparence

Je partage le même avis.

Plusieurs d'entre vous ont soulevé la question des conditionnements. La commission de la transparence, chargée d'attribuer une note de SMR et d'ASMR, doit également définir la population cible d'un médicament et se prononcer sur le caractère adéquat ou non de son conditionnement. Il nous arrive de dire qu'un conditionnement n'est pas adapté. Aucun texte ne rend, hélas, notre avis contraignant pour l'industriel. Pourrait-on descendre à la gélule ou au comprimé dans la dispensation en pharmacie ? Au Royaume-Uni, pour certains médicaments, on donne aux malades le nombre exact de comprimés nécessaires. Il n'appartient pas à la Haute Autorité, mais à l'ANSM, de se prononcer sur l'intérêt ou le danger que présenterait une délivrance à l'unité. La Haute Autorité peut seulement dire qu'elle souhaite la meilleure adéquation possible entre le conditionnement et les besoins des patients.

Les Français sont ambivalents à l'égard des médicaments, c'est vrai. En même temps qu'ils s'en défient, ils en consomment à tout propos. Il faut voir aussi qu'on leur en surprescrit facilement. Il est tellement simple de donner un hypnotique à une personne âgée ou de la Ritaline à un enfant hyperactif pour avoir la paix ! S'agissant de la Ritaline, je ne pourrais rien dire. La Haute Autorité a en effet été saisie par le directeur général de la santé pour revoir l'ensemble des produits à base de méthylphénidate, principe actif de la Ritaline. Et nous sommes actuellement en période contradictoire. Je n'ai donc absolument pas le droit de lever le voile sur notre projet de décision.

Le Mopral est passé en vente libre, tandis qu'était mis sur le marché un isomère, l'Inexium, simple isomère de l'oméprazole. C'est ancien et cela ne pourrait plus se reproduire. Dès sa création, la commission de la transparence a constaté qu'étaient proposés au remboursement puis commercialisés des isomères qui n'étaient rien d'autre que des contre-génériques. Alors qu'au début, les pharmacologues nous assuraient qu'un isomère était plus efficace qu'un racémique, mélange des deux isomères, nous savons maintenant qu'il n'en est rien. Nous sommes donc extrêmement vigilants et depuis longtemps plus aucun contre-générique ne s'est vu reconnaître d'ASMR.

Pourquoi ne pas garder un seul médicament – le moins cher – par classe thérapeutique dans notre pharmacopée ? C'est là un problème politique qui ne relève pas de la compétence de la Haute Autorité. Nous n'avons aucun pouvoir d'exclure du marché, où la libre concurrence est garantie, tel nouveau médicament au motif que d'autres couvrent déjà le même besoin thérapeutique. Nous pouvons seulement faire valoir que le besoin est satisfait. C'est ainsi que cinq statines sont aujourd'hui disponibles en France !

J'en viens aux médicaments homéopathiques. D'une manière générale, la Haute Autorité n'a pas à en connaître. En effet, la commission de la transparence attribue des notes de SMR et d'ASMR en fonction d'indications retenues dans l'autorisation de mise sur le marché. Or, ces médicaments n'en ont pas. Il nous est arrivé de manière toute à fait exceptionnelle d'avoir à nous prononcer sur une teinture mère. Nous avons dit que nous n'étions pas en mesure de l'évaluer car il n'y avait pas d'indications précises ni de dossier. Si la commission de la transparence n'a pas de position de principe contre l'homéopathie, elle a toutefois approuvé la décision prise en 2004 par le ministre de la santé, Jean-François Mattei, d'en abaisser le taux de remboursement de 65 à 35 %. Il nous semblait en effet juste que ces produits, sans dossier d'évaluation ni indications, ne soient pas mieux remboursés que des produits classiques possédant, eux, un dossier et des indications.

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président de la commission nationale d'évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé

L'affaire des prothèses PIP a soulevé deux problèmes, celui de la sécurité de ces dispositifs au niveau national et celui des coopérations européennes. La loi du 29 décembre 2011 a été très positive en matière de sécurité du médicament et des produits de santé mais je ne suis pas aussi enthousiaste que Jean-Luc Harousseau sur la lisibilité et le partage des compétences entre agences sanitaires nationales. Il faudrait, selon moi, revoir totalement leur organisation et s'inspirer du Royaume-Uni, où le nombre d'agences a été ramené de 21 à 9 et où, moins de quatre ans plus tard, 45 % d'économies de fonctionnement auraient été enregistrées. L'excellent rapport de votre ancien collègue Yves Bur sur le sujet était à mon avis trop prudent.

Pour le reste, il est évident que, pour les dispositifs médicaux, l'actuel marquage CE ne suffit pas, les organismes de certification notifiés étant très hétérogènes. Une procédure d'autorisation de mise sur le marché serait, de mon point de vue, nécessaire. Elle pourrait d'ailleurs voir le jour. La récente directive sur le sujet ne va toutefois pas assez loin, sans compter que, comme pour toutes les directives, bien du temps passera avant qu'elle ne soit examinée par le Parlement européen. Vous avez à cet égard un rôle-clé à jouer auprès des députés européens.

À des coopérations européennes, je me suis en vain essayé depuis quatre ans. Nous avions retenu trois thèmes : les stents intra-crâniens, divers dispositifs anticipant les futurs implants rétiniens et les pieds et chevilles à restitution d'énergie. Nous nous sommes beaucoup réunis et avons beaucoup débattu, hélas pour rien : rien de concret n'en a résulté. J'ai alors changé de partenaires, me tournant vers l'IQWIG allemand (Institut für Quälität und Wirtschaftlichkeit im Gesundheitswesen) et le NICE anglais. Même constat, hélas : on discute mais rien n'avance ! Nous aurions pourtant grand besoin de coopérations européennes en matière de dispositifs médicaux, où les populations cibles sont très peu nombreuses.

