Séance en hémicycle du 14 janvier 2015 à 21h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à vingt et une heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle le débat sur la politique maritime de la France.

La parole est à M. le secrétaire d’État chargé des transports, de la mer et de la pêche.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

Madame la présidente, mesdames et messieurs les députés, vous avez pris l’initiative d’organiser un nouveau débat sur la politique maritime de la France, après celui que vous aviez déjà eu en juin 2013 avec mon prédécesseur, à qui je veux rendre hommage.

Ce débat revêt une importance particulière. Le Premier ministre lui-même, à l’occasion des Assises de la mer et du littoral qui se sont tenues le 2 décembre dernier à Nantes, avait exprimé le souhait qu’un débat parlementaire soit consacré à ce sujet. En effet, la responsabilité de la France, grande nation maritime, est forte en la matière si elle veut être à la hauteur de l’enjeu et des opportunités historiques de ce secteur. Un an après le dernier comité interministériel de la mer, notre pays doit continuer à travailler à l’édification d’une politique publique de la mer. C’est le sens même de ma communication en conseil des ministres du 1er octobre dernier.

Grâce à ses outre-mer notamment, la France est présente sur quatre océans et possède la deuxième surface maritime du monde, s’étendant sur onze millions de kilomètres carrés. Cet espace est d’une importance économique de premier ordre, tant sur le plan de l’exploitation des ressources naturelles – je pense aux pêcheries et aux réserves énergétiques et minérales – que du fait de l’explosion du commerce maritime, qui représente 80 % du commerce mondial. En France, cela représente 300 000 emplois directs, près d’un million d’emplois indirects et 65 milliards d’euros de chiffre d’affaires, sans compter les activités littorales.

Mais des menaces pèsent sur le maintien des grands équilibres écologiques marins et littoraux. La prise de conscience de la vulnérabilité des grands équilibres écologiques, aujourd’hui plus aiguë que jamais, exige que nous recherchions des solutions pour assurer leur préservation et une exploitation durable des ressources. C’est aussi un des enjeux de la Conférences des Parties à la convention climat, ou COP Climat, qui doit se tenir en décembre prochain et qui est cette année une priorité du Gouvernement.

Je suis convaincu que la mer est au croisement de tous les enjeux du développement durable. Cette réalité impose une nécessité : celle de l’émergence d’une croissance bleue intégrée, à l’instar de celle qui se développe aujourd’hui à l’échelle européenne. Nous devons donner un cap à cette ambition maritime renouvelée. Nous allons maintenant mettre en oeuvre la stratégie nationale de la mer et du littoral. Depuis 2013, des étapes importantes ont été franchies en vue de l’élaboration de cette stratégie : l’installation du conseil national de la mer et des littoraux le 18 janvier 2013, la tenue des Assises de la mer et du littoral, la réalisation d’un rapport d’état des lieux « mer et littoral ».

J’en retiens trois priorités fondamentales : la croissance et l’emploi ; la protection de l’environnement marin et l’exploitation durable des ressources ; la recherche, l’innovation et l’enseignement maritimes.

La croissance et l’emploi seront ma première priorité.

Je veux accompagner dans leur développement les entreprises françaises de transport et de service maritimes, dont certaines sont des leaders mondiaux. Ce développement s’appuie sur les compétences que notre pays a su et doit continuer à développer dans les métiers à terre et en mer.

Des travaux importants ont été engagés au cours des deux dernières années. Nous sommes ainsi parvenus à un consensus sur la protection privée des navires contre la piraterie avec la loi du 1er juillet dernier, dont les décrets d’application ont tous été publiés pour une entrée en vigueur dès le 1er janvier. Le Gouvernement s’est engagé à légiférer sur l’avenir du transport pétrolier par voie maritime, qui a fait l’objet d’une disposition dans la loi relative à la transition énergétique. Un appel à projets doté de 80 millions d’euros a été lancé pour aider à la modernisation des ferries et l’appel à manifestations d’intérêts « navires du futur » se poursuit. Nous avons par ailleurs assuré la mise en oeuvre de la convention du travail maritime, en vue d’éradiquer les situations de normes sociales et de conditions de travail indécentes. Des dispositions ont été adoptées dans le cadre de la loi de finances rectificative pour 2014 pour accroître la compétitivité de l’armement français en consolidant le régime fiscal de la taxe au tonnage et en élargissant le régime des plus-values de cession de navires. Nous avons enfin entrepris de simplifier les procédures, dans le sillage des propositions du rapport Leroy et des travaux du dernier comité interministériel de la mer.

La bataille pour l’emploi suppose aussi d’agir pour faire avancer le dossier de la SNCM. Malgré tous les pronostics défavorables, nous avons obtenu la possibilité d’inclure la délégation de service public dans l’appel d’offres organisé par les mandataires judiciaires. La bataille pour l’emploi, c’est se battre pour l’avenir de MyFerryLink, menacée depuis la décision prise il y a quelques jours par l’autorité britannique de la concurrence et dont je répète qu’elle me paraît injuste, notamment pour les salariés.

C’est à dessein que j’évoque votre rapport, monsieur Leroy, car c’est un travail fondateur du point de vue de la « maritimisation » des esprits. Non seulement vos travaux apporte un souffle nouveau au sujet de la flotte de commerce, monsieur le député, mais en outre ils font référence pour l’ensemble de la communauté maritime.

L’emploi profitera aussi du développement des énergies marines. L’exploitation de l’énergie thermique dans les outre-mer en est une belle illustration. J’ai la conviction profonde qu’on a là l’opportunité d’assurer demain l’autonomie énergétique de nos territoires ultramarins.

La croissance passe aussi, conformément aux conclusions du rapport parlementaire d’Odette Herviaux, par le renforcement des ports maritimes, tant les grands ports maritimes relevant de l’État que les ports décentralisés. Nos ports, et plus généralement nos villes portuaires, doivent conforter et développer leurs capacités industrielles et leur savoir-faire. Je sais l’implication de Jean-Christophe Fromantin dans ce domaine ; j’ai souvenir de nos échanges sur les hinterlands et la stratégie nationale de relance portuaire. Celle-ci s’étendra prochainement à l’outre-mer, et j’aurai le plaisir de la présenter dans quelques semaines, à l’occasion de l’installation du conseil de coordination interportuaire Antilles-Guyane.

Les ports élaborent actuellement leurs projets stratégiques. L’État souhaite affirmer son ambition et définir une feuille de route valant pour l’ensemble de son système portuaire et visant à donner à la France une place de premier rang dans le commerce international et à en faire le point d’entrée, ou le hub, de l’Europe. Les ports sont aussi des acteurs très importants des démarches engagées depuis un an dans le cadre de la conférence pour la relance du fret ferroviaire et de la conférence sur le fret fluvial, qui ont pour objet de définir et mettre en oeuvre des actions concrètes en faveur de ces deux modes de transport, dont le développement est fondamental pour l’élargissement des hinterlands de nos ports.

Les contrats de plan État-région joue un rôle significatif en la matière puisque l’effort de l’État en faveur des ports s’élève dans ce cadre à 334 millions d’euros. Cet effort considérable témoigne de l’implication de l’État dans le développement des grands ports maritimes, implication confirmée par le Premier ministre à Nantes. Le tourisme littoral est lui aussi un relais de croissance, grâce aux ports de plaisance et aux loisirs nautiques.

La deuxième priorité, c’est la protection de l’environnement marin et une exploitation durable des ressources.

La création ou la mise à l’étude de nouvelles aires marines protégées, après l’annonce de la création ou de la mise à l’étude de six parcs marins depuis 2012, s’inscrivent dans l’objectif de préservation d’un bon état écologique des milieux marins. Notre ambition est de permettre la création de 20 % d’aires marines protégées à l’horizon 2020. Le Conservatoire du littoral, auquel j’ai le plaisir de souhaiter un excellent quarantième anniversaire, et l’Agence des aires marines sont des établissements publics à l’action reconnue et constituent, chacun dans son domaine, des outils indispensables pour aider à renforcer cet atout du point de vue d’un développement durable équilibré.

En métropole, la directive-cadre sur la stratégie pour le milieu marin de 2008 constitue désormais le cadre d’action et de référence en matière de bon état écologique. Innovante et ambitieuse, cette directive vise à maintenir ou rétablir un bon fonctionnement des écosystèmes marins tout en permettant l’exercice durable des activités humaines en mer. Les résultats de l’évaluation par les autorités communautaires des premières étapes de sa mise en oeuvre, publiés en 2014, sont globalement positifs pour la France et attestent de la qualité du travail fourni. C’est la première fois qu’un suivi consolidé des milieux marins va être mis en place à l’échelle nationale, grâce à l’expertise de nos institutions scientifiques et techniques, dont les travaux sur les milieux marins font autorité.

Par ailleurs le Gouvernement assure la mise en gestion des sites Natura 2000 en mer en finançant l’élaboration des documents d’objectifs et l’animation de ces sites. Nous menons aussi, dans la concertation, notamment avec les pêcheurs, un travail de désignation de nouveaux sites au large, pour satisfaire aux obligations communautaires en matière de protection des oiseaux et mammifères pélagiques et des récifs. Les efforts des élus, des socio-professionnels ou des associatifs impliqués dans cette gestion sont aujourd’hui reconnus sur le plan international : en témoignent la valorisation par l’Union internationale de conservation de la nature du parc naturel marin d’Iroise, du parc national de Guadeloupe et de la réserve naturelle nationale de Cerbère Banyuls.

Quant au littoral, les tempêtes hivernales de l’hiver dernier ont montré sa vulnérabilité et sa fragilité face à un phénomène d’érosion très prégnant dans certains secteurs. Outre les mesures d’urgence qui ont été prises par le Gouvernement pour soutenir les actions de réparation des collectivités, la mise en oeuvre de la stratégie nationale pour la gestion du trait de côte se concrétisera par la réunion le 22 janvier du comité national de suivi du trait de côte.

Au sein du secteur maritime, la pêche et l’aquaculture sont des activités économiques importantes et structurantes pour notre littoral. La réalité de la pêche française, et sa force, c’est sa diversité. La petite pêche côtière, la pêche hauturière, la grande pêche, la pêche dans nos outre-mer : toutes jouent un rôle essentiel dans l’économie maritime et l’attractivité de nos ports de pêche – je salue ici les élus qui portent haut les valeurs et les couleurs des ces ports.

Le devoir de la France d’assumer son statut de grande puissance halieutique lui impose d’engager une démarche constructive avec la Commission européenne et les États membres. C’est le sens même de la politique commune de la pêche, qui vient d’être réformée dans toutes ses composantes, qu’il s’agisse du règlement de base, de l’organisation commune des marchés ou de l’instrument financier qu’est le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche, le FEAMP. Nous devons désormais mettre en oeuvre cette réforme et la réussir. Lors de mes premiers entretiens avec les représentants du secteur et à l’occasion de mes déplacements sur le terrain, j’ai pu prendre la mesure des enjeux – je pense notamment à l’obligation de débarquement des rejets.

Les résultats obtenus tout récemment par la France en matière de fixation des quotas pour 2015 dans le cadre du dernier conseil des ministres européens de la pêche illustrent notre détermination à défendre les intérêts de la pêche française tout en garantissant l’exploitation durable et responsable des ressources.

En 2015, un FEAMP pleinement opérationnel permettra d’accompagner la nouvelle politique commune de la pêche, avec des moyens renforcés par une hausse des crédits de 70 %. La rédaction du programme opérationnel avance, en étroite collaboration avec les régions qui pourront désormais être autorité de gestion déléguée pour certaines mesures. C’est une priorité majeure pour ce début d’année.

Enfin le renouvellement de la flotte de pêche est un impératif. Un rapport de l’Inspection générale des finances, l’IGF, et de l’Inspection générale des affaires maritimes, l’IGAM, vient de m’être remis à ce sujet. Il sera rendu public, et je souhaite que, sur la base de ses conclusions, nous puissions explorer des pistes concrètes, en associant à la fois les entreprises de pêche, les structures professionnelles, les collectivités et les services de l’État.

Notre pays souffre également d’une forte dépendance aux importations de produits de la mer, à hauteur de 80 %. Nous devons réduire cette dépendance et renforcer l’ambition aquacole de la France. L’aquaculture doit redevenir un secteur stratégique dans les prochaines années : c’est le sens du plan national pour le développement d’une aquaculture durable.

