Commission des affaires européennes

Réunion du 9 novembre 2016 à 8h45

Résumé de la réunion

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  • brexit
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  • mondialisation
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La réunion

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COMMISSION DES AFFAIRES EUROPÉENNES

Mercredi 9 novembre 2016

Présidence de Mme Danielle Auroi, Présidente de la Commission

La séance est ouverte à 8 h 45

I. Audition de M. Christian Lequesne, ancien directeur du Centre d'études et de recherches internationales et professeur de science politique à Sciences Po Paris, spécialiste des questions européennes, sur l'avenir de l'Union européenne

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Je vous remercie vivement d'avoir accepté notre invitation à participer à ce cycle d'auditions sur l'avenir de l'Europe. Nous sommes assez peu nombreux ce matin mais l'actualité politique américaine a sans doute conduit certains de nos collègues à veiller fort tard cette nuit.

Dans ce cycle d'auditions, nous avons une démarche prospective cherchant à connaitre l'analyse de professionnels éclairés et indépendants sur l'Union européenne. Votre regard de chercheur enrichira notre réflexion, entamée autour d'échanges similaires avec Enrico Letta et Luuk Van Middelaar. C'est une occasion de débattre librement, de prendre du recul, et de contribuer à tracer de nouvelles perspectives pour relancer l'Union.

Dans un récent article intitulé « Le Brexit n'est pas seulement une question britannique », vous avez écrit : « il faut bien qu'à un moment l'Europe retrouve le chemin de l'avenir en proposant un nouveau projet politique, par exemple autour d'une zone euro réformée ».

L'objectif de ce cycle d'auditions est justement de nourrir de tels projets !

Notre démarche suppose de réfléchir et d'échanger très librement. N'hésitez pas à dresser des perspectives ambitieuses, même si elles sont peu réalistes à court-terme : je crois que nous avons besoin aujourd'hui d'essayer de voir plus loin, de retrouver un sens, une perspective.

Vous avez également écrit sur l'intégration différenciée, et je sais que vous avez été auditionné par certains membres de notre commission sur le sujet.

À votre avis, doit-on envisager la suite de la construction européenne autour d'un noyau-dur d'États voulant aller plus loin ? –Une Europe des avant-gardes fait-elle sens ? Ne court-on pas le risque de créer une Europe « à la carte » ou « à deux vitesses » ? À ce titre, que pensez-vous de la contribution de la Fondation Bruegel proposant un « partenariat continental » qui permettrait de formaliser cette Union à deux vitesses ?

Dans un autre registre, quelle appréciation portez-vous sur l'évolution des liens entre la Pologne, la Hongrie et le reste de l'Union ? Comment peut-on renforcer la prise en compte des droits fondamentaux et de la démocratie au sein de l'Union ?

Et sur l'état du moteur franco-allemand ?

Pensez-vous qu'il soit possible, et surtout souhaitable, de procéder à de nouvelles réformes institutionnelles à moyen-terme ? Ou le nouveau souffle dont l'Union a tant besoin doit-il passer par d'autres types de réformes ? La feuille de route issue du sommet de Bratislava vous paraît-elle à la hauteur de la nécessaire refondation de l'Union ?

Comment approfondir la démocratie européenne, l' » espace politique européen », et quel rôle pour les parlements nationaux dans ce cadre ?

Je ne vais pas être plus longue, pour laisser le plus de temps possible au débat.

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Christian Lequesne

Quand j'ai accepté cette invitation, je ne savais pas que j'interviendrai le matin même des résultats des élections présidentielles américaines ! Il est assez tentant de faire un lien entre l'élection de Donald Trump et le vote en faveur du Brexit en Grande-Bretagne. Dans les deux cas, il s'agit d'une réaction d'une partie de la population laissée pour compte des évolutions économiques de ces vingt dernières années, qui se mobilise contre cette perte de statut ou d'identité et qui cherche à « faire payer » les membres de « l'establishment ». Ce rejet des élites, des privilégiés coupés du peuple, Donald Trump et le parti UKIP l'ont largement instrumentalisé.

Il y a quelques années, les réformes libérales paraissaient un gage pour l'avenir mais en réalité ces réformes n'ont pas eu les effets bénéfiques attendus et n'ont pas favorisé l'émergence de nouvelles classes moyennes, bien au contraire. La revue « NewStatesman » a récemment titré : « The closing of the liberal mind » que l'on peut traduire par la fermeture à l'esprit libéral. Le libéralisme ne se limitait pas aux questions économiques, il prônait aussi une société ouverte sur l'extérieur, multiculturelle, favorable aux libertés des personnes. Ces valeurs d'ouverture sont aujourd'hui rejetées.