Vous avez raison, madame Carrillon-Couvreur, l'excellente loi de 2005 sur le handicap n'est pas appliquée comme elle devrait l'être. Mais la Haute Autorité est seulement chargée d'évaluer sur le plan scientifique les outils de compensation du handicap. Nous travaillons sur saisine, et il nous est très difficile de nous autosaisir, vu la complexité des dossiers.

Monsieur Perrut, comment faire diminuer la dépense publique en matière de dispositifs médicaux ? Tout d'abord, en les évaluant plus rigoureusement sur le plan scientifique. Nous nous y efforçons, mais la tâche est souvent difficile. Ensuite, en précisant mieux les indications et les stratégies. Nous y tendons également. Enfin, en réévaluant l'ensemble des dispositifs dans les groupes homogènes de séjour (GHS), comme cela nous a d'ailleurs été demandé. Nous nous y sommes attelés mais il faudrait des moyens considérables pour mener la tâche à bien.

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président de la Haute Autorité de santé

J'ai oublié tout à l'heure de répondre à Mme Clergeau qui nous appelait à plus de réactivité. Certaines de nos décisions, pour lesquelles nous n'avons pas de contraintes de délai, peuvent prendre deux ans ou plus. D'autres doivent être prises d'urgence et le sont. Nous avons pris des dispositions pour pouvoir aller plus vite sur les dossiers les plus brûlants comme ceux touchant à la pertinence des actes. Enfin, pour accélérer notre production, nous nous attachons désormais à rédiger des recommandations plus courtes. Au lieu d'édicter tout ce qui serait souhaitable pour une pathologie donnée, nous nous focalisons sur certains aspects, pratiques notamment, pouvant servir à l'organisation du parcours de soins.

Je laisse Dominique Maigne répondre sur les moyens de la Haute Autorité.

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Dominique Maigne, directeur de la Haute Autorité de santé

Dès 2010, la Haute Autorité s'était d'elle-même engagée dans la démarche d'économies qui allait être exigée des agences sanitaires. En 2012, nos ressources annuelles ont diminué de 10 % suite à la décision prise par le gouvernement dans la loi de financement de la sécurité sociale de réduire de 100 millions d'euros les crédits destinés aux opérateurs et qui s'est appliquée à chacun à due proportion de son budget antérieur. 2012 a donc été compliquée pour la Haute Autorité sur le plan budgétaire, alors même que le périmètre de ses missions était étendu.

Il faudrait revoir totalement le mode de financement de la Haute Autorité. Un peu plus de la moitié de nos ressources proviennent aujourd'hui d'une subvention de l'État au titre du programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » et d'une dotation forfaitaire de l'assurance maladie, complétée grâce à la mutualisation de l'ensemble des coûts de certification. L'autre moitié provient de taxes prélevées sur l'industrie du médicament et des dispositifs médicaux et dont une part du produit nous est reversée. Le problème est qu'il s'agit des taxes perçues sur la promotion. Cela soulève tout d'abord une question sinon d'éthique, du moins de lisibilité de notre action. Et cela rend nos ressources très volatiles, le produit de ces taxes étant extrêmement variable. Enfin, 10 % de nos ressources proviennent de nos activités de guichet.

Nous avons obtenu dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 que le plafond du produit des taxes, qui ne l'avait pas été depuis très longtemps, soit relevé. Les textes prévoient que désormais l'ensemble des taxes représente environ 40 % de nos ressources. Nous étions convenus à l'époque avec la représentation nationale et le gouvernement qu'il faudrait aller à 70 % pour les porter au niveau de ce qu'elles représentent dans le budget des autres agences. Une actualisation minimale de 30 % serait donc aujourd'hui nécessaire.

PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Je vous remercie, messieurs, de ces réponses très complètes.

Je retiens trois points principaux de nos échanges. Tout d'abord, concernant le budget de la Haute Autorité. On ne peut pas sans cesse charger davantage sa barque sans lui donner parallèlement les moyens de rester à la surface de l'eau.

Pour ce qui est des experts, je fais confiance à la vigilance de M. Bouvenot pour en recruter sans lien d'intérêt. Même si l'on peut concevoir des exceptions dans le cas des maladies orphelines parce qu'il n'y a que très peu d'experts pour chacune d'entre elles, il ne faudra pas néanmoins que le lien d'intérêt qu'ils peuvent avoir avec l'industrie se transforme en conflit d'intérêt et brouille leur esprit.

Enfin, je rappelle que le législateur a souhaité dans la loi du 29 décembre 2011 que soit le plus rapidement possible constituée une base de données Médicaments, indépendante et fiable. Elle permettra de contrer les informations incertaines délivrées sur certains sites Internet privés, y compris des sites certifiés par l'organisation Health on the net, cette certification n'étant, hélas, pas gage de l'indépendance totale des sites. Il est prévu que la Haute Autorité soit associée à la constitution de cette base Médicaments, qui sera mise en place sous l'égide de l'ANSM.

La Commission des affaires sociales procède ensuite au dépouillement du vote sur la nomination de M. Jean-Claude Ameisen à la présidence du Comité consultatif national d'éthique pour les sciences de la vie et de la santé (CCNE).

Le tirage au sort a désigné MM. Arnaud Robinet et Gérard Sebaoun.

Les résultats du scrutin sont les suivants :

Nombre de votants

Bulletins blancs ou nuls

Suffrages exprimés

Favorables

Défavorables

La séance est levée à douze heures quinze.