Une politique ambitieuse de recherche, d’enseignement, d’innovation et d’acquisition de connaissances en sciences marines visant à valoriser la mer et l’extraction de ressources minérales : telle est ma troisième priorité.

Il s’agit de renforcer l’attractivité de l’enseignement maritime et des métiers de la mer et de permettre le rayonnement des marins français et du système d’enseignement français à l’étranger. Grâce à un système intégré, du lycée maritime jusqu’à l’école nationale supérieure maritime, l’ENSM, via l’ouverture des premiers BTS maritimes en septembre 2014, et grâce à un réseau qui peut se rapprocher des grandes écoles d’ingénieurs dont le pays est riche, le marin français devient une référence.

La recherche maritime est, elle aussi,un levier de développement pour ce secteur. Faut-il rappeler qu’outre l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer, l’IFREMER, la France dispose en la matière d’un potentiel de premier plan au niveau mondial et européen, notamment grâce à la mise en place de l’Alliance nationale de recherche pour l’environnement, l’ AllEnvi ?

La construction navale également peut être envisagée sous cet angle de la recherche. La spécialisation sur des créneaux à haute valeur ajoutée a permis à l’industrie française de renforcer son savoir-faire, son potentiel industriel, et ainsi d’augmenter ses parts de marché. Générant 60 000 emplois directs et 10,5 milliards d’euros de chiffre d’affaires en 2013, ce qui la place au sixième rang mondial, la filière navale française a fait la preuve de sa compétitivité.

En partenariat avec le ministère de l’économie, de l’industrie et du numérique, il convient de renforcer le Conseil d’orientation de la recherche et de l’innovation pour la construction et les activités navales, le CORICAN, et de lui donner des moyens d’action efficaces. Une structuration de la filière est nécessaire, sur le modèle de ce que l’aéronautique a su construire. Il nous appartient de jouer collectivement la carte de l’industrie française.

Il ne saurait y avoir de politique maritime sans une gouvernance renforcée : c’est précisément l’objectif de la Délégation à la mer et au littoral, chargée de la coordination des politiques maritimes et littorales au sein du ministère de l’environnement, que le Premier ministre a décidé de créer lors du dernier Comité interministériel de la mer. Cette décision a été concrétisée par le décret du 28 octobre 2014 créant la DML, qui doit être mis en oeuvre très prochainement.

Je voudrais, avant de conclure, évoquer l’avenir du sauvetage en mer. Des inquiétudes se sont manifestées quant à la pérennité de son modèle actuel et de son financement. Pour y répondre, il a d’ores et déjà été décidé d’augmenter de 1,5 million d’euros la subvention allouée par l’État à la Société nationale des sauveteurs en mer, la SNSM, en 2015, et d’adapter la loi à ce cas particulier, notamment s’agissant de la clause de compétence générale.

Je conclurai mon propos en citant Jules Verne. Celui-ci écrivait dans Vingt mille lieues sous les mers que « la mer est un immense désert où l’homme n’est jamais seul, car il sent frémir la vie à ses côtés ». Cette pensée doit nous inspirer un esprit de responsabilité, mais aussi de conquête. La mer, les océans respirent la vie. Il nous reste tant à découvrir ! C’est ce grand défi qui nous attend : le défi d’une politique maritime intégrée, le défi de la croissance bleue.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la mer, magnifiée par nombre d’artistes et d’écrivains, a toujours fasciné. Si le groupe UDI a souhaité que ce débat ait lieu, c’est parce que cet enjeu est essentiel pour l’avenir, non seulement de notre pays, mais aussi de l’humanité tout entière. L’humanité ne pourra relever trois des principaux défis qu’elle aura à affronter au XXIe siècle que par une exploitation raisonnable et raisonnée des ressources des mers et des océans.

Il s’agit tout d’abord du défi de l’alimentation. Notre planète compte sept milliards d’êtres humains ; à l’horizon 2050, nous serons peut-être neuf, dix, onze milliards, voire plus ! Nous le savons tous, la superficie des terres cultivables est par définition limitée : pour nourrir la population mondiale, il faudra donc aller chercher une plus grande quantité de ressources alimentaires – notamment des protéines – dans les mers et les océans.

Sous ce rapport, nous en sommes encore à la préhistoire. Comme mode de subsistance en effet, la pêche telle qu’elle se pratique aujourd’hui, c’est la cueillette des ressources marines. L’humanité devra relever le défi d’une exploitation raisonnable et raisonnée de ces ressources. Je pense bien sûr à l’aquaculture, mais aussi à l’intensification de l’exploitation d’espèces naturelles telles que les algues : la France consomme 17 tonnes d’algues par an, contre plus de 2 000 tonnes en Chine !

De nombreuses possibilités s’offrent à nous pour développer l’exploitation des ressources des mers. Chacun doit être conscient, par exemple, que la pharmacopée de l’avenir se trouve dans les mers et les océans, qui renferment 90 % des espèces inconnues, notamment les zooplanctons et les phytoplanctons.

L’opération Tara, financée par des mécènes français, est exemplaire à cet égard, en ce qu’elle révèle combien notre connaissance des grandes profondeurs est limitée. Certains chiffres laissent rêveurs : 400 hommes ont gravi l’Everest ; plusieurs dizaines sont allés dans l’espace ; douze ont marché sur la Lune ; seuls deux sont descendus jusqu’au point le plus profond des océans, dans la fosse des Mariannes, 11 000 mètres au-dessous du niveau de la mer. Au temps des grandes découvertes, on parlait de terra incognita. Aujourd’hui, c’est de mare incognitum qu’il faudrait parler : excepté l’espace, le grand domaine qu’il nous reste à explorer, ce sont les mers et les océans. C’est un enjeu majeur, au même titre que l’énergie.

L’énergie représente en effet un deuxième défi pour l’humanité. La mer est un gisement exceptionnel, voire inépuisable, d’énergies renouvelables. Relever ce défi impose de prendre la mesure de certaines réalités. Aujourd’hui, plus de la moitié du pétrole utilisé dans le monde provient de sources off shore – sans parler des ressources minières que sont les nodules polymétalliques.

L’accès à l’eau est le troisième enjeu fondamental pour l’humanité. Il faut savoir que 41 des 70 métropoles de plus d’un million d’habitants situées sur le littoral souffrent de problèmes d’accès à l’eau. A cet égard, la désalinisation de l’eau de mer sera essentielle pour garantir à l’humanité l’accès à cette ressource.

Le grand paradoxe, monsieur le secrétaire d’État, c’est que notre pays croit être une puissance européenne et continentale alors qu’il est en réalité une puissance mondiale et maritime. La France souffre d’un mal particulièrement profond : le « métropolicentrisme », qui est une forme de négation de l’outre-mer, soit une négation de la réalité même de notre pays, dont le domaine maritime s’étend sur 12 millions de kilomètres carrés – ce qui en fait le deuxième au monde, derrière le domaine maritime des États-Unis. Notre zone économique exclusive s’étend sur les trois océans et nous sommes présents sur quatre des cinq continents. J’ai coutume de dire que si l’on additionne les zones terrestres et maritimes sur lesquelles s’exerce la souveraineté française, notre pays est plus étendu que la Chine ! Il faut prendre conscience de cet atout majeur pour l’avenir.

Ce qui nous manque, c’est une grande politique visant à valoriser nos atouts. Certes, la France a des points forts, et vous les avez rappelés, monsieur le secrétaire d’État. On sait qu’aujourd’hui l’économie maritime pèse plus que la production automobile en France, et pourtant ces sujets ne feront jamais l’ouverture du journal de vingt heures.

Il faut avoir conscience qu’une vraie politique maritime nécessite des objectifs et des investissements de long terme. Il y a certes des enjeux spécifiques, qu’il s’agisse du développement de l’hinterland – Jean-Christophe Fromantin développera ce point tout à l’heure –ou de l’outre-mer, sur lequel Philippe Gomes reviendra. Mais ce qui manque à notre pays, c’est une stratégie inspirée par un souffle gaullien !

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Ce qui manque à notre pays, c’est l’esprit qui a inspiré les grands programmes de l’époque gaullienne, qu’il s’agisse du nucléaire, des grandes infrastructures routières et ferroviaires, de l’aéronautique ou de l’aérospatiale.

Nous devons aussi prendre conscience de la nécessité de protéger notre domaine maritime. Ce qui est en train de se préparer à travers l’accord de cogestion de l’îlot de Tromelin constitue un terrible précédent ! ce sont 240 000 kilomètres carrés de zone économique exclusive qui sont en jeu, à comparer aux 345 000 kilomètres carrés de zone économique exclusive de la métropole. Voilà ce que nous risquons de perdre, outre que cela ne manquera pas, par effet domino, d’avoir des conséquences sur d’autres de nos possessions ultramarines.

Un pays qui doute de lui-même est incapable de défendre sa souveraineté. Pour mesurer combien la France doute d’elle-même, il n’est qu’à voir avec quelle arrogance la puissance chinoise revendique en mer de Chine des îlots qui ne lui appartiennent pas, pendant que notre pays abandonne l’îlot de Clipperton à son sort, c’est-à-dire à tout le monde, aux trafics les plus divers, alors que ses alentours comportent des ressources de thonidés exceptionnelles. Clipperton nous permettrait par ailleurs d’être présents dans le Pacifique Nord, où l’on dit que l’avenir du monde se jouera. Alors que nous avons des possessions dans cette région, nous sommes incapables de les utiliser, de les valoriser, d’y défendre notre souveraineté : il y a là de quoi s’interroger.

Nous devons savoir inscrire nos projets dans une perspective longue, qui dépasse l’action au jour le jour. Une politique maritime suppose également de donner à notre marine nationale la capacité de défendre notre souveraineté maritime. Au lieu de cela, on prétexte le manque de moyens pour s’y refuser. Aucun autre pays au monde n’agirait comme nous !

J’espère que ce cri du coeur suscitera une prise de conscience collective de tout ce qui se joue là.

J’espère que ce débat nous permettra de réfléchir aux moyens d’assurer cette souveraineté de la meilleure façon possible, mais aussi d’ouvrir de véritables perspectives à nos outre-mer, afin d’en faire de véritables zones de développement de notre économie maritime. Pour l’heure, qu’il s’agisse de nos départements et collectivités d’outre-mer ou de la métropole, le mot d’Éric Tabarly, selon lequel « la mer, pour les Français, c’est ce qu’ils ont dans le dos quand ils regardent la plage » se vérifient encore trop souvent. Il faut que l’avenir infirme ce propos, tant en métropole que dans nos outre-mer.

Paul Claudel affirmait dès 1911 que la mer était la vie du futur. Je suis intimement convaincu que la France sur mer sera la France du futur.

Applaudissements sur les bancs du groupe UDI.

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La parole est à M. Paul Molac, pour le groupe écologiste.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je l’avais déjà dit à votre prédécesseur : nous aurions tellement aimé que vous fussiez un ministre de la mer de plein exercice : ce serait reconnaître au monde maritime toute l’importance qu’il mérite.

Concernant la politique maritime de la France, je tiens premièrement à attirer votre attention sur les conflits d’usage auxquels donnent lieu le milieu maritime et le littoral. En effet, les eaux marines côtières et la frange littorale sont actuellement concernées par nombre d’enjeux, et cela génère d’ores et déjà des conflits d’usages importants entre pêche, production d’énergie, tourisme, réserves naturelles ou urbanisme. Certaines démarches, comme la gestion intégrée des zones côtières ou le schéma de mise en valeur de la mer, ont permis, pour certains secteurs littoraux et maritimes, de confronter les besoins et les attentes des différents acteurs des territoires concernés, afin d’organiser les usages en fonction des besoins et des enjeux environnementaux.

Néanmoins, l’insuffisance de certains résultats laissent à penser qu’il est nécessaire d’améliorer ces démarches, notamment sur le plan de la gouvernance. Cette question est d’autant plus importante que certains usages maritimes et littoraux seront amenés à évoluer rapidement. Permettre l’exploitation des ressources naturelles pour favoriser le développement économique tout en préservant un fonctionnement global de qualité favorisant les services écosystémiques marins et littoraux, voilà un des points clés du développement des usages marins.