Le Brexit intervient après une série de crises successives comme celles de 2008 ou de la zone euro mais grâce à des compromis, l'Union européenne avait réussi à franchir plusieurs étapes d'intégration. Le vote du Brexit ne correspond pas à une énième crise des partenaires européens, il risque de compromettre l'avenir même de la construction européenne qui est menacée d'un véritable délitement. Ce précédent renforce le sentiment anti européen et plusieurs Etats souhaitent à leur tour organiser des référendums comme au Pays Bas ou la part du peuple danois ou encore le mouvement « cinque stelle » italien, dont la contestation de la construction européenne est moins frontale.

Le premier ministre britannique a eu un discours très dur à Birmingham récemment mais elle s'adressait à des militants de son parti, alors qu'en réalité elle est bien consciente de la nécessité de faire des compromis pour trouver une solution de sortie qui fasse le moins de dommages possibles. La justice britannique a estimé que le Parlement devrait se prononcer sur la sortie de l'Union européenne. Le Gouvernement britannique a fait appel de cette décision, ce qui prolonge de facto la période transitoire. Le Parlement sera sans doute partisan d'une négociation longue qui pourrait se prolonger au-delà des échéances des futures élections européennes et devrait inciter à un « soft Brexit », avec une possibilité de trouver un compromis pour que le pays puisse continuer à avoir accès au marché intérieur.

Ce compromis est-il possible, est-il souhaitable ? Que penser de la proposition de la Fondation Bruegel qui suggère d'admettre la notion de quotas qui viendrait remplacer la liberté de circulation des personnes ? N'est-il pas dangereux de toucher aux quatre libertés fondamentales qui constituent l'identité même de la construction européenne ? Les États membres doivent transformer cette crise du Brexit en une occasion pour refonder le modèle européen et faire de cette menace une occasion de sursaut.

L'Europe différenciée est-elle une solution face à la montée des eurosceptiques ? L'idée de créer des cercles concentriques avec des États plus ou moins intégrées dans la construction européenne est une idée déjà ancienne, la CDU l'avait déjà proposé en 1994. Certains États dans le cercle le plus extérieur, construiraient un libre marché intérieur, ce cercle pouvant associer la Grande Bretagne ainsi que certains États actuellement candidats. Ce cercle ressemblerait à l'actuel espace économique européen qui associe aujourd'hui la Norvège, l'Islande et le Liechtenstein. Les contributions de ces États seraient réduites par rapport à ceux appartenant au premier cercle qui eux seraient beaucoup plus intégrés et rassemblerait les États appartenant à la zone euro et ceux qui aspirent à y entrer.

Cette organisation nécessiterait une réforme institutionnelle pour modifier les mécanismes de prise de décision.

Il y a quelques années les pays d'Europe centrale avaient beaucoup d'empressement à rejoindre la zone euro alors qu'aujourd'hui, au contraire, la Pologne par exemple considère que sa monnaie nationale l'a protégée par rapport à l'effet récessif de l'euro. L'Union européenne n'est plus aujourd'hui perçue d'abord comme un grand marché. On lui demande d'être un facteur de protection et on voudrait lui conférer certains attributs régaliens comme la défense contre le terrorisme, la gestion efficace des frontières extérieures, certains parlant même de politique de défense.

La difficulté avec ce mécanisme des cercles concentriques est de faire comprendre aux pays de l'Europe centrale qu'ils ont vocation de faire partie du premier cercle. De plus, aucun progrès notable dans l'organisation de l'UE ne pourra intervenir avant les échéances électorales en France et en Allemagne. L'opinion publique ne peut se satisfaire de cette idée d'Europe différenciée car il manque un discours politique mobilisateur.

Depuis le non français au référendum sur le traité constitutionnel européen, les politiques ont tendance à occulter les questions européennes qui restent gérées entre spécialistes sans contrôle démocratique. Il faudrait au contraire repolitiser le débat. Mattéo Renzi l'a bien compris même si ses déclarations sont parfois un peu populistes. La réorganisation institutionnelle ne doit pas apparaître comme une discussion entre experts. Elle doit être au service d'un projet d'avenir.

