Commission des affaires étrangères

Réunion du 24 mai 2016 à 17h00

Résumé de la réunion

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La réunion

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Pavlo Klimkine, ministre des Affaires étrangères de la République d'Ukraine

La séance est ouverte à dix-sept heures.

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Nous sommes très heureux d'accueillir M. Pavlo Klimkine, ministre des affaires étrangères de l'Ukraine, accompagné de M. Oleksii Gontcharenko, vice-président du groupe d'amitié Ukraine-France à la Rada, que nous avions eu le plaisir de recevoir dans cette salle en juin 2015. Je salue également M. Oleg Shamshur, ambassadeur d'Ukraine en France, ainsi que les collaborateurs du ministre.

J'ai eu le plaisir de vous recevoir à déjeuner il y a quelque temps, monsieur le ministre, avec quelques-uns de mes collègues. Vous savez que notre commission suit de très près l'évolution des relations de l'Ukraine avec l'Union européenne, mais aussi avec la Russie, et que nous recevons régulièrement des personnalités des deux pays, de même, bien sûr, que les diplomates français qui sont impliqués dans la résolution du conflit. Nous avons ainsi auditionné récemment M. Pierre Morel, qui préside un des quatre groupes de travail issus des accords de Minsk.

Je me suis rendue en Ukraine il y a quelques semaines avec mes homologues allemand et polonais, MM. Norbert Röttgen et Grzegorz Schetyna, visite au cours de laquelle nous avons eu le plaisir et l'honneur de dîner avec vous, monsieur le ministre. J'irai à Moscou le 15 juin prochain.

La France s'est, avec l'Allemagne, engagée au plus haut niveau dans la médiation concernant le conflit du Donbass, avec les négociations en format dit « Normandie » et les accords de Minsk, qui ont encore donné lieu à une réunion ministérielle le 11 mai dernier à Berlin. Ces accords ont été endossés par les chefs d'État et de gouvernement européens, qui ont décidé, en mars 2015, de lier la durée des sanctions contre la Russie à leur mise en oeuvre.

Ces accords constituent un compromis : les Ukrainiens, les Russes et les séparatistes ont dû faire les uns et les autres des concessions qu'ils jugent parfois désagréables. Mais, de mon point de vue – qui est, je crois, largement partagé –, il est absolument indispensable que ces accords soient intégralement appliqués par toutes les parties. C'est, évidemment, une condition du soutien de l'Union européenne.

Les accords de Minsk contiennent l'engagement de mettre en oeuvre un cessez-le-feu réel et durable. Je pense que la Russie pourrait faire davantage pour convaincre les séparatistes de le respecter. On constate d'ailleurs une nette amélioration sur le terrain depuis le 1er mai. Il y a donc une évolution favorable par rapport à la situation que nous avait décrite Pierre Morel lorsque nous l'avions auditionné.

Mais la mise en oeuvre des accords suppose aussi des mesures politiques et, à cet égard, le gouvernement ukrainien et la Rada ont une responsabilité. Nous savons qu'il n'existe pas aujourd'hui de majorité qualifiée à la Rada pour voter définitivement la révision constitutionnelle. Pourtant, il faudra bien que cet engagement soit tenu. Le président de la Rada et vous-même, monsieur le ministre, nous avez indiqué que, en attendant que ce vote soit acquis, on enregistrait des avancées sur d'autres textes, notamment sur la loi électorale pour le futur scrutin dans le Donbass et sur la loi d'amnistie. Le gouvernement ukrainien a proposé un projet de loi électorale, mais encore faut-il qu'il soit conforme aux accords de Minsk et discuté avec les représentants des séparatistes, ainsi qu'il en a été convenu. Pouvez-vous, M. le ministre, nous rassurer sur ce point précis ? Est-ce bien la démarche qui a été retenue ?

Vous allez certainement évoquer la libéralisation du régime des visas, sujet qui figure dans l'agenda commun de l'Union européenne et de l'Ukraine et qui, je le sais, vous tient à coeur. Mais il faut comprendre aussi qu'il est normal que l'Union européenne lie la question des visas aux évolutions sur le dossier que je viens d'évoquer.

Les réformes internes et la lutte contre la corruption constituent un sujet essentiel pour l'Ukraine. C'est l'une des priorités du nouveau gouvernement, ainsi que le premier ministre M. Hroïsman et de nombreux collègues ukrainiens nous l'ont redit à Kiev. Pouvez-vous nous faire un point sur le programme de réformes dans votre pays ?

Enfin, en lien avec tout cela, la situation économique et financière de l'Ukraine reste très difficile, même s'il semble que le pire de la récession soit derrière nous : on constate une nette amélioration, avec notamment une baisse notable de l'inflation. Le 18 mai, le Fonds monétaire international (FMI) a annoncé la conclusion d'un préaccord qui laisse entrevoir un déblocage des aides qui étaient gelées depuis plusieurs mois. Sa présidente, Mme Lagarde, avait d'ailleurs fait des déclarations assez sévères à ce sujet en février : elle avait alors publié un communiqué indiquant qu'il serait difficile de poursuivre l'aide du FMI sans efforts significatifs de l'Ukraine pour combattre la corruption et réformer la gouvernance. L'annonce récente est donc, évidemment, une bonne nouvelle pour l'Ukraine. Selon vous, comment vos relations avec les bailleurs de fonds internationaux vont-elles évoluer désormais ? Comment voyez-vous les perspectives économiques et sociales de l'Ukraine ?