Deuxièmement, il convient de remédier à la trop forte concentration du transport maritime en France. Aujourd’hui, les ports moyens sont délaissés du fait de l’accroissement constant du tonnage des navires de transport. Les ports sont contraints de s’adapter au gigantisme de ces nouveaux monstres des mers, et Marseille et Le Havre captent l’essentiel du soutien de l’État dans ce domaine. Il s’agit donc d’avoir une politique maritime volontariste, visant à développer nos infrastructures portuaires de taille plus modeste. Nous pensons d’ailleurs que les compétences des conseils régionaux devraient là encore être étendues, afin qu’ils aient la charge de tous les ports de commerce et la capacité de mener une politique maritime régionale.

Pour rééquilibrer la politique maritime, il convient d’explorer des solutions telles que le feedering, processus de collecte et de distribution des conteneurs dans les nombreux ports secondaires, et le cabotage par une meilleure intégration des chargeurs routiers, notamment agroalimentaires, dans la chaîne logistique.

Par ailleurs, nous nous félicitons que le Gouvernement ait enfin pris la pleine mesure du potentiel de développement des énergies marines renouvelables, les EMR, comme le montrent notamment le lancement d’appels à projets et la création du Comité national des énergies renouvelables en mer. Pour l’hydrolien, un dispositif de soutien aux premiers projets pré-commerciaux a été lancé.

En ce qui concerne la simplification des procédures, plusieurs mesures sont en train d’être mises en place : l’introduction d’un permis unique regroupant les différentes autorisations pour les énergies marines ; la facilitation des raccordements en zone littorale, ou encore la préparation d’un décret simplifiant et raccourcissant les procédures de recours contentieux.

De même, le Breton que je suis salue la confirmation du transfert du siège de l’IFREMER à un grand port maritime occidental, celui de Brest, comme cela était prévu par le Pacte d’avenir pour la Bretagne.

Enfin, nous avons, avec le navigateur Jo Le Guen, attiré l’attention des ministères concernés et du secrétariat général de la mer sur l’opportunité de créer au sein du Fonds international d’indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures, le FIPOL, un groupe de travail chargé de réfléchir aux modalités d’indemnisation du préjudice écologique.

Un projet de loi serait d’ores et déjà rédigé par la chancellerie et une proposition de loi vient d’être adoptée en première lecture au Sénat visant à la reconnaissance par le code civil la notion de préjudice écologique. Au-delà de cette reconnaissance au niveau national, nous estimons que la France, dont l’histoire a été jalonnée par les marées noires, a un rôle déterminant à jouer au sein d’une organisation internationale telle que le FIPOL pour faire reconnaître ce préjudice par l’industrie pétrolière et la nécessité de son indemnisation. Il convient de rappeler que, lorsque la délégation française au FIPOL avait soulevé la question de la réparation du préjudice écologique à la suite de la catastrophe de l’Erika, l’insuffisance des fonds disponibles pour indemniser ce nouveau type de dommage avait été immédiatement invoquée pour écarter sa proposition. Or la création en 2005 du FIPOL complémentaire, doté d’environ 850 millions d’euros, rend désormais possible une telle indemnisation. Pour contourner la difficulté persistante de l’évaluation du coût financier du préjudice écologique, on pourrait imaginer qu’il verse à ce titre 10 % des sommes qu’il aura consacrées à l’indemnisation des victimes d’une marée noire.

Pour cela, il est nécessaire que les États membres du FIPOL complémentaire expriment clairement la volonté politique de cet établissement d’instituer en son sein un tel groupe de travail, comme les statuts de la convention l’y autorisent. Monsieur le secrétaire d’État, nous vous prions donc de donner mandat au représentant de la délégation français pour demander la création de ce groupe de travail.

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La parole est à M. Stéphane Saint-André, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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« Homme libre, toujours tu chériras la mer ! La mer est ton miroir ; tu contemples ton âme dans le déroulement infini de sa lame, et ton esprit n’est pas un gouffre moins amer. »

En ces temps solennels de défense de la liberté, et à l’occasion du débat passionnant sur la politique maritime de la France demandé par nos collègues du groupe UDI, nourrissons-nous de Baudelaire, qui invite l’homme libre à chérir la mer, la mer fascinante par son infinitude, la mer à notre image, miroir où l’homme regarde son double comme un frère à la fois jumeau et ennemi, comme l’infini toujours possible de sa liberté.

Pourtant, aussi transcendante que soit la force de la musicalité ou du symbole, la science, le développement des transports et l’exploitation des ressources nous amènent aujourd’hui à contredire le poète. « La mer, la mer toujours recommencée » de Paul Valéry n’est plus. Ces notions d’infini, de ressources inépuisables et de pérennité des libertés maritimes, peut-être exactes aux temps, pas si lointains, de Baudelaire ou Valéry, sont désormais complètement dépassées. La mer n’est plus recommencée, les ressources halieutiques s’amenuisent, les pollutions s’aggravent. La mer est de moins en moins un espace de liberté, les États tendant à revendiquer des espaces maritimes qui leur échappaient jusqu’ici, de la mer de Chine aux détroits du sud et du nord d’Ormuz au passage du nord-ouest.

Plus généralement, le droit maritime, qui s’est fondé sur l’affirmation de la primauté de la liberté des mers, au sens où l’entendait Grotius, s’oriente desormais vers une extension du domaine d’exclusivité des États, même si les États-Unis, première puissance maritime du monde, n’ont pas encore ratifié la convention de Montego Bay, et vers une réglementation croissante de la haute mer. Pourtant, ni le droit, ni l’organisation économique ne sont encore à la hauteur des enjeux, par rapport auxquels ils restent embryonnaires.

Pour un pays comme la France, le rang de seconde puissance maritime du monde, voire de première si nous obtenons la reconnaissance de toutes nos revendications dans le cadre du programme EXTRAPLAC, devient de plus en plus difficile à tenir. Il ne suffit pas en effet de revendiquer son droit : encore faut-il avoir les moyens physiques de 1’exercer. Il ne suffit pas de proclamer notre exclusivité d’exploitation sur un espace dont la richesse est encore souvent virtuelle : la pêche atteint ses limites, les autres modes d’exploitation sont encore en devenir pour l’essentiel, de telle sorte que le concept d’exclusivité reste pratiquement difficile à réaliser.

Dans ce contexte, la protection de l’environnement maritime apparaît comme un moyen relativement accessible à un pays comme le nôtre de protéger son bien tout en affirmant son droit. Dans une grande partie de nos espaces maritimes, dont l’essentiel se situe dans nos outre-mers, l’exploitation halieutique reste résiduelle et l’exploitation minière demeure à l’état de potentialité. Dans ce contexte, la protection de l’environnement reste le moyen le plus accessible de manifester notre présence tout en préservant nos ressources futures et en améliorant notre connaissance du milieu. Notre stratégie doit consister à étendre considérablement la protection sans compromettre, bien au contraire, le développement.

Certaines puissances n’hésitent pas à user avec un certain cynisme de certaines facultés juridiques pour renforcer leur espace maritime. Si le Canada a fait de l’île de Sable un parc national, c’est parce qu’il s’agit là, dans le conflit ancien et toujours recommencé qui nous oppose à propos de Saint-Pierre et Miquelon, d’un moyen commode d’avancer la ligne de base de dizaines de milles marins par rapport à la côte correspondante.

La France ne se donne peut-être pas les moyens de son ambition. Nous renonçons sans résistance à nos droits sous prétexte de ménager des intérêts diplomatiques. Nous avons, pour des raisons restées mystérieuses, renoncé de facto à la zone économique exclusive à laquelle nous avons droit au titre de l’îlot de Clipperton, pour lequel la validité juridique de notre titre ne saurait être contestée depuis l’arbitrage international rendu, à titre définitif, en 1931.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Pire encore, alors même que le gouvernement de M. François Fillon, à la demande de plusieurs députés aujourd’hui membres du groupe RRDP, avait déclaré aux Nations unies son intention de déposer un dossier d’extension du plateau continental, alors même que les études menées par l’Ifremer ont incontestablement démontré la validité de nos titres sur le plan scientifique, alors même qu’aucun obstacle juridique ne saurait naître d’un arbitrage intervenu précédemment, puisqu’il excluait explicitement cette question, le Gouvernement, et plus particulièrement notre diplomatie, reste hésitant à déposer le dossier de demande d’extension du plateau continental.

Ainsi, au nom des députés du groupe RRDP, et dans le temps qui m’est imparti, je profite de cette tribune et de ce débat pour réitérer cette revendication légitime et constamment réaffirmée. Tout en rendant hommage aux efforts de votre prédécesseur, Frédéric Cuvillier, pour faire évoluer notre doctrine, nous tenons à vous dire, monsieur le secrétaire d’État, que nous serions heureux de vous voir poursuivre ce travail, afin que la seconde puissance maritime au monde se dote d’une vraie politique maritime intégrée et se préoccupe avec plus de fermeté de la gestion politique et diplomatique de ses droits en mer.

Applaudissements sur les bancs des groupes RRDP, écologiste et UDI.

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La parole est à M. Arnaud Leroy, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je voudrais d’abord remercier le groupe UDI d’avoir proposé ce débat important. Je m’associe également aux propos de M. Saint-André sur la nécessaire poursuite de la bataille pour la reconnaissance internationale de nos droits sur divers îlots qualifiés parfois de « confettis », comme Tromelin ou Clipperton, et sur l’extension du plateau continental.

Vous l’avez rappelé, monsieur le secrétaire d’État : avec 310 000 emplois, 60 milliards de chiffre d’affaires et une balance commerciale positive, le secteur maritime est un enjeu essentiel de notre économie, même s’il reste méconnu – le faible nombre de députés présents ce soir dans l’hémicycle en atteste une nouvelle fois. La mer contribuera grandement aux défis du XXIe siècle. Le défi maritime a d’ailleurs été identifié très tôt par le Président de la République et le débat n’a pas été escamoté par le Gouvernement, qu’il s’agisse de votre prédécesseur ou de vous-même, monsieur le secrétaire d’État. Les diverses stratégies que vous venez de nous présenter – relance portuaire, maritime, aquacole – démontrent votre volonté d’avancer.

Quatre défis se présentent à nous : le défi climatique – la question du climat et des océans est primordiale et je remercie les organisateurs de la COP 21 d’avoir insisté sur cet enjeu – ; le défi alimentaire, rappelé par M. Folliot ; le défi énergétique – nous sommes tous conscients de l’importance des énergies marines renouvelables, qu’elles soient produites par les hydroliennes ou les éoliennes offshore.

J’y ajouterais le défi démographique, en raison du développement d’un certain tropisme littoral qui voit, en France ou dans le monde, les populations migrer vers les zones littorales et côtières. Ce phénomène entraîne des conflits d’usage majeurs, que M. Molac a très bien décrits.

À notre échelle, nous voyons émerger un besoin d’espaces de concertation et de décision. Je salue à cet égard la création des nombreux parcs naturels marins. J’espère que nous les doterons des moyens financiers et humains nécessaires à leur bon fonctionnement.

Vous avez, monsieur le secrétaire d’État, mentionné mon rapport : je suis ravi de constater qu’il a eu quelque effet. Vous avez cité la loi relative à la lutte contre la piraterie et à l’exercice en mer des pouvoirs de police de l’État. Des dispositifs fiscaux ont également été mis en place.

Il reste cependant beaucoup à faire. Vous savez que je mène, comme vous, monsieur le secrétaire d’État, un combat acharné en faveur d’une structuration de la filière. Cette structuration ne devra pas s’arrêter au seul transport maritime, mais devra intégrer l’ensemble de la filière, du petit producteur de boulons inoxydables au chantier STX de Saint-Nazaire. Il est urgent de traiter sérieusement cette question. Je n’ai toujours pas obtenu d’explication cohérente et intelligible quant aux raisons qui interdiraient une telle structuration, alors qu’elle s’est avérée possible dans les domaines du ferroviaire, du nucléaire, entre autres.

Mais cette filière n’aura un sens que si elle est adossée à un fonds, qu’il soit abrité par la Banque publique d’investissement ou porté par la Caisse des dépôts et consignations.

L’embarquement de nos jeunes constitue une autre des priorités dégagées par mon rapport et que je souhaite voir beaucoup plus fortement prises en compte. Nous devrions nous donner tous les moyens d’avancer sur ce sujet qui fait l’objet de débats récurrents, notamment en promouvant des dispositifs tels qu’un Erasmus maritime ou qui permettent l’embarquement sur des navires tiers.