Trop longtemps les instances communautaires ont eu des positions réactives pour faire face aux crises comme ce fut encore le cas lors de la crise des réfugiés. Il faut changer de démarche et proposer un projet crédible qui aborde franchement les défis actuels. L'Union européenne doit s'interroger sur la possibilité de réguler les effets de la mondialisation alors que jusqu'à présent les opinions publiques considèrent que les politiques sont impuissants.

Ce doit être aussi l'occasion de bien expliquer que cette Europe différenciée n'est pas fondée sur une exclusion mais au contraire qu'elle permettra une intégration à un rythme spécifique à chacun pour permettre aux États membres de librement choisir leur mode de participation au projet européen.

Il faut aussi faire preuve de pédagogie pour faire comprendre l'originalité de la construction européenne qui n'est pas un projet libéral mais qui au contraire repose sur des mécanismes de régulation protecteurs comme dans la politique agricole commune ou la politique de cohésion des territoires. L'atout de l'Union européenne c'est justement d'être capable d'élaborer des compromis respectueux des intérêts de chaque État membre. Loin d'être une faiblesse cette capacité à élaborer des solutions de consensus est un véritable facteur de stabilité et de progrès.

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Merci beaucoup pour cet exposé qui soulève de nombreuses questions.

Votre introduction interrogeait des concepts fondamentaux, notamment la question de la gouvernance. La mondialisation soulève de plus en plus de questions et provoque de plus en plus de réactions voire de rejet, et ce qui vient de se passer aux États-Unis le montre. La mondialisation est-elle gouvernée ? Si oui, par qui ? Pour qui ? C'est la question des termes de l'échange. Je ne veux surtout pas tenir un discours bassement protectionniste, mais nous voyons bien, un peu partout, que les promoteurs et premiers gagnants de la mondialisation parlent au moins deux langues, sont les plus mobiles, les plus instruits. En revanche, il semblerait qu'il y a beaucoup de perdants, pas mobiles, pas instruits, qui sont donc demandeurs de proximité. Les termes de l'échange de la mondialisation ne participent-ils pas à l'énorme inquiétude actuelle ?

Vous employez le terme de désintégration s'agissant de l'Europe – je suis également très inquiet de ce risque -, mais le mot est-il bien choisi pour essayer de comprendre véritablement ce qui est en train de se passer ? N'y a-t-il pas au contraire une vraie demande de réintégration, notamment à l'intérieur de chaque pays, dans un modèle beaucoup plus fédéraliste, une demande de nouveaux repères dans cette gouvernance ? N'y a-t-il pas une contradiction entre un centralisme administratif manifeste en Europe et un fédéralisme politique beaucoup moins manifeste quand il s'agit de l'impuissance politique et encore une fois de la gouvernance ? Vous avez évoqué en des termes très intéressants le cas de M. Matteo Renzi, qui, à travers ce qu'il dit et que je ne partage pas toujours, semble combattre avant tout les administrations, plus que des politiques qui n'existeraient plus. Est-ce que l'on ne fait pas face à une exaspération démocratique contre une exagération administrative ? La question de l'échelle est probablement majeure : est-ce que la politique est capable de gouverner n'importe quelle échelle – nationale, européenne, mondiale ? -, ou se retrouve-t-elle contrainte, au-dessus d'une certaine taille, à s'en remettre à l'expertise administrative, en sacrifiant son essence, c'est-à-dire sa capacité à exprimer les demandes du peuple et à véritablement gouverner ? La politique est-elle condamnée à n'être plus qu'une relation à l'extérieur, à l'étranger, que ce soit par la voie diplomatique ou celle du conflit ? Finalement, peut-on encore faire de la politique dans le contexte d'aujourd'hui ?

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Le résultat des élections américaines ce matin montre en effet qu'il y a une véritable exaspération de nos peuples. Je suis fils d'agriculteur, et élu du département du Gard : je sais à quel point l'Union européenne et ses aides ont permis la survie du Midi viticole ! Pourtant, quand je discute avec les jeunes agriculteurs de ma circonscription, je vois qu'ils pensent que l'Union européenne, c'est seulement des contraintes et des problèmes. Ils ne se rendent pas compte que notre agriculture ne s'en serait jamais sortie sans elle. Les politiques sont sans doute tous responsables de cette situation, à force de faire de l'Europe un bouc émissaire et de ne pas prendre nos responsabilités.