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Pavlo Klimkine, ministre des Affaires étrangères de la République d'Ukraine

(Interprétation de l'ukrainien) Je salue toutes les personnes présentes dans la salle et vous remercie, madame la présidente, de m'offrir l'occasion de m'exprimer devant votre commission. Nous avons de nombreux sujets à débattre ensemble, sur lesquels nous avons besoin d'une véritable solidarité et d'un véritable partenariat, au nom des intérêts de toute l'Europe et de sa sécurité. Votre introduction très détaillée constitue une excellente base pour notre discussion, notamment sur la politique étrangère de l'Ukraine. Je souhaite aborder un certain nombre de points clés.

Le format dans lequel nous discutons de la libération du Donbass ne porte pas le nom de « Normandie » par hasard : c'est précisément le jour de la commémoration du Débarquement qu'a été prise la décision de travailler en commun pour assurer la paix et la stabilité en Europe. Pour ma part, j'ai été présent à toutes les réunions qui se sont tenues dans le format « Normandie », aux réunions ministérielles comme aux sommets. J'ai également participé à la préparation des accords de Minsk.

Le contenu de ces accords est assez clair et simple, mais il est très difficile à mettre en oeuvre pour l'une des parties, à savoir la Russie. Les accords de Minsk reposent sur une logique simple : tout d'abord, la désescalade, le retrait des armes et la stabilisation de la situation sécuritaire. Les institutions internationales, en l'espèce la mission d'observation de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), doivent être présentes sur le terrain afin de contrôler la réalité de ce retrait et de s'assurer que la frontière orientale – dont plus de 400 kilomètres échappent actuellement au contrôle des autorités ukrainiennes – n'est pas franchie par des troupes régulières russes, des mercenaires, des armes et des munitions. La communauté internationale doit aussi contribuer à garantir la sécurité des opérations électorales, avec la présence d'une mission de police de l'OSCE. C'est seulement dans ces conditions que l'on pourra parler d'élections libres et transparentes.

Or, ce que nous voyons aujourd'hui, c'est la présence, sur le territoire du Donbass, de troupes régulières russes – y compris de forces spéciales –, de mercenaires, d'environ 2 000 chars et véhicules blindés, ainsi que d'une grande quantité de pièces d'artillerie lourde et de mortiers. Toutes ces armes viennent de Russie.

Le Donbass représente seulement 3 % du territoire ukrainien, mais c'est une région très importante, où se trouvent plusieurs fleurons de notre industrie. La stratégie de la Russie consiste à déstabiliser le Donbass pour déstabiliser l'Ukraine et l'ensemble de la région. Nous cherchons aujourd'hui à revenir à une bonne compréhension du processus : il faut d'abord passer par une phase de désescalade, puis par la stabilisation du Donbass, avant d'en venir à sa reconstruction.

D'autre part, l'occupation de la Crimée continue. Au cours des derniers mois la situation s'est aggravée : on parle de dizaines de disparitions et de cas de torture ; les médias des Tatars de Crimée ont tous été interdits, même les sites internet pour enfant. Dans la mesure où nous n'avons plus accès à la péninsule, nous ne pouvons pas vraiment savoir ce qui s'y passe. Nous avons à plusieurs reprises demandé l'envoi d'une mission d'observation du Conseil de l'Europe ou de l'OSCE en Crimée, mais ces efforts n'ont pas abouti pour l'instant.

Pour résoudre la situation en Ukraine, il faut en revenir à une compréhension claire du fait qu'aucun pays au monde ne doit pouvoir violer les règles du droit international. Le monde a mis longtemps à établir ces règles, qui garantissent à chaque pays son indépendance, son intégrité territoriale et l'inviolabilité de ses frontières. À cet égard, nous sommes très reconnaissants à l'Union européenne et au G7 de leur aide et de la solidarité politique qu'ils nous ont manifestée, ainsi que pour la pression politique qu'ils exercent sur la Russie.

Notre objectif est non pas d'affaiblir ou de marginaliser la Russie, mais de faire en sorte qu'elle respecte les règles du droit international. Cela implique qu'elle retire ses troupes régulières et ses équipements militaires du Donbass, qu'elle cesse d'y envoyer des mercenaires et qu'elle mette fin à l'occupation de la Crimée. Les sanctions appliquées à la Russie sont en effet liées à la pleine mise en oeuvre des accords de Minsk. Encore une fois, la communauté internationale doit pouvoir contrôler ce qui se passe sur le territoire du Donbass. Il faut donc que la mission d'observation de l'OSCE y ait accès, jusqu'à la frontière orientale. Hier, au cours de la réunion des ministres des affaires étrangères du Partenariat oriental, j'ai présenté à mes collègues des images et des vidéos – dont je suis prêt à vous remettre une copie – montrant que cette frontière est franchie, la nuit, par des équipements militaires russes : des chars, des véhicules blindés, des pièces d'artillerie lourde. Du côté russe de la frontière sont massés 38 000 à 40 000 hommes, soldats des troupes régulières russes ou mercenaires, eux-mêmes majoritairement russes.