Mais la croissance bleue ne se résume pas au transport maritime, même si je remercie Jean-Marc Ayrault de m’avoir confié la tâche passionnante de travailler sur le sujet du pavillon français ainsi que sur les services maritimes. Fort de cette expérience, j’ai repris mon bâton de pèlerin et me suis attelé à cette question de la croissance bleue avec mon ami, l’homme de mer Georges Tourret. J’ai développé pour cela une méthode, certes artisanale, autour de structures baptisées les ateliers de la croissance bleue. Son objectif est d’élaborer, dans la concertation, une proposition de loi que j’espère déposer d’ici la fin de l’année 2015.

Elle traitera de l’ensemble des secteurs et reprendra certaines des propositions de mon rapport qui n’ont pas encore pu être ni discutées ni arbitrées. Certaines de ses dispositions concerneront la pêche. Nous devons en effet mettre à profit l’accalmie que connaît actuellement ce secteur pour avancer sur certains sujets comme celui du statut du pêcheur. Celui-ci n’a sans doute pas évolué au même rythme que la ressource ou le développement des activités annexes.

À cet égard, je veux, monsieur le secrétaire d’État, saluer le succès que vous avez obtenu lors du dernier conseil des ministres européens de la pêche, et qui n’a sans doute pas été suffisamment relevé par les médias français. Il est pourtant rare qu’un ministre se fasse applaudir après des négociations à Bruxelles. Je tenais à vous féliciter, même tardivement, pour cette victoire.

Ma proposition de loi traitera également de la construction et de la réparation navales. Ce secteur compte des entreprises de taille intermédiaire et des petites et moyennes entreprises qui sont de véritables joyaux. Il nous faut tout à la fois les protéger, les promouvoir et soutenir leur développement.

La filière algue, l’aquaculture revêtent une importance tout aussi grande et je m’associerai à vos travaux sur la stratégie aquacole afin que nous puissions doter rapidement ces filières des instruments dont elle ont besoin pour remédier à l’important déficit commercial dont souffre ce secteur.

Ce travail est rendu plus urgent encore par la raréfaction des ressources et l’obligation de nourrir demain un nombre grandissant d’être humains. Il faut souligner en effet que notre filière aquacole est également performante sur les marchés d’exportation.

Je voudrais enfin vous inviter, monsieur le secrétaire d’État, à faire preuve d’autant de poigne dans les négociations qui ont lieu au sein de l’Organisation maritime internationale que vous en avez montré lors des dernières négociations européennes sur les quotas de pêche. La définition des normes constitue en effet le nerf de la guerre dans le domaine maritime. Si nous ne sommes pas capables de peser au stade de l’élaboration de la réglementation, nous ne ferons que courir après le lièvre. Les dernières négociations sur l’index d’efficacité énergétique, dont il est à craindre que les résultats ne desservent une partie de notre flotte, montrent toute l’importance d’intervenir à ce stade de la décision. Un organe tel que le Conseil supérieur de la marine marchande pourrait se voir reconnaître un rôle dans ce domaine.

Je suis ravi, monsieur le secrétaire d’État, que vous soyez parmi nous à l’occasion de ce débat. Je remercie une fois encore Philippe Folliot d’avoir, au nom du groupe UDI, proposé son inscription à l’ordre du jour car j’en attends des échanges féconds.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, permettez-moi à mon tour de remercier le groupe UDI d’avoir initié ce débat fort intéressant. J’ai choisi ce soir de vous parler de politique portuaire.

En effet, cette politique fait partie intégrante de la politique maritime de la France. Le Gouvernement l’a d’ailleurs bien compris, monsieur le secrétaire d’État, puisque votre prédécesseur, Frédéric Cuvillier, a présenté, dès le mois d’octobre 2013, une stratégie nationale de relance portuaire reposant sur trois piliers : les constructions logistiques intégrées, la politique industrielle renforcée, et le rôle accru d’aménageur et de gestionnaire d’espace. Cette nouvelle stratégie a pour ambition d’intégrer les hinterlands à l’échelle européenne et d’engager une coopération dans les structures de façade maritime.

Aujourd’hui, avec 360 millions de tonnes de fret et 30 millions de passagers transportés, la France est la cinquième puissance portuaire européenne. Sur les 35 000 hectares d’espace foncier des grands ports maritimes, le secteur portuaire génère plus de 40 000 emplois directs, plus de 90 000 dans les activités industrielles et plus de 300 000 dans les bassins locaux. Les grands ports maritimes français ont aujourd’hui les moyens d’être compétitifs vis-à-vis des ports leaders en Europe et de contribuer ainsi au développement industriel et économique de notre pays. Pourtant, comme d’autres secteurs d’activité, les ports français souffrent de la complexité de nos procédures et de la lourdeur de nos contraintes administratives qui freinent directement leur évolution.

Je souhaiterais apporter ce soir, monsieur le secrétaire d’État, ma petite pierre à l’édifice en vous proposant des simplifications et des allégements des procédures « travaux » qui s’appliquent à l’ensemble de nos établissements portuaires.

Comme chacun sait, les ports sont des établissements ou des services publics à caractère industriel ou commercial, qui permettent des échanges nationaux et internationaux de fret ou de passagers. Ils contribuent fortement à la création de richesses commerciales et sont souvent eux-mêmes d’importants investisseurs de la filière maritime. De plus, leurs ressources proviennent essentiellement de recettes commerciales : ils dépendent très peu des financements publics.

Ce qui fait défaut pour répondre aux attentes des différents clients portuaires n’est généralement pas le financement, mais plutôt la réactivité. Celle-ci est en effet nécessaire pour assurer aux investisseurs potentiels un service efficace, dans un contexte de forte concurrence entre places portuaires.

Concernant plus particulièrement les intervenants portuaires que sont les autorités portuaires, leurs concessionnaires et les industriels privés, nous disposons d’outils réglementaires adaptés et réactifs. Je veux parler des autorisations d’occupation temporaire, les AOT, qui sont constitutives de droits réels, et des conventions de terminal privé. Il s’agit d’outils non soumis à l’obligation de mise en concurrence et qui doivent le rester. Malheureusement la jurisprudence en la matière semble évoluer vers une mise en concurrence systématique qui aurait pour conséquence une inertie dommageable et contre-productive quand il faudrait au contraire dynamiser ce secteur économique. Il conviendrait donc de légiférer sur ce point afin de contrecarrer cette évolution.

Les difficultés rencontrées aujourd’hui sont dues plus encore aux dispositions réglementaires qui encadrent la réalisation de travaux portuaires. Nous constatons que les textes en vigueur diffèrent très peu selon que ces travaux concernent le domaine public maritime naturel ou le domaine public maritime artificiel portuaire, alors que leurs incidences du point de vue du développement durable, dans ses aspects économiques, environnementaux et sociaux, sont loin d’être comparables.

Alors que ces textes sont appropriés au domaine public maritime naturel, le domaine public maritime artificiel portuaire présente beaucoup moins d’intérêt sur le plan environnemental tout en disposant d’un fort potentiel économique et social. Il ne dépend en effet que très peu des financements publics et constitue indéniablement un vecteur essentiel de création de richesse au bénéfice de l’ensemble de notre pays.

Dans l’état actuel du droit, la réhabilitation d’ouvrages portuaires existants ou la construction d’ouvrages nouveaux à l’intérieur d’un port doivent respecter des instructions aussi contraignantes que celles s’imposant lors de la création ou l’extension d’un port impactant le domaine public maritime naturel. De ce fait, les délais de réalisation, instruction comprise, sont au minimum de deux ans pour les petits chantiers. Ils s’avèrent totalement incompatibles avec la nécessité de réactivité par rapport aux attentes des clients et à l’évolution du marché.

Le rapport de la mission parlementaire de simplification de l’environnement réglementaire, administratif et fiscal des entreprises, présidée par notre ancien collègue Thierry Mandon, montre que le taux de réalisation des 348 mesures de simplification préconisées pour les entreprises et engagées depuis 2009 n’était que de 29 %.

La préconisation no 10.2 de ce même rapport, relative à la conformité avec les normes environnementale et visant à réduire les délais de procédure pour l’autorisation des installations classées prévues pour le 31décembre 2015, pourrait être étendue aux travaux et aménagements effectués à l’intérieur des ports.

Pour ces raisons, monsieur le secrétaire d’État, je demande instamment au Gouvernement d’envisager très rapidement des modifications législatives ciblées sur les instructions réglementaires relatives aux travaux dans les ports, afin d’accroître la réactivité des maîtres d’ouvrages portuaires. Ce serait une réponse à nos entreprises qui souhaitent investir et soutenir notre économie.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’océan est porteur d’enjeux de croissance et de défis majeurs dans nos territoires ultramarins en général, et dans notre outre-mer du Pacifique sud en particulier.

Composé de trois collectivités – Nouvelle-Calédonie, Wallis-et-Futuna et la Polynésie française – il se caractérise par l’étroitesse des espaces terrestres et l’immensité des domaines maritimes. Rappelons que la partie émergée de la Nouvelle-Calédonie équivaut à la surface d’une région moyenne de l’Hexagone comme la Picardie, alors que son domaine maritime couvre une superficie supérieure à la moitié de la Méditerranée. Les îles Wallis couvrent à elles trois la moitié de la surface de l’île d’Oléron. En revanche, leur domaine maritime s’étend sur une surface équivalente à la moitié de l’Espagne. Enfin la Polynésie française et ses 118 îlots représentent en terres émergées l’équivalent d’un petit département métropolitain comme les Alpes-Maritimes, alors que son domaine maritime s’étend sur une surface équivalente à celle de l’Union européenne.

Certes, les trois collectivités dont je viens de parler présentent des handicaps indéniables : éloignement, double insularité, faiblesse de la population et étroitesse du marché. Considérons cependant qu’elles conjuguent par ailleurs des atouts extrêmement précieux et rares : des espaces, de la biodiversité, de la géodiversité, ainsi que des ressources énergétiques.

S’agissant des espaces, les quelques chiffres avancés sont éloquents puisqu’au total les domaines maritimes de ces trois collectivités couvrent 6,4 millions de kilomètres carrés. Cela représente 1,5 fois la superficie de l’Union européenne, sans compter les possibilités d’extension juridique du plateau continental, qui porteraient ce chiffre à près de 7 millions de kilomètres carrés.

Ces espaces valent aussi par leur qualité. Les parties remarquables des récifs de Nouvelle-Calédonie, qui s’étendent sur 15 000 kilomètres carrés, ont été inscrites au patrimoine mondial de l’humanité en 2008, et une étude est en cours pour l’inscription des îles Marquises en Polynésie française.

Quant à la biodiversité, un exemple suffira pour attester de son importance : le lagon et le grand récif de Nouvelle-Calédonie compte autant d’espèces que toute la Méditerranée.

Il en va de même de la géodiversité. La Nouvelle-Calédonie, fait quasiment unique au monde, est l’un des pointements émergés, avec Norfolk, en Australie, et la Nouvelle-Zélande au sud, d’un continent englouti, Zealandia, vestige du supercontinent primitif Gondwana. La Polynésie française présente d’autres traits remarquables, tels que de nombreux monts sous-marins, sièges d’encroûtements de manganèse et de cobalt, des plaines abyssales immenses ou encore des points chauds volcaniques du type hawaïen actif.

Cet outre-mer est riche de ressources énergétiques douces. Si le développement technologique ne permet pas encore de les exploiter tous, force est de constater que ces trois collectivités d’outre-mer possèdent des avantages certains – le soleil, le vent, des régimes de houle stables, du courant dans certaines passes, récifs et lagons, et surtout des eaux profondes à proximité des côtes, facteur favorable à l’utilisation d’une des très rares énergies, avec la géothermie, fondées sur les différences de température entre surface et fond qui soit renouvelable, continue et inépuisable : l’énergie thermique des mers.

Au plan national, parmi les sept ambitions posées par les analyses prospectives de la commission « Innovation », deux s’appliquent totalement à nos trois collectivités : l’ambition no 3, qui concerne les ressources minérales marines, pour lesquelles tout reste à faire en matière d’exploration, de mise au point de technologies d’exploitation comme de réduction des impacts sur les milieux naturels ; l’ambition no 4, relative à la chimie du végétal, qui vise à exploiter de façon douce le capital naturel que représentent ces immenses bassins de biodiversité et les solutions que la nature a su développer pour s’adapter à des conditions variées et fabriquer des biomolécules utiles à l’avenir de l’homme.