M. Lequesne, je pense que vous avez totalement raison lorsque vous parlez des cercles concentriques et de la nécessité de se recentrer sur un noyau dur. Je pense que nous sommes allés trop vite dans l'élargissement de l'Union. Ce n'est plus possible de prendre des décisions à vingt-sept ou vingt-huit ! Les pays candidats à l'adhésion et les nouveaux entrants attendent que l'Union leur apporte la prospérité et une amélioration de leurs conditions de vie, mais l'idée d'une Europe de la paix et de la sécurité semble oubliée. Où est l'Europe de la défense ? La France est très isolée dans le maintien de la paix dans le monde. Où est la solidarité en Europe aujourd'hui ? Je pense que le Brexit n'est qu'un premier pas, et va donner des idées à d'autres.

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Il y a des raisons d'être inquiets. Quand je regarde la carte électorale des États-Unis, ce qui me frappe avant tout, c'est l'importance du vote en faveur du futur président dans les zones rurales. Comme M. William Dumas, je suis élue d'un département rural, les Pyrénées-Atlantiques. Ce département a lui aussi bénéficié de la politique agricole commune et des fonds structurels, et pourtant, nos citoyens ont le sentiment d'être des citoyens de « seconde zone ».

J'adhère à votre idée de noyau central, comme beaucoup de politiques, mais j'ai bien peur que ne nous puissions pas y faire adhérer la population. Ce que nos citoyens voient de l'Union européenne, c'est des contraintes, des déclarations à faire à n'en plus finir : un agriculteur de ma circonscription n'a pas pu toucher ses aides car il a fait sa déclaration avec dix minutes de retard, il n'avait pas internet depuis dix jours…

L'adhésion de la population est pourtant primordiale.

Est-ce que les institutions européennes étaient vraiment adaptées aux élargissements ? Même si nous mettons en place un noyau dur et plusieurs cercles, j'ai peur que le fonctionnement de nos institutions ne soit toujours pas le bon. Il y a un vrai problème de démocratie et l'Europe n'est pas lisible. Personne n'est capable d'expliquer simplement aux citoyens comment fonctionne l'Europe et comment sont prises les décisions ! Commission, Conseil, règlements, directives… C'est très compliqué pour tout le monde, ce qui est problématique !

Sur le Brexit, je pense que les conditions de la sortie du Royaume-Uni seront primordiales : je sais que je vais dire est dur, mais si le Royaume-Uni sort de l'Union européenne dans des conditions trop avantageuses, comment expliquera-t-on aux Français, aux Espagnols, aux Grecs, qui vivent les politiques décidées à Bruxelles soit comme des contraintes soit comme de l'austérité, que les Britanniques arrivent à obtenir ce qu'ils veulent ? Cela sera très compliqué.

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Les citoyens ont l'impression, peut-être pas totalement à tort, que les élites politiques et administratives sont inféodées aux grands décideurs économiques, aux multinationales, aux paradis fiscaux. Si l'Union doit faire quelque chose, c'est aujourd'hui interroger une certaine forme de mondialisation. Le « noyau dur » que nous appelons de nos voeux doit se faire autour de la question sociale. Le social est au moins autant une priorité que la défense et la sécurité !

Le budget européen est devenu beaucoup trop faible et très dépendant des contributions des Etats. La taxe sur les transactions financières ne pourrait-elle pas être un petit signal positif et concret ?

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Christian Lequesne

M. Piron, vous avez absolument raison de poser la question du gouvernement de la mondialisation. Mais je voudrais vous dire tout de suite que l'on emploie toujours le mot de gouvernance de la mondialisation et non pas de gouvernement de la mondialisation, et ce n'est pas pour rien : il n'y a probablement jamais eu de gouvernement de la mondialisation. Le gouvernement que nous connaissons et que nous acceptons comme légitime c'est le gouvernement des États. Mais l'Union européenne a été une des seules expériences d'un gouvernement qui dépasserait les États, et je pense que nous ne devons pas abandonner cette expérience. Je ne crois pas à un gouvernement mondial mais je crois à une forme de gouvernement européen, car il faut réguler les flux, réguler la mondialisation. Bien des populations pensent aujourd'hui que l'Europe est le cheval de Troie de la mondialisation, et il faut au contraire rappeler que l'Europe est l'un des moyens de réguler la mondialisation par les institutions.