Pour que des élections normales se tiennent dans le Donbass, il faut que les partis politiques puissent y participer, que les médias puissent les couvrir, que les 1,5 million de personnes déplacées puissent exercer leur droit de voter ou d'être élues et que le scrutin se déroule sous le contrôle d'observateurs internationaux. Ces conditions semblent assez logiques, mais la Russie s'y oppose catégoriquement, car elle utilise la situation dans le Donbass pour déstabiliser l'Ukraine et l'ensemble de la région.

Un nouvel entretien téléphonique a eu lieu hier, tard dans la nuit, entre les chefs d'État et de gouvernement du format « Normandie ». Ils ont souligné que l'amélioration du contexte sécuritaire était indispensable, et sont convenus de discuter du déploiement d'une mission de police de l'OSCE sur le terrain, notamment pour garantir la sécurité des prochaines opérations électorales.

La nouvelle Ukraine – qui n'est plus l'Ukraine post-soviétique – aspire à une vie pleinement démocratique fondée sur les valeurs et les principes européens. Telle est la volonté des Ukrainiens eux-mêmes. Aujourd'hui, la progression de l'Ukraine vers l'Union européenne est devenue l'idée nationale. Nous travaillons très activement à la mise en oeuvre de l'accord d'association, qui fixe la feuille de route de nos réformes.

L'un des objectifs très importants de cet accord est l'introduction d'un régime sans visas. L'enjeu est non seulement la simplification de la délivrance des visas d'un point de vue technique, mais aussi la possibilité pour de très nombreux Ukrainiens d'enrichir leurs contacts interpersonnels dans les pays de l'Union européenne. À cet égard, nous mettons en oeuvre un important programme de réformes, que la Commission européenne a validé. Je peux commenter nos réalisations point par point : nous avons créé de nouvelles institutions de lutte contre la corruption, introduit des passeports biométriques, mis en place un nouveau système d'enregistrement, etc. En coopérant avec ses partenaires européens, l'Ukraine peut contribuer de manière significative au renforcement de la sécurité sur le continent.

Je suis persuadé que la zone de libre-échange entre l'Union européenne et l'Ukraine, entrée en vigueur le 1er janvier de cette année, offre d'excellentes perspectives pour les hommes d'affaires français en Ukraine. Je me souviens des succès enregistrés par les entreprises françaises dans les pays d'Europe centrale et orientale, notamment en Pologne. Je sais que nombre d'entre elles s'intéressent aujourd'hui à l'Ukraine, pour s'y développer ou y investir. De ce point de vue, le potentiel de l'Ukraine ne va faire que croître à l'avenir.

Nous avons encore beaucoup à faire en termes de réformes. En tant que ministre des affaires étrangères, je peux néanmoins vous dire que nous avons réalisé beaucoup plus de réformes au cours des deux dernières années qu'au cours des quelque vingt années précédentes de l'Ukraine post-soviétique. Toutes ces réformes visent à renforcer l'État de droit. La nouvelle police nationale ukrainienne travaille avec des méthodes très différentes. D'autres chantiers clés sont engagés, notamment la réforme du système judiciaire. La logique des réformes que nous essayons de mettre en oeuvre consiste à transposer la législation européenne dans le droit ukrainien et à construire des institutions efficaces et transparentes. Pour cela, nous avons besoin de l'aide de l'Union européenne. Nous avons évoqué tous ces sujets hier à Bruxelles.

Au cours des deux dernières années, nous avons été pleinement engagés dans la mise en oeuvre de notre vision de l'Ukraine, à savoir un pays uni, démocratique et européen. Aujourd'hui, le projet européen n'est pas concevable sans l'Ukraine. Ce que nous défendons en Ukraine, c'est non seulement l'avenir de notre pays, mais aussi la sécurité de l'Union européenne et l'avenir du projet européen.

Je suis ravi de pouvoir échanger avec vous aujourd'hui et suis prêt à répondre en détail à toutes vos questions.

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Merci beaucoup, monsieur le ministre, pour cet exposé très complet.

Je donne la parole à M. Jean-Pierre Dufau, rapporteur de la mission d'information sur les relations entre la Russie, l'Union européenne et la France. Il a fait un déplacement à Kiev dans ce cadre.