Au plan supranational, dix des onze axes prioritaires que compte le plan « croissance bleue » de l’Union européenne sont des opportunités objectives pour nos trois collectivités.

Dans le cadre des activités matures facteurs de croissance, cinq axes majeurs sont susceptibles de concerner nos collectivités : trafic maritime et ports, industrie de croisière, tourisme côtier, culture marine et protection des côtes.

En ce qui concerne les activités émergentes créatrices d’emploi, trois axes sont également susceptibles d’être retenus : la surveillance des espaces maritimes, les biotechnologies et la chimie du vivant et les énergies renouvelables.

Enfin, en ce qui concerne les activités en prédéveloppement à fort potentiel, deux axes, l’exploration et l’exploitation de pétrole et de gaz, concernent la Nouvelle-Calédonie, dotée de bassins sédimentaires en épaisseur de sédiments importants et caractérisés par des structures de piégeage potentiel. Même s’il s’agit de ressources fossiles, ce sont des ressources potentielles fortement créatrices d’activités dont la collectivité, très consommatrice d’énergie pour son industrie minière, pourrait tirer profit tout en encadrant strictement leur exploitation.

Enfin ces trois collectivités d’outre-mer sont dotées de ressources minérales profondes, Wallis-et-Futuna en premier lieu, avec l’hydrothermalisme et des dépôts sulfurés. Il y a aussi les nodules métalliques et les terres rares des sédiments profonds de la Polynésie française et les encroûtements sous les monts sous-marins en Polynésie, en Nouvelle-Calédonie, ainsi que, vraisemblablement, des dépôts sulfurés, similaires à ceux de Wallis-et-Futuna, dans la zone économique de Nouvelle-Calédonie.

Voilà, brièvement résumés, dans les cinq minutes qui me sont imparties, les potentiels immenses de la mer dans nos collectivités françaises du Pacifique.

« Les terres australes forment pour ainsi dire un monde à part. La découverte de ces terres pourrait offrir de grandes utilités pour le commerce et de merveilleux spectacles pour la physique. Il y a vraisemblablement entre le Japon et l’Amérique un grand nombre d’îles dont la découverte pourrait bien être importante. » Ces propos sont de 1752 ; il sont ceux de Pierre-Louis Moreau de Maupertuis, mathématicien, philosophe, qui a en outre jeté certaines des bases de la biologie moderne. A cette date, Futuna était connue, tout comme les Marquises, mais la Nouvelle-Calédonie, les îles Loyauté, Tahiti, la Société, l’essentiel des Tuamotu, les Australes, l’île de Wallis ne l’étaient pas. Il avait profondément raison de juger importants ces archipels qui le sont toujours, plus que jamais peut-être.

Applaudissements sur de nombreux bancs.

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Belle défense et illustration de l’outre-mer !

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaiterais commencer mon intervention par un constat : celui d’une forte contribution du Parlement à l’orientation de la politique maritime nationale. Ce débat en est une illustration.

Il illustre également la reconnaissance de l’importance des enjeux liés à la politique maritime par notre Président, qui a initié, dès 2013, les Assises de la mer et du littoral, étape fondamentale d’échanges dans les territoires et de définition d’une stratégie nationale pour la mer et le littoral.

La France représente, grâce à ses territoires ultramarins, la deuxième surface maritime du monde et est présente sur les quatre océans. Ce débat est l’occasion de rappeler qu’il s’agit d’un atout considérable, notamment sur le plan économique pour des secteurs d’activité comme la pêche, la mytiliculture, l’ostréiculture, le tourisme, les industries navale et nautique, les énergies marines renouvelables, et j’en oublie certainement.

Ces leviers de ce qu’on appelle désormais la croissance bleue représentent un véritable gisement d’emplois, que ce soit dans des secteurs traditionnels comme la pêche, qu’elle soit côtière ou extensive, avec le chalutage, ou dans des activités plus récentes, telles que l’exploitation des énergies renouvelables.

La Commission européenne estime d’ailleurs que cette économie offre de nouveaux et importants moyens d’aider l’Union européenne à sortir de la crise économique, dans la mesure où elle s’inscrit dans un processus de croissance intelligente, durable et inclusive. Cet objectif illustre la nécessité de se doter de stratégies coordonnées aux différents niveaux, local, national et européen.

Plus concrètement, l’espace maritime représente un véritable potentiel en matière de ressources minérales. Je souhaite m’arrêter particulièrement sur le sujet de l’extraction du sable, secteur où la disparité des réglementations au niveau international posent de nombreux problèmes.

Associées à la montée du niveau de la mer, les conséquences du développement de cette activité sont particulièrement importantes. Les répercussions sur le trait de côte concernent entre 75 et 80 % des plages de la planète. Certaines conséquences sur les ressources biologiques ainsi que sur l’activité de pêche sont directes et manifestes. La destruction du peuplement benthique dans les zones d’exploitation affecte en effet les invertébrés, sources de nourriture pour certains poissons. C’est pourquoi certains projets d’extraction, notamment dans les Côtes-d’Armor, suscitent de nombreuses réserves chez les associations de protection de l’environnement, les élus, les professionnels de la pêche ainsi que les producteurs de granulats.

L’examen en commission du projet de loi relatif à la biodiversité a été l’occasion de prévoir la publication d’un rapport qui permettra d’évaluer l’impact environnemental et économique de ces activités d’exploration et d’exploitation des ressources minérales sur le littoral et l’écosystème marin. Je profite de cette intervention pour réaffirmer la nécessité de disposer d’un tel document de référence. L’élaboration de la stratégie nationale de la mer et du littoral nécessite en effet de s’appuyer sur ce type d’évaluations, à la fois scientifiques et économiques. Depuis 2014 et la présentation dans le cadre du Conseil national de la mer et des littoraux de l’état des lieux « mer et littoral », en votre présence, monsieur le secrétaire d’État, nous disposons d’ailleurs du diagnostic nécessaire à la définition de cette stratégie.

Cet état des lieux vient ainsi s’ajouter au travail ambitieux de concertation mené dans le cadre des assises de la mer. Aussi, mon intervention est-elle l’occasion de vous demander des informations sur le calendrier de définition de la Stratégie nationale mer et littoral, la SNML.

Je souhaiterais également insister sur la nécessité de s’inspirer des dispositifs qui ont fait leurs preuves au niveau local, tels que la gestion intégrée des zones côtières. Il s’agit en effet d’un moyen particulièrement efficace de mettre autour de la table tous les acteurs de l’interface terre-mer et de parvenir ainsi à un projet global de territoire.

Ce type de dispositif représente, me semble-t-il, le meilleur moyen de prendre en compte les différentes expériences qui ont permis la mise en place de bonnes pratiques élaborées par les acteurs eux-mêmes. C’est le cas par exemple de la pêche à la coquille Saint-Jacques dans la baie de Saint-Brieuc, qui a fait l’objet de mesures restrictives instaurées par les pêcheurs afin de parvenir à une gestion raisonnée des ressources naturelles.

En guise de conclusion, je me permets d’élargir le sujet de notre débat à la question du littoral, pensé en tant qu’interface terre-mer. Ce dernier est, en effet, confronté à un enjeu de taille : celui du changement climatique. Cette question sera au coeur des débats toute cette année. Il me paraît important de se saisir de cette occasion historique pour évaluer, analyser et anticiper les conséquences de la montée des eaux.

J’aimerais aussi avoir l’assurance que la prise en compte de cette problématique dans la future stratégie nationale de la mer et du littoral sera à la hauteur de l’enjeu qu’elle représente, pour les populations, la biodiversité et la protection des zones humides telles que les mangroves.

Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, valoriser les atouts de la France est un enjeu majeur. La France dispose du deuxième domaine maritime, derrière les États-Unis. Elle est le seul pays au monde à être présent sur quatre continents. Au-delà des enjeux de la surface maritime et politique maritime globale, valoriser ces atouts suppose de préserver, améliorer et valoriser les atouts locaux.

Dans votre communication en conseil des ministres du 1er octobre 2014, vous avez mis en avant, monsieur le secrétaire d’État, une politique maritime au service de l’emploi, de l’environnement, de l’innovation et de l’éducation.

En ma qualité de député de la Haute-Corse, je ne peux pas ne pas déplorer que la Corse ne dispose pas pour le transport maritime d’un véritable service minimum garanti s’exerçant dans les mêmes conditions qu’un service minimum terrestre. En effet, monsieur le secrétaire d’État, la politique maritime doit également englober le transport des passagers, le fret, ainsi que le développement du tourisme, secteur majeur de l’économie insulaire. Or force est de constater que la Corse est trop souvent prise en otage par des grèves ou des menaces de grève qui mettent à genoux des secteurs entiers de l’économie insulaire.

L’ouverture à la fin du mois de novembre d’une procédure de redressement judiciaire de la SNCM ne nous permet pas d’appréhender sereinement cette nouvelle année. Avez-vous des éléments à nous communiquer sur ce point ?

Par ailleurs, 2014 fut une année funeste pour la Société nationale de sauvetage en mer de la Haute Corse. Une série noire s’est abattue sur cette association, privant de deux vedettes, entre autres, la côte nord-ouest de la Corse, qui représente une bande côtière de 350 kilomètres. Si la vedette de la SNSM de Calvi présente des défaillances techniques, celle de Saint-Florent a malheureusement été totalement détruite par un incendie et doit être remplacée.

La zone précitée doit faire l’objet de notre attention sur deux points : la sécurité en mer, pour les personnes et pour les biens, mais également l’assistance sanitaire, qu’elle soit en mer ou sur le rivage dans les zones inaccessibles par voie terrestre.

La dotation annuelle habituellement allouée à la SNSM par l’État est de 2,3 millions d’euros. Le 18 décembre à Brest, M. Le Premier ministre a évoqué une rallonge de 1,5 million d’euros pour cette année, en raison des événements précités. Etant donné l’urgence de la situation, je souhaiterais savoir quand ce financement complémentaire, qui permettrait d’envisager la mise en chantier d’une vedette de remplacement pour Saint-Florent, sera effectif.

Au-delà de cette problématique exceptionnelle et spécifique à la Corse se pose la question des moyens indispensables à la réalisation de l’ensemble des missions dévolues à cette association reconnue d’utilité publique et intégrée dans l’organigramme du sauvetage en mer par l’État, alors que celui-ci impose par ailleurs une très forte restriction budgétaire.

Je souhaite saluer ici les 5 800 bénévoles, qui effectuent 50 % des missions de jour et 90 % des missions de nuit dans le cadre des interventions nationales. Leur efficacité, leur disponibilité et surtout leur courage sont unanimement salués par les préfets maritimes et les centres régionaux opérationnels.

Les récentes réformes engagées par l’État, notamment celle de l’organisation territoriale, avec la contraction projetée des dotations des collectivités locales et la suppression de la clause de compétence générale dont elles disposent à ce jour, conduiront inévitablement à une diminution des contributions publiques.

Pour un budget global de 24 millions d’euros, la France dispose d’un système performant, efficace et qui sait se renouveler.

Une simple restriction du budget de la SNSM serait financièrement insupportable pour nos sauveteurs et compromettrait la sécurité des usagers de la mer – plaisanciers, professionnels, baigneurs. Les coupes opérées par l’État dans le budget de la SNSM mettent en danger la survie du sauvetage en mer, qui est conditionnée par le renouvellement, tant de la flotte, dont le financements était assurés jusqu’à présent par les régions, par les départements et par l’État, chacun à hauteur de 25 %, ainsi que par les donateurs privés, que des hommes – les sauveteurs sont formés à Saint-Nazaire par un pôle national de formation.

Le système créé par la SNSM garantit, pour un budget de fonctionnement qui avoisine les quatre millions d’euros, la survivance du sauvetage sur nos côtes. Il serait difficile pour l’État d’offrir une solution de substitution à si bon compte.

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Le simple fait de ne pas continuer de recourir aux services de cette association reconnue d’utilité publique serait financièrement irresponsable.