Vous avez évoqué l'exaspération administrative, et vous avez raison, elle est présente dans de nombreuses démocraties occidentales. En même temps, je constate qu'aujourd'hui bien des gens veulent plus de redistribution, et cela passe quand même par une organisation administrative ! Il y a une contradiction entre ces demandes. Toutefois, dans le cadre spécifiquement français, il y a sans doute un problème particulier lié au fait que sous la Vème République, l'administration a constitué un fort vivier de recrutement du personnel politique. Les électeurs ont souvent le sentiment que les responsables politiques viennent essentiellement du monde administratif. Une plus grande diversité du personnel politique me semble en effet indispensable.

Sur la question des élargissements posée par M. Dumas et Mme Chabanne, je pense comme vous que l'on a élargi sans approfondissement préalable. Nous avons vraiment raté une occasion avec l'initiative Schauble-Lamers de 1994, qui disait justement qu'il fallait approfondir l'Union économique afin de préparer l'ouverture à la Grande Europe qui semblait inéluctable. Nous n'avons pas réussi à nous mettre d'accord sur l'approfondissement, mais nous avions des obligations morales envers les pays d'Europe centrale et orientale qui frappaient à la porte de l'Union et qui souhaitaient être réintégrés dans la famille démocratique : il était donc difficile de dire non aux élargissements, mais ce séquençage n'a pas été idéal.

Sur la question de l'Europe sociale, je vous aurai répondu il y a quelques années qu'au vu des différences entre les systèmes sociaux européens et entre les attentes des différents Etats membres, la construction d'une telle Europe sociale était difficile et probablement utopique. Mais aujourd'hui on sent tout de même que les demandes dans le domaine social, à la fois en termes de régulation et de redistribution, se rapprochent. Mais au préalable, il faudra bien réfléchir à la répartition des compétences entre le niveau social et le niveau national. Il faudra aussi un véritable budget européen, car nous n'avons pas construit l'Europe pour faire de la redistribution mais pour faire de la régulation ! Ce ne sera pas facile, car le contexte actuel n'est pas forcément favorable à l'augmentation des impôts…

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On a longtemps pensé que l'Union économique induirait automatiquement et naturellement une harmonisation sociale et politique, mais on voit aujourd'hui que ce n'est pas le cas. Donc sur ces questions sociales, on en vient rapidement à penser qu'il faut un noyau dur si nous voulons y arriver car ce sera trop difficile à vingt-sept. Mais dès que l'on parle de noyau dur, on envoie un message de délitement de l'Europe ! Comment sortir de ce paradoxe ? Il faudrait sans doute avoir un discours plus clair autour de la convergence. C'est très net sur la question des travailleurs détachés. Parler de l'Europe à plusieurs vitesses, c'est aussi potentiellement tuer l'idée européenne et renoncer à la convergence. La seule réponse que l'on peut apporter aujourd'hui, c'est la convergence sociale.

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D'ailleurs, les nouveaux entrants sont très inquiets de cette idée d'une Europe en plusieurs cercles.

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Christian Lequesne

Comment penser le projet de la différenciation sans donner l'impression d'exclure des États membres et de créer une première et une deuxième classe ? Cette question est centrale. Je pense que le discours politique doit souligner que dans un tel système, tous les États auront vocation à rejoindre le noyau dur, même si ce n'est pas possible dans l'immédiat. Il faut aussi penser à tous les États qui ne veulent pas rejoindre ce noyau dur. La question que vous posez, vous la posez aussi à partir de votre expérience française, mais si on prend la Grande-Bretagne ou le Danemark, les électeurs sont dans une posture différente et rejettent notamment l'euro que nous considérons comme faisant partie du noyau dur. Ces électeurs veulent que l'on respecte leur choix de ne pas faire partie de la locomotive la plus rapide. Il faut dans le même temps rappeler qu'ils sont les bienvenus et que l'objectif est in fine que nous convergions tous ensemble. C'est à mon avis le seul moyen d'articuler un discours crédible sur cette question de la différenciation.

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Je vous remercie d'avoir soulevé autant de nouvelles questions et de la qualité des débats que vous nous avez permis d'avoir.

II. Nomination de rapporteurs d'information

Sur proposition de la Présidente Danielle Auroi, la Commission a nommé des rapporteurs d'information :

- Mme Nathalie Chabanne et M. André Schneider, sur le paquet « Énergie ».

La séance est levée à 9 h 45.