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Monsieur le ministre, vous avez dressé un tableau des grands problèmes qui se posent dans ce dossier impliquant l'Union européenne, l'Ukraine, la Russie et les séparatistes. Nous n'oublions pas toutes les difficultés que vous avez rappelées : la situation dans le Donbass, avec la présence de troupes et la problématique des élections, mais aussi la situation économique et financière de l'Ukraine, ainsi que les problèmes de corruption. Il y a aussi la question de la Russie, dont traite notre mission d'information. À cet égard, ne nous voilons pas la face : on ne peut pas parler de l'Union européenne et de l'Ukraine sans parler en même temps de ce grand pays qu'est la Russie ; on ne peut pas signer un partenariat avec certains pays en faisant comme si le voisinage n'existait pas sur le continent européen. Enfin, nous sommes conscients qu'il n'est pas aisé de passer à la situation la plus démocratique, transparente et avancée possible, ainsi que vous essayez de le faire.

Vous avez insisté sur la situation sécuritaire dans le Donbass, notamment à proximité de la frontière avec la Russie, ainsi que sur la Crimée. Malheureusement, ces questions ne vont pas se résoudre rapidement, d'un coup de baguette magique. Les accords de Minsk ont fixé un cadre et des objectifs, mais leur mise en oeuvre n'est pas simple. Parmi ces objectifs figure la décentralisation, qui constitue l'un des volets de la réforme constitutionnelle. Or celle-ci est actuellement bloquée. Comment voyez-vous ce processus de décentralisation ? Quelle est la perspective ? Quel statut envisagez-vous pour le Donbass ? Comment renouer le dialogue pour que ce dossier évolue favorablement ? À défaut, on risque d'en rester pendant des années à un statu quo qui ne satisfait personne. Rappelons qu'il faut atteindre une majorité qualifiée et que l'Ukraine a récemment changé de premier ministre. Quoi qu'il en soit, il faut être en mesure non seulement de prendre des décisions, mais aussi de les appliquer.

Vous avez également évoqué la libéralisation du régime des visas et l'introduction de passeports biométriques. Mais, pour que nous puissions lever l'obligation de visa, encore faut-il que la situation ait suffisamment évolué en Ukraine et que l'on soit dans une autre dynamique.

Quant à la levée des sanctions contre la Russie, elle est souhaitable, dans l'intérêt de tous, mais suppose qu'un certain nombre de conditions soient remplies. En tout cas, on ne peut pas en rester au blocage actuel.

Vous avez mentionné un certain nombre d'avancées en matière de lutte contre la corruption. Pouvez-vous nous en dire davantage à ce propos ?

D'une façon plus générale, que proposez-vous pour faire évoluer la situation et progresser dans la mise en oeuvre des accords de Minsk ? Certes, l'Ukraine ne détient pas toutes les clés d'un déblocage, mais les évolutions dépendent en partie de sa volonté. Elle doit agir de telle sorte que nous puissions, au niveau international, peser sur les autres parties. Selon un proverbe bien connu, « aide-toi, le Ciel t'aidera. »

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Notre commission et sa présidente, vous l'avez compris, monsieur le ministre, s'intéressent beaucoup à la question ukrainienne depuis le début de cette législature. Mon parti – actuellement dans l'opposition – et moi-même avons été aux côtés de la révolution Orange, dès 2003, et avons travaillé avec les gouvernements ukrainiens successifs. Lorsque j'étais secrétaire d'État chargé des affaires européennes, nous avons même constitué un groupe des amis de l'Ukraine pour essayer d'obtenir des transformations économiques, ce qui était très difficile à l'époque.

Mon parti a voté en faveur d'une résolution, qui a d'ailleurs recueilli la majorité des voix, dans laquelle nous demandons la levée des sanctions contre la Russie. Pourquoi avons-nous, après réflexion, adopté cette position ? Parce que nous avons le sentiment que la situation intérieure en Ukraine ne permet pas d'aboutir au vote de la loi nécessaire pour accorder l'autonomie aux régions de Donetsk et de Lougansk tout en les gardant à l'intérieur de l'Ukraine. Dès lors, nous, Français, et notre économie sommes en quelque sorte devenus les otages de nos propres sanctions – je vous dis les choses très franchement. Il y a un problème russe évident, avec la présence de forces russes dans l'est de l'Ukraine, qu'il faut pousser vers la sortie. Mais il y a un autre problème : le fait que nous n'arrivons pas à obtenir ce texte. Dans cette situation, les sanctions peuvent continuer à s'appliquer ad vitam æternam et un climat de guerre froide va s'imposer de plus en plus en Europe. Nous n'aurons absolument rien réglé, et il y aura un risque éventuel d'escalade.

La solution à la crise est sur la table, avec les accords de Minsk : retrait des forces russes, vote de la loi par la Rada, déploiement des moyens de l'OSCE. Malheureusement, pour l'instant, il n'y a d'évolution ni d'un côté, ni de l'autre. Nous sommes en attente d'un geste fort de l'Ukraine, non seulement sur le plan économique – il y a, à cet égard, une évolution –, mais surtout sur le plan politique, avec le vote de ce texte. Il reviendra alors à la diplomatie française et européenne de favoriser la concordance entre ce geste du côté ukrainien et un geste du côté russe. J'espère que vous saurez nous convaincre, monsieur le ministre.