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M. le Premier ministre a annoncé des modifications législatives visant à permettre aux collectivités de continuer à financer les subventions aux stations de la SNSM. Qu’en est-il ? Ces questions très concrètes ne peuvent être laissées sans réponse tant elles sont importantes pour les usagers de la mer, surtout quand on se donne comme ambition la croissance et l’emploi et qu’on veut faire du tourisme littoral un relais de croissance grâce aux ports de plaisance et aux loisirs nautiques. Pourriez-vous monsieur le secrétaire d’État, nous exposer ce que le Gouvernement compte faire face à cette situation ?

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, « on ne fait rien quand on a la géographie contre soi. Or, en la circonstance, ce n’est pas seulement l’histoire que nous avons avec nous, c’est aussi la géographie. » Ces paroles étaient prononcées ici même, en 1946, par le député Aimé Césaire. Cette foi dans la grande France, au lendemain d’un conflit mondial qui l’avait mise à genoux, est une leçon pour tous les déclinologues qui veulent nous persuader que la France est un lopin de terre insignifiant. Quand nous apprenons à nos enfants que la France, c’est une superficie de 550 000 kilomètres carrés, à peine 1 % de la population mondiale et 0,4 % des terres émergées, qu’est-ce d’autre qu’un conditionnement des esprits à la « micro-France » ? Quoi de mieux pour convaincre nos futurs concitoyens que leur pays a besoin de se tourner vers Bruxelles, vers Berlin ou vers Washington pour assurer sa survie dans la mondialisation ?

La grande France n’a pas disparu dans la dilution de la mondialisation. Elle est là, présente, et bien présente ! Nation aux quatre continents, la France est frontalière avec vingt-sept États. Grâce aux DOM-COM, nous possédons onze millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive, qui placent notre pays au rang de seconde puissance maritime mondiale. Ces données ne sont pas neutres : elles assignent à la France une mission vis-à-vis de son peuple des quatre continents, tout en exigeant des gouvernants visionnaires.

Voilà l’occasion d’évoquer ces DOM-COM trop souvent oubliés, qui sont pourtant la pierre angulaire d’un projet qui redonnera à notre pays un levier de puissance. Les départements d’outre-mer, loin de nos yeux, sont pourtant proches du coeur de notre histoire nationale. La Martinique, par exemple, est française depuis le règne de Louis XIII, bien avant Nice. Malheureusement, vous considérez ces 2,5 millions de Français ultramarins comme des assistés puisqu’aucun projet d’avenir ne leur est proposé ni assuré. Il est grand temps de renforcer la continuité territoriale entre la métropole et les DOM et de les réorganiser en grandes régions maritimes : la région d’Amérique, la région de l’océan Indien et celle de l’océan Pacifique.

Soixante-deux pour cent de la zone économique exclusive française se trouvent dans le Pacifique, grâce aux îles de la Polynésie et de la Nouvelle-Calédonie. Or que fait le président de la France ? Il décide de rester neutre dans le débat sur l’indépendance de la Nouvelle-Calédonie, dont le référendum sur l’autodétermination est prévu en 2018. Voilà un capitaine qui navigue à contre-courant des intérêts français ! Plus que jamais, nous devons soutenir le programme d’extension du plateau continental, qui permettrait de gagner 400 000 kilomètres carrés de zone économique exclusive.

Si l’ONU validait notre requête, nous deviendrions dès lors la plus grande zone économique exclusive au monde. Les atouts y sont énormes : les deux tiers des ressources mondiales de nickel, lequel est de plus en plus convoité, sont concentrés dans le Pacifique. Les grandes puissances ont fait de cette zone leur terrain de jeu du nouveau siècle. La Chine est passée de 33 millions de dollars d’investissements en 2000 à 200 millions en 2013, alors que les États-Unis entendent y mener un projet de libre-échange transpacifique. Il est donc temps d’agir si nous voulons éviter le pillage de nos ressources maritimes. Beaucoup de pays l’ont compris et luttent pour étendre leur espace maritime.

La France doit aussi faire entendre sa voix dans l’Atlantique, dans le dossier de l’extension de son plateau continental à Saint-Pierre-et-Miquelon, potentiellement très riche en hydrocarbures. Nous ne pouvons pas laisser cette zone de l’Atlantique Nord dépérir depuis que, en 1992, l’ONU a considérablement réduit notre zone économique exclusive au détriment des activités de l’île française, véritable carrefour entre New York et le Groenland et point d’appui de la francophonie en Amérique du Nord.

La géopolitique mondiale du XXIe siècle se concentre sur la souveraineté maritime. Alors que nos dirigeants prônent le « tout-Europe », les autres nations oeuvrent à l’affirmation de leur souveraineté via l’horizon bleu marine.

Sourires.

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La souveraineté, voilà l’avenir ! Le Brésil, la Russie, l’Inde, la Chine se lancent dans de grands efforts navals avec des navires de surface, des sous-marins, des porte-avions. Quand la France possède des outils de rayonnement, vous les rendez vulnérables. L’IFREMER, dont le budget de fonctionnement chute depuis plusieurs années, est considérablement fragilisé par la délocalisation de son siège, dont le coût est estimée à 18 millions d’euros. L’institut permet pourtant à notre pays de demeurer à la pointe de la recherche maritime.

La conquête des océans doit nous ouvrir des opportunités économiques, énergétiques, alimentaires, dans le domaine de la santé et du transport. La contribution des activités maritimes au PIB n’est que de 2,4 %, ce qui est dérisoire au vu de la formidable perspective qui s’offre à nous. Alors que 85 % des échanges commerciaux se font par voie maritime, nos ports nationaux sont loin des premiers ports mondiaux. Augmenter nos efforts en la matière ne pourra qu’améliorer notre compétitivité.

En optimisant sa souveraineté par les mers, la France peut apporter encore plus au monde. La mer contient 80 % de la biodiversité existante : c’est un trésor pour la santé. Face à la croissance démographique, la France a une carte à jouer en développant la pisciculture et l’aquaculture. Ce modèle de souveraineté ne pourra pas se réaliser sans l’atout de la francophonie, outil indispensable pour bâtir une civilisation capable de lutter contre l’hégémonie atlantiste et chinoise.

Il est temps de sortir nos compatriotes d’outre-mer de ce destin d’oubliés, tellement oubliés que les chômeurs hors métropole ne sont même pas comptabilisés dans les statistiques officielles. Il est temps de leur permettre de devenir des acteurs essentiels de la prospérité française. François Hollande appelait il y a peu les Français à l’audace : invitons donc ce gouvernement à une politique maritime audacieuse, à la mesure de nos atouts !

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Ce débat sur le potentiel maritime de la France concerne tant notre pays dans son ensemble que chacun de nos territoires en particulier. Il n’a cependant d’intérêt pour ces derniers que dans la mesure où ils sont effectivement reliés à ces portes d’entrée que sont les ports, notamment nos grands ports maritimes. Or, quand on voit que Rotterdam et Anvers sont les premiers ports français, quand on voit que Barcelone ou Gênes grignotent des parts de marché à nos ports méditerranéens,…

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… on peut légitimement s’inquiéter pour notre capacité à exploiter au mieux ces belles interfaces que sont nos grands ports maritimes. À l’heure où l’on parle beaucoup de la réindustrialisation de la France, il devrait pourtant constituer des atouts, d’autant que notre économie mondialisée se caractérise par une fragmentation croissante des chaînes de valeur. Pascal Lamy a souvent décrit ce phénomène : aujourd’hui, les produits que l’on consomme sont de plus en plus souvent fabriqués par plusieurs opérateurs dispersés dans le monde, avec pour conséquence une évolution du transport des conteneurs, marquée par une massification des flux. CMA CGM, l’un des leaders français du transport maritime, opère avec des porte-conteneurs de 18 000 boîtes, parmi les plus gros porte-conteneurs au monde. Aujourd’hui, une entreprise située au coeur de nos territoires doit s’inscrire dans cette chaîne de valeur et se résoudre à importer des biens intermédiaires pour réexporter un produit dans lequel elle aura injecté de la valeur ajoutée.

Dans ce contexte, la pertinence de nos stratégies industrielles dépend de notre capacité à faire de nos ports maritimes des éléments d’irrigation de l’ensemble des territoires français et de véritables portes d’entrée sur la mondialisation. Or il est difficile pour nos grands ports maritimes d’avoir une ambition pour leur hinterland, et je le mesure à chaque fois que je les visite au titre de mes responsabilités au sein de la commission du développement durable : les voies ferroviaires font défaut ; les routes n’innervent pas suffisamment le territoire pour assurer un déchargement rapide des conteneurs ; on ne construit pas les canaux qui seraient nécessaires.

On en arrive à cette situation aussi paradoxale qu’inquiétante : si les marchandises arrivent dans nos ports, ils n’en sortent pas pour autant. Il y a quelques années, cherchant à mesurer le coût de transport d’un conteneur de Hong Kong à Dijon, j’avais constaté que celui-ci arrivait plus vite à destination et pour un coût moindre en passant par Rotterdam plutôt que par Marseille. Si on examine la carte de France à l’aune de ces dynamiques, on se rend compte à quel point ce handicap s’aggrave, alors même que nos grands ports maritimes pourraient constituer autant de vecteurs pour tirer profit de la mondialisation.

Dans le rapport que j’avais consacré à ce sujet au nom de la commission, j’avais souligné le fait que tous les ports maritimes regrettaient la diminution des crédits alloués au dragage. Alors que les navires sont de plus en plus gros, les ports ont de plus en plus de difficulté à draguer leur entrée afin d’accueillir ces navires qui permettent la mutualisation du transport de conteneurs et partant contribuent à la compétitivité de notre économie. De 2009 à 2015, les crédits destinés aux investissements et à l’entretien des grands ports maritimes étaient passés de 53 à 48 millions d’euros, alors qu’il s’agit là de dépenses stratégiques pour notre compétitivité et notre industrie.

Lors de l’examen du projet de loi pour la croissance et l’activité, actuellement discuté en commission, je proposerai un amendement destiné à offrir de nouveaux moyens aux grands ports maritimes. Pourquoi ne pas aller dans certains cas jusqu’à ouvrir le capital des grands ports maritimes à des opérateurs extérieurs pour stimuler et jouer des effets de levier de ces investissements ? Si nous n’avons pas de grandes ambitions pour les grands ports maritimes, si nous ne nous ne leur donnons pas les moyens d’investir, nous prendrons le risque de nous faire déposséder de cet avantage comparatif. Il faut savoir que le développement du port de Rotterdam s’inscrit dans une véritable stratégie prospective, visant à le relier d’ici cinquante ans à l’ensemble de l’Europe !

Une route par l’Arctique s’ouvrira probablement dans quelques années. Dans ces conditions, les ports durange nord-européen seront très bien placés pour consolider une partie du fret maritime européen. Il est en conséquence particulièrement important, au regard de l’atout que constituent nos grands ports maritimes, de faire preuve d’ambition en matière d’aménagement du territoire.

Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.

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« Homme libre, toujours tu chériras la mer ! » Ces mots de Baudelaire prennent un sens particulier à l’aune des tragiques événements de la semaine passée. Ils nous disent aussi que la mer est un espace ouvert, sur le monde et sur l’avenir. Le Premier ministre l’a rappelé lors des Xe Assises de l’économie de la mer : « L’ambition maritime de la France est notre avenir. » La France est une grande puissance maritime, grâce à ses outre-mer. Avec onze millions de kilomètres carrés, nous possédons la deuxième surface maritime mondiale. Répartie sur quatre océans, elle est un outil au service de trois ambitions : diplomatique, économique et environnementale.

Sur le plan diplomatique, notre présence maritime fait de la France un interlocuteur incontournable. Grâce à elle, notre voix porte aux quatre coins du globe. Elle nous permet également de nous impliquer dans le développement de toutes les parties du globe. Elle nous impose enfin de protéger, par la diplomatie environnementale, ce patrimoine inestimable. Ce sera d’ailleurs l’un des enjeux de la conférence environnementale que nous accueillerons en décembre à Paris.

Sur le plan économique, la mer nourrit notre pays. Elle génère 300 000 emplois directs, un million si l’on compte les emplois induits, et 65 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Dans ce domaine comme dans tant d’autres, la France possède des atouts indéniables. Des entreprises de pointe travaillent par et pour la mer. Outre les grands groupes internationaux que nous connaissons tous, notre pays compte de nombreuses PME et PMI, moins connues mais tout aussi efficaces – je pense à une entreprise de ma circonscription, Flexi France, spécialisée dans la production de conduites flexibles, qui intervient dans le monde entier.