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Je précise que plusieurs députés de la majorité et moi-même avons voté contre cette résolution. Cependant, quelques députés de la majorité ont voté pour, ce qui fait qu'elle a recueilli une majorité des voix bien qu'elle ait été présentée par l'opposition.

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C'est moi, monsieur le ministre, qui ai proposé cette résolution. Quelles que soient mes amitiés de l'autre côté de la frontière, je n'ai strictement rien contre l'Ukraine : j'ai présidé le groupe d'amitié France-Ukraine pendant cinq ans ; je me suis rendu dans votre pays plus de cinquante fois ; dans les années 1990, j'en ai arpenté les routes avec la fondation Est Libertés et d'autres députés, notamment Claude Goasguen, pour favoriser la formation de partis politiques s'opposant à ce qui restait du parti communiste ; lors de la dernière élection présidentielle, j'ai été impliqué dans la campagne de Mme Tymochenko. De mon point de vue, il est hallucinant que la Russie et l'Ukraine en soient arrivées à un conflit qui a fait environ 10 000 morts. On ne peut, bien sûr, que regretter cette situation.

Permettez-moi de dire très aimablement au député qui vous accompagne, M. Gontcharenko, que je ne suis pas payé par la Russie, contrairement à ce qu'il a déclaré il y a quelques jours à la télévision. Souffrez que, dans ce pays, on puisse avoir des opinions sans être forcément rémunéré ! Cela dit, je suis heureux de l'accueillir aujourd'hui. J'espère qu'il tiendra des propos plus modérés la prochaine fois.

Je préside la mission d'information dont mon collègue Jean-Pierre Dufau est le rapporteur. Nous constatons aujourd'hui que la situation est complètement bloquée. Le cessez-le-feu n'est pas totalement respecté, mais reconnaissons qu'il y a tout de même de grands progrès par rapport à la situation très violente qui prévalait il y a quelques mois. Du côté russe comme du côté ukrainien, on attend que l'autre fasse le premier pas. On se demande qui sera le plus intelligent des deux et fera ce pas. En attendant, des vies humaines sont fauchées, et le fossé qui est en train de se creuser entre vos deux pays promet d'être durable.

À Moscou, nous avons rencontré M. Gryzlov, qui vous accable de tous les maux et attend des avancées de votre part, en particulier l'adoption de la loi accordant l'autonomie aux régions de l'Est – sur lesquelles la Russie n'a aucune revendication territoriale, chacun l'a désormais compris – et celle de la loi d'amnistie. Je vous pose à mon tour la question primordiale déjà soulevée par mes collègues : quand ces textes seront-ils votés à la Rada ? Quel est le calendrier des travaux en la matière ?

On ne reviendra pas sur les causes du conflit, mais je pense que l'Union européenne et certains grands voisins ont leur part de responsabilité. Certes, il ne fallait pas bloquer un accord entre l'Union européenne et l'Ukraine, mais on aurait dû faire en sorte que l'Ukraine trouve sa place, en construisant des relations à la fois avec l'Europe et avec la Russie.

Paradoxalement, je fais partie de ceux qui regrettent qu'on lie la question des visas à des progrès dans la résolution de la crise. C'est, à mon avis, une forme de chantage totalement déplacée. J'ai toujours défendu l'idée d'une libéralisation du régime des visas pour les Ukrainiens comme pour les Russes, ainsi que nous l'avons déjà fait pour les Moldaves. L'Ukraine et la Russie ont vocation à renforcer leurs liens avec l'Europe. Quels que soient nos désaccords en ce moment, il serait bien plus logique d'accorder plus facilement des visas aux Ukrainiens qu'aux Turcs.

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J'aurais dû en effet rappeler, cher collègue, que vous présidez la mission d'information dont M. Jean-Pierre Dufau est le rapporteur. Notre commission ne déroge jamais à la règle selon laquelle le président de la mission d'information est issu de l'opposition, et le rapporteur, de la majorité.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, nous donner des précisions concrètes sur ce qui a été réalisé dans le cadre de l'importante réforme de la justice que vous avez évoquée ?

La nomination de M. Iouri Loutsenko au poste de procureur général, le 12 mai dernier, a suscité des interrogations : c'est une personnalité politique tout à fait honorable, mais ayant peu d'expérience judiciaire et très proche du président Porochenko. Comment expliquez-vous cette décision ? Vous paraît-elle de nature à apaiser les choses ?

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Pavlo Klimkine, ministre des Affaires étrangères de la République d'Ukraine

(Interprétation de l'ukrainien) Merci beaucoup pour toutes vos questions.

Nous n'avons rien contre la Russie en tant que telle, mais nous avons un problème avec le régime qui existe en Russie – et vous aussi, je suppose. Le problème, c'est que, dans ce pays, on érige des monuments à Staline et que les gens y déposent des fleurs, alors que ce dictateur a fait mourir des millions de gens dans les camps – le président russe lui-même honore sa mémoire. Le problème, c'est que la Russie a envoyé des troupes en Crimée et l'occupe. Le problème, c'est que la Russie a envoyé 2 000 chars, des troupes régulières et des mercenaires dans le Donbass. Le problème, c'est que la Russie a envoyé ses avions en Syrie et que ceux-ci bombardent non pas les terroristes, mais la population civile à Alep.

La décentralisation est un processus tout à fait nécessaire pour l'Ukraine dans son ensemble. Elle consiste à transférer davantage de responsabilités aux pouvoirs locaux. Le parlement ukrainien a déjà adopté, en 2014, un projet de loi sur les spécificités de l'autonomie locale dans le Donbass. Ce texte prévoit notamment que cette région peut mener sa propre politique économique et qu'on peut y utiliser la langue de son choix : l'ukrainien, le russe ou le grec – il y a, dans le Donbass, une minorité grecque, qui compte 50 000 personnes. Mais il ne faut pas confondre l'idée très positive de l'autonomie locale et de la décentralisation avec la fédéralisation que la Russie cherche à imposer. La Russie veut donner aux régions telles que le Donbass le droit d'intervenir dans les décisions qui concernent l'ensemble de l'Ukraine, ainsi que des compétences en matière de politique étrangère. Je pense que cela n'existe dans aucun pays européen. Nous ne permettrons pas la poursuite de la fragmentation de l'Ukraine. Nous avons dit clairement que cette loi relative à l'autonomie du Donbass entrerait en vigueur dès que s'y seront tenues des élections libres et honnêtes, organisées avec l'OSCE et sous contrôle international. Actuellement, la loi ne peut pas être appliquée car la région n'a pas de dirigeants légitimes. Les élections qui se sont tenues dans le Donbass en novembre 2014 – en réalité, une farce – n'ont été reconnues ni par l'Union européenne ni par l'Ukraine, et pas même, je le souligne, par la Russie.

L'amnistie est, elle aussi, nécessaire. Il y a eu par exemple un processus d'amnistie dans les Balkans, avec un mécanisme de réconciliation coordonné par la communauté internationale. Dès qu'il y aura des pouvoirs locaux légitimes et que le système judiciaire fonctionnera, nous pourrons commencer le processus d'amnistie. Mais l'amnistie doit-elle être accordée à tous, notamment à ceux qui ont abattu le Boeing de la Malaysia Airlines, ou encore à ceux qui ont bombardé la population civile, en connaissance de cause, à Marioupol, à Kramatorsk et dans d'autres localités ukrainiennes ? Il faut séparer ceux qui se sont trompés et ceux qui ont commis des crimes contre l'humanité en connaissance de cause. C'est ce qui a été fait, avec succès, dans les Balkans.

La réforme constitutionnelle est, elle aussi, nécessaire, mais nous ne pouvons pas la voter aujourd'hui, car cela légitimerait ceux qui se trouvent actuellement au pouvoir dans le Donbass et y sont arrivés à la faveur d'une farce électorale. Cela figerait la situation actuelle, laissant le Donbass aux mains de structures mafieuses et créant un « trou noir » bien pire qu'en Transnistrie. La région serait alors source d'insécurité non seulement pour l'Ukraine, mais pour toute l'Europe.

Pour progresser sur le dossier du Donbass, c'est simple : il faut obtenir le retrait des troupes et des armes russes, donner l'accès aux inspecteurs de l'OSCE et organiser les élections. Dès que ces élections se seront tenues et que l'Ukraine aura rétabli son contrôle sur sa frontière orientale, on aura appliqué les accords de Minsk et les sanctions pourront être levées. Mais la Russie n'est pas de cet avis, car elle veut garder le Donbass sous son protectorat et disposer ainsi d'un levier sur l'Ukraine et sur l'Europe. Encore une fois, il faut distinguer la Russie en tant que telle et le régime actuellement en place en Russie.

S'agissant des réformes que nous avons engagées en Ukraine, en particulier dans le domaine de l'État de droit, j'ai déjà mentionné la mise en place de la nouvelle police, qui constitue, selon moi, un vrai succès. Quant à la nomination du nouveau procureur général, il faut l'apprécier dans le contexte plus large de la réforme du parquet général, que nous devons achever. Nous allons modifier en profondeur ses fonctions, en partie héritées de la période soviétique : le parquet général n'aura plus de pouvoir d'instruction, mais seulement un rôle de supervision. Il nous faut achever, parallèlement, la réforme du système judiciaire. Toutes ces réformes correspondant à des engagements que l'Ukraine a pris dans le cadre de l'accord d'association avec l'Union européenne.