Cette puissance économique se retrouve dans de nombreux domaines : chantiers navals, industries nautiques, transports maritimes, pose de câbles sous-marins et bien d’autres activités encore. Elle génère une croissance bleue, pendant maritime de la croissance verte que nous venons d’encourager en votant le projet de loi relatif à la transition énergétique.

À l’échelle mondiale, l’économie bleue représente 5,4 millions d’emplois et un chiffre d’affaires de 500 milliards d’euros. Nous sommes présents sur ce marché et nous le serons encore demain grâce à la recherche, l’innovation et l’enseignement, qui seront nos meilleurs atouts.

Enfin cette surface maritime nous assigne une ambition environnementale. Vous l’avez dit, monsieur le secrétaire d’État, la mer est un patrimoine national que nous devons protéger. La France affirme d’ores et déjà son ambition de créer 20 % d’aires maritimes protégées à l’horizon 2020. Nous devons atteindre ces objectifs : il en va de la préservation d’une biodiversité que nous découvrons chaque jour davantage grâce à nos programmes de recherche.

L’économie de la mer est aussi une économie de la connaissance. Nous ne devons pas cesser de rappeler le coût de l’érosion de la biodiversité : nous ne pouvons pas nous permettre de le payer.

La protection marine va de pair avec la mise en place d’une pêche durable. Nous sommes conscients de la limite de nos ressources. Nous savons que notre modèle économique doit évoluer, et nous le ferons évoluer vers un modèle plus juste et plus responsable, tant du point de vue social que du point de vue environnemental. Nous pourrons ainsi utilement remettre sur la table l’interdiction du chalutage en eau profonde en vue d’avancer sur cette question avec la Commission européenne et la majorité des États membres, qui y est favorable.

L’économie bleue est aussi une économie verte et doit s’appuyer sur les filières d’avenir. Je pense au développement de nos ports, notamment ceux du Havre et de Marseille, véritables portes d’entrée de la France. Je pense à nos chantiers navals, qui devront construire les navires du futur que vous appelez de vos voeux et qui mettront la technologie au service de l’écologie. Je pense également au développement des énergies renouvelables marines, qui bénéficient aujourd’hui d’un programme d’investissements d’avenir. Je pense enfin à la valorisation de notre patrimoine marin.

L’attrait de l’homme pour la mer ne faiblira pas dans les prochaines années. La mer représente un potentiel de croissance particulièrement fort pour nos zones littorales, comme l’ont rappelé de nombreux intervenants.

Mes chers collègues, tout au long de son histoire notre pays a su regarder vers le large. Nous avons la capacité de relever ensemble les défis diplomatiques, économiques et environnementaux. C’est aujourd’hui que nous écrivons les pages de notre avenir dans le livre de notre politique maritime.

Je mesure, comme beaucoup de mes collègues, que vous avez, monsieur le secrétaire d’État, parfaitement compris le sens de ces défis et que vous engagez les moyens nécessaires pour les relever. Ce faisant, vous répondez à l’ambition de notre pays de continuer à être une grande puissance maritime.

Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.

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Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues de la terre, de la montagne, des plaines et des vallées hexagonales, en ces périodes de marasme économique, permettez à un élu de la Vendée littorale de rappeler le formidable gisement de croissance que représente la mer pour notre pays.

Savez-vous, mes chers collègues, qu’il est un domaine où la France occupe le deuxième rang mondial ? C’est assez rare pour être souligné. Nous disposons en effet du deuxième plus vaste espace maritime au monde, l’équivalent de onze millions de kilomètres carrés, soit dix-sept fois la surface de la France continentale.

À eux seuls, ces chiffres doivent nous permettre de mesurer tout l’enjeu que représente pour notre avenir collectif la définition d’une politique nationale maritime stratégique et ambitieuse. Comment passer du constat de la vocation maritime de la France à une stratégie de développement de nos activités maritimes au service de l’intérêt national, de nos entreprises et de l’emploi ?

Il m’est impossible de répondre à cette question dans les quelques minutes qui me sont imparties. Aussi me contenterai-je d’esquisser brièvement trois pistes qui sont autant d’opportunités à saisir pour la France et de champs d’action féconds pour notre pays.

La première urgence est d’affirmer clairement aux yeux du monde la souveraineté de la France sur ses espaces maritimes. Ne soyons pas naïfs : si nous ne nous donnons pas les moyens d’occuper militairement, scientifiquement et diplomatiquement les gigantesques territoires qui sont les nôtres, nous prenons le risque de nous les voir contester et de perdre la maîtrise de leur destin.

C’est un enjeu considérable pour la France. La compétition est rude et active parmi les grandes puissances maritimes. Ne perdons pas cet avantage, qui nous hisse au rang des grandes nations et nous garantit des perspectives de développement aujourd’hui insoupçonnées.

Quand on songe que moins de 5 % des fonds maritimes de la planète ont été à ce jour explorés, on mesure le gigantesque potentiel de connaissances scientifiques, de ressources, partant de développement que recèle notre patrimoine maritime.

Le deuxième axe de notre nouvelle stratégie maritime devra être de considérer la mer comme un formidable levier de croissance – croissance scientifique, avec un soutien renforcé à l’IFREMER, croissance économique, énergétique, croissance bleue, croissance maritime et ultra-marine, croissance du transport maritime commercial, qui représente 80 % de la circulation mondiale des marchandises, défense du pavillon français, croissance littorale, tropisme littoral, croissance démographique, croissance des filières nautiques et des chantiers navals de guerre, scientifiques, de pêche et de plaisance. Autant de leviers de croissance essentiels pour notre pays et pour les régions littorales comme la Vendée, qui se trouve au confluent de la plupart de ces enjeux.

Moteur en matière de développement d’énergie éolienne offshore au large des îles d’Yeu et de Noirmoutier, leader mondial de la construction navale de navires de plaisance avec le groupe Bénéteau, deuxième département de pêche français en valeur de poisson débarqué, comptant une filière pêche et marine innovante, une démographie littorale galopante, des projets vitaux de nouveaux ports de plaisance – suspendus à l’arbitraire des décideurs environnementaux –, organisatrice de l’une des plus grandes épreuves sportives nautiques au monde, le Vendée Globe, la Vendée est un laboratoire à ciel ouvert de cette « croissance bleue » qui pourrait, et devrait, participer au rebond de notre économie. Je vous invite, monsieur le secrétaire d’État, à venir le constater sur place.

Le troisième axe de notre nouvelle stratégie maritime nationale est un axe transversal qui fonde les deux autres : il s’agit de la préservation de nos océans.

L’urgence de la protection écologique et durable des mers et des océans est la condition préalable de toute ambition maritime pour la France. Le gigantesque réservoir de biodiversité, de ressources et de connaissances scientifiques qu’ils constituent ne représente un véritable intérêt que si nous faisons de leur protection une priorité. Qualité de l’eau, gestion des déchets, énergies propres, protection des fonds sous-marins, des frayères, respect des cycles de reproduction des espèces marines, défense contre la mer des zones côtières aménagées, aquaculture, salinité, acidité, effluents terrestres, protection de nos côtes contre les navires poubelles et les risques de marée noire, enfin projet, à mes yeux essentiel, de création d’un corps européen de garde-côtes pour protéger nos zones littorales : toutes ces problématiques sont vitales si nous voulons que nos territoires maritimes et littoraux conservent durablement leur identité et leur potentiel stratégique.

Mes chers collègues, nous parlons ici de sujets dont l’importance est capitale pour notre pays. L’État doit mettre tous ces atouts de son côté et faire réellement de la mer une priorité. Cela passe notamment par la création du grand ministère de plein exercice de la mer et de la pêche que tous les acteurs et les professionnels des milieux littoraux et maritimes appellent de leurs voeux.

La mer n’est pas seulement le berceau de la vie ou le « miroir de nos rêves ». La mer, mes chers collègues, est l’avenir de la terre !

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

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Intervenant en dernier dans ce débat, madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, il m’est possible de tirer quelques enseignements des interventions de mes collègues. Il en est au moins un : quand on dispose du deuxième potentiel maritime mondial – terme que je préfère à celui de puissance – on a vocation à parler au monde.

Il est naturel que nous évoquions la question du développement économique, mais nous aurions dû insister sur des points qui concernent l’ensemble de la planète, en particulier l’environnement. Je regrette à ce titre que nous n’ayons pas évoqué ce soir le sixième continent, ni la pollution de la Méditerranée due à l’absence de systèmes d’épuration dans un certain nombre de grandes villes du bassin méditerranéen, ni de l’Arctique, où l’ouverture de nouvelles voies maritimes représente un véritable danger sur lequel la France doit s’exprimer.

Enfin, nous devons garder à l’esprit que les pays ambitieux défendent leurs îles, y compris lorsqu’elles sont très petites, comme le montre la position de la Russie, de la Chine ou encore des USA.

La France dispose d’une zone économique exclusive de onze millions de kilomètres carrés, ce qui la place au deuxième rang mondial, pas loin des États-Unis. Nous devons cette position aux départements et territoires d’outre-mer, mais aussi aux Terres australes et antarctiques françaises, les TAAF.

Ces terres ne sont pas seulement le legs historique des navigateurs qui les ont découvertes et explorées ; elles sont aussi pour la France un atout économique et stratégique. Elles représentent 2,3 millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive et leurs eaux sont riches en ressources halieutiques et énergétiques. On suppose ainsi que le canal du Mozambique, où se trouvent les îles Éparses, contiendrait d’importants gisements d’hydrocarbures, de gaz notamment.

De plus, comme le reste des DOM-COM, les TAAF assurent à la France une présence dans l’hémisphère sud.

Conséquence logique, les missions de la marine dans ces territoires sont immenses : lutte contre les trafics et la pollution, police des pêches, déploiement à proximité des points chauds pour pouvoir intervenir rapidement, maintien d’une présence dissuasive, entre autres. Or la marine française n’échappe pas aux coupes budgétaires qui sont imposées à l’ensemble de nos forces armées et ses capacités ont chuté d’environ 30 % depuis 2000.

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Pourtant la France ne pourra faire respecter sa souveraineté et tirer profit de son vaste domaine maritime que si elle dispose des capacités militaires suffisantes pour le contrôler, le défendre et y assurer une présence face aux revendications d’autres États. L’enjeu n’est pas seulement stratégique et militaire, il est aussi économique car dans le monde actuel, les océans sont à la fois des voies d’approvisionnement et des sources de richesse. La France, compte-tenu de son potentiel maritime immense, ne peut pas se limiter à des ambitions continentales.

Je souhaiterais à présent évoquer plus particulièrement le cas de l’île de Tromelin.

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Comme vous le savez, cet îlot est revendiqué par Maurice. En 2010, la France a signé avec Maurice un accord prévoyant une cogestion dans trois secteurs : les ressources halieutiques, la recherche et la protection de l’environnement.

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Cet accord a notamment pour effet de concéder aux Mauriciens des droits de pêche autour de Tromelin. De plus, il ne peut être révisé qu’avec l’accord des deux parties, ce qui impose de fait une cogestion ad vitam aeternam.

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Grâce à l’intervention des membres du groupe d’études sur les Terres australes et antarctiques françaises, le projet de loi autorisant la ratification de cet accord a été retiré in extremis de notre ordre du jour en 2013.

Tromelin est un îlot d’un kilomètre carré seulement ; c’est une terre inhospitalière, battue par les vents et perdue dans l’Océan indien. Pourquoi lui accorder tant d’importance, me dira-ton ? C’est que Tromelin représente, à elle seule, 280 000 kilomètres carrés de zone économique exclusive, contre 345 000 pour la métropole.

En outre, l’acceptation par la France d’une cogestion avec Maurice, fut-elle limitée aux domaines économique et scientifique, serait un aveu de faiblesse et de doute de notre pays.

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Elle constituerait de plus un signe d’encouragement pour les États revendiquant d’autres territoires appartenant à la France, avec le risque d’un effet domino. Je pense notamment aux îles du canal du Mozambique : Juan de Nova, Europa, Bassas da India et les îles Glorieuses.