J'en viens à la lutte contre la corruption. Nous avons créé un bureau national de lutte contre la corruption, qui bénéficie de l'aide technique de l'Union européenne et des États-Unis. Il a déjà mené plusieurs enquêtes, dont certaines ont abouti à l'ouverture de procédures judiciaires. Nous avons aussi créé une agence nationale de prévention de la corruption, qui est notamment chargée d'examiner les déclarations fiscales et les revenus des personnalités politiques. Ces deux institutions ont de réels pouvoirs et sont en mesure de détecter efficacement les actifs acquis illégalement. L'Union européenne a donné une évaluation positive des réformes que nous avons réalisées à ce stade et de celles que nous envisageons. Si vous le souhaitez, je peux vous fournir toutes les informations que j'ai présentées à ce sujet hier à Bruxelles au cours de la réunion des ministres du Partenariat oriental.

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Oleksii Gontcharenko, coprésident du groupe d'amitié Ukraine-France à la Verkhovna Rada de l'Ukraine

Je vous remercie, madame la présidente, de nous donner l'occasion d'échanger avec votre commission. Je suis coprésident du groupe d'amitié Ukraine-France à la Rada et secrétaire de la commission chargée des questions de décentralisation. Les sujets dont nous discutons aujourd'hui ayant un fort contenu émotionnel et ma maîtrise du français n'étant pas parfaite, je vais m'exprimer en ukrainien.

(Interprétation de l'ukrainien) En tant que parlementaire, M. Mariani a naturellement le droit de se rendre en Crimée occupée et d'y inviter d'autres députés français. Cependant, que se passe-t-il en Crimée ? D'après Transparency international, Amnesty international et Reporters sans frontières – ce n'est donc pas mon appréciation personnelle, ni celle de l'Ukraine –, les Tatars de Crimée et les personnes considérées comme pro-ukrainiennes sont réprimées ; le majlis – assemblée représentative – des Tatars de Crimée a été qualifié d'organisation terroriste et interdit ; des dizaines de personnes ont été arrêtées ; d'autres, portées disparues, sont en réalité enfermées entre les murs du FSB – Service fédéral de sécurité russe. Dans un tel contexte, aller en Crimée est une erreur. Bien sûr, M. Mariani a le droit de faire ce que bon lui semble. Pour ma part, j'ai le droit de dire ce que j'en pense.

La décentralisation de l'Ukraine est non pas un projet pour l'avenir, mais un processus en cours. Depuis le 1er janvier 2015, nous avons réalisé la décentralisation financière et fiscale. Les pouvoirs locaux ont reçu plus de 1,5 milliard d'euros à ce titre. Si la Crimée et le Donbass n'étaient pas occupés par la Russie, elles pourraient profiter de ces moyens. Nous allons poursuivre ce processus de décentralisation, qui est d'une grande importance pour un pays de la taille de l'Ukraine. Je tiens à remercier la France pour l'aide qu'elle nous apporte en la matière.

Quant au fossé entre la Russie et l'Ukraine, qui l'a créé ? Dans notre conversation nous avons oublié une chose : aucun soldat ukrainien n'a traversé la frontière de la Fédération de Russie ; il n'y a de militaires ukrainiens dans aucun village ou ville russe, tandis que deux régions ukrainiennes sont physiquement occupées, l'une en totalité – la Crimée –, l'autre partiellement – le Donbass. Il n'est pas facile de prouver qu'il y a des troupes régulières russes dans le Donbass, mais, en Crimée, c'est une évidence : il s'agit d'une occupation pure et simple. Depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, c'est la première fois en Europe qu'un pays en attaque un autre et occupe une partie de son territoire.

Croyez-vous donc au prétendu référendum organisé en Crimée, qui n'a été reconnu ni par l'ONU, ni par aucune autre organisation internationale ? Avez-vous oublié à quel point la rhétorique de Poutine à propos de la Crimée ressemble à celle de Hitler concernant l'Autriche ou l'Alsace-Lorraine ? Il s'est agi d'une une violation brutale du droit international. Bien sûr, l'Ukraine n'est pas pays parfait, et nous avons beaucoup de problèmes. Mais est-ce une raison pour s'introduire sur notre territoire, en occuper une partie et tuer des Ukrainiens ? Si votre voisin se conduit mal, allez-vous entrer dans son appartement, le tuer et vous emparer d'une partie de son appartement et de ses biens ?

L'adoption de la résolution évoquée précédemment par une partie des députés de votre assemblée a été un épisode très douloureux pour nous. Bien sûr, c'était votre droit. Mais je rappelle que des valeurs fondamentales sont en jeu : on ne peut pas accepter qu'un pays occupe le territoire d'un autre.

Nous sommes tout à fait favorables à la mise en oeuvre des accords de Minsk, mais, comme vous le savez, il y a un ordre de priorité entre les points de ces accords, et le premier d'entre eux est le cessez-le-feu. Or, depuis le début de l'année, on a dénombré plus de 6 000 violations du cessez-le-feu dans le Donbass. Au cours de la seule journée de lundi, sept soldats et officiers ukrainiens ont été tués par des militaires ou mercenaires russes. Est-ce là le cessez-le-feu ? Est-ce là l'arrêt des violences ? En outre, de quelles élections peut-on parler dans ce contexte ? Nous voulons plus que tous organiser des élections dans le Donbass, car nous avons besoin de représentants légitimes dans cette partie de l'Ukraine. Mais pouvez-vous imaginer des élections dans un endroit où circulent des chars, où l'on tire au lance-roquettes et où il y a des morts tous les jours sans exception ?

Nous avons un profond respect pour la République française et pour l'Assemblée nationale. Nous sommes reconnaissants à la France de son soutien, des positions qu'elle a prises et du rôle qu'elle joue au sein du format « Normandie ». La France n'est pas un pays ordinaire : c'est un pays très important pour l'Ukraine et pour le monde entier. Beaucoup de choses dépendent de sa position, notamment des signaux qu'envoie l'Assemblée nationale. C'est pourquoi je vous prie d'être très attentifs lorsque l'on vous soumet un projet de résolution, un texte ou une idée : demandez-vous ce qu'il y a derrière et à quoi cela peut mener.

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Merci beaucoup, monsieur le ministre, monsieur le coprésident. Il est très important que vous ayez pu exprimer votre point de vue pour mieux nous le faire comprendre, y compris, s'agissant de M. Gontcharenko, avec l'émotion et la véhémence de la jeunesse. De ce point de vue, les ministres sont en général tenus à plus de diplomatie que les parlementaires. Vous avez formé un duo très complémentaire.

Vous avez bien compris que nous avons des opinions différentes au sein de cette commission, ce qui est bien normal. Je ne souscris pas aux termes employés par certains de mes collègues, notamment de l'opposition. Je considère toujours que l'annexion de la Crimée constitue une violation très grave de principes internationaux constamment respectés depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, y compris par l'Union soviétique. En ce qui concerne le Donbass, il faut vraiment que les accords de Minsk soient appliqués, et par l'Ukraine, et par la Russie. Nous disons à nos interlocuteurs russes – nous l'avons fait, par exemple, lorsque nous avons reçu ici même mon homologue M. Pouchkov – que la Russie doit, elle aussi, remplir ses obligations à cet égard. Le pourrissement de la situation n'est dans l'intérêt de personne. La situation humanitaire devient désastreuse dans le Donbass. Il y a aussi des risques pour la sécurité, qui pourraient se répercuter au-delà du Donbass, dans le reste de l'Ukraine et en Russie, et contaminer l'ensemble de la région. Quelles que soient les différences de point de vue au sein de notre commission, nous tenons le même langage exigeant à nos invités russes.

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Monsieur le ministre, les Russes nous disent que la loi d'autonomie n'a été votée que pour une période de trois ans. Est-ce exact ?

Quelles que soient nos opinions politiques, nous nous accordons tous sur le fait que les accords de Minsk sont la bonne feuille de route, et qu'il n'est pas question de confier au Donbass des prérogatives en matière de politique internationale, laquelle doit rester du ressort de l'État.

Je pense que vous avez tort de diaboliser les visites en Crimée. Car c'est avec ces visites que, peut-être, le point de vue sur la situation évoluera progressivement. Pour le reste, chacun a son opinion. D'autre part, je remercie M. Gontcharenko d'avoir fait preuve de plus de modération que lorsqu'il est intervenu à la télévision. Je crois que chacun d'entre nous apprend au cours de sa carrière parlementaire.

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Pavlo Klimkine, ministre des Affaires étrangères de la République d'Ukraine

(Interprétation de l'ukrainien) La loi relative à l'autonomie du Donbass a été adoptée en 2014. C'est en accord avec la Russie que sa durée initiale avait été fixée à trois ans, celle-ci devant ensuite être prolongée. Les parties sont désormais d'accord sur le fait que cette loi ne pourra entrer en vigueur qu'à l'issue des élections.

En tant que ministre des affaires étrangères, je suis catégoriquement opposé aux visites en Crimée. Évidemment, il s'agit d'un choix politique qui relève de l'appréciation de chacun. Toutefois, ce ne sont pas seulement des visites dans un territoire occupé par la Russie, ce sont des visites dans un territoire où les gens disparaissent, sont arrêtés sans raison ou sont persécutés, parce qu'ils sont tatars, pro-ukrainiens ou chrétiens évangéliques. À ce jour, vingt-deux Tatars de Crimée ont disparu. La semaine dernière, dans la même journée, vingt-huit personnes ont été arrêtées parce qu'elles étaient sorties dans la rue pour commémorer la déportation du peuple tatar par Staline. Le majlis et les autres institutions représentatives des Tatars de Crimée sont interdits. En Crimée, les gens ont peur de se parler. Si vous y allez, vous cautionnez ce qui s'y passe. La question est non pas de savoir si l'on peut se rendre ou non dans des territoires occupés, mais de savoir si l'on défend ou non la cause des gens qui sont persécutés par le régime d'occupation russe.

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Merci beaucoup, monsieur le ministre, monsieur le coprésident, monsieur l'ambassadeur. Bon courage !

La séance est levée à dix heures trente.