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Je réaffirme donc mon opposition à cet accord de cogestion, oppositioin partagée par les députés de toutes obédiences qui appartiennent à notre groupe d’études, et mon soutien à une politique maritime ambitieuse, digne d’un pays présent sur tous les océans du globe !

Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

Madame la présidente, mesdames et messieurs les parlementaires, je remercie à mon tour le groupe UDI de son initiative : la qualité du débat et l’enthousiasme des orateurs prouvent qu’il était nécessaire.

Monsieur Folliot, vous avez d’emblée élevé le débat en évoquant l’avenir de l’humanité. Dans le même temps, vous avez affirmé la nécessité d’une vision gaullienne. Je me permets donc de vous rappeler la réponse qui fut celle du général de Gaulle à ceux qui lui demandaient de créer un ministère de la mer : « Il n’y a pas de ministère de la terre, pourquoi voulez-vous un ministère de la mer ? »

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Le général de Gaulle a dit bien d’autres choses sur la mer !

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

Cela n’enlève rien à la qualité de votre intervention, monsieur le député, ni à la légitimité des problématiques que vous avez soulevées et je peux approuver l’essentiel vos propos quant à la nécessité d’une vision de long terme.

Beaucoup d’entre vous ont interrogé le Gouvernement sur la volonté de notre pays de faire respect ses droits sur ses zones économiques exclusives. Vous avez notamment été plusieurs à évoquer l’affaire de l’île de Tromelin. Je rappellerai simplement qu’un traité a été signé en 2010 avec l’île Maurice.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

Peut-être, mais il a été signé ! Et le Sénat l’a voté en janvier 2012.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

C’est vrai. Une certaine expérience de la procédure parlementaire m’oblige cependant à vous rappeler qu’il aurait suffi qu’un groupe exerce son droit d’opposition pour qu’il y ait une discussion générale, et vous permettrez à l’ancien ministre des relations avec le Parlement que je suis d’observer que personne n’a pris une telle initiative.

Pour l’heure ce traité n’est toujours pas ratifié. Ce rappel ne visait qu’à replacer cette affaire dans son contexte politique et historique afin de mettre chacun face à ses responsabilités, et non à contester la légitimité de vos interrogations. Je ne voudrais pas qu’il ressorte du débat l’idée que ce gouvernement et ceux qui l’ont précédé auraient été tentés d’abandonner nos droits en la matière.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

Non ! Le Président de la République a rappelé la position de la France à l’occasion de son déplacement à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Il ne faudrait pas non plus laisser penser, comme certains orateurs, que la mer serait française et que nous pourrions imposer notre volonté au monde. On ne peut pas à la fois se féliciter de la COP 21, qui est une négociation internationale, appeler l’humanité à se saisir de ces questions, pour finalement laisser de côté l’humanité au profit de conflits de territoires et d’intérêts nationaux. Si la mer est un bien commun, si une politique commune de la pêche a été mise en place, s’il existe une démarche internationale, c’est bien parce que nous avons pour la mer l’ambition de concilier protection et croissance, comme l’ont très bien dit Yannick Moreau et d’autres orateurs.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

Il ne faut pas opposer exigence de croissance et exigence de protection – je me félicite d’ailleurs que personne ne l’ait fait au cours de ce débat. La réponse se trouve évidemment dans une politique maritime intégrée et surtout dans l’objectif de croissance bleue. Si ce débat avait eu lieu il y a dix ans, il aurait peut-être opposé les tenants d’une vision exclusivement environnementale de la politique maritime à ceux qui la refusaient au nom de la croissance. Toute l’intelligence de la société et des professionnels de la filière est d’avoir compris qu’il faut conjuguer les deux : c’ est tout l’intérêt de la notion de croissance bleue. Mais celle-ci n’est possible qu’en raison d’une volonté commune sur le plan international et d’engagements au niveau européen. Je ne crois pas que l’exigence de souveraineté doive faire oublier toutes les autres.

La France défend ses droits ni plus ni moins que les autres Etats. Il est tout aussi important que des politiques communes permettent de répondre à ce que vous même considérez comme une ambition pour l’humanité, non en termes de conflits de souveraineté mais de coopération internationale en matière de protection de l’environnement et de croissance économique. Cette question sera d’ailleurs au coeur des débats de la COP21, et je suggère que nous abordions cette conférence avec l’objectif de convaincre l’ensemble du monde et non de donner le sentiment d’être d’abord les défenseurs de je ne sais quel pré carré.

Debut de section - Permalien
Alain Vidalies, secrétaire d’état chargé des transports, de la mer et de la pêche

Ce n’est pas contradictoire, mais je vous mets en garde contre le risque de laisser cette impression.

Yannick Moreau est parti après avoir dit des choses justes et enthousiasmantes. Les projets qu’il a énumérés qu’il s’agisse de la protection du littoral, des EMR, des ports, que sais-je encore, et qui ne résultent certes pas tous de l’action de ce gouvernement, démentent l’idée selon laquelle la France ne fait rien et n’est pas à la hauteur de ses ambitions. En énumérant tous ces exemples, il faisait la démonstration que la France est au rendez-vous et que ma pleine conviction que la mer est un formidable levier de croissance est partagée.

Je suis tout à fait intéressé, monsieur Leroy, par la proposition de loi que vous m’avez annoncée, et le Gouvernement sera bien évidemment un partenaire dans son examen.

La démarche que vous nous engagez à adopter au sein du Fipol complémentaire, monsieur Molac, a déjà eu lieu mais elle n’a pas connu le succès escompté parce que nous nous sommes heurtés à des difficultés. Naturellement rien ne nous empêche de la réitérer mais dans le principe elle a été engagée.

Il me semble, monsieur Vitel, que votre intervention s’inspirait d’une expérience personnelle en matière de réhabilitation portuaire ! Nous avons mis en place une expérimentation de simplification des procédures en cause, limitée pour l’instant au grand ports maritimes et qui vise précisément à remédier aux difficultés que vous avez évoquées. Nous devons pour l’heure attendre son retour d’expérience avant d’envisager de la généraliser. J’espère que nous trouverons ensemble une solution très concrète.

Le Gouvernement, monsieur Gomes, souscrit pleinement à vos propos quant au potentiel immense des territoires que vous nous avez décrits. Comme vous le savez, beaucoup de choses ont déjà été entreprises. Le parc national marin de la mer de corail est aujourd’hui la plus grande aire marine protégée du monde. Par ailleurs, nous comptons combler par un décret le vide juridique dans lequel se trouvent les modalités d’exploration minière, en particulier à Wallis-et-Futuna, afin de répondre à la demande déposée par la société Eramet.

La question de l’extraction du sable, madame Le Dissez, qui fait l’objet d’un débat récurrent, est prise en compte par la loi relative à la transition énergétique. Elle doit faire prochainement l’objet d’un rapport, comme vous l’avez vous-même rappelé. Cette question relève de plusieurs ministères, ce qui est pour le Gouvernement une raison de plus d’attendre ce rapport avant d’en débattre avec la représentation nationale.

J’ai moi-même abordé la situation de la SNSM, monsieur Gandolfi, et je peux reprendre à mon compte les propos que vous avez tenus. Je pense comme vous que nous disposons aujourd’hui d’une organisation efficace et reconnue dont le coût est sans concurrence possible, rapporté au service rendu, parce qu’elle a su concilier bénévolat et efficacité. C’est dans cet esprit que le Gouvernement a échangé avec les représentants de cette association. Je vous confirme qu’un financement supplémentaire de 1,5 million d’euros est inscrit dans le budget, et que Ségolène Royal et moi-même avons sanctuarisé ces crédits.

En outre, nous avons pris une initiative législative pour réparer ce qu’on peut qualifier de dommage collatéral de la loi NOTRe. En effet, la spécialisation des compétences des collectivités a entraîné une mise en cause des subventions votées par les communes, que la suppression de la clause de compétence générale prive de cadre législatif. Nous avons voulu répondre à cette objection pleinement fondée et je peux vous garantir que la loi NOTRe permettra aux communes, auxquelles il ne s’agit pas de se substituer, de maintenir leur dotation.

J’ai bien enregistré que le problème particulier de la Corse n’a pas aujourd’hui de réponse satisfaisante. Votre question est légitime et les services du ministère travaillent sur ce sujet.

Même si l’oratrice qui les a tenus n’est plus là, je tiens à dire que je ne saurais souscrire à des propos tendant à faire croire qu’on ne ferait rien pour l’ outre-mer et que les habitants de ces territoires seraient abandonnés. Je peux d’autant moins laisser passer ce genre d’attaque politicienne qu’elle constitue aussi d’une certaine manière une agression contre les élus et les acteurs socioprofessionnels de ces territoires. Seule l’ignorance peut justifier que l’on puisse ainsi affirmer, à l’occasion d’un débat sur la politique maritime, qu’il ne se passe rien à la Guadeloupe ou à la Martinique. Le projet sur le canal de Panama constitue au contraire une chance historique, notamment du point de vue du développement de l’activité portuaire : il y a là une démarche très élaborée, et de nombreux projets sont lancés par les collectivités avec les différentes catégories professionnelles, les chambres de commerce et l’ensemble de la filière. Et l’on vient nous dire qu’il ne se passerait rien ! On peut toujours ignorer la réalité, mais pour ma part, je m’inscris en faux contre cette vision, ne serait-ce que pour rendre justice à ceux qui font ce travail sur le terrain. Ainsi que je l’ai dit dans mon propos introductif, je me rendrai d’ailleurs dans quelques semaines sur place pour initier une coopération entre ces grands ports.

En évoquant ainsi les ports, je réponds bien sûr à Jean-Christophe Fromantin, que j’avais cité – sans son autorisation – dans mon propos introductif. Ce que vous nous avez dit à ce sujet est en effet juste et fort et doit nous interroger tous. Nous avons engagé une politique en faveur des grands ports maritimes, mais vous avez raison de dire que les difficultés de liaison avec l’hinterland que nous connaissons aujourd’hui doivent nous conduire à apporter des réponses qui ne relèvent pas seulement de la politique maritime. L’exemple que vous avez donné conduit bien évidemment à s’interroger sur les transports à l’intérieur du territoire, notamment la liaison avec le ferroviaire, et sur la question de la logistique. Je partage pleinement cette approche globale, d’autant qu’elle légitime totalement les compétences conjuguées de mon secrétariat d’État dans le domaine de la mer et dans celui des transports. Je sais que nous poursuivrons ce débat, mais j’espère que nous pourrons aussi agir, car je partage entièrement cette vision de la nécessité d’une stratégie à long terme.

Je veux dire aussi à plusieurs d’entre vous, notamment à Christophe Bouillon, que le Gouvernement est sensible à votre réflexion. Je tire de ce débat la conclusion qu’il existe une certaine cohérence au sein de la représentation nationale. Tous, en effet, vous avez conscience, à la fois des atouts dont notre pays dispose, des enjeux environnementaux et du problème, complexe, des conflits d’usage, qui peuvent rendre difficile le passage à la concrétisation pratique : un certain nombre de projets, engagés parfois par d’autres gouvernements, se sont heurtés à cette réalité. C’est une bonne idée, par exemple d’élaborer un plan d’ implantation de sites d’aquaculture marine ; en pratique, c’est beaucoup plus compliqué. Nous devons donc poursuivre ce travail.

La représentation nationale le fera dans un contexte qui me paraît positif, non seulement sur le plan international, mais aussi parce qu’il existe, comme je le constate depuis maintenant quelques mois, une filière professionnelle structurée, qui constitue un interlocuteur exigeant.

Les constats que nous avons faits ce soir, qu’il s’agisse des atouts de notre pays, de nos objectifs, ou de la nécessité d’inscrire ce débat dans une ambition beaucoup plus large et beaucoup plus forte prouvent la légitimité de cette discussion. La mer est bien un atout, non seulement pour la France, mais aussi pour l’avenir de l’humanité – sur ce point, nous partageons tous le point de vue de Philippe Folliot.

C’est cette « croissance bleue » qui nous a réunis ce soir : que ceux qui nous ont permis d’avoir ce débat en soient, une fois encore, remerciés.

Applaudissements sur tous les bancs.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

Prochaine séance, demain, à neuf heures trente, en salle Lamartine :

Débat sur l’avenir du secteur industriel de défense et des capacités de maintenance industrielle des matériels.

La séance est levée.

La séance est levée à vingt-trois heures trente-cinq.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly