Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Réunion du 16 janvier 2013 à 16h30

Résumé de la réunion

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La réunion

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La séance est ouverte à 16 heures 30.

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, président, puis de M. Dominique Raimbourg, vice-président, puis de M. Jean-Jacques Urvoas, président

La Commission poursuit l'examen du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe (n° 344) (M. Erwann Binet, rapporteur)

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Mes chers collègues, il me faudra vous quitter à dix-sept heures pour aller assister aux voeux du Président de la République ; M. Dominique Raimbourg me suppléera provisoirement.

Nous poursuivons donc l'examen du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe.

Après l'article 1er (suite) :

La Commission est saisie de plusieurs amendements portant article additionnel après l'article 1er.

Elle examine d'abord l'amendement CL 468 de M. Sergio Coronado et l'amendement CL 511 du rapporteur, qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

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Pour remédier aux situations difficiles qu'ont décrites plusieurs familles homoparentales auditionnées, nous proposons de compléter le code civil pour garantir la possession d'état et la filiation dans un couple de même sexe dès lors que la personne a été traitée par celui ou ceux dont on la dit issue comme son enfant et qu'elle-même les a traités comme son ou ses parents. Je constate que l'amendement du rapporteur est rédigé dans le même esprit ; il n'est pas impossible que je m'y rallie.

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L'amendement CL 511 va dans le même sens, mais je vais le retirer. Nous souhaitons apporter aux familles homoparentales aujourd'hui séparées la solution que la loi ne leur donnera pas. Toutefois, la procédure juridique qui permet d'établir la possession d'état étant particulièrement lourde, je souhaite disposer de davantage de temps pour apprécier si cette solution est la plus judicieuse. L'essentiel est de trouver le meilleur moyen de parvenir à nos fins avant le débat en séance publique.

Les amendements CL 468 et CL 511 sont retirés.

La Commission est saisie de l'amendement CL 138 de M. Jean-Frédéric Poisson et de l'amendement CL 465 de M. Sergio Coronado, qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.

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Avec l'amendement CL 138, nous tenons à lever toute ambiguïté en précisant que seuls les couples de personnes de sexe différent, mariés ou vivant en concubinage, peuvent recourir à une assistance médicale à la procréation (AMP).

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L'amendement CL 465 est un amendement de coordination avec l'amendement relatif à l'ouverture de l'assistance médicale à la procréation aux couples de femmes, au cas où un amendement en ce sens serait adopté.

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L'occasion m'est donnée de formuler plusieurs remarques à propos de l'AMP, sujet amplement débattu. Le droit comparé montre que tous les pays – Angleterre, Belgique, Canada, Danemark, Espagne, États-Unis, Norvège, Pays-Bas, Suède – ayant ouvert le mariage et l'adoption aux couples de même sexe ont également ouvert l'accès à l'AMP aux couples de femmes. D'autres pays tels la Grèce, la Finlande, Israël et la Roumanie, qui ne leur ont pas ouvert le mariage, donné accès à l'AMP aux femmes seules. Tous les pays qui ont ouvert le mariage et l'adoption aux couples de même sexe permettent aussi le recours à l'AMP aux couples de femmes.

Les enjeux sont multiples. J'évoquerai pour commencer l'égalité. L'ouverture du mariage aux couples de même sexe leur donne une nouvelle liberté ; l'extension du droit à l'AMP s'inscrit dans la même logique et le principe d'égalité impose notamment que les couples de femmes mariées, qui ne peuvent procréer, puissent recourir à l'AMP.

Il y a aussi nécessité de cohérence. En dehors des cas d'adoption d'un enfant issu d'une précédente union hétérosexuelle, les possibilités d'adoption pour les couples de même sexe seront vraisemblablement restreintes. Mais l'on sait que les couples de femmes ont accès à l'AMP chez nos voisins belges et espagnols. Une délégation de notre Commission a rencontré les responsables de l'unité de PMA de l'Hôpital Érasme de Bruxelles ; les femmes françaises s'y rendent en masse, elles vont aussi en Espagne. Le projet de loi va permettre à la conjointe de ces femmes, qui sont aujourd'hui les seuls parents légitimement reconnus, d'adopter l'enfant ainsi conçu, mais on ne peut pas imaginer qu'il tolère l'adoption d'enfants dont il ne prévoit pas la naissance.

Par ailleurs, les médecins que nous avons consultés ont mis en avant un enjeu de santé publique. L'ouverture de l'AMP aux couples de femmes est nécessaire pour faire cesser le risque sanitaire induit par l'interdiction qui leur est actuellement faite d'y recourir en France. L'AMP est un protocole médical très lourd et le suivi à distance accroît les risques courus par les femmes qui s'y soumettent. D'autres risques, tout aussi sérieux, menacent celles qui recourent aux inséminations « artisanales », qu'elles soient réalisées avec du sperme acheté sur Internet puis livré congelé ou qu'elles soient le fruit de rencontres d'un soir, avec les risques associés de contamination par des maladies sexuellement transmissibles que cela comporte. Autrement dit, des risques sanitaires menacent aussi bien les femmes contraintes de se rendre à l'étranger pour se soumettre à une AMP que celles qui, n'en ayant pas les moyens, recourent à des méthodes dites « artisanales » peu sûres. Au cours des années 1970 les pouvoirs publics n'ont pu ignorer les risques sanitaires que couraient les femmes contraintes de se rendre à l'étranger pour subir une interruption de grossesse ; nous ne pouvons pas davantage ignorer les risques que courent aujourd'hui les couples de femmes qui souhaitent avoir un enfant.

Le principal argument avancé par l'opposition pour refuser l'AMP aux couples de femmes, c'est qu'ouvrir ce droit entraînerait l'ouverture du droit à la gestation pour autrui (GPA). AMP et GPA sont deux sujets distincts, qui ont toujours été considérés comme tels dans cette enceinte. La question a été tranchée il y a des années : l'AMP est légale en France, la GPA ne l'est pas, et nous n'avons aucune intention de revenir sur ce point.

Je considère cependant que l'ouverture de l'AMP aux couples de femmes ne doit pas avoir pour véhicule ce projet relatif au mariage, mais le projet de loi relatif à la famille récemment annoncé par le Premier ministre. La précédente majorité avait fait la même analyse en 2011, comme en atteste le rapport rédigé, au nom de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la bioéthique, par M. Jean Leonetti, et dont je vous rappelle les termes : « Les débats sur l'accès à l'AMP ont également porté sur les couples homosexuels. Cette option a été écartée pour plusieurs raisons : tout d'abord, cette question dépasse largement le cadre d'une loi de bioéthique. Comme l'indique le Conseil d'État dans son étude sur la révision des lois de bioéthique, même si la demande d'une meilleure reconnaissance de l'homoparentalité s'accroît et si la question de l'accès des couples de femmes à l'AMP est posée, son émergence à l'occasion du réexamen des lois de bioéthique ne doit pas faire oublier que cette question relève fondamentalement du droit de la famille. »

Aborder la question dans le texte consacré à la famille annoncé par le Gouvernement permettra d'ouvrir l'AMP à tous les couples de femmes, mariées ou non mariées. Le principe d'égalité impose que l'accès à l'AMP soit ouvert aux couples à raison de leur infertilité et non de leur état marital, et donc à tous les couples de femmes, qu'elles soient mariées ou qu'elles ne le soient pas.

En conclusion, je suis résolument favorable à l'ouverture de l'AMP aux couples de femmes, mais pas dans le cadre de ce projet. Le Gouvernement s'étant engagé de la manière la plus claire sur le périmètre et sur le calendrier de l'ouverture de ce nouveau droit aux femmes, je donne un avis défavorable aux deux amendements.

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Je me sens tenu de souligner que la PMA n'est pas un acte médical banal, que toutes les femmes ne peuvent y être soumises et que la procédure a un coût financier non négligeable.

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Nous vous avons entendu, monsieur le rapporteur, distinguer l'AMP, à laquelle vous êtes favorable, de la GPA, que vous refusez. Toutefois, vous donnez comme argument principal à l'ouverture de l'AMP aux couples de femmes que l'on ne peut ignorer les risques qu'elles courent en se rendant à l'étranger pour se soumettre à une pratique qui leur est interdite en France ; on peut user du même argument pour plaider en faveur de la GPA, vous le savez.

Avec une grande franchise, vous avez souligné que la PMA telle que vous l'envisagez serait très différente de celle, fondée sur l'infertilité médicale, aujourd'hui permise par la loi : il faudrait changer sa définition, et l'on passerait à une procréation au moins autant socialement que médicalement assistée.

Quant à invoquer le principe d'égalité pour expliquer qu'il s'impose d'accorder le droit à la PMA aux couples de femmes comme il l'est aux couples hétérosexuels, cela ne tient en aucune manière : les situations ne sont comparables en rien. Dans le second cas, le recours à la PMA est prévu par la loi de bioéthique en raison d'une infertilité ; dans le premier cas, il n'y a aucune pathologie, tout est lié à la constitution même du couple. Pousser ce raisonnement à son terme aboutirait par exemple à étendre la PMA à des couples hétérosexuels indépendamment de leur âge ou, peut-être, à des choix d'opportunité. Vous justifiez l'extension de la PMA par « la liberté d'avoir un enfant » ; mais, comme pour le mariage, cette liberté emporte une responsabilité.

Vous nous avez enfin parlé de cohérence. Même si le Gouvernement et la majorité ont choisi de scinder la question, nous voulions davantage de clarté au sujet de la stratégie envisagée à propos de l'AMP. Je constate que nous cheminons, et je salue l'honnêteté intellectuelle avec laquelle le rapporteur a reconnu que, sans la PMA, le projet n'est pas cohérent, ce qui peut poser un problème de constitutionnalité. Les auditions l'ont montré : il n'y aura pas d'adoptions internationales, et très peu en France. Pour l'essentiel, la filiation ouverte par la loi se fera donc par la régularisation de PMA et de GPA transgressives commises à l'étranger. La force réelle du texte découlerait donc d'amendements que vous déposeriez pour étendre la PMA. Nous serions tout aussi contre, mais au moins le projet serait-il cohérent. Il ne l'est pas, vous l'avez reconnu, ce qui ne va pas sans poser des questions sur sa solidité juridique.

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Je souhaite rappeler la position du groupe socialiste. À la fin de l'année 2012, nous avons annoncé le dépôt d'un amendement sur la PMA. Le rapporteur a expliqué pourquoi nous voulons que la question soit traitée en conséquence directe du projet ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de même sexe : pour assurer, dans un calendrier resserré, l'égalité des droits entre couples hétérosexuels et couples homosexuels en matière d'accès à la PMA, tout en évitant l'hypocrisie par laquelle l'État permettrait l'adoption de l'enfant de la conjointe en feignant d'ignorer les conditions de sa conception.

Le Gouvernement ayant proposé un calendrier qui nous convient, selon lequel le projet relatif à l'ouverture du mariage aux couples de même sexe et le projet relatif à la famille qui traitera avec exhaustivité de la PMA pourront être adoptés de manière presque concomitante, nous avons décidé de ne pas déposer un amendement qui, pour éviter le risque de cavalier législatif, aurait concerné uniquement les couples de femmes mariées, une limitation très peu satisfaisante. Il nous paraît par ailleurs de meilleure pratique de traiter cette question dans le cadre d'un projet spécifique plutôt que par le biais d'un amendement parlementaire. Le groupe SRC a donc bien l'intention d'ouvrir l'accès à la PMA à tous les couples, quels que soient leur orientation sexuelle et leur statut marital, mais nous préférons le faire dans le cadre du prochain projet de loi relatif à la famille.

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Contrairement à ce qui m'a été dit hier, c'est donc bien le souhait d'une stricte égalité entre tous les couples qui fonde le projet d'accès des couples de femmes à l'AMP. Je rappelle par ailleurs que l'article L. 2141-2 du code de la santé publique, qui règle les conditions d'accès à l'AMP, pose aussi comme condition la stabilité du couple – c'est un autre problème. Comme mon collègue Hervé Mariton, je m'interroge sur la constitutionnalité du texte en l'état ; il serait cocasse que le Conseil constitutionnel le censure parce que le groupe socialiste n'est pas allé au bout de sa démarche…

Il nous a fallu attendre aujourd'hui pour entendre confirmer ce que nous disions depuis des semaines, cependant que l'on nous accusait de mensonges et d'élucubrations : ce projet n'a de cohérence que si l'accès à l'AMP est permis à tous les couples — et, bien entendu, que vous le souhaitiez ou non, plus tard, le dispositif sera complété par la GPA.

Enfin, j'ai du mal à admettre que la loi serve à régulariser des illégalités. Au motif que des femmes vont à l'étranger se soumettre à des protocoles d'AMP parce qu'elles ne peuvent le faire en France, il faut, nous explique-t-on, légiférer. Ce n'est pas la conception que je me fais de l'écriture de la loi. Autant dire que je ne partage pas l'avis du rapporteur, ce qui explique l'amendement.

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Mme Corinne Narassiguin ayant exprimé le point de vue du groupe socialiste, je me limiterai à quelques brèves remarques complémentaires. M. Hervé Mariton l'a reconnu, ouvrir aux couples de même sexe le mariage et l'adoption, mais pas la PMA, serait manquer de cohérence ; je me félicite qu'il appuie notre démarche. La réalité, les auditions l'ont montré, c'est que des femmes mettent leur santé en péril par des PMA « artisanales », dont la multiplication conduit à un commerce florissant, favorisé par Internet. Des femmes qui n'ont pas l'argent nécessaire pour payer dix fois un billet de train entre la France et la Belgique ou l'Espagne peuvent ainsi se faire livrer des paillettes de sperme congelé du monde entier et mettre en danger leur santé et celle du futur enfant pour satisfaire un désir de maternité.

Nous ne souhaitons pas fermer les yeux sur cette réalité. Dès que le Gouvernement a présenté ce projet de loi, les socialistes ont déclaré, par l'intermédiaire du président du groupe, qu'ils souhaitaient, par souci de cohérence, que l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de personnes de même sexe s'accompagne de l'ouverture de la PMA aux couples de femmes.

Corinne Narassiguin vient de rappeler les raisons qui nous ont conduits à retirer notre amendement et à renvoyer la question à l'examen du projet de loi sur la famille. Ce texte sera présenté au conseil des ministres en mars et inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée avant la fin de la session parlementaire ; il devrait donc être adopté avant la fin de l'année, concomitamment au présent texte sur le mariage.

Cela satisfera une revendication que tous les pays qui ont ouvert le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe ont intégrée, avec le soutien des partis conservateurs – à deux exceptions près. Dans la plupart de ces pays, ces avancées ont donc été obtenues à l'unanimité ou à une très large majorité. On nous annonce le bouleversement de la notion de famille, voire la ruine de la société française, mais ces exemples plus ou moins proches de nos frontières montrent qu'il faut cesser d'agiter des épouvantails !

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Vous venez de faire l'aveu que ce projet n'était pas cohérent : si l'on permet le mariage, on permet l'adoption et l'on devrait permettre l'AMP ; et si le texte ne le prévoit pas, c'est pour des raisons politiques internes au groupe socialiste.

Quels seront les critères retenus pour accéder à l'AMP ? La stabilité du couple sera-t-elle prise en compte ? Si la condition de vie commune d'une durée d'au moins deux ans a été supprimée par la nouvelle loi relative à la bioéthique, c'est en raison de la lourdeur de la démarche médicale ; mais dès lors qu'il s'agit d'une infertilité « sociale », il faudrait que des critères de stabilité entrent en ligne de compte.

Vous avez dit, monsieur le rapporteur, que l'on ne pouvait pas tolérer l'adoption d'enfants dont on n'aurait pas prévu la naissance. Pourriez-vous préciser le sens de ce propos ?

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La majorité et l'opposition semblent s'accorder sur la cohérence qu'il y aurait eu à inclure dans le même texte l'ouverture du mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe et l'accès à la PMA pour les couples de femmes. Bien que je regrette les hésitations du Gouvernement en la matière, j'ai pris acte des engagements du rapporteur ; néanmoins, je souhaiterais que Mme la ministre s'exprime devant l'ensemble de la représentation nationale, car il n'est pas souhaitable de donner l'impression d'un dialogue entre l'exécutif et le seul parti majoritaire.

La question de la filiation provoque entre nous un désaccord d'ordre philosophique. Vous pensez que la filiation est une affaire naturelle ; moi, je la conçois comme un lien juridique, qui est souvent, mais pas toujours, la transposition de l'engendrement biologique. Je ne pense pas que les règles de filiation reproduisent à l'identique celles de la nature. Depuis 1966, l'adoption est ouverte aux célibataires ; l'accouchement sous X met au monde un enfant sans filiation maternelle ; le législateur a inscrit dans le code civil des règles de filiation qui ne correspondent pas à l'engendrement biologique. Je m'étonne que l'opposition se mobilise aujourd'hui sur des questions qui ne datent pas d'hier !

Je voudrais, pour conclure, revenir sur le recours à la PMA par des couples de femmes. Il ne s'agit pas seulement de « bébés Thalys » ; cette pratique est courante en France, dans les centres d'étude et de conservation des oeufs et du sperme humains (CECOS), avec la « complicité » des médecins ; le recours à une procréation médicalement assistée dite « artisanale » ne comporte pas seulement des risques pour la santé publique : il est interdit, et punissable. Bref, pour reprendre les mots du président, j'invite la représentation nationale à quitter les mondes parallèles et à affronter la réalité du monde dans lequel nous vivons.

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Au-delà de la question de principe, la PMA pose des problèmes techniques : qui doit-elle concerner ? comment la réaliser ? qui doit payer ? Nous trouvant confrontés à ces questions au moment de rédiger notre amendement, nous avons jugé que ce n'était pas la bonne méthode pour traiter du sujet, et qu'une réflexion approfondie était nécessaire. C'est pourquoi nous avons décidé de procéder en deux temps. Aujourd'hui, il est question du mariage et de l'adoption ; la suite logique, qui viendra dans quelques mois, sera l'ouverture de la PMA. Nous en rediscuterons à ce moment-là.

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Le groupe Radical, républicain, démocrate et progressiste ne peut être qu'étonné de ces soubresauts, qui apportent une certaine confusion dans un domaine où nous n'en avions pas besoin. En conséquence, nous avons décidé de nous en remettre à l'avis de Mme la garde des Sceaux, qui incarne mieux que quiconque la sagesse républicaine.

Nous avons également décidé d'auditionner le professeur René Frydman, dont chacun sait le rôle éminent qu'il a joué en matière de PMA. Quelque 200 000 enfants sont déjà nés par PMA et environ 20 000 continuent à naître chaque année grâce à ces techniques. Pourtant, les moyens qui leur sont alloués sont très réduits et il faut compter au minimum deux à trois ans d'attente pour pouvoir y avoir recours. Le professeur Frydman estime que la situation de la recherche sur l'embryon est insatisfaisante et que son développement serait plus important que des mesures sociétales visant telle ou telle catégorie. Selon lui, l'ouverture de la PMA devrait répondre à des problèmes essentiellement d'ordre médical ; le don d'ovocytes doit être plus important, faute de quoi le nombre de personnes partant à l'étranger – actuellement de 8 000 – ira en augmentant.

Le texte initial du Gouvernement était satisfaisant et il ne fallait pas y toucher. L'amendement du groupe socialiste aurait jeté un trouble considérable. Quant à la nouvelle loi, elle devrait, à mon sens, porter sur la filiation, plutôt que sur la famille, de manière à éviter l'expression de certains fantasmes autour du symbole familial.

Quoi qu'il en soit, une étude d'impact approfondie sera nécessaire. Certains députés sont sensibles à ces questions, mais de nombreux autres collègues sont réticents à la PMA ; dans mon groupe, une large majorité y est opposée. Voilà pourquoi nous nous en rapportons à la sagesse de Mme la garde des Sceaux.

Présidence de M. Dominique Raimbourg, vice-président de la Commission

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Pourquoi avez-vous prévu deux projets de loi, plutôt qu'un seul et même texte ? Pour la clarté de nos débats, c'eût été préférable !

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La gauche refuse les réalités. Certes, le progrès technique permet d'en gommer certaines, ou du moins de les atténuer. Mais la gauche veut bâtir un autre monde, un monde de rêve, où tout le monde s'aimerait, pourrait faire ce qu'il veut, notamment avoir des enfants. Il n'est pas interdit de rêver, c'est parfois même un facteur de progrès, mais n'oublions pas que, tôt ou tard, les réalités se rappellent à vous – avec brutalité.

Ce monde de rêve consomme beaucoup d'argent. Or, dans le monde réel, la pauvreté se développe à grande vitesse. Rêver à un monde où l'on pourrait faire ce que l'on veut grâce à la technique est amusant, mais ce n'est guère raisonnable.

Certains malades ont besoin de reins artificiels, mais ne peuvent en obtenir : voilà qui me semble autrement grave. Quatorze pays, sur cent quatre-vingt-cinq, ont institué le mariage homosexuel. Il faudra attendre un temps assez long avant d'en connaître l'impact réel sur la société. C'est pourquoi j'invoque à nouveau le principe de précaution ; il est dangereux de nier la nature, car elle se venge. Et il convient de dominer ses rêves, si l'on ne veut pas qu'ils nous tuent.

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Ce n'est pas parce qu'une technique est possible que l'on doit nécessairement l'appliquer : « science sans conscience n'est que ruine de l'âme » – mais vous me répondrez que, dans cette enceinte, l'âme n'a que peu à faire.

L'égalité n'est pas la similitude, et il importe de protéger la composante biologique de la filiation. Accepter la PMA, c'est à terme accepter la gestation pour autrui : on ne peut pas envisager d'accorder la PMA aux couples de femmes sans que cela constitue ipso facto une discrimination à l'égard des couples d'hommes. Il convient de lutter contre cet engrenage ; c'est pourquoi je soutiens l'amendement CL 138.

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Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Enfin, nous entrons dans le concret ! Non, nous n'avons pas la volonté de bâtir un autre monde : nous prenons le monde tel qu'il est, tel que nos concitoyens le définissent. Force est de constater que la filiation ne se réduit pas aujourd'hui à la filiation biologique, et que cela n'a rien à voir avec l'homosexualité. On prend prétexte de la loi visant à ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe pour aborder des questions qui concernent tous les couples, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels.

C'est pour cette raison que nous sommes conduits à rédiger deux projets de loi : le premier répond à l'engagement pris par François Hollande d'ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe, tandis que le second s'adressera indifféremment aux familles hétéroparentales et aux familles homoparentales. Vos échanges sur l'assistance médicale à la procréation permettent d'ouvrir un débat qui se poursuivra ultérieurement, mais ils sortent du cadre strict du présent projet de loi.

L'autre raison qui rend nécessaire un second texte, c'est qu'on relève des incohérences dans le code civil. Ainsi, l'adoption et la PMA ne sont pas ouvertes aux mêmes couples. Le code civil s'étant constitué par étapes, il peut renfermer des sources de traitement inégalitaire.

L'adoption internationale est actuellement en fort recul. Je trouve positif que les pays d'origine, parce qu'ils se développent économiquement, demandent à leurs ressortissants d'être les premiers adoptants : cela me semble une bonne chose du point de vue des droits de l'enfant. Mais l'ouverture de l'adoption aux couples de personnes de même sexe mariés vise également à apporter une sécurité juridique à des enfants qui sont aujourd'hui élevés par un parent biologique et par un deuxième parent, qui ne dispose d'aucune reconnaissance officielle.

Enfin, filiation et famille me semblent indissociablement liées ; je ne vois aucun antagonisme entre les deux. Sans filiation, en quoi consisterait la famille ?

Quoi qu'il en soit, nous aurons l'occasion de poursuivre cette discussion lors de l'examen du deuxième projet de loi ; le débat sur la PMA y trouvera naturellement sa place.

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Madame la ministre, j'ai du mal à vous comprendre. Vous dites que le Gouvernement n'est pas favorable à un amendement sur la PMA, car celle-ci concerne d'autres catégories que celles visées par le texte. Je suis d'accord, mais votre argument devrait également être valable pour l'adoption !

Sur le fond, quelle est la position du Gouvernement ? Est-il, oui ou non, favorable à l'ouverture de la PMA aux couples homosexuels ?

Vous avez raison : il y a, en France et à l'étranger, de moins en moins d'enfants à adopter. Dans ces conditions, il semble paradoxal de vouloir augmenter le nombre de familles susceptibles de le faire – même si le nombre de couples homosexuels est très réduit au regard du nombre de couples hétérosexuels –, et cela d'autant plus que seuls vingt États dans le monde acceptent l'adoption d'enfants par des couples homosexuels.

Bref, vous manquez de pragmatisme. Ce n'est pas tout d'ouvrir des droits : encore faut-il qu'ils puissent être satisfaits !

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L'adoption et son corollaire, la PMA : tel est en effet notre principal point de friction, pour les raisons que vient de rappeler Charles de Courson. Sans reprendre les arguments pour et contre, je vous invite à remettre le débat en perspective. N'oublions jamais que la science évolue, de sorte que les décisions que nous prenons aujourd'hui pourraient nous embarrasser dans un avenir qui n'est pas si éloigné. Ainsi, dans deux ou trois ans, il sera possible de concevoir un enfant doté du bagage génétique de deux femmes. Si nous étendons aujourd'hui l'accès à la PMA en partant du principe que l'enfant à naître est issu d'un homme et d'une femme, comment pourrons-nous refuser à deux femmes la possibilité d'une PMA entre elles, au nom de leur droit à avoir un enfant dont elles seront sûres qu'il est le leur, dès lors que la technique le permettra ? Mais le politique ne doit-il pas limiter l'application de la science ? Voilà notamment pourquoi la question de la PMA est si essentielle.

On dit que la loi doit s'adapter à l'évolution des moeurs, mais qui serait d'accord pour supprimer l'obligation de fidélité de l'article 212 du code civil au motif que l'adultère est, si j'ose dire, un sport national ?

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La question essentielle de l'évolution scientifique, posée lors des auditions, est restée sans réponse. Quelle sera la position de la majorité et du Gouvernement à propos d'un enfant qui serait doté du patrimoine génétique de deux hommes ou de deux femmes ? Nous ne pouvons nous prononcer sur le présent texte sans en avoir la moindre idée. Cette perspective n'a rien d'une fiction, ni du « raisonnement raëlien » évoqué hier par la ministre : elle repose sur des considérations scientifiques solides.

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Monsieur Mariton, vous n'aviez pas la parole. Je vous ai laissé la prendre par distraction et je le regrette. J'ajoute que la commission des Lois, comme l'humanité, ne peut résoudre les problèmes avant qu'ils ne se posent.

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Pas du tout. Par ailleurs, il a déjà été longuement question du conflit entre nature et culture et nous ne pouvons prolonger indéfiniment ce débat philosophique.

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Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je suis naturellement très sensible à la passion nouvelle qui anime l'opposition à propos de la PMA et la pousse à demander depuis hier, avec une fébrilité qui nous flatte, Mme la ministre de la Famille et moi-même, l'avis du Gouvernement sur ce sujet. Nous avons pourtant rappelé le contenu de la déclaration publique du Premier ministre. Par respect envers les parlementaires de la majorité comme de l'opposition, nous tenons à répondre aussi précisément que possible aux questions qu'ils nous posent, même si, en l'occurrence, cela n'empêche pas la question d'être sans cesse reposée sous une forme inchangée.

Le Gouvernement est défavorable aux amendements en discussion et à celui qui sera examiné ensuite sur le même sujet, car, comme l'a dit le Premier ministre, un texte spécifique traitera ces différentes questions liées, directement ou non, au mariage et à la filiation. Pourquoi ne pas avoir traité l'adoption à part ? Parce que nous aurions ainsi créé un mariage pour les couples homosexuels, distinct du mariage entre hétérosexuels. Or nous ne voulons pas créer un mariage au rabais, mais ouvrir aux couples de même sexe le mariage, qui, dans notre code civil, emporte l'adoption.

Pourquoi ne pas avoir traité dans un même texte le mariage et l'adoption, d'une part, et la PMA, de l'autre ? Nous le répétons depuis que le débat a commencé, et le Premier ministre l'a encore dit publiquement la semaine dernière : le mariage et l'adoption relèvent du code civil, car ils concernent les libertés, alors que la PMA relève du code de la santé publique. Voilà qui est très simple à vérifier et ne constitue ni une vue de l'esprit ni une voie de dégagement. En effet, l'ouverture de la PMA s'est fondée sur les lois de bioéthique, sur les connaissances scientifiques et sur une délibération collective qui a eu pour conséquence de mettre ces technologies à la disposition des couples désireux de procréer, à deux conditions alternatives : une infertilité médicalement diagnostiquée ou le risque de transmission d'une maladie héréditaire. « La PMA mérite un débat en tant que tel, c'est pourquoi elle figurera dans le projet de loi famille » : le Premier ministre a été très clair, et a précisé le calendrier en mentionnant le mois de mars.

Comme l'a dit Alain Tourret, comme le savent ceux qui connaissent les positions du professeur Frydman – qu'ils aient assisté à son audition, entendu ses déclarations publiques ou lu son livre Convictions – et ceux qui militent depuis des années pour l'ouverture de la PMA aux couples de femmes ou aux femmes célibataires, ce sujet est complexe et il faut tenir compte de cette complexité pour adopter des dispositions législatives efficaces. Ce sujet est lié, naturellement, à celui dont nous débattons : ce lien, c'est l'effectivité de l'accès à la filiation, qui, dans l'état actuel du droit – que nous voulons ouvrir aux couples homosexuels –, est soit biologique, par engendrement – c'est le titre VII du code civil –, soit adoptive – c'est le titre VIII.

L'accès à la filiation non adoptive, notamment par la PMA, suppose de répondre à plusieurs questions, avant de procéder à l'étude d'impact dont Alain Tourret a souligné à juste titre la nécessité. Premièrement, aujourd'hui, la PMA est ouverte aux couples hétérosexuels aux conditions que j'ai indiquées, prévues par le code de la santé publique : il s'agit alors d'un dispositif à caractère médical. Si cette technologie est mise à la disposition des couples de personnes de même sexe, ce ne peut être aux mêmes conditions. Il nous faut donc déterminer si nous maintenons l'accès des couples hétérosexuels à la PMA aux conditions existantes et si nous l'ouvrons aux couples homosexuels, à certaines conditions ou sans condition.

D'autres questions se posent : si nous conservons le caractère médical de la PMA – laquelle implique une assistance médicale, un accompagnement médical, une sécurité médicale –, le droit à la solidarité sociale sera-t-il le même pour les couples hétérosexuels et pour les couples homosexuels ? Si oui, cela entraîne des conséquences pour les couples hétérosexuels. Dans le cas contraire, nous créons un nouveau dispositif.

Nous n'avons pas l'intention de fuir ces questions ; nous entendons les traiter correctement. Voilà pourquoi le Gouvernement a jugé qu'elles devaient faire l'objet d'un autre texte. Je ne sais comment le dire pour me faire entendre ! Nous en avons parlé au cours du débat, mais cela vous intéressait beaucoup moins qu'aujourd'hui. Vous espérez manifestement compliquer la discussion du texte, mais peu importe – nous avons tous ici l'expérience du Parlement. Travaillons sur le texte en discussion et faisons progresser cette belle réforme, avant d'en venir, en temps utile, à l'autre belle réforme relative à la PMA et à l'ensemble des sujets directement ou indirectement liés au mariage et à l'adoption. Parmi ces sujets, l'ouverture de l'adoption aux couples pacsés fait l'objet d'amendements au texte en discussion. Mais le Gouvernement a décidé que ce texte ouvrirait à droit constant aux couples de personnes de même sexe les seules dispositions actuelles du code civil. Visiblement, cela vous déplaît et vous voudriez aborder dès aujourd'hui la PMA. Je comprends votre impatience et, d'une certaine manière, je la goûte, mais il vous faudra vous contenter pour l'instant du texte que nous vous soumettons.

La Commission rejette successivement les amendements CL 138 et CL 465.

Elle en vient ensuite à l'amendement CL 467 de M. Sergio Coronado.

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Mme la garde des Sceaux vient de le rappeler, ce projet de loi procède à une réforme à droit constant. Il maintient donc la présomption de paternité. Si l'on s'en tient là, cela induit un traitement différencié des couples selon leur orientation sexuelle. Une autre solution consiste à créer une présomption de parenté – comme l'a notamment fait le Québec – au nom du parallélisme des formes. On pourrait également supprimer la présomption de paternité au nom de l'égalité, mais j'ai opté dans mon amendement pour la deuxième solution, ce qui ne préjuge pas des dispositions du futur projet de loi sur la famille.

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Si le projet de loi ouvre aux couples de personnes de même sexe le mariage et, par voie de conséquence, l'adoption, il ne modifie en rien la présomption de paternité exposée à l'article 312 du code civil et ne permet donc pas la reconnaissance de l'enfant du conjoint au sein d'un couple homosexuel. En effet, la rédaction de cet article – « l'enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari » – ne permet pas de l'appliquer à un couple de personnes de même sexe. Ce choix de ne pas créer une présomption de parenté au sein des couples homosexuels semble justifié, pour des raisons qui ne sont d'ailleurs pas identiques selon que le couple unit deux hommes ou deux femmes.

Pour les couples de femmes, la difficulté est la suivante. Aujourd'hui, le mari peut contester sa paternité en montrant qu'il n'est pas le père biologique, notamment en prouvant que l'enfant est né d'une infidélité. Le principe même de la présomption simple est en effet qu'on peut la renverser. Mais, si l'épouse devenue mère par présomption disposait de cette possibilité de contestation, alors qu'elle sait évidemment pouvoir prouver qu'elle n'est pas la mère biologique de l'enfant, le risque serait grand de déstabiliser la filiation. Pour s'en prémunir, il faudrait alors interdire toute contestation, ce qui contraindrait toute épouse à assumer la responsabilité de tout enfant né de sa femme, même s'il est issu d'une infidélité.

Au sein des couples d'hommes, aucune naissance n'est par définition possible. Si l'un des deux conjoints devient parent d'un enfant, ce ne peut être que par adoption ou par reconnaissance. Dans le premier cas, s'il adopte seul un enfant qu'il aurait légalement pu adopter en couple – ce que la loi permettra –, l'on ne saurait imposer à son conjoint d'en devenir automatiquement le père. Dans le second, s'il reconnaît un enfant dépourvu de filiation maternelle, il s'agit d'une GPA, que notre droit n'admet pas.

Pour ces raisons, la présomption de parenté, intellectuellement séduisante, semble toutefois difficile à intégrer dans notre droit. Avis défavorable.

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Monsieur le rapporteur s'est exprimé avec un grand sérieux, mais il aurait pu dire la même chose sous forme de gag. Au sein d'un couple de même sexe, l'un des parents n'étant pas le parent, il ne peut prouver qu'il n'est pas le parent : la présomption de parenté au sein d'un couple homosexuel étant tautologique ou absurde, elle touche aux limites du compréhensible. C'est bien une fiction que tend à créer cet amendement, auquel s'oppose heureusement le rapporteur. Mais pourquoi sa raison et son sérieux ne le conduisent-ils pas à repousser également les autres fictions que contient le texte ?

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Notre collègue Coronado l'a dit lui-même, cet amendement est lié à la réforme du code de la famille. Il y a donc bien un lien entre la présente réforme et celle qui nous sera soumise dans quelques semaines. Nous veillerons également à ce que la distinction qu'a établie Mme la garde des Sceaux entre le code de la santé publique et le code civil soit à nouveau abordée, sans doute en séance publique.

Ce qui nous est proposé est une parfaite fiction de filiation, dépourvue de toute cohérence biologique. C'est même une forme de falsification.

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Cet amendement est très intéressant, car il démontre par l'absurde que le mariage pour tous n'est pas la bonne solution aux problèmes posés par les couples homosexuels. Je prendrai deux exemples. Celui d'un couple d'hommes, d'abord : comment un enfant pourrait-il naître en son sein ? Imaginez-vous le conjoint d'un homme former un recours en contestation de paternité ? Dans sa réponse, le rapporteur aurait pu être moins gentil ! Celui d'un couple de femmes, ensuite : si l'une des deux conçoit un enfant avec un homme lors d'une aventure extraconjugale, cet homme pourrait entamer une procédure en reconnaissance de paternité alors que l'autre femme est présumée en être la mère ! Comme le dirait – gentiment – notre rapporteur, on monte au ciel !

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Ce n'est qu'une expression. Vous avez raison de juger que cet amendement aboutit à une absurdité, mais vous ne poussez pas l'analyse assez loin : cela ne s'explique-t-il pas par le choix du mariage pour tous plutôt que de l'alliance – ou union – civile ?

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Mme la ministre de la Famille l'a souligné elle-même à juste titre, famille et filiation sont indissociables. Pourquoi faut-il donc deux lois ? Le président l'a dit, le sujet est compliqué, et le débat que nous venons d'entendre illustre cette complexité jusqu'à l'absurde. Madame la garde des Sceaux, votre distinction entre le code civil, que le présent texte réforme, et le code de la santé publique, dont relèverait la PMA, est habile, mais la PMA emporte la filiation qui, si je ne me trompe, est traitée dans le code civil.

En réalité, si vous prévoyez deux lois, c'est pour des raisons purement politiques. Ce texte se concentre sur le mariage pour tous parce que les sondages montrent que nos concitoyens y sont majoritairement favorables ; mais l'on s'aperçoit petit à petit qu'il débouche sur l'ouverture de la filiation, que nos concitoyens n'approuvent pas, non plus que l'adoption, d'ailleurs. Voilà pourquoi l'amendement PMA a été retiré après que le groupe socialiste l'a approuvé : parce que nos concitoyens sont contre et que, à l'heure actuelle, la majorité n'a vraiment pas besoin de contestation. On prétend donc que le moment n'est pas opportun, que le sujet est complexe, et l'on renvoie la disposition à une loi ultérieure : ceux qui ont l'expérience du Parlement connaissent la méthode.

Si l'amendement PMA a été écarté, c'est en second lieu pour des raisons constitutionnelles, et parce qu'il aurait fallu consulter le Comité consultatif national d'éthique, qui s'est prononcé depuis 2005 contre l'extension de la PMA et contre la GPA.

Pour ces raisons, à mon avis, il n'y aura pas de deuxième loi.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Il y aura une deuxième loi, monsieur le député, car, comme l'a dit le Premier ministre, nous entendons reconnaître la diversité des modèles familiaux, qui ont beaucoup évolué depuis une trentaine d'années. Je maintiens le terme de « modèle » – même s'il ne vous agrée pas, monsieur Mariton – au sens non d'une référence, mais d'une constitution familiale. Nos concitoyens demandent sécurité juridique et protection pour leurs enfants et pour eux-mêmes. Par ailleurs, la loi sur la famille concernera indifféremment les familles hétérosexuelles et homosexuelles.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Monsieur Houillon, seriez-vous surpris que le code civil et le code de la santé publique ne soient pas un seul et même document ? Nous répétons depuis le mois de juin que la PMA relève du second, mais vous semblez ne découvrir le sujet qu'à la faveur de la récente mobilisation de la société civile. Ne nous faites donc pas de procès d'intention en évoquant les supposées raisons politiques – ou plutôt opportunistes – de notre démarche.

Monsieur Mariton, vous parlez de fiction ; mais l'adoption – surtout internationale – ou la PMA ne sont-elles pas également des fictions, tout comme la présomption de paternité, dont les juristes disent qu'elle assure la paix des familles ?

Le Gouvernement est défavorable à l'amendement, car la présomption de parenté – qui couvre d'éventuelles fictions – suppose un mode d'établissement de la preuve qui ferait défaut dans le cas des couples de même sexe. L'ouverture de ce droit pourrait détruire une liberté. C'est pourquoi le Gouvernement considère que, dans ce type de couples, l'établissement de la parenté doit faire l'objet d'une démarche.

La Commission rejette l'amendement CL 467.

Puis elle examine l'amendement CL 473 de M. Sergio Coronado.

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Cet amendement vise à modifier l'article 343 du code civil. Si, en 1999, le législateur n'a pas voulu ouvrir l'adoption aux couples liés par un PACS, c'est parce que, comme l'expliquait la garde des Sceaux de l'époque, il refusait d'en faire bénéficier les couples de même sexe. Maintenant que le Gouvernement propose de permettre à ces couples de se marier, et donc d'adopter des enfants, et que l'adoption est également ouverte aux célibataires, il n'y a plus de raisons de refuser ce droit aux couples pacsés.

L'évolution est patente : l'argument consistant à voir dans la différence des sexes le fondement du couple, défendu à l'époque par certains sociologues qui, depuis, ont changé d'avis, n'est aujourd'hui repris que par quelques opposants radicaux à l'ouverture du mariage.

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Nous partageons la volonté des députés du groupe écologiste d'ouvrir l'adoption à tous les couples stables et nous regrettons que les couples homosexuels soient contraints de se marier pour devenir parents par adoption. Cette inégalité subsistera durant quelques mois encore. Cela dit, comme cette ouverture de nouveaux droits concernerait tous les couples, hétérosexuels comme homosexuels, il nous semble plus opportun de traiter cette question dans le cadre du prochain projet de loi sur la famille.

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Certes, faire du mariage une condition de l'adoption ne paraît plus adapté à la réalité de notre société : plus d'un enfant sur deux naît hors mariage, et le concubinage et le PACS sont des façons tout aussi stables de faire couple. Néanmoins, le projet de loi sur la famille serait un vecteur plus adapté pour mener à bien une réflexion approfondie et élargie sur le champ qu'il convient de donner aujourd'hui à l'adoption.

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Pourquoi, alors que le Gouvernement et la majorité proposent les mêmes réponses institutionnelles à des situations différentes, voulez-vous absolument garder le caractère spécifique de ce texte ?

Tout maire sait que, si une forte proportion d'enfants naissent hors mariage, les parents se marient souvent par la suite, de sorte que la proportion d'enfants vivant dans le mariage est bien supérieure. Il existe donc bien un lien – certes non exclusif – entre l'enfant et le mariage.

En suivant la logique de M. Coronado, il faudrait étendre son amendement aux concubins. Le problème, c'est que le PACS et le concubinage sont par construction plus réversibles que le mariage, mais également que l'engagement d'un adoptant célibataire, qui exclut toute rupture dans la relation à l'enfant. En cas d'adoption par un couple marié, l'enfant profite de la solidité du mariage ; en cas d'adoption par un célibataire – que nous souhaiterions sortir du droit commun –, il bénéficie de la permanence de la personne ; mais ni le PACS, ni le concubinage n'offrent de solidité juridique comparable. Que devient donc l'enfant ? Mesurez-vous la responsabilité que vous prenez en encourageant l'adoption par des couples qui n'ont pas l'ambition de s'inscrire dans la durée et qui ne bénéficient pas de la protection qu'offrent les règles juridiques du mariage ?

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La différence entre le PACS et le mariage est liée à la notion de durée. En 1999, si l'adoption n'a pas été ouverte aux pacsés, ce n'est pas seulement en raison du caractère homosexuel des couples concernés, mais aussi parce que le PACS n'offrait aucune garantie de stabilité : ce contrat pouvant être rompu à tout moment de façon unilatérale, on a pu parler de « quasi-répudiation ». Or, dans l'intérêt de l'enfant, le couple doit être stable, même si le mariage n'est jamais définitif et que le divorce reste possible.

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En me penchant sur les travaux préparatoires de la loi du 15 novembre 1999, j'ai trouvé ces quelques phrases que je souhaite soumettre à notre Commission : « Je reconnais […] que des homosexuels doivent continuer à s'occuper des enfants qu'ils ont eus avec un partenaire de sexe différent, même s'ils vivent ensuite avec un compagnon ou une compagne de même sexe. Ce disant, j'affirme que la paternité ou la maternité confère des obligations qui ne peuvent cesser. Mais une chose est de maintenir un lien de parenté déjà constitué entre parents et enfants, autre chose est de permettre, en vertu de la loi, l'établissement d'un lien ex nihilo entre un enfant et deux adultes homosexuels. Dans le premier cas, celui de la parenté constituée par la procréation naturelle, il s'agit d'une solution conforme à l'intérêt de l'enfant qui a le droit de conserver son père et sa mère lorsque ses parents se séparent […] ; dans le second cas, il s'agirait de créer de toutes pièces, par le droit, une mauvaise solution. Pourquoi l'adoption par un couple homosexuel serait-elle une mauvaise solution ? Parce que le droit, lorsqu'il crée des filiations artificielles, ne peut ni ignorer ni abolir la différence entre les sexes. »

Ainsi, madame la garde des Sceaux, s'exprimait votre prédécesseur, Élisabeth Guigou, en 1998, et je crois qu'elle parlait d'or. La partie de la majorité qui dérive au-delà des frontières du réel pour entrer dans une sorte de « quatrième dimension » absurde et déplorable ferait bien de s'inspirer de ces déclarations sensées.

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Le texte que vient de lire M. Larrivé est intéressant. Que l'on ne vienne pas nous dire qu'il est daté ; d'une part, quinze ans ne sont pas une si longue durée ; d'autre part, la filiation est un sujet intemporel.

Au moment du débat sur le PACS, les défenseurs de ce dispositif nous expliquaient que son intérêt était précisément de permettre de se lier et de se délier très facilement, et cette extrême facilité a ensuite été effectivement fixée dans la loi. En accordant le droit d'adoption aux couples qui ne veulent pas s'inscrire dans la durée, l'amendement proposé apparaît antinomique avec la notion d'intérêt de l'enfant.

Madame la garde des Sceaux, loin de le découvrir aujourd'hui, nous avons dès le départ été attentifs au lien – à nos yeux essentiel – entre ce projet de loi et la PMA, et n'avons eu de cesse de rappeler la cohérence de ces différentes dispositions.

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Cet amendement déposé par deux députés du groupe écologiste exprime, de fait, l'avis de toute la majorité. Si l'ouverture de l'adoption aux personnes pacsées ne figure pas dans le présent texte, elle sera donc proposée dans un autre cadre.

C'est la question de la stabilité du couple dans l'adoption qui nous divise. Pour nous, l'intérêt de l'enfant exige qu'il soit accueilli dans une famille qui, sans forcément être stable, en a au moins l'ambition. Nous sommes animés par deux logiques différentes : pour vous, l'adoption consiste à donner un enfant à une famille ; pour nous, à donner une famille à un enfant. Vous cherchez à combler un désir d'adulte, sans tenir compte de l'intérêt de l'enfant. C'est votre choix, assumez-le ; quant à nous, nous le refusons.

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Monsieur Larrivé s'est fait spécialiste, dans ce débat, de la citation d'éminents responsables socialistes. Mais ce procédé est risqué, car nous pourrions nous livrer, de manière bien plus cruelle, au même exercice pour produire un florilège des interventions les plus nuancées et les plus modérées, prononcées par certains d'entre vous – ou par certains de vos prédécesseurs – lors du débat sur le PACS, dont vous vous faites aujourd'hui les plus ardents défenseurs. Cela prouve au moins que les avis peuvent évoluer !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Le privilège de la chancellerie est de disposer de statistiques qui émanent de nos juridictions. Voici quelques chiffres qui permettent de répondre à l'argument de la stabilité des mariages.

Il y avait 22 000 PACS en 2000, et 1 055 000 en 2011. Dans les trois premières années suivant l'instauration du dispositif, 40 % des couples recourant au PACS étaient homosexuels ; dix ans plus tard, ils n'étaient plus que 4,7 %. La durée moyenne des PACS est de 32,7 mois, la différence entre les couples hétérosexuels et homosexuels étant dérisoire.

Pour le mariage, je ne dispose pas des mêmes chiffres, mais je vous les ferai parvenir. Au demeurant, 19 % des divorces sont prononcés moins de cinq ans après la célébration du mariage et 27 % entre cinq et neuf ans ; au total, 46 % des divorces concernent donc des mariages de moins de neuf ans.

Vous donnez l'impression de souhaiter que le mariage dure à tout prix. Je rappelle pourtant que les législateurs de 1792, qui ont instauré le divorce un an après le mariage civil, ont déclaré que le mariage n'est une liberté que s'il est dissoluble. Le divorce constitue la réalité humaine et sociale dont nous traitons, et la difficulté consiste pour le droit à couvrir des situations extrêmement diverses. Le divorce n'est certes pas la finalité du mariage, mais la condition de la liberté que celui-ci prévoit. Les couples mariés ont donc le droit de divorcer, y compris au bout de quelques années seulement, et les statistiques conduisent à relativiser votre conception de la pérennité de cette institution, même s'il est vrai que l'on fête parfois des noces d'or.

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Les adoptants attendent des années avant de pouvoir adopter, ce qui témoigne souvent de la solidité de leur projet parental.

La Commission rejette l'amendement CL 473.

Elle examine ensuite l'amendement CL 52 de M. Xavier Breton.

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Nous souhaitons que l'adoption, qui constitue un mode de filiation, continue à être réservée aux couples hétérosexuels. Selon les pédopsychiatres notamment, la filiation repose sur trois piliers.

Le pilier biologique ou corporel tout d'abord : rencontre des gamètes, grossesse, accouchement, etc. Il n'est certes pas le plus important, mais il n'est pas possible de le balayer d'un revers de la main – songeons, par exemple, aux personnes stériles ou infertiles.

Le pilier affectif ou éducatif, ensuite, qui consiste à aimer et à éduquer un enfant. Il est évidemment essentiel, mais il ne suffit pas.

Le pilier juridique ou social, enfin, qui reconnaît l'union – mariage, PACS, concubinage – et la filiation.

Si, dans l'idéal, la filiation repose sur ces trois piliers, l'un ou l'autre peut faire défaut. Le pilier biologique, par exemple, est défaillant dans le cadre d'un accouchement sous X, le pilier éducatif et affectif étant quant à lui particulièrement sollicité afin qu'une telle situation soit mieux vécue. Le pilier affectif est aussi défaillant pour les enfants violentés au sein de leur propre milieu familial. Dans ce cas, il est du devoir de l'État de les en retirer, la situation, là encore, pouvant être réparée.

Si l'adoption est rendue possible pour les couples homosexuels, vous créez volontairement une situation où l'un des piliers fait défaut. Outre que les autres piliers seront encore plus sollicités, les enfants seront victimes d'un mensonge puisqu'on leur dira qu'ils sont nés de deux pères ou de deux mères. Autant un tel discours est recevable dans le cadre d'un couple adoptant hétérosexuel, puisque la filiation est crédible, autant le cheminement de l'enfant ne pourra pas aboutir dans le cadre d'un couple adoptant homosexuel puisque la fiction concernant la filiation est totale. Vous allez instituer un mensonge d'État !

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Un « mensonge d'État » ? Non seulement cette formule – qui me choque un peu – relève davantage du cinéma américain que du code civil, mais elle est fausse. L'établissement des actes d'état civil en cas d'adoption simple ou plénière fait référence à l'adoption. Les parents adoptifs, qu'ils soient de même sexe ou de sexe différent, ne peuvent pas se faire passer pour les parents géniteurs.

S'agissant de l'adoption simple, les extraits d'actes de naissance comportent la mention des deux filiations – d'origine et adoptive – et, s'agissant de l'adoption plénière, l'acte de naissance de l'enfant résulte de la transcription du jugement d'adoption, les références de jugement étant mentionnées dans l'acte. Une copie intégrale de celui-ci ne laisse évidemment aucun doute sur le caractère adoptif de la filiation.

Il n'est pas possible d'affirmer que l'adoption par un couple de même sexe ou par le conjoint de même sexe aboutira à faire croire que l'enfant est né de deux personnes de même sexe. Il faut admettre que le droit de l'adoption se situe expressément sur un registre qui n'a rien à voir avec celui de l'engendrement. Que les adoptants soient en couple hétérosexuel ou homosexuel, le droit tel qu'il est permet d'établir une distinction entre les parents qui élèvent l'enfant et les géniteurs qui l'ont procréé.

Avis défavorable.

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Il serait intéressant que le Gouvernement ou le rapporteur nous disent quelle sera précisément la rédaction des actes d'état civil en matière d'adoption par un couple de même sexe. Comment seront donc rédigés les deux livrets de famille distincts dont vous avez parlé ?

Je le répète : si ce texte vise à créer deux livrets, pourquoi vouloir une seule institution ? D'une certaine façon, vous êtes plus attentifs aux sentiments que les parents pourront éprouver lorsqu'ils recevront leur livret qu'à la définition de principes.

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L'examen de l'article 2 permettra sans doute de répondre aux questions que vous posez.

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Il est vrai que l'adoption plénière résulte d'un jugement. Toutefois, l'acte d'état civil d'un enfant adopté comporte un mensonge évident puisqu'il est censé être « né de et de », alors qu'il n'a pas été porté par les deux parents adoptants.

Votre raisonnement ne tient pas non plus dans le cas d'une adoption par une personne célibataire puisque le géniteur ou la génitrice est purement et simplement effacé dans l'acte d'état civil.

Personne ne songe à raconter à des enfants qu'ils sont nés de deux pères ou de deux mères : il s'agit de savoir si deux pères ou deux mères peuvent se voir confier des enfants à adopter comme c'est le cas pour les parents hétérosexuels, dont les enfants deviennent les « vrais » enfants grâce à l'affection qu'ils leur portent. Même s'ils ne sont pas génétiquement issus de ces derniers, ils sont considérés comme tels dans les actes d'état civil.

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Je soutiens évidemment l'amendement CL 52.

Notre débat soulève la question de l'articulation des trois piliers de la filiation si bien décrits par M. Breton. Si M. le rapporteur trouve que la formule « mensonge d'État » est trop forte, il n'en reste pas moins que la différence des sexes est à l'origine de l'existence de chacun d'entre nous.

Quelle est donc la place de la filiation biologique dans l'économie de la loi ? Telle est la question centrale de notre débat. Les réponses philosophiques que nous y apportons divergent, mais notre amendement me semble parfaitement cohérent avec la ligne que nous défendons.

Je prends les statistiques concernant le PACS et le mariage comme elles viennent, madame la garde des Sceaux. Il n'en reste pas moins qu'il existe une différence de nature entre le mariage et le PACS. D'une certaine façon, peu importe que les couples, un jour, vivent plus longuement ensemble dans le cadre du second que dans celui du premier, car le principe même du mariage comprend l'engagement à assurer au-delà même du divorce les responsabilités qui ont été acceptées au moment de sa conclusion : tel n'est pas le cas avec le PACS.

C'est ainsi que, lors de la procédure de séparation, le juge statue dans un cas sur l'ensemble des aspects de la vie quotidienne des couples – le mode de garde des enfants, la répartition des biens, s'il le faut – alors que, dans l'autre, la rupture est sèche, un certain nombre de couples qui ont rompu leur PACS se rendant ensuite chez le juge civil pour demander soit une réparation, soit une répartition des biens meubles, etc.

Les deux logiques sont donc extrêmement différentes. La volonté de s'inscrire dans la durée, qui est au coeur du mariage, justifie que l'adoption y soit permise alors qu'elle doit rester impossible dans le cadre du PACS.

Sans doute aurons-nous l'occasion de revenir sur les débats de 1791 et 1792, sur la liberté de s'unir qui ne se conçoit pas sans la liberté de se séparer, sur les raisons pour lesquelles – comme il est dit de manière habilement incomplète dans l'exposé des motifs – le code civil n'a jamais formulé de définition du mariage. Certaines choses, en effet, sont tues faute d'être vues ou par désaccord, mais aussi, parfois, parce qu'elles sont trop évidentes.

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La substitution de filiation en cas d'adoption plénière est patente, mais elle demeure tout à fait vraisemblable, l'enfant ayant un père et une mère, contrairement à ce qui se passe dans le cas de figure qui est ici évoqué.

De plus, en cas d'adoption par une seule personne, il n'est pas question de créer une mère ou un père « artificiels » puisque la reconnaissance se fait au profit d'un seul des parents. En cette occurrence aussi, donc, nulle extrapolation ni mystification, mais une fiction, en quelque sorte, crédible. Je veux bien ne plus parler de « mensonge d'État », l'expression est sans doute un peu forte, mais il importe de distinguer les différentes situations.

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Nous avons eu l'occasion d'auditionner des pédopsychiatres spécialistes des problèmes liés à l'adoption. Leur longue expérience les autorise à constater les difficultés qui y sont liées. Un enfant adopté, en effet, vit toujours son adoption sur le mode de la culpabilité : qu'a-t-il fait pour être abandonné de ses parents ? Les pédopsychiatres ont souligné à de nombreuses reprises combien cette situation pouvait être parfois traumatisante. En outre, l'ouverture de l'adoption aux couples homosexuels et aux célibataires constitue selon eux une source supplémentaire de fragilité.

J'ai donc cosigné cet amendement afin que l'adoption soit demandée par une femme et son mari, non séparés de corps, mariés depuis plus de deux ans ou âgés l'un et l'autre de plus de vingt-huit ans. C'est ainsi que nous garantirons la préservation des intérêts de l'enfant, lesquels doivent toujours être au coeur de nos débats.

La Commission rejette l'amendement CL 52.

Elle examine ensuite l'amendement CL 54 de M. Xavier Breton.

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En proposant de supprimer la possibilité d'adopter pour les célibataires, cet amendement vise surtout à engager une réflexion. Historiquement, ce type d'adoption a été institué en 1966 en raison d'un nombre d'enfants à adopter supérieur au nombre de familles adoptantes. Tel n'est plus le cas aujourd'hui, puisque les modes de vie et les modalités de l'adoption internationale ont évolué. De plus, la possibilité d'adoption par les célibataires constitue une curiosité juridique alors même que la filiation, telle que nous la définissons à partir du couple hétérosexuel, demeure très cohérente. Il semblerait donc logique de rendre notre droit plus cohérent.

S'agissant de la crédibilité de la filiation dans le cadre de l'adoption par des célibataires, l'absence du second parent est évidente, mais nul ne ment au point de dire à un enfant qu'il serait né de deux pères ou de deux mères. Le manque ou la carence sont simplement constatés et un réinvestissement, au sens psychiatrique, pourra éventuellement avoir lieu. Il ne faut pas confondre la parenté, comme filiation, et la parentalité, au sens de pilier éducatif et affectif. La parenté ne peut se résumer au seul pilier éducatif. En effet, on « est » parent. Deux conceptions différentes s'opposent donc : vous voulez créer ex nihilo de nouvelles formes de familles et nous, nous tenons compte des divers piliers que j'ai évoqués.

Enfin, serait-il possible de connaître le nombre annuel d'adoptions par des célibataires ? Ont-elles lieu dans un cadre familial ou extrafamilial ? Quel est le pourcentage d'échecs ? Sont-ils plus nombreux que pour les couples adoptants ? Les femmes célibataires sont-elles plus nombreuses à adopter que les hommes célibataires ?

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L'adoption consiste à mettre en adéquation l'intérêt d'un enfant privé de famille avec le projet éducatif d'un candidat fondé sur l'engagement de ce dernier à devenir son parent. Rien ne permet aujourd'hui d'affirmer que les capacités éducatives d'une personne célibataire seraient moindres que celles d'un couple.

De plus, l'adoption par une personne seule demeurant une démarche marginale, les couples ne sont donc pas privés de la possibilité d'y accéder. Sur les 1 961 adoptions réalisées en 2011, 167 femmes et 8 hommes célibataires ont été recensés.

Avis défavorable.

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Il faudrait réaliser un florilège des fortes paroles du rapporteur : « on ne peut pas imaginer que la loi tolère l'adoption d'un enfant dont on n'a pas prévu la naissance », « rien ne permet aujourd'hui d'affirmer que les capacités éducatives d'une personne célibataire seraient moindres que celles d'un couple ».

Nous sommes au coeur de la définition de la famille telle que nous l'entendons : il est préférable, pour un enfant, d'être élevé dans une famille aussi solide que possible. Cela ne constitue certes pas une condition suffisante, puisque de telles familles peuvent évidemment connaître des malheurs, mais l'affirmation de M. le rapporteur me semble contradictoire avec ce que nous considérons comme étant la capacité éducative elle-même.

S'agissant de l'adoption par les célibataires, un amendement de ce type – qui mérite en effet d'être affiné – donne raison à ceux qui estiment que les objections que nous formulons à ce texte ont une limite : l'adoption par les célibataires rompt déjà avec la vision du modèle familial sur lequel nous insistons. Précisément, en cohérence, nous considérons qu'il convient de revenir sur le droit commun de l'adoption par les célibataires.

Il n'est en effet pas question pour nous de l'interdire absolument, des circonstances pouvant justifier une adoption par un membre de la famille ou de l'environnement familial. Si les deux parents décèdent dans un accident de la route, un oncle célibataire, par exemple, peut fort bien adopter l'enfant. Autant nous considérons qu'une relation préétablie avec un ami de ce couple peut également justifier une procédure d'adoption dans l'intérêt de l'enfant, autant nous ne pensons pas qu'il faille continuer à cautionner une « construction » extérieure à son environnement et à son histoire qui tendrait à justifier une adoption par une personne célibataire. C'est sans doute ce type d'argument que nous ferons valoir en séance publique.

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Cet amendement est surréaliste, incroyable, honteux. Chers collègues de l'opposition, cessez d'être hypocrites ! Dites-le clairement : pour vous, la famille est nécessairement constituée d'un homme et d'une femme, qui ont ensemble un ou plusieurs enfants. En revanche, derrière les célibataires se cacheraient, selon vous, des homosexuels, qui ne seraient pas capables d'élever des enfants.

Pourtant, de plus en plus d'enfants sont élevés par un seul de leurs parents. Ce n'est d'ailleurs sans doute pas une si mauvaise chose : le précédent et l'actuel Président de la République ont grandi dans des familles monoparentales.

Vous parlez de « fiction » concernant l'adoption par les couples de même sexe. Or, s'il est possible à un couple hétérosexuel de cacher à un enfant adopté la vérité sur ses origines, c'est beaucoup plus compliqué pour un couple homosexuel. L'expérience le montre.

En outre, vous avez tenu des propos qui relèvent de la caricature : vous feriez preuve, dans l'opposition, de générosité, car vous souhaitez donner une famille à un enfant ; nous serions, dans la majorité, l'incarnation de l'égoïsme, car nous chercherions à satisfaire le désir d'enfant de certains couples.

Enfin, qu'entendez-vous par « l'échec d'une adoption » ? Cette expression est terrible. Une famille, c'est beaucoup plus complexe que vous ne le pensez. Vous ne cessez de donner des leçons et vous décrétez ce qu'est la famille idéale !

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Cet amendement vise à susciter un débat. Le rapporteur a partiellement répondu à nos interrogations en citant les chiffres de l'adoption par des personnes célibataires pour l'année 2011. Je souhaiterais néanmoins disposer de données qualitatives sur ces adoptions : font-elles suite au décès des parents ? Interviennent-elles dans un cadre familial ?

Le contexte très particulier qui prévalait en 1966 n'est plus celui d'aujourd'hui. On entretenait alors une forme de « fiction monoparentale ». L'objectif était avant tout de donner un père ou une mère à un enfant, non pas de reconstituer une véritable famille avec un père et une mère. C'est pour cette raison que l'on a autorisé, à ce moment-là, l'adoption par des célibataires.

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Je suis effaré par votre proposition d'amendement. Ce qui était acceptable en 1966 ne le serait plus aujourd'hui ? Alors que vous sembliez faire preuve d'une certaine ouverture, vous proposez là une forme de régression, tant sur le plan moral que du point de vue de la conception de la famille. Votre amendement est dangereux. Il est en outre révélateur de votre état d'esprit et met en lumière la hiérarchisation que vous faites entre les différents types de famille. Je partage entièrement l'avis du rapporteur : les capacités éducatives d'une personne célibataire ne sont pas moindres que celles d'un couple. Je ne pensais pas que vous iriez aussi loin.

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Nos collègues de l'opposition souhaitent un débat qui les aide à rédiger les amendements qu'ils présenteront pour la discussion en séance publique. J'ignorais que le travail en commission servait à préparer les joutes oratoires dans l'hémicycle ! Pour notre part, nous évitons de répondre systématiquement pour ne pas prolonger indûment les débats.

Avec cet amendement et le précédent, vous proposez une véritable régression par rapport au droit existant. Je comprends dès lors pourquoi M. Mariton hésite à voter un amendement qu'il a pourtant cosigné. Cet amendement vous oblige en effet à prendre une responsabilité. Je ne suis d'ailleurs pas certaine que l'ensemble des membres de votre groupe politique le soutiendraient.

Par ailleurs, vous avez employé un vocabulaire bien précis : « entretenir une fiction », « mensonge aux enfants », « couple crédible ». Nous en débattrons en séance publique.

Nous découvrons votre ligne au fur et à mesure de vos amendements et de vos interventions. Vous allez dans le sens de la régression et vous vous éloignez considérablement du projet de loi présenté par le Gouvernement. Il est aussi intéressant de constater que vous adaptez vos propositions et vos prises de position en fonction des déclarations des ministres, auxquelles vous ne cessez de demander de prendre des engagements sur un texte futur. Tout cela augure de débats animés dans l'hémicycle.

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Il convient d'être prudent : nous ouvrons des droits que nous ne serons pas en mesure de satisfaire. Madame la ministre déléguée a bien perçu le fond du problème : le nombre d'enfants adoptables baisse de manière continue. Nous ne pouvons d'ailleurs que nous en réjouir : c'est le signe que les pays d'origine des enfants se développent.

Actuellement, 700 enfants français et 2 000 enfants étrangers sont adoptés chaque année en France. Dans un département de taille moyenne comme le mien, on compte 6 ou 7 enfants français adoptables par an pour 200 à 250 familles en attente d'adoption. Les présidents de conseils généraux, compétents en matière de placement des enfants adoptables, doivent donc faire des choix. Quant à l'adoption internationale, elle est très dépendante de la situation et du droit des États d'origine des enfants.

Le présent projet de loi accroît le nombre de familles susceptibles d'adopter, alors que le nombre d'enfants adoptables diminue d'année en année. Cet amendement se fonde sur un raisonnement non pas idéologique, mais pratique : il s'agit de concentrer le droit d'adopter sur les familles stables et susceptibles d'offrir un père et une mère à des enfants qui n'en ont plus.

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Ce débat n'est pas nouveau. En 2009, M. Christian Vanneste avait déposé une proposition de loi visant à permettre aux seuls couples mariés d'adopter un enfant. Il mettait en avant le risque qu'un couple homosexuel ne se dissimule derrière une personne célibataire candidate à l'adoption.

Vous prétendez que l'adoption par une personne célibataire ne serait plus justifiée eu égard au faible nombre d'enfants à adopter. Or, 120 000 enfants sont aujourd'hui privés de leur père et de leur mère, non pas parce que les liens de filiation légaux ont été rompus, mais parce qu'ils ont été placés dans des foyers ou des familles d'accueil. Interviewée en 2010 par L'Express, Mme Tabarot, députée UMP, expliquait que seuls 200 de ces enfants étaient adoptables en France contre 3 500 au Royaume-Uni. Il convenait dès lors, selon elle, de « faire primer l'intérêt de l'enfant sur le lien biologique, en prononçant davantage de déclarations d'abandon ». En deux ans, vous avez opéré un virage à 180 degrés : vous ne souhaitez plus aujourd'hui offrir une famille à ces enfants délaissés pour leur permettre de se reconstruire.

Il convient, comme l'a dit M. Breton, d'engager un débat, mais sur la base d'autres propositions, notamment celles qu'avait formulées Mme Tabarot dans son rapport sur l'enfance délaissée et l'adoption en 2010.

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Notre collègue doute de l'existence des échecs d'adoption. Interrogez les spécialistes ! L'adoption est très compliquée sur le plan psychologique pour un enfant – comme d'ailleurs pour les parents. Elle peut se solder par un échec, voire par un abandon de l'enfant adopté. Mme la présidente du Conseil supérieur de l'adoption pourrait sans doute nous fournir des chiffres précis à cet égard. Cette réalité fait cependant l'objet d'un tabou. Les abandons d'enfants adoptés n'ont strictement rien à voir avec l'orientation sexuelle des parents adoptifs. Parce qu'ils ont vécu des situations traumatisantes, certains enfants ne parviennent pas à s'insérer dans une famille.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Je comprends très bien que nous ayons, les uns et les autres, des visions différentes de la famille et que nous en débattions. Cependant, j'ai entendu certains termes très dérangeants : « substitution », « fiction », « mensonge », « mensonge d'État ». Il est insultant de laisser penser et de répéter que les couples homosexuels ne disent pas la vérité aux enfants et leur font croire qu'ils sont nés de deux pères ou de deux mères. Je demande que l'on respecte ces parents et mets en garde contre l'utilisation de certaines expressions. Les mots ont leur importance. Je vous rappelle que, pendant longtemps, on masquait aux enfants leurs origines adoptives.

L'un d'entre vous a parlé de climat propice à l'éducation des enfants et a évoqué les difficultés rencontrées par les familles monoparentales. Soyons bien clairs : s'il s'agit de relever que les familles monoparentales ont davantage de difficultés financières que les autres, c'est en effet une réalité.

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Il y a aussi les résultats scolaires des enfants.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Justement ! Comment peut-on laisser penser que les résultats scolaires de ces enfants sont moins satisfaisants parce qu'ils sont élevés dans des familles monoparentales ? C'est très choquant !

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Non ! C'est une réalité statistique, un constat !

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Nous avons des façons de voir diamétralement opposées. Vous stigmatisez les familles monoparentales. Pour ma part, je ne connais aucune famille, fût-elle monoparentale, qui ne cherche pas à bien éduquer ses enfants.

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Je ne stigmatise personne ! Regardez les résultats !

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Dire que les familles monoparentales ont des difficultés financières est une chose. Établir un lien de causalité entre le caractère monoparental de la famille et la capacité du parent à bien éduquer ses enfants en est une autre. Je trouve cela consternant et vous mets à nouveau en garde : le débat dévie sur des questions qui n'ont rien à voir avec le présent projet de loi.

Présidence de M. Jean-Jacques Urvoas, président de la Commission.

L'amendement CL 54 est retiré.

Chapitre Ier bis Dispositions relatives à la filiation adoptive (Division et intitulé nouveaux)

Puis elle est saisie de l'amendement CL 510 du rapporteur.

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Cet amendement vise à introduire dans la structure du projet de loi un nouveau chapitre Ier bis, relatif à la filiation et à la filiation adoptive. Puisque les amendements sur la possession d'état ont été retirés, la phrase de ma proposition qui se lisait « Dispositions relatives à la filiation et à la filiation adoptive » doit dorénavant être rédigée ainsi : « Dispositions relatives à la filiation adoptive ».

La Commission adopte l'amendement ainsi rectifié.

Article 1er bis (nouveau) (art. 345-1 du code civil) : Adoption plénière par l'époux de l'enfant adopté par son conjoint en la forme plénière :

La Commission examine les amendements identiques CL 512 du rapporteur et CL 546 de la rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales, l'amendement CL 469 de M. Sergio Coronado, les amendements identiques CL 513 du rapporteur, CL 547 de la rapporteure pour avis de la commission des Affaires sociales et CL 506 de Mme Corinne Narassiguin, et l'amendement CL 470 de M. Sergio Coronado.

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L'adoption intrafamiliale constituera le moyen privilégié pour établir un lien de filiation entre un enfant et deux adultes de même sexe. C'est d'ailleurs le cas dans tous les pays qui ont ouvert le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe.

L'article 345-1 du code civil prévoit actuellement que l'adoption plénière de l'enfant du conjoint est permise dans trois cas : lorsque l'enfant n'a de filiation légalement établie qu'à l'égard de ce conjoint ; lorsque l'autre parent que le conjoint s'est vu retirer totalement l'autorité parentale ; lorsque l'autre parent que le conjoint est décédé.

Si, en l'état actuel de notre code, aucun texte n'exclut la possibilité d'adopter un enfant déjà adopté, aucun ne le prévoit expressément non plus. Pour éviter des interprétations divergentes de la loi qui pourraient être préjudiciables à l'intérêt de l'enfant, il est donc indispensable de préciser, d'une part, que l'adoption plénière de l'enfant du conjoint est également permise lorsque cet enfant a déjà fait l'objet d'une adoption plénière par ce seul conjoint et, d'autre part, que l'adoption simple est possible lorsque l'enfant du conjoint a antérieurement fait l'objet d'une adoption simple ou plénière par ce seul conjoint. Tel est l'objet des amendements CL 512 et CL 513.

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Le présent projet de loi va permettre, d'une part, l'adoption conjointe par un couple homosexuel marié et, d'autre part, l'adoption de l'enfant du conjoint dans les familles homoparentales. Un grand nombre de « parents sociaux » vont enfin se voir reconnaître un lien de filiation avec les enfants qu'ils élèvent.

Nous devons éviter d'éventuelles interprétations équivoques des dispositions légales sur l'adoption plénière. La commission des Affaires sociales émet donc un avis favorable à l'adoption des amendements CL 512 et CL 546.

Pour leur part, les amendements CL 513 et CL 547 prévoient la possibilité d'une adoption simple de l'enfant du conjoint lorsque la filiation de cet enfant a elle-même été établie avec ce seul conjoint par une première adoption simple ou plénière. En l'état actuel du droit, l'adoption simple d'un enfant ayant fait l'objet d'une première adoption plénière n'est autorisée que pour motif grave. Par motif grave, la jurisprudence entend généralement l'échec de l'adoption. Dans quelques rares cas, elle a également retenu le fait que l'enfant était élevé par le conjoint du parent légal, mais cela conduisait à priver ce dernier de l'autorité parentale s'il n'était pas marié avec le conjoint qui élève l'enfant. Les amendements précités permettront de droit l'adoption simple.

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Je me rallie aux amendements défendus par M. le rapporteur et par Mme la rapporteure pour avis.

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Je souscris aux explications données par M. le rapporteur et Mme la rapporteure pour avis, et vous fais part du soutien du groupe socialiste à leurs amendements.

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Je réponds à la question qui m'a été adressée en ma qualité de présidente du Conseil supérieur de l'adoption : on compte une dizaine d'échecs d'adoption par an.

En outre, j'ai été un peu choquée par la manière dont a été évoquée la diminution du nombre d'enfants adoptables. Les personnes qui ont obtenu un agrément sont dûment prévenues que la procédure d'adoption peut ne pas aboutir. Quand on cite les chiffres de l'adoption, on ne s'intéresse souvent qu'aux enfants de moins de trois ans en bonne santé. Or, il conviendrait de se préoccuper également des enfants délaissés et des enfants dits « à besoins spécifiques », qui ont tout autant besoin d'une famille.

Il convient de ne pas être aussi négatif quand on parle de l'adoption. L'adoption, c'est non pas des chiffres, mais des enfants. Vous vous faites, chers collègues de l'opposition, les chantres de l'intérêt de l'enfant. Or l'intérêt de l'enfant, c'est qu'il y ait davantage de familles candidates à l'adoption que d'enfants adoptables.

S'agissant des enfants qui grandissent dans des familles homoparentales, aucune étude les concernant ne montre qu'ils sont mieux ou moins bien élevés par leurs parents que les autres enfants. Je vous invite notamment à relire les études réalisées au Québec, même si certains en tirent des enseignements contradictoires. Les auditions organisées par le rapporteur ont également montré que les enfants élevés dans des familles homoparentales étaient, à tous égards, comme les autres.

L'intérêt de ces enfants doit être au coeur de nos préoccupations. Nous devons sécuriser leur situation, leur permettre de vivre de manière épanouie. Grâce au présent projet de loi, en cas de décès du parent biologique, le « parent social », dont les droits seront reconnus, pourra continuer de pourvoir aux besoins de l'enfant. Je note d'ailleurs que les avancées en matière de droit des enfants ont généralement été favorisées par la gauche.

En ce qui concerne la filiation biologique, les familles homoparentales ne mentent pas à leurs enfants. L'enfant sait qu'il a été adopté. Ces familles ont souvent surmonté de nombreuses difficultés et ont dû construire un véritable projet parental. Elles ont désiré l'enfant et préparé son arrivée. De plus, ces enfants ont, dans leur entourage, de nombreux repères féminins et masculins. Comme on le dit souvent en Afrique, il faut tout un village pour élever un enfant.

Gardons-nous des caricatures. Nous n'avons, ni les uns ni les autres, le monopole du coeur. Grâce au présent projet de loi, nous remettons l'enfant au coeur du dispositif.

Les amendements CL 469 et CL 470 de M. Sergio Coronado sont retirés.

La Commission adopte successivement les amendements identiques CL 512 et CL 546.

Article 1er ter (nouveau) (art. 360 du code civil) : Adoption simple par l'époux de l'enfant adopté par son conjoint en la forme simple ou plénière :

Puis la Commission examine les amendements identiques CL 513 du rapporteur, CL 547 de la rapporteure pour avis au nom de la commission des Affaires sociales et CL 506 de Mme Corinne Narassiguin.

L'amendement CL 506 de Mme Corinne Narassiguin est retiré.

La Commission adopte les amendements identiques CL 513 et CL 547.

Article 1er quater (nouveau) (art. 365 du code civil) : Exercice en commun de plein droit de l'autorité parentale en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint.

Elle examine ensuite l'amendement CL 514 du rapporteur.

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L'article 365 du code civil prévoit qu'en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint, ce dernier conserve seul l'exercice de l'autorité parentale, sauf si une déclaration conjointe avec l'adoptant est adressée au greffier en chef du tribunal de grande instance aux fins d'un exercice en commun de cette autorité.

Afin de faciliter cet exercice en commun en cas d'adoption simple de l'enfant du conjoint, cet amendement prévoit que, dans cette situation, l'autorité parentale est exercée de plein droit en commun. Si les titulaires de l'autorité parentale ne souhaitent pas l'exercer conjointement, ils pourront alors saisir le juge aux affaires familiales dans les conditions de droit commun pour que leur convention soit homologuée.

La Commission adopte l'amendement.

Elle en vient ensuite à l'amendement CL 193 de M. Charles de Courson.

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À l'époque de Napoléon, une partie des Français se mariaient religieusement, mais pas civilement. Il a donc été décidé d'interdire aux ministres du culte de procéder au mariage si le couple ne s'était pas, au préalable, marié civilement. Les officiers de l'état civil délivraient un document certifiant le mariage civil et qui, remis au ministre du culte, permettait le mariage religieux. En l'absence de cette attestation, le ministre du culte devait refuser d'unir le couple.

Malgré la loi du 9 décembre 1905 relative à la séparation des églises et de l'État, cette règle continue de s'appliquer. Ainsi, l'article 433-21 du code pénal dispose que « Tout ministre d'un culte qui procédera, de manière habituelle, aux cérémonies religieuses de mariage sans que ne lui ait été justifié l'acte de mariage préalablement reçu par les officiers de l'état civil sera puni de six mois d'emprisonnement et de 7 500 euros d'amende ». Cette sanction est devenue désuète et cet article du code pénal paraît contraire à l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme qui garantit la liberté de pensée, de conscience et de religion. Cette disposition empêche en effet des citoyens qui ne veulent pas se marier civilement d'avoir accès au mariage religieux – à moins qu'ils ne s'unissent à l'étranger. Il est temps d'abroger cet article du code pénal.

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J'émets un avis défavorable à cet amendement, son objet étant différent de celui du projet de loi. Le seul rapport entre ces deux sujets, monsieur de Courson, serait d'imaginer que l'ouverture du mariage civil aux couples de même sexe incite les couples hétérosexuels à ne plus s'unir civilement, je ne veux pas croire que ce soit votre avis.

Le mariage civil est une institution républicaine et laïque : les dispositions juridiques qui lui sont attachées ne sont pas offertes par le mariage religieux. Ne semons pas de confusion sur ce point chez nos concitoyens.

Par ailleurs, pour constituer le délit de célébration du mariage religieux, les éléments suivants doivent avoir été réunis : caractère religieux du mariage déjà célébré, circonstance aggravante d'habitude, absence de mariage civil préalable et intention délictueuse. La réunion de l'ensemble de ces quatre éléments est rare, mais leur effet dissuasif commande de les maintenir dans notre droit.

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Étant globalement opposé aux sanctions pénales – dont l'utilité est faible –, je préférerais que le code pénal se contente de poser l'interdit du mariage religieux non précédé du mariage civil.

Puisque notre collègue M. Noël Mamère a été suspendu de ses fonctions de maire de Bègles pendant un mois après avoir célébré un mariage entre deux personnes du même sexe, l'on pourrait imaginer un système qui interdise aux ministères du culte d'officier en cas d'infraction à la règle qu'ils doivent respecter. Si M. de Courson approuvait cette proposition, je me rallierais à son amendement.

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Cette interdiction date, me semble-t-il, de l'instauration du mariage civil, c'est-à-dire de 1792, et non de l'époque napoléonienne. Il est intellectuellement séduisant de pouvoir séparer totalement le mariage religieux et le mariage civil. Cela consacrerait l'aboutissement du processus de laïcisation du mariage et conférerait au mariage civil le caractère d'institution.

Par ailleurs, l'article 433-21 du code pénal possède la vertu de lutter contre la polygamie. En effet, certains cultes encouragent les mariages qui ne se limitent pas à deux personnes. Cet article protège les femmes qui se croient mariées alors qu'elles ne le sont pas au regard de la loi.

Toutefois, madame la garde des Sceaux, pourriez-vous demander à vos services de réfléchir à une nouvelle rédaction de cet article qui modifierait le régime de la sanction et qui intégrerait l'ensemble des personnes pouvant faire office de ministre du culte ?

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Les arguments avancés par M. le rapporteur comme par les députés de la majorité sont difficiles à suivre. Tout d'abord, une République qualifiée de laïque par sa Constitution peut-elle conserver dans son droit une telle disposition ?

En outre, monsieur le rapporteur, mesdames les ministres, quelle est votre position sur la question de la compatibilité de cet article 433-21 du code pénal avec l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme ?

Enfin, la polygamie n'est pas du tout concernée par cet article ; à l'époque où Napoléon a décidé cette interdiction, la religion était un service public et les ministres du culte étaient des fonctionnaires, ce qui n'est plus le cas – sauf en Alsace-Moselle.

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Monsieur le rapporteur, mesdames les ministres, quelle est la définition d'un mariage religieux ?

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle étudie l'amendement CL 463 de M. Sergio Coronado.

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Cet amendement vise à permettre aux couples de femmes d'accéder à la PMA.

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Je renvoie à mes interventions sur l'AMP. Avis défavorable.

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Le débat ayant déjà eu lieu, je soumets cet amendement au vote.

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Refuser le débat de la sorte est inacceptable !

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle examine l'amendement CL 195 de M. Olivier Dussopt.

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Cet amendement vise à inscrire le principe de l'ouverture de la PMA aux couples de femmes. Les modalités seront précisées dans un second texte, conformément au calendrier annoncé par le Gouvernement. J'imagine que M. le rapporteur objectera les mêmes arguments à cette proposition qu'à celle présentée par mon collègue M. Coronado, et que mon amendement sera repoussé. Je le maintiens néanmoins pour que la discussion ait lieu en séance.

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En effet, monsieur Dussopt, j'émets un avis défavorable au regard des engagements pris par le Gouvernement.

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Tout le monde est témoin de votre façon de présider ! Vous refusez le débat, monsieur le président, c'est scandaleux ! Depuis le début de la discussion de ce projet de loi, votre méthode est le passage en force !

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Monsieur le président, nous souhaitons des débats sereins et vous les court-circuitez !

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CL 55 de M. Charles de Courson.

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Monsieur de Courson, soit vous défendez immédiatement votre amendement, soit je donne la parole à M. le rapporteur.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle en vient à l'amendement CL 49 de M. Xavier Breton.

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La manière dont vous présidez est scandaleuse, monsieur le président, et tout le monde peut en être le témoin !

L'amendement CL 49 est retiré.

La Commission étudie l'amendement CL 43 de M. Charles de Courson.

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Monsieur le président, je suis extrêmement choqué de la façon dont vous présidez.

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Vous m'avez empêché de défendre l'amendement CL 55, car vous ne respectez même pas le règlement.

L'étude d'impact accompagnant le projet de loi n'en a pas évalué les conséquences sur plusieurs prestations sociales, ainsi que sur certains prélèvements fiscaux. Cet amendement a donc pour objet de demander au Gouvernement de mesurer, dans un rapport transmis au Parlement, l'impact de son projet sur les pensions de réversion. Actuellement, les couples homosexuels, comme l'ensemble des couples pacsés, ne peuvent pas bénéficier de la pension de réversion. Ce sujet est sérieux et je suis étonné que le Gouvernement n'ait prévu aucune mesure pour le traiter. Connaître l'impact d'un tel projet – notamment sur les régimes de retraite qui connaissent déjà des difficultés financières – est indispensable.

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La commission des Lois a pour tradition – dont Jean-Luc Warsmann avait pris l'initiative au cours de la précédente législature – de s'opposer aux amendements réclamant un rapport à soumettre au Parlement.

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Pour cette raison, monsieur le président, mon avis est défavorable.

Par ailleurs, monsieur de Courson, vous réclamez un rapport sur les pensions de réversion avant le 1er septembre prochain. Est-ce à dire que vous imaginez que les couples de même sexe qui vont se marier vont souffrir d'un taux de mortalité très élevé dans les mois qui viennent ?

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La requête de M. de Courson mérite une réponse plus sérieuse. M. le rapporteur est économe de ses paroles et, quand il intervient, nous souhaiterions qu'il s'appuie sur des éléments solides.

La question de la pension de réversion est importante. Elle avait été soulevée au cours du débat sur la réforme des retraites. Certains députés de gauche avaient voulu l'accorder aux partenaires pacsés, et l'ancienne majorité avait fait obstacle à cette extension. Être informé des conséquences financières de ce projet de loi est une exigence de bon sens. Cette évaluation devrait avoir été conduite et son absence de l'étude d'impact est choquante. Nous ne prévoyons aucun pic de mortalité, monsieur le rapporteur, mais éclairer le Parlement sur un tel sujet est la moindre des choses.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CL 44 de M. Charles de Courson.

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Cet amendement rejoint le précédent et réclame l'évaluation financière des conséquences de ce texte sur la majoration pour enfants. Cette estimation est, là encore, absente de l'étude d'impact. Or, plusieurs questions se posent : comment les majorations pour enfants seront-elles réparties ? Dans un couple de deux femmes, la mère de l'enfant sera-t-elle la seule à bénéficier des majorations ou celles-ci seront-elles partagées à la discrétion du couple ?

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La doctrine de Jean-Luc Warsmann – qui, au passage, ne consistait pas à proscrire l'expression, comme vous venez de le faire, monsieur le président – n'interdit pas que nous puissions bénéficier de projections sur l'évolution des pensions de réversion et, plus largement, sur les conséquences financières du texte que la majorité s'apprête à voter.

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Notre demande résulte du vide de l'étude d'impact et ne peut donc pas être balayée d'un revers de la main. Ce projet de loi possède un caractère sociétal, mais il induit également un impact économique et financier qui doit être étudié.

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Ces amendements mettent en lumière la dimension sociale de ce projet de loi. Cela nous ramène, là encore, à la contestation de la légitimité même des majorations pour enfants que certains députés avaient menée lors de la discussion sur la réforme des retraites. Notre inquiétude réside dans le fait que votre projet de loi fragilise le système des majorations pour enfants et conforte ceux qui veulent le supprimer. Afin de se prémunir contre ce risque, la rédaction d'un rapport ne serait pas inutile.

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L'article L. 351-4 du code de la sécurité sociale dispose que « Les parents désignent d'un commun accord le bénéficiaire de la majoration [de durée d'assurance] ou, le cas échéant, définissent la répartition entre eux de cet avantage […]. En cas de désaccord exprimé par l'un ou l'autre des parents […], la majoration est attribuée par la caisse d'assurance vieillesse compétente à celui des parents qui établit avoir assumé à titre principal l'éducation de l'enfant pendant la période la plus longue. À défaut, la majoration est partagée par moitié entre les deux parents. »

Par conséquent, l'arrêt de libre partage, au sein du couple, ne soulève pas de difficulté au regard de l'ouverture du mariage aux couples de même sexe. Il n'est donc pas nécessaire de modifier la loi.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle est saisie de l'amendement CL 45 de M. Charles de Courson.

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Mon ami Jean-Luc Warsmann a instauré cette règle d'opposition systématique aux amendements réclamant la rédaction d'un rapport à soumettre au Parlement, par crainte de voir se multiplier les rapports sans intérêt. C'est la dévoyer que de refuser une demande qui ne découle que de l'absence de toute évaluation sociale et fiscale dans l'étude d'impact.

Mesdames les ministres, quel est l'ordre de grandeur de l'impact fiscal du mariage pour tous ? D'après les études qui ont été menées, les homosexuels disposent d'un patrimoine et d'un revenu bien supérieurs à la moyenne des Français. L'ouverture du mariage aux couples du même sexe aura donc un coût pour le trésor public. À combien est-il estimé ?

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Si nous suivons votre rigueur, monsieur le président, et que les rapports que nous réclamons ne peuvent être élaborés, au moins le Gouvernement devrait-il répondre séance tenante à nos questions !

Ainsi, nous souhaiterions connaître les conséquences du projet de loi que le Gouvernement anticipe sur la mise en oeuvre de l'obligation alimentaire. Face à la complexification que la reconnaissance de l'homoparenté, combinée aux recompositions familiales, allait induire, le laboratoire des idées du parti socialiste avait affirmé, il y a quelques mois, que l'obligation alimentaire devait être due aux deux premiers parents dans l'ordre chronologique.

La Commission rejette l'amendement.

La séance est suspendue à vingt heures.

La séance est reprise à vingt et une heures quarante.

La Commission poursuit l'examen des articles du projet du projet de loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe.

Chapitre II Dispositions relatives au nom de famille (intitulé nouveau)

La Commission examine l'amendement CL 515 du rapporteur.

La Commission adopte l'amendement CL 515.

Article 2 (art. 311-21, 311-23 et 357 du code civil) : Conséquences de l'ouverture de l'adoption plénière aux couples mariés de personnes de même sexe sur la dévolution du nom de famille

La Commission examine les amendements identiques de suppression de l'article CL 16 de M. Philippe Houillon, CL 51 de M. Xavier Breton, CL 136 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 266 de M. Philippe Gosselin, CL 289 de M. Hervé Mariton et CL 404 de Mme Marie-Jo Zimmermann.

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L'amendement CL 16 tend à supprimer l'article qui, sous couvert de régler des problèmes patronymiques, consacre l'établissement d'une filiation adoptive par des couples homosexuels, c'est-à-dire d'une filiation issue de deux hommes ou de deux femmes, qui est impossible et à laquelle je ne peux donc pas souscrire.

Hier, le rapporteur a balayé tout risque d'inconstitutionnalité, au motif que le Conseil constitutionnel s'empresserait de consacrer toute liberté nouvelle. Celui-ci a rendu onze décisions sur la base des principes fondamentaux connus par les lois de la République, les unes consacrant des libertés, d'autres visant à protéger des droits existants. Peut-être les sages protégeront-ils la filiation crédible au détriment de celle que vous voulez instaurer.

L'exposé des motifs de l'amendement CL 463 de Sergio Coronado rappelle que l'ouverture à l'adoption sera limitée par le faible nombre d'enfants adoptables en France, et que très peu de pays autorisent l'adoption pour les couples homosexuels. C'est pourquoi, si vous consacrez en droit une filiation impossible en fait, les couples se tourneront vers la PMA et la GPA. Or sur ces sujets, il n'y aura pas de second texte. Puisque, contrairement au mariage entre personnes du même sexe, la filiation ne rencontre pas l'accord de nos compatriotes, vous ne prendrez pas le risque de voter une seconde loi sur la famille. Vous créerez donc, comme l'ont fait d'autres pays, un appel d'air vers le tourisme procréatif, qui consiste à chercher à l'étranger le moyen de satisfaire ce que vous appelez une « demande parentale ». Bref, les couples s'adresseront à des réseaux étrangers, dans des conditions que réprouverait le Comité national d'éthique. Une GPA se paie 1 500 euros en Ukraine et un peu moins en Inde…

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Je me félicite que nos débats reprennent dans des conditions plus sereines. Je souhaite que nous puissions nous exprimer sans que nos micros soient coupés ! À cette occasion, chacun a pu constater la partialité du président.

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Pour réfléchir à l'adoption, nous devons savoir quelle est notre vision de la filiation. Il existe un pilier biologique ou corporel : un homme et une femme créent un être qui leur ressemble. Quand ce pilier manque, il existe une carence et une souffrance. Il suffit de voir la détresse des couples stériles ou des enfants qui ne connaissent pas leurs parents biologiques.

Le deuxième pilier est éducatif, affectif ou, comme l'a dit un pédopsychiatre, psychique. Il s'agit pour les parents d'aimer et d'élever leurs enfants et, pour ceux-ci, de se sentir aimés. Ce pilier est indispensable. L'État y supplée quand il confie des enfants battus dans leur foyer à des familles d'accueil. Ce pilier n'est pas moins important pour des parents adoptifs ou des enfants adoptés, car il existe, quoi qu'en disent nos collègues, des échecs en matière d'adoption.

Le troisième est la reconnaissance par la société de l'union entre les parents et du lien de filiation.

Le mécanisme que vous proposez fait l'impasse sur le premier pilier, alors que les trois sont indispensables pour constituer la filiation.

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Petit à petit, vous faites primer la filiation sociale sur la filiation biologique, ce qui révèle sans doute un changement de civilisation. Jusqu'à présent, sans nier la réalité de la filiation juridique et affective, ni remettre en cause la sincérité des personnes, on considérait que la filiation n'était pleinement accomplie que lorsque les trois éléments étaient réunis.

Je n'ignore pas que la loi a du mal à prendre en compte certaines évolutions sociales, et que certains textes sont difficiles à écrire. Les techniques de PMA ont percuté parfois violemment la notion de filiation biologique, mais celle-ci reste source de norme et de droit. L'affaiblir ne profitera ni au corps social ni aux personnes.

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L'article prétend adapter la législation existante sur les noms de famille, mais il pose en fait un problème plus complexe. Du mariage découle la possibilité pour les couples d'adopter sans qu'il soit besoin de modifier le code civil ni le code de la famille. C'est pour cela que nous sommes opposés au mariage entre personne de même sexe, et non à une forme d'union civile, qui peut apporter certaines solutions. Notre position ne relève par conséquent d'aucune homophobie.

Si la législation doit évoluer sur certains points, nous refusons que la filiation sociale en vienne à nier la filiation biologique.

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L'article doit être supprimé, car l'adoption envisagée n'est pas souhaitable. Elle se fonderait sur un lien humain qui, s'il peut justifier certaines formes de reconnaissance, ne peut être assimilé à un lien familial. Ce dispositif pose plus de difficultés sociales qu'il n'en résoudra. C'est d'ailleurs la dimension sociale du projet qui justifie notre demande d'un référendum populaire.

Les possibilités d'adopter seront nulles à l'international et extrêmement réduites sur le plan national. Les services sociaux seront-ils amenés à respecter des quotas pour garantir l'adoption par des couples de même sexe ? Quant à régulariser la transgression des règles, cela revient à privilégier les comportements illégaux. La seule solution restera la PMA.

Si nous reconnaissons le droit des tiers, car certaines situations de fait peuvent se produire dans le respect de la loi, nous récusons que la réponse à ce problème passe par l'adoption, c'est-à-dire par l'approche dite du « beau-parent ». Pourquoi donner aux tiers le nom de « parents », fût-ce en accolant un adjectif à ce nom ? Nous ferons des propositions en ce qui les concerne, car nous sommes attachés à construire grâce à des réponses concrètes, alors que vous ne cherchez qu'à démolir par des réponses idéologiques.

La Commission rejette les amendements identiques CL 16, CL 51, CL 136, CL 266, CL 289 et CL 404.

Elle en vient à l'amendement CL 507 de Mme Corinne Narassiguin.

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À l'égard du nom de famille, l'amendement vise à lever la discrimination, particulièrement pénalisante pour les femmes, entre la filiation biologique et la filiation adoptive.

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Avis très favorable. Le maintien d'une règle d'attribution patronymique du nom de famille pour les seuls cas de filiation par le sang est susceptible d'introduire une rupture d'égalité entre les couples.

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Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Sagesse.

La Commission adopte l'amendement CL 507.

Elle adopte ensuite successivement les amendements rédactionnels CL 516 et CL 517 du rapporteur.

Elle en vient à l'amendement CL 41 de M. Yves Goasdoué.

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L'amendement est technique. Le texte prévoit que l'enfant prendra le nom de l'adoptant et de son conjoint ou des deux adoptants, accolés selon l'ordre alphabétique. Quand il n'y a pas d'accord, il peut arriver que les noms accolés dans cet ordre soient inappropriés ou contraires à l'intérêt de l'enfant, auquel cas je propose que l'on saisisse le juge.

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Avis défavorable. L'article 2 tire les conséquences de l'ouverture du mariage aux couples de même sexe, en modifiant a minima les règles actuelles concernant l'évolution du nom de famille en cas d'adoption plénière. Il n'y a pas lieu d'ajouter un nouveau cas d'intervention du juge, d'autant qu'il s'agit d'une situation très rare.

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Dans le premier paragraphe de l'exposé des motifs, quelle différence faites-vous entre « l'adoptant et son conjoint » et « chacun des deux adoptants » ?

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Il y a deux types d'adoption : l'adoption conjointe, ouverte par le texte, et l'adoption intrafamiliale, qui découle de l'adoption par le conjoint célibataire.

La Commission rejette l'amendement CL 41.

Puis la Commission adopte successivement les amendements rédactionnels CL 518 et CL 519 du rapporteur.

Elle adopte ensuite l'article 2 modifié.

Article 3 (art. 361 et 363 du code civil) : Conséquences de l'ouverture de l'adoption simple aux couples mariés de personnes de même sexe sur la dévolution du nom de famille

La Commission examine les amendements identiques de suppression de l'article CL 17 de M. Philippe Houillon, CL 53 de M. Xavier Breton, CL 137 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 267 de M. Philippe Gosselin, CL 290 de M. Hervé Mariton et CL 405 de Mme Marie-Jo Zimmermann.

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Je peux comprendre votre état de stress, monsieur le président : il reste environ 400 amendements – même si un grand nombre d'entre eux vont sans doute tomber –, et je suppose que vous voulez terminer ce soir l'examen du texte. Il existe des impératifs de majorité : nous savons comment cela se passe, parce que nous connaissons bien la maison. Vous en êtes là, mes chers collègues : parce que vous pensez qu'il faut absolument terminer la discussion, vous n'êtes plus dans le débat. Dès lors, il ne sert plus à rien d'intervenir. Je parle sous le contrôle de Mme la garde des Sceaux, c'est une « révolution sociale ». Or, examiner un sujet aussi fondamental prend du temps.

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Il est en effet dommage que, sur un texte qui porte un changement de civilisation, nous n'ayons pas le temps de débattre.

Nous ne cherchons pas à faire de l'obstruction : 49 députés ont cosigné l'amendement CL 53 ! Je m'exprime donc également au nom de mes 48 collègues.

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Déposer 15 amendements identiques de suppression sur chaque article, ce n'est pas faire preuve d'une volonté d'obstruction ?

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Nous aurions pu en déposer autant que de députés signataires. Si nous ne l'avons pas fait, c'est parce que nous souhaitons aller au fond des choses.

J'aimerais, monsieur le rapporteur, mesdames les ministres, que vous nous précisiez quelle est votre conception de la filiation. Que signifie pour vous être père ou mère, fils ou fille ? Vous reconnaissez-vous dans ces trois piliers corporel, éducatif et social ? Ou pensez-vous qu'il faut prendre en compte le désir d'adultes réclamant un « droit à l'enfant » ? Dites-le nous, afin que ce qui nous sépare soit bien clair ! Pour notre part, nous souhaitons mettre en place un système qui favorise le lien de filiation, qui le répare en cas d'accident de la vie, sans pour autant créer de nouvelles situations. Ne vous contentez pas de lire des fiches ou des extraits de jurisprudence, allez au fond du débat !

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Plutôt que de se donner l'ambition de refonder la filiation et la famille, le Gouvernement aurait pu faire le choix d'examiner ce que l'on pourrait tirer de l'adoption simple.

L'adoption simple est un outil efficace, pouvant répondre à de nombreuses situations concrètes. Son nom est cependant une source de difficultés. Nous sommes très hostiles à l'adoption plénière, et hostiles à l'adoption simple parce que, hélas !, sa désignation, au-delà d'un cadre juridique qui est bien établi, porte une vision caractérisée par la confusion. Mais le Gouvernement, en anticipant le débat sur le droit des tiers, aurait pu choisir une autre voie : transformer l'adoption simple, éviter toute confusion – y compris terminologique – avec l'adoption plénière, et lui donner la possibilité de répondre à certaines situations concrètes auxquelles nous sommes confrontés aujourd'hui. Il aurait pu proposer une solution objectivement moins choquante. Si nous défendons ces amendements de suppression, c'est donc aussi parce que vous vous êtes enfermés dans ce choix idéologique. Pour notre part, nous sommes prêts à proposer de changer le nom de l'adoption simple et d'en faire un outil pour répondre à la problématique du droit des tiers, y compris dans les foyers dont les deux membres sont du même sexe.

Je le répète : nous adoptons une approche concrète, tandis que vous êtes bloqués dans une approche idéologique, dont vous faites payer le prix à l'ensemble de la société.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements identiques de suppression CL 17, CL 53, CL 137, CL 267, CL 290 et CL 405.

Elle adopte ensuite successivement les amendements de précision CL 520 et CL 521 du rapporteur.

Puis elle est saisie de l'amendement CL 522 du même auteur.

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Pourquoi est-il utile de préciser que le consentement de l'adopté doit être personnel ?

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Le consentement d'un mineur peut être exprimé par ses parents. Il convient de préciser que ce qui doit être recueilli est bien le consentement personnel de l'enfant.

La Commission adopte l'amendement.

Elle adopte ensuite l'amendement de précision CL 523 du rapporteur.

Puis elle en vient à l'amendement CL 42 de M. Yves Goasdoué.

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Il relève du même esprit que mon amendement précédent. En l'absence de déclaration conjointe mentionnant le nom de l'enfant, celui-ci se verra accolé à son premier nom d'origine le premier nom de son adoptant.

Je suppose que le rapporteur exprimera à nouveau un avis défavorable. Je pense cependant qu'il faudrait permettre au juge d'intervenir afin d'éviter que des enfants portent des noms incongrus. Certes, le cas serait rarissime : si l'on adopte, ce n'est pas dans le but de ridiculiser un enfant. Mais il peut se présenter.

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Avis défavorable, pour les mêmes raisons que précédemment.

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Je trouverais plus normal de faire confiance aux parents pour inverser l'ordre des noms si cela permet d'éviter, dans l'intérêt de l'enfant, une association incongrue.

Mais cette affaire montre que l'application de l'article 3 va susciter un véritable Rubik's Cube de noms. Souhaitons bonne chance aux parents adoptants : nous allons connaître des lignes de filiation très difficile à suivre, avec des frères et soeurs portant des associations de noms différentes. Le nom est pourtant fait pour identifier les gens !

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte ensuite l'amendement de précision CL 524 du rapporteur.

Elle adopte enfin l'article 3 modifié.

Après l'article 3 :

La Commission est saisie de l'amendement CL 165 de M. Jean-Pierre Decool.

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Cet amendement reprend l'article 1er de la proposition de loi n° 309 visant à préserver l'autorité partagée et à privilégier, en cas de séparation des parents, le choix de la résidence alternée pour l'enfant, de façon à préserver son équilibre. Le texte que nous examinons peut en effet constituer un bon véhicule législatif pour cette disposition qui représenterait une réelle avancée sociale, sachant que de nombreux pédopsychiatres ont souligné la nécessaire présence des deux parents au quotidien.

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Avis défavorable. La question de la résidence alternée est réelle, mais elle concerne l'ensemble des couples, qu'ils soient composés de personnes de sexes différents ou de même sexe. L'amendement n'a donc pas de lien direct avec l'objet du présent projet de loi.

La Commission rejette l'amendement.

Elle examine ensuite l'amendement CL 168 de M. Jean-Pierre Decool.

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Je suis étonné par l'argumentation du rapporteur qui, tout en admettant la légitimité de s'interroger sur la résidence alternée, prétend que cette question n'a pas de lien avec le projet de loi que nous examinons aujourd'hui. Nous parlons pourtant de la famille au sens large, ainsi que des enfants. Nous parlons de mariage, et donc, le cas échéant, de divorce, qu'il s'agisse des couples homosexuels ou hétérosexuels. La question de la résidence alternée mérite donc d'être étudiée par notre Commission.

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Un texte sur la famille a été annoncé par Mme la ministre de la Famille. Cependant, je vais préciser les raisons pour lesquels mon avis est également défavorable sur cet amendement.

La rédaction de l'article 373-2-9 du code civil permet d'ores et déjà au juge aux affaires familiales (JAF), en cas de désaccord de l'un des deux parents ou à la demande de l'un d'eux, d'expérimenter à titre provisoire la résidence alternée en cas de séparation. Votre amendement prévoit qu'en cas de désaccord de l'un des parents, ce dernier est entendu par le JAF, lequel doit donner la priorité à la résidence alternée, sauf décision contraire spécialement motivée. Il semble pourtant dangereux de vouloir privilégier à tout prix la résidence alternée, a fortiori lorsque les parents sont en désaccord. Une telle solution ne serait pas adaptée à toutes les situations se présentant au juge.

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Pourquoi affirmer qu'il n'y a pas de lien direct entre l'amendement et le projet de loi ? Aujourd'hui, en cas de séparation des parents, on tend à donner de façon privilégiée la garde à la mère, au nom de l'intérêt de l'enfant. Mais si ce sont deux hommes ou deux femmes qui se séparent, il sera plus difficile d'affirmer qui doit obtenir la garde. Dès lors que l'on promeut l'égalité, il serait logique d'instituer un mode de garde égalitaire en cas de divorce. Si la réflexion sur la résidence alternée concerne également les couples hétérosexuels, elle nous semble encore plus cruciale s'agissant des couples homosexuels, en raison du caractère plus complexe de la décision que le juge devra prendre dans leur cas.

La Commission rejette l'amendement.

Elle en vient ensuite à l'amendement CL 167 de M. Jean-Pierre Decool.

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Je remercie M. le rapporteur d'avoir développé ses arguments : cela montre qu'il prend au sérieux nos amendements sur la garde alternée, dont l'examen était légitime dans le cadre d'un débat sur la famille.

L'amendement CL 167 favorise le recours à la médiation familiale pour la mise en place de la garde alternée.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie de l'amendement CL 472 de M. Sergio Coronado.

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Lors des auditions, nous avons pris connaissance de situations très pénibles, à la fois pour les parents et les enfants de familles homoparentales. Ainsi, dans la mesure où, en France, la PMA est interdite aux couples de personnes de même sexe, et la GPA à l'ensemble des couples, il existe des projets de coparentalité entre des couples de femmes et des couples d'hommes.

L'amendement vise à modifier l'article 377 du code civil afin que la délégation-partage de l'autorité parentale puisse bénéficier au conjoint d'un parent, de façon à tenir compte du lien affectif existant entre un enfant et un tiers ayant participé à son éducation.

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Avis défavorable.

Sur la forme, l'amendement propose de modifier l'article 377 du code civil, consacré à la seule délégation d'autorité parentale, mais il aurait dû viser l'article 377-1, qui concerne la délégation-partage. Nous avons vu cependant, lors des auditions, qu'une grande confusion demeurait entre ces deux notions. Les deux procédures sont d'ailleurs très aléatoires, car conditionnées par des circonstances laissées à la libre appréciation des juges. Ainsi, d'un point à l'autre du territoire, l'attitude des juges et donc la jurisprudence peuvent varier énormément. Une réforme nous semble donc nécessaire, car au-delà des couples de personnes de même sexe se pose la question du statut du tiers. J'invite le Gouvernement à s'en saisir dans le cadre du futur projet de loi consacré à la famille.

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Nous disposons de quelques jugements, mais pas d'une véritable jurisprudence, dans la mesure où la Cour de cassation ne s'est pas prononcée sur le sujet. Cependant, il est vrai qu'un problème se pose, auquel il conviendra d'apporter des réponses au moment d'examiner le projet de loi sur la famille.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Je le répète, la loi sur la famille qui sera présentée en mars concernera indifféremment les familles hétérosexuelles comme homosexuelles. Dès lors, il est sans doute préférable d'y inclure une réflexion sur la garde alternée ou le statut du tiers, plutôt que d'insérer, à propos de ces questions, des amendements dans un projet de loi qui ne s'y prête pas nécessairement.

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L'amendement introduit un débat dans lequel nous entrerons volontiers, avec la volonté de résoudre concrètement certaines situations. Mais je m'interroge sur les mots : « si l'enfant résulte d'un projet parental commun ». Je ne sais pas s'il s'agit d'une expression classique, mais je la trouve curieuse et bien peu jolie. Même si je comprends l'idée sous-jacente, un enfant ne résulte pas d'un projet ; ce n'est d'ailleurs pas un résultat.

Par ailleurs, pourquoi les auteurs de l'amendement n'ont-ils pas cherché à améliorer l'attribution de la délégation-partage de l'autorité parentale dans le cas où un enfant serait né, avant ce que vous appelez le projet parental commun ? Considérez-vous qu'une telle situation serait moins problématique ?

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Tout d'abord, il est vrai que l'amendement ne vise pas le bon article du code civil.

Ensuite, l'expression à laquelle M. Mariton fait allusion a déjà été employée dans des décisions de justice, même si elle ne figure pas dans le code civil. Je conçois qu'elle n'est pas très élégante, mais ce n'est pas ce dont la loi se préoccupe.

Enfin, nous ne cherchons pas à régler autre chose que la situation visée par l'amendement.

L'amendement est retiré.

Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette successivement les amendements CL 169 et CL 166 de M. Jean-Pierre Decool.

Chapitre III Dispositions de coordination

Article 4 (articles 34, 37, 63, 71, 73, 75, 78, 79, 108, 108-2, 113, 148, 149, 150, 151, 154, 173, 182, 183, 191, 204, 205, 206, 211, 342-7, 347, 348, 348-2, 348-4, 365, 367, 368-1, 371, 371-1, 371-3, 371-4, 372, 373, 373-1, 373-2, 373-3, 373-4, 375, 375-3, 375-6, 375-7, 375-8, 376-1, 377, 377-1, 377-2, 378, 378-1, 381, 382, 383, 387, 389-7, 390, 391, 395, 399, 401, 403, 409, 413-2, 413-3, 413-7, 430, 448, 449, 454, 456, 460, 462, 477, 510, 601, 729-1, 731, 733, 734, 735, 736, 737, 738, 738-1, 738-2, 739, 740, 743, 745, 746, 747, 749, 756, 757-1, 757-2, 757-3, 758, 904, 911, 935, 975, 980, 995, 1082, 1114, 1384 et 1438, section première du chapitre III du titre Ier du livre troisième et paragraphe 3 de la section I du chapitre III du titre Ier du livre III du code civil) : Coordinations au sein du code civil :

La Commission est saisie de cinq amendements visant à supprimer l'article : les amendements CL 18 de M. Philippe Houillon, CL 140 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 268 de M. Philippe Gosselin, CL 291 de M. Hervé Mariton, CL 406 de Mme Marie-Jo Zimmermann.

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Si cet article n'est pas le plus important sur le plan symbolique, il est probablement celui qui aura les plus grands effets sur notre droit.

Quand nous avons expliqué qu'une des conséquences du texte serait de supprimer de nombreuses mentions des termes « père » et « mère » dans notre corpus juridique, on nous a traités de « menteurs » et de « falsificateurs ». Or, l'article 4 prévoit la suppression de 148 occurrences des termes « père » et « mère », « mari » et « femme », « épouse » et « époux », « aïeul » et « aïeule » – bref, toutes les marques de l'altérité féminin-masculin – dans sept codes différents. Évidemment, cela suscite une certaine émotion !

D'ores et déjà, sur les formulaires de la SNCF, les mentions du « père » et de la « mère » ont été remplacées par celles du « parent 1 » et du « parent 2 » ; c'est également le cas dans d'autres documents. Il y a là une source d'inquiétude légitime pour certains de nos concitoyens, qui considèrent qu'ils vont être privés par la loi de leur « titre » de père et de mère. Ils trouvent cela insupportable, et je suis du même avis qu'eux.

Ces modifications sont d'ailleurs dans la logique du texte. Dès lors que, dès l'article 1er, on considère que l'altérité sexuelle n'est plus fondatrice du mariage et de la famille, il faut, dans un souci de cohérence, supprimer tout ce qui peut contribuer à l'inscrire dans le droit. Se trouve ainsi marquée la renonciation pure et simple à l'idée que la composante biologique de la nature humaine est fondatrice d'un certain nombre d'obligations et de droits.

Voilà les motifs pour lesquels nous proposons la suppression de cet article.

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La suppression des termes « père » et « mère » et « mari » et « femme » est un choc pour beaucoup de nos concitoyens. Cela nous a été confirmé par les échanges que nous avons eus avec eux et par les courriers que nous avons reçus.

Je regrette qu'avant même d'être votées, ces dispositions soient entrées en application. Ainsi, le formulaire de demande de la carte de famille nombreuse utilise d'ores et déjà les termes de « parent 1 » et de « parent 2 », de même que le formulaire d'inscription en ligne à Sciences Po. Ce n'est pas du fantasme ! Nous voulons stopper ce processus.

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Chacun voit bien que nous sommes là au coeur du projet de loi et des débats qu'il a provoqués. Oui, le texte du Gouvernement prévoit bien la suppression de très nombreuses mentions des termes de « père » et de « mère » et d'autres marques sexuées ; l'adoption du seul premier alinéa de l'article 4 provoquerait la disparition de 52 occurrences ! La suppression en nombre de ces termes fait partie des multiples effets de la nouvelle loi.

Madame la garde des Sceaux, vous avez démontré votre engagement et votre maîtrise du texte, ainsi que l'attention que vous portiez à nos travaux ; mais dimanche soir, à la télévision, en réponse aux manifestants, vous avez prétendu qu'il n'y avait pas de disparition des termes de « père » et de « mère » dans le texte. Excusez-moi, mais je pense que vous cherchez à tromper ceux qui vous écoutent ; nous n'avons jamais dit qu'il y avait une disparition complète des termes ; vous, en revanche, vous cherchez à masquer les quelque 150 suppressions des termes de « père » et « mère » qu'opère le projet.

Ce texte ne peut pas ne pas avoir de conséquences sur un grand nombre de nos concitoyens. Les choses eussent été différentes avec l'alliance civile. Ce que nous contestons, c'est la réponse que vous avez choisie, et qui vous conduit, non seulement à introduire de nouvelles dispositions pour les couples de personnes de même sexe et pour leur filiation, mais également à supprimer, dans un grand nombre de cas, les termes de « père » et « mère » de notre droit. Cela vous amène même à préciser par tautologie que « l'autorité parentale appartient aux parents » !

Une question technique pour terminer. Pourquoi supprimer, à l'article 78 du code civil, la déclaration d'un des parents du défunt comme source de l'acte de décès, pour ne conserver que celle de « la personne possédant sur son état civil les renseignements les plus exacts et les plus complets qu'il sera possible » ? Il me semble important que les parents du défunt soient associés à la déclaration de décès !

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Lors de la séance de questions au Gouvernement du 6 novembre dernier, j'ai demandé si l'adoption du projet de loi aboutirait à faire disparaître les termes « père » et « mère » de notre droit. J'attendais une réponse correcte, et non que la ministre déléguée chargée de la famille me réplique avec arrogance que j'avais des fantasmes ! Cet article est bien la preuve que ce n'était pas le cas. Je ne supporte pas que l'on mente aux gens. Cessez de raconter n'importe quoi aux députés !

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Je proposerai moi-même une nouvelle rédaction de l'article 4. Avis défavorable, donc.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Madame Zimmermann, la question n'est pas de savoir si vous avez, personnellement, des fantasmes : je pense que cela n'intéresse personne ! En revanche, j'ai dit que vous étiez, les uns et les autres, en train de diffuser l'idée que nous voulions supprimer les notions de père et de mère, ce qui laissait penser que les couples hétérosexuels ne pourraient plus user de ces qualifications.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Non : j'ai dit que vous jouiez sur les peurs, et qu'il n'était pas nécessaire d'ouvrir la boîte à fantasmes. On voit bien les inquiétudes que vous pouvez développer faute d'explication, en prétendant que les couples hétérosexuels ne seraient plus reconnus dans leurs fonctions de père et de mère. Je le répète : cette loi n'enlève rien aux uns, elle ne fait qu'apporter aux autres. Et je n'aime pas non plus que l'on détourne le sens de mes propos. Vous n'avez à la bouche que le mot « mensonge » : c'est insupportable !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je confirme pour ma part les propos que j'ai tenus à la télévision : j'ai dit que les mots « père » et « mère » ne disparaîtraient pas du code civil, en réponse à la question : « Les mots de père et de mère vont-ils disparaître ? »

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Monsieur Mariton, cela fait des semaines que l'opposition essaye de faire croire aux Français que les mots de « père » et de « mère » vont disparaître du code civil. Lors des questions au Gouvernement, il ne s'agissait même pas d'une question, mais d'une affirmation !

La question que se posent les Français, ce n'est pas de savoir combien il existe de mentions des termes, mais si l'ouverture du mariage et de la filiation aux couples de personnes de même sexe modifiera quelque chose pour les couples hétérosexuels. Je le répète : les mots de « père » et de « mère » demeureront dans l'intégralité du titre VII du code civil relatif à la filiation ; quant au titre VIII relatif à la filiation adoptive, on y trouve déjà le mot « parents ». Toutefois, il serait bien misérable de notre part d'ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe et de n'en tirer aucune conséquence juridique, ce qui empêcherait dans la pratique les citoyens de jouir de leurs libertés et d'exercer leurs droits. Notre sens des responsabilités politiques nous amène donc à ne remplacer les mentions du père et de la mère que lorsque cela est strictement nécessaire. Et si vous avez envie de raconter autre chose aux Français, c'est votre liberté !

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Ce n'est pas ce que vous avez dit à la télévision !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

C'est ce que j'ai dit lors de la séance des questions au Gouvernement, qui sont retransmises à la télévision, tout comme j'avais déjà dit, devant cette Commission, que nous sommes conscients de la charge symbolique des mots, et que le fait d'ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de personnes de même sexe ne changera strictement rien à la vie des couples hétérosexuels.

J'ai même précisé qu'à chaque fois que cela avait été possible, nous n'avions pas modifié les termes. Et j'ai cité des exemples d'articles où ceux-ci étant au pluriel, nous les y avions laissés, parce qu'il n'y avait aucun risque d'ambiguïté. Vous pouvez toujours chicaner en comptant le nombre d'occurrences !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Mais nous n'avons jamais prétendu qu'il ne s'agissait pas d'une réforme importante !

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En tout cas, ce n'est pas ce que vous avez dit dimanche soir à la télévision !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Je m'en suis déjà expliquée !

L'exercice auquel vous essayez de nous contraindre est de refaire sans cesse le même débat et de répéter en boucle les mêmes arguments ! Mais ce qui importe, c'est que les Français comprennent que l'ouverture du mariage et de l'adoption pour les couples homosexuels ne changera rien pour les couples hétérosexuels. Et quand ils l'auront compris, ils auront compris votre jeu, et je ne suis pas sûre qu'ils vous en seront reconnaissants !

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Je tiens à remercier Mme la garde des Sceaux pour son explication claire et sincère. Si Mme la ministre déléguée chargée de la famille m'avait répondu ainsi, je n'aurais pas eu besoin d'intervenir.

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Quid de la modification de l'article 78 du code civil ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Elle ne figurait pas dans le projet de loi initial, qui prévoyait que la déclaration devait être faite par un parent du défunt ou par une personne disposant d'informations exactes et complètes. La modification a été demandée par le Conseil d'État, qui a considéré qu'il existait un risque de confusion sur le terme « parents » : selon lui, l'important est qu'en cas de décès, la personne qui dispose d'informations puisse les apporter ; il a donc fait supprimer la mention du parent. Personnellement, je trouve que cela manque d'élégance !

La Commission rejette les amendements CL 18, CL 140, CL 268, CL 291 et CL 406.

La Commission est saisie de deux amendements identiques, l'amendement CL 526 du rapporteur et l'amendement CL 548 de la commission des Affaires sociales, ces amendements faisant chacun l'objet de sept sous-amendements de M. Philippe Gosselin identiques un à un : les sous-amendements CL 580 à CL 586 et les sous-amendements CL 587 à CL 593.

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Mon amendement vise à réécrire l'article 4 afin de remplacer les coordinations qu'il opère par deux dispositions générales, rendant les dispositions législatives sexuées des livres Ier et III du code civil applicables aux couples de personnes de même sexe.

À cette fin, un nouvel article 6-1, placé en tête du livre Ier, et un nouvel article 718, placé en tête du livre III, indiqueront que les dispositions contenues dans ces livres faisant référence aux père et mère s'appliquent également aux parents de même sexe, en dehors des dispositions du titre VII du livre Ier.

L'amendement maintient toutefois certaines modifications du code, qui demeurent nécessaires : remplacement des termes « mari » et « femme » par « époux » aux articles 75 et 108, et remplacement des termes « beau-père » et « belle-mère » par les termes « beaux-parents » à l'article 206.

Je précise que la motivation de cet amendement tient à la rigueur juridique, et non à une quelconque volonté de rétablir symboliquement les mots « père » et « mère », qui, je le réaffirme, n'avaient jamais disparu du titre VII. D'ailleurs, je n'ai jamais compris votre attachement chamanique, quasi-biblique, à ces termes avant tout juridiques.

Cet amendement permet d'éviter des coordinations induites par le remplacement des termes « père » et « mère » par le mot « parents ». En effet, le terme de parents est parfois remplacé par l'expression « membres de la famille », qui a été critiquée notamment par le Conseil supérieur du notariat.

L'introduction de ces dispositions générales est aussi conforme à la philosophie du projet de loi, qui ne vise pas à instaurer un mariage homosexuel, mais à ouvrir le mariage tel qu'il existe dans le code civil aux personnes de même sexe, et de faire rentrer les couples homosexuels dans le code civil, sans créer un mariage homosexuel ad hoc.

Cette solution s'inspire du droit civil espagnol. L'article 44 du codigo civil a ainsi été complété par un alinéa disposant que « le mariage est soumis aux mêmes conditions et emporte les mêmes effets que les deux conjoints soient de même sexe ou de sexe différent ».

J'ajoute enfin que l'amendement va de pair avec l'amendement CL 527 portant article additionnel après l'article 4, qui vise à faire de même avec l'ensemble du reste de la législation.

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La commission des Affaires sociales a adopté un amendement identique CL 548. Je ne reprends pas l'excellente argumentation du rapporteur. Cet amendement montrera à la population que, contrairement à ce que certains essaient de faire croire, notre réforme ne bouleverse pas tout. Nous souhaitons seulement instituer l'égalité pour tous les couples. Rien ne change pour les couples hétérosexuels. Nous ne faisons que donner les mêmes droits aux couples homosexuels, et de cela nous sommes fiers.

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Le rapporteur vient de dire, je le cite, que notre attachement aux mots de « père » et « mère » était « quasi chamanique, biblique ». Voilà une excellente citation qui mérite d'être relevée et ne manquera pas d'être utilisée ! (Interruptions des commissaires socialistes). Si ce n'est pas se moquer de nous, qu'est-ce donc ?

J'en viens au sous-amendement CL 580. « L'amendement-balai » du rapporteur vise à donner l'impression que tout cela n'est que technique et n'emporte aucun « changement de civilisation », je reprends les mots de la garde des Sceaux. Selon vous, l'opposition aurait fantasmé sur la disparition des mots « père » et « mère ». Eh bien, non, car plus de 150 occurrences de ces termes étaient concernées. Qu'il ait fallu un tel amendement est la preuve même qu'il y avait une difficulté.

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Il serait bon, cher collègue, de présenter des arguments nouveaux.

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Je suis surpris de l'impréparation de ce projet de loi, supposé être pourtant le texte emblématique du début de ce quinquennat. M'étonne également la forme de mépris dont il témoigne. Les services de la Chancellerie auraient pu faire autrement que de proposer cet article 4 de coordination qui, supprimant au moins 150 fois les mots « père » et « mère », a suscité l'émoi…

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Ces arguments sont connus. Je considère que la Commission est suffisamment éclairée.

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Laissez-moi terminer, monsieur le président. À la dernière minute, le rapporteur sort de son chapeau un amendement qui va faire tomber un grand nombre des nôtres, alors qu'il y a matière à discussion. Cette façon de procéder traduit un manque de respect.

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Nos sous-amendements sont nécessaires pour bien faire comprendre le contenu même de l'amendement. Je vais défendre le CL 581.

Ce qui nous est proposé, sans que cela ne soit explicitement avoué, bien que les excès mêmes du rapporteur le trahissent, n'est qu'une stratégie pour remédier à la principale difficulté résidant dans la disparition d'innombrables occurrences des mots « père » et « mère » dans le code civil.

Je dois reconnaître, monsieur le rapporteur, que vous aviez déjà évoqué cette idée d'un « amendement-balai », à la suite sans doute de certaines des auditions auxquelles vous avez procédé, notamment celle du professeur Annick Batteur qui vous a dit à la fois être favorable au mariage et à l'adoption pour les couples de même sexe, mais estimer que le projet de loi n'était ni fait ni à faire. Le remplacement des mots « père » et « mère » par le mot « parent » et du mot « parent » par l'expression « membre de la famille » crée des fragilités juridiques et ses conséquences sont en tout cas difficiles à évaluer, vous a-t-elle dit. Vous en avez tenu compte en apportant une double correction au texte, à la fois technique – c'est dire sa qualité initiale ! – et politique – il fallait bien gommer les difficultés !

Ne sachant pas exactement ce qu'était un « amendement-balai », je me suis renseigné. J'ai ainsi appris qu'un tel amendement avait, dans la loi sur la confiance dans l'économie numérique, remplacé le mot « télécommunications » par « communications électroniques », dans la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure le mot « vidéosurveillance » par le mot « vidéoprotection », ou bien encore dans la loi ayant fusionné les professions d'avoué et d'avocat le mot « avoué » par le mot « avocat ».

Si l'on peut à la rigueur accepter cette méthode dans des cas techniques comme ceux précités, on ne le saurait en aucune manière dans un texte aussi lourd de conséquences que celui-ci. Votre façon de procéder est une insulte pour les couples de même sexe comme une insulte à la réalité de la filiation. Vous vous enfermez dans une fiction.

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Puisque vous souhaitez manifestement abréger les débats, monsieur le président, je ne répéterai pas ce que vous tenez pour des arguments éculés et défendrai en deux mots le sous-amendement CL 582. Je redis tout de même que la façon de procéder témoigne de l'impréparation du texte et d'une grande fébrilité. Cet amendement-balai constitue l'aveu même qu'il y avait bien une difficulté. Il traduit du mépris à l'égard de l'opposition qui a fourni un travail considérable pour recenser chacune des occurrences des mots « père » et « mère ». Destiné à laisser accroire qu'il ne s'agit que de points techniques, cet amendement n'abusera personne. Il y a bien, au final, un changement fondamental de l'esprit d'un nombre important d'articles du code civil, et cela vous ne pouvez le masquer. Nous aurons l'occasion d'y revenir en séance publique, puisque ce soir il faut visiblement aller vite.

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C'est quand le débat devient difficile, monsieur le président, qu'apparaît la tentation d'accélérer le débat en coupant le micro aux orateurs.

Le rapporteur a évoqué notre attachement chamanique, quasi biblique, aux mots de « père » et « mère ». Oui, nous sommes attachés aux mots de « père » et « mère », comme des millions de Français. Pour nous, ces mots ont un sens profond et nous les défendons. C'est parce que nous pensons qu'ils ne peuvent être rayés d'un coup de plume que nous avons déposé ces sous-amendements. J'ai défendu le sous-amendement CL 583.

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Je me contenterai de dire que le sous-amendement CL 584 est défendu. Je regrette de découvrir l'obligation nouvelle désormais faite à ceux qui souhaitent s'exprimer dans cette Commission de présenter des arguments nouveaux. La parole devrait être libre sur des sujets aussi importants que ceux dont nous débattons ce soir.

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Je crois au contraire avoir été constant dans ma pratique. Depuis que j'ai l'honneur de présider cette Commission, j'ai toujours souhaité que chaque intervenant développe des arguments nouveaux afin que la réflexion progresse. J'ai ici le sentiment que nous tournons en rond. Preuve en est qu'un journal en ligne résumait ce matin nos propos d'hier en huit arguments et que je n'en ai pas entendu un neuvième aujourd'hui.

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Le rapporteur a eu l'honnêteté de reconnaître qu'il s'était inspiré de ce qui avait été fait en Espagne – du moins en partie, car les Espagnols se sont attachés à distinguer le mariage des personnes de même sexe et celui des personnes de sexe différent. Pourquoi la Chancellerie n'avait-elle pas eu d'elle-même l'idée de la solution synthétique qu'il a trouvée ? Pourquoi le Gouvernement n'était-il pas allé d'emblée dans cette voie ?

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En réalité, vous rendez hommage au travail parlementaire, cher collègue.

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Ne soyez pas sévère à l'égard du Gouvernement !

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Avis défavorable à l'ensemble des sous-amendements.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Monsieur Mariton, vous qui ne cessez de donner des leçons aux uns et aux autres, devriez commencer par vous mettre en accord avec vous-même…

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Il est toujours difficile d'être en accord avec soi-même.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Dans votre cas particulier, c'est même singulièrement périlleux. (Sourires)

Le travail de la Chancellerie n'était pas satisfaisant, dites-vous. Mais l'amendement du rapporteur non plus ne vous paraît pas satisfaisant.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Vous dénoncez du mépris, tout en étant bien dans l'incapacité de prouver le mépris dont quiconque aurait fait preuve à votre égard. Mais c'est vous qui êtes méprisant à l'égard du Gouvernement, dont vous jugez le projet de loi de mauvaise qualité.

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L'opposition a tout de même le droit de le penser.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Est-ce une raison pour crier au loup ?

C'est une éthique de vie chez moi que de n'éprouver jamais de mépris pour personne et donc de n'en exprimer jamais.

Le Gouvernement a rédigé son projet de loi de la façon dont il l'a fait parce que c'est le procédé le plus courant en légistique que de mettre ainsi au point des articles de coordination. Dès lors qu'une réforme intervient, la rigueur juridique exige de veiller à en tirer toutes les conséquences dans le code concerné, en l'espèce le code civil, mais aussi dans l'ensemble des codes potentiellement concernés. Nous avions identifié huit codes concernés, ainsi que plusieurs lois, notamment celle de 1983 relative à la fonction publique, et plusieurs ordonnances, essentiellement celle de 1945 relative aux mineurs délinquants, et avions donc rédigé des dispositions de coordination afin d'apporter toutes les modifications induites par la réforme.

Il existe une autre façon de faire, celle choisie par le rapporteur, et que l'on nomme de manière quelque peu triviale « amendement-balai ». Ce ne sont là que deux façons différentes d'écrire la loi. Le Gouvernement a choisi le procédé le plus courant. Le Parlement s'apprête, semble-t-il, à faire un autre choix. Il n'y a lieu ni de se quereller, ni de manifester du mépris à l'égard de qui que ce soit, ni de taxer d'incompétence la Chancellerie. Celle-ci, monsieur Mariton, ne se résume pas à moi. C'est une administration, dont les fonctionnaires se sont mobilisés pour élaborer ce texte et ont consciencieusement fait leur travail. Il n'y a aucune raison de mépriser leur oeuvre collective.

Depuis que ce projet de loi est à votre disposition, c'est-à-dire depuis le 7 novembre dernier, pas une virgule n'en ayant été depuis lors modifiée par le Gouvernement, comme le veut d'ailleurs la procédure, vous savez pertinemment que les mots « père » et « mère » ne disparaissent pas du code civil. Vous aviez le choix de dire la vérité ou de tromper les Français sur ce sujet. Vous avez pris vos responsabilités.

Les Français, davantage que par votre jeu consistant à recenser l'occurrence de certains mots, sont intéressés à comprendre les conséquences de la réforme. Ils sont plus généreux que l'image que vous donnez d'eux.

Les exemples que vous avez cités d'institutions éminentes ou d'entreprises comme la SNCF qui utilisent le mot « parents » démontrent en réalité le contraire de ce que vous vouliez démontrer. On voit bien que l'utilisation de ce mot n'a pas fait s'effondrer la société !

La Commission rejette successivement les paires de sous-amendements identiques CL 580 et CL 587, CL 581 et CL 588, CL 582 et CL 589, CL 583 et CL 590, CL 584 et CL 591, CL 585 et CL 592, CL 586 et CL 593.

Puis la Commission adopte les amendements identiques CL 526 et CL 548.

L'article 4 est ainsi rédigé.

En conséquence, les amendements CL 56 à CL 86 de M. Xavier Breton n'ont plus d'objet.

Article additionnel après l'article 4 : Article rendant expressément applicables aux couples de personnes de même sexe, les dispositions législatives autres que celles du code civil faisant référence aux mari et femme, aux père et mère ou aux veuf et veuve :

La Commission est saisie des amendements identiques CL 527 du rapporteur et CL 549 de la commission des Affaires sociales, tendant à insérer un article additionnel et faisant chacun l'objet d'un sous-amendement identique CL 594 et CL 595 de M. Philippe Gosselin.

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La logique de l'amendement CL 527 est la même que celle du CL 526 tout à l'heure. Il est défendu.

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Comme vous ne voulez pas dire expressément que les mots de « père » et « mère », « mari » et « femme », « veuf » et « veuve » disparaissent d'un grand nombre d'articles du code civil, vous avez recours à un article-balai. Il serait de bonne pédagogie que nos concitoyens soient mieux éclairés. Tel est l'objet des sous-amendements CL 594 et CL 595. Ceux-ci visent à mettre en lumière vos contorsions pour limiter le nombre de suppressions de ces occurrences.

J'ai bien compris, madame la garde des Sceaux, qu'il existait deux façons d'écrire la loi. Il n'en reste pas moins que c'est parce que vous avez vite compris que la disparition des mots « père » et « mère » serait une affaire sensible que des corrections, déjà, ont été apportées entre l'avant-projet et le projet de loi. Mais pourquoi le Gouvernement n'a-t-il pas de lui-même proposé, comme l'a fait le rapporteur, un article-balai – je reconnais que cette désignation a quelque chose de méprisant, mais ce n'est pas moi qui suis l'auteur du concept ? Cela aurait été plus transparent.

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Je reconnais votre souci de pédagogie, monsieur Mariton, mais en l'espèce, ces sous-amendements constituent des truismes. Avis défavorable.

La Commission rejette les sous-amendements identiques CL 594 et CL 595.

Puis elle adopte les amendements identiques CL 527 et CL 549.

Après l'article 4 :

La Commission examine ensuite les amendements CL 10 et CL 12 de M. Alain Tourret, tendant chacun à insérer un article additionnel et pouvant faire l'objet d'une présentation commune.

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Fier d'avoir été, à l'époque, l'un des cosignataires de la proposition de loi ayant institué le PACS, je n'en considère pas moins aujourd'hui que celui-ci doit être amélioré. Ce projet de loi en donne l'occasion.

Le PACS ne confère pas aux partenaires le droit de faire usage du nom de l'autre, ne crée pas de vocation successorale entre eux, sauf dispositions testamentaires, n'emporte aucun effet sur la nationalité, n'emporte pas à lui seul de plein droit la délivrance d'un titre de séjour, enfin ne donne aucun droit au partenaire survivant à percevoir une pension de réversion. Ce sont ces droits, aujourd'hui conférés seulement par le mariage, que le PACS conférera demain, si mes amendements sont adoptés. Le PACS ne différerait plus alors du mariage que par les modalités de sa conclusion et de sa rupture. Il a déjà été beaucoup rapproché du mariage. Mon idée est de profiter du présent projet de loi pour le toiletter et l'en rapprocher encore davantage.

Ce sont là des cavaliers, m'objectera-t-on peut-être. Sur ce point, la jurisprudence du Conseil constitutionnel a évolué. Elle permet davantage, surtout en première lecture, de déposer un amendement à un texte donné pour modifier ou toiletter un autre texte concernant une institution semblable, similaire, proche, quasi-identique, ce qui est bien le cas du PACS par rapport au mariage.

Je suis profondément convaincu que le PACS est une institution moderne, beaucoup plus moderne que le mariage. L'évolution de la société le confirme, puisqu'on dénombre aujourd'hui chaque année 210 000 PACS pour 250 000 mariages et que les courbes devraient se croiser dans les deux années à venir.

Le PACS, institution moderne, essentielle, novatrice, est désormais accepté par les Français. Pourquoi ne pas le faire évoluer sur les six points que j'ai évoqués, sans tomber dans votre alliance civile qui n'a rien à voir ?

On pourrait également considérer que mon amendement relatif à la pension de réversion est contraire à l'article 40 de la Constitution. J'admets la pertinence de cet argument qui n'empêcherait toutefois pas l'adoption de mes autres amendements.

Nous avons une occasion unique d'améliorer le PACS, et la fenêtre de tir est étroite. Nous donnerions un mauvais signe à l'ensemble de la population si nous refusions de le faire.

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Même si elles peuvent se justifier, les modifications du PACS n'entrent pas dans le champ du texte dont nous débattons, pas plus que les règles relatives à la nationalité ou aux successions. Ces évolutions pourraient faire l'objet d'un texte ad hoc.

En tout cas, monsieur Tourret, je reconnais volontiers la constance de votre souci d'améliorer un texte dont vous avez été l'un des pères – puisque ce mot est de mise ce soir. Je suis néanmoins défavorable à vos amendements.

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Pour notre part, nous prenons acte du fait que le PACS a rencontré un vrai succès dans la société française, même si le bilan n'est pas celui qui avait été anticipé et si, à bien des égards, sa mise en oeuvre a probablement constitué un obstacle à l'amélioration de la situation juridique des couples de personnes de même sexe.

Le PACS est utile, mais il ne nous paraît pas que ce soit la forme de conjugalité idéale. Il ne nous paraît surtout pas souhaitable d'assurer une trop grande continuité entre le PACS et le mariage.

M. Alain Tourret est cohérent : considérant que le PACS est la formule d'avenir, il souhaite qu'on lui confère la plupart des droits liés au mariage. Mais, à mon sens, il n'est pas bon de confondre ces institutions. Il n'est pas souhaitable de donner des « avantages » supplémentaires aux pacsés alors qu'ils ne sont pas soumis aux contraintes prévues par le mariage.

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M. Tourret nous annonce un prochain croisement des courbes du nombre de mariages et de PACS. Pourtant, pour la première fois depuis 2000, le nombre de mariages a augmenté en 2012 – 241 000 selon les chiffres publiés hier par l'INSEE. Il ne faut donc pas insulter l'avenir, ni discerner un sens de l'histoire où il n'y en a pas.

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Il faut aussi pondérer le nombre par la durée !

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Et nous n'avons pas de statistiques à ce sujet.

Nos débats auront-ils un effet sur le nombre de mariages ? En tout état de cause, monsieur Tourret, rien n'est écrit d'avance.

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M. Tourret conserve la foi du néophyte. Son attachement chamanique et biblique au PACS est tel qu'il veut en faire l'égal du mariage. J'estime, quant à moi, que chacun d'eux doit garder sa singularité.

Le PACS est aujourd'hui entré dans les moeurs. Lors des précédentes législatures, nous l'avons grandement amélioré, par exemple en matière de successions grâce au travail de notre collègue Sébastien Huyghe. Cependant, s'il devait devenir l'équivalent du mariage, cela poserait la question du maintien de deux statuts distincts.

PACS et mariage ont des durées et des ambitions différentes. Il ne faut pas s'engager dans la voie proposée par les amendements de M. Tourret, qui constituent, du reste, de son propre aveu, un cavalier.

La commission rejette successivement les amendements CL 10 et CL 12.

Article 5 (art. L. 211-9, L. 221-4, L. 226-2-1, L. 226-2-2, L. 222-2, L. 222-5, L. 223-1, L. 223-5, L. 224-4, L. 224-5, L. 224-6 et L. 224-10 du code de l'action sociale et des familles) : Coordinations dans le code de l'action sociale et des familles :

La commission est saisie de l'amendement CL 528 du rapporteur portant suppression de l'article ainsi que des amendements identiques CL 550 de la commission des Affaires sociales, CL 146 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 269 de M. Philippe Gosselin et CL 292 de M. Hervé Mariton .

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La suppression de l'article se justifie par le fait que la Commission a précédemment adopté les amendements CL 526 et CL 527. Cela vaudra également pour les articles 6 à 13 du projet de loi.

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, l'article 5 est supprimé.

Article 6 (art. L. 4123-14, L. 4123-15, L. 4138-7 et L. 4138-14 du code de la défense) : Coordinations dans le code de la défense :

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 529 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 551 de la commission des Affaires sociales, CL 147 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 270 de M. Philippe Gosselin et CL 293 de M. Hervé Mariton .

En conséquence, l'article 6 est supprimé.

Après l'article 6 :

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette l'amendement CL 14 de M. Alain Tourret.

Article 7 (art. L. 423-15 du code de l'environnement) : Coordination dans le code de l'environnement

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 530 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 552 de la commission des Affaires sociales, CL 97 de M. Philippe Gosselin, CL 148 de M. Jean-Frédéric Poisson et CL 294 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 7 est supprimé.

Article 8 (art. L. 13-7 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique) : Coordination dans le code de l'expropriation pour cause d'utilité publique :

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 531 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 553 de la commission des Affaires sociales, CL 98 de M. Philippe Gosselin, CL 149 de M. Jean-Frédéric Poisson et CL 295 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 8 est supprimé.

Article 9 (art. 6, 195, 776 ter et 1452 du code général des impôts) : Coordinations dans le code général des impôts :

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 532 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 554 de la commission des Affaires sociales, CL 150 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 273 de M. Philippe Gosselin et CL 296 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 9 est supprimé.

Article 10 (art. L. 222-39 du code de justice militaire) : Coordination dans le code de justice militaire :

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 533 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 555 de la commission des Affaires sociales, CL 151 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 274 de M. Philippe Gosselin et CL 297 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 10 est supprimé.

Article 11 (art. L. 47 et L. 88 du code des pensions civiles et militaires de retraite) : Coordinations dans le code des pensions civiles et militaires de retraite :

La Commission est saisie de l'amendement de suppression CL 534 du rapporteur, ainsi que de plusieurs autres amendements ayant le même objet.

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Tous ces amendements de suppression font disparaître un grand nombre d'amendements. La mécanique puissante mise en oeuvre par le rapporteur fait peut-être gagner du temps, mais elle anéantit des liasses entières d'amendements.

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 534 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 556 de la commission des Affaires sociales, CL 152 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 275 de M. Philippe Gosselin et CL 298 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 11 est supprimé.

Article 12 (art. L. 184 et L. 473 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre) : Coordinations dans le code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre :

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 535 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 557 de la commission des Affaires sociales, CL 153 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 276 de M. Philippe Gosselin et CL 299 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 12 est supprimé.

Article 13 (art. 335, 448 et 753 du code de procédure pénale) : Coordinations dans le code de procédure pénale :

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 536 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 558 de la commission des Affaires sociales, CL 154 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 277 de M. Philippe Gosselin et CL 300 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 13 est supprimé.

Article 13 bis (nouveau) (art. L. 732-10, L. 732-11, L. 732-12 et L. 732-12-1 du code rural et de la pêche maritime) : Coordinations dans le code rural et de la pêche maritime :

La Commission est saisie d'un amendement CL 559 de la rapporteure pour avis portant article additionnel après l'article 13.

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Actuellement, le congé d'adoption du régime des exploitants agricoles appartient en propre à la femme. Cet amendement permet l'indemnisation du congé d'adoption sans considération du sexe des bénéficiaires, conformément à l'intention du Gouvernement qui indique, dans l'étude d'impact, vouloir procéder à cette modification par décret.

Il remplace par ailleurs des références abrogées relatives à l'agrément pour l'adoption.

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Avis favorable. En l'état du droit, le congé d'adoption n'est pas applicable aux exploitants agricoles mariés à une personne de même sexe. Il n'y a pas de raison de tenir ces derniers en marge de la réforme en cours.

La Commission adopte l'amendement.

Article 14 (art. L. 331-7, L. 351-4, L. 434-10, L. 434-11, L. 521-2, L. 523-1, L. 523-3, L. 613-19, L. 722-8, L. 613-19-1, L. 722-8-1, L. 613-19-2, L. 722-8-3 et L. 713-6 du code de la sécurité sociale) : Coordinations dans le code de la sécurité sociale :

La Commission est saisie des amendements de suppression CL 141 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 278 de M. Philippe Gosselin, et CL 301 de M. Hervé Mariton.

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L'article 14 s'inscrit dans votre logique de banalisation. Il étend aux couples de même sexe les droits en matière de congés d'adoption et de majoration de durée d'assurance. L'évaluation de cette mesure pose problème, et l'étude d'impact ne précise rien quant à son coût.

Par ailleurs, les enfants qui peuvent être adoptés sont de moins en moins nombreux. On compte moins de deux mille adoptions internationales en 2011, alors que plusieurs dizaines de milliers de candidats sont agréés.

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Cet article modifie le code de la sécurité sociale : cela démontre, s'il en était besoin, que ce texte a bien une dimension sociale.

Notre politique sociale accorde, dans un certain nombre de circonstances, une place privilégiée aux mères et aux femmes. Avec le texte que nous examinons et l'approche civile qui gomme la distinction des sexes, nous courons le risque d'affaiblir cette reconnaissance particulière.

J'ai déjà montré que la parité s'accommodait mal de votre texte, mais nous constatons aussi qu'il fragilisera la place que la femme a progressivement trouvée au cours de l'histoire de la République grâce à l'oeuvre du Conseil national de la résistance, et à la reconnaissance de ses responsabilités et de ses droits spécifiques, en particulier en matière de maternité ou de retraite.

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L'article 14 porte sur le congé d'adoption et sur la majoration de durée de l'assurance vieillesse, qui sont actuellement attribués à la mère. Il prévoit des règles spécifiques afin que ces dispositifs soient applicables aux couples de même sexe. Il n'y a pas lieu de le supprimer. Avis défavorable.

La Commission rejette ces amendements de suppression.

Puis, suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette l'amendement CL 103 de M. Marc Le Fur.

La Commission examine ensuite l'amendement CL 104 de M. Marc Le Fur.

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Il n'est pas justifié de remplacer les mots « du père ou de la mère assuré social » par les mots « de l'un ou l'autre des deux parents » dans la disposition du code de la sécurité sociale relative à la majoration de durée d'assurance de quatre trimestres accordée aux femmes assurées sociales pour chacun de leurs enfants au titre de l'incidence de la maternité sur leur vie professionnelle. Ce serait reconnaître l'indifférenciation sexuelle et cela irait à l'encontre des droits accordés aux femmes.

La Commission rejette l'amendement.

Elle est ensuite saisie des amendements identiques CL 537 du rapporteur et CL 560 de la rapporteure pour avis.

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Ces amendements sont la conséquence de l'adoption par la Commission des amendements « balais ».

La Commission adopte ces amendements.

En conséquence, les amendements CL 105 à CL 109 tombent.

La Commission est ensuite saisie de l'amendement CL 110 de M. Marc Le Fur.

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Il n'est pas justifié de remplacer le mot « femmes » par les mots « les assurés » dans les dispositions relatives aux allocations de repos maternel dont bénéficient les femmes affilées au régime social des indépendants à l'occasion de la maternité ou de l'arrivée d'un enfant dans le foyer en vue de l'adoption.

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Avis défavorable. Il n'y a pas lieu d'exclure les couples de même sexe du bénéfice de cette allocation.

La Commission rejette l'amendement.

Puis elle adopte l'amendement rédactionnel CL 561 de la rapporteure pour avis.

La Commission en vient ensuite à l'amendement CL 111 de M. Marc Le Fur.

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Nos arguments sont identiques à ceux que vient d'exposer M. Xavier Breton pour l'amendement CL 110. Ils concernent cette fois les allocations de repos maternel dont bénéficient les conjointes collaboratrices à l'occasion de leur maternité ou de l'arrivée dans le foyer d'un enfant en vue de l'adoption.

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Même argumentation que pour l'amendement précédent. Défavorable.

La Commission rejette l'amendement.

Elle adopte les amendements identiques de coordination CL 525 du rapporteur et CL 562 de la rapporteure pour avis.

Puis elle adopte l'amendement CL 538 du rapporteur.

Elle adopte enfin l'article 14 modifié.

Article 15 (art. L. 5552-36 du code des transports) : Coordination dans le code des transports :

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 539 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 564 de la commission des Affaires sociales, CL 112 de M. Xavier Breton, CL 155 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 279 de M. Philippe Gosselin et CL 302 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 15 est supprimé.

Article 16 (art. L. 1453-1, L. 3142-1, L. 4153-5, L. 4153-7, L. 4743-2, L. 7124-16, L. 7124-17, L. 7124-30 et L. 7124-31 du code du travail ; art. L. 211-1, L. 224-1, L. 231-1, L. 328-18 du code du travail applicable à Mayotte ; art. 8 et 53 de la loi n° 52-1322 du 15 décembre 1952 instituant un code du travail applicable dans les territoires et territoires associés relevant des ministères de la France de l'outre-mer) : Coordinations dans le droit du travail applicable en métropole et outre-mer

La Commission adopte l'amendement de suppression CL 540 du rapporteur ainsi que les amendements ayant le même objet CL 565 de la commission des Affaires sociales, CL 156 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 280 de M. Philippe Gosselin et CL 303 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 16 est supprimé.

Article 16 bis (nouveau) (art. L. 11302-3-2 [nouveau] du code du travail : Protection des salariés mariés à une personne de même sexe en cas de mutation géographique dans un pays incriminant l'homosexualité :

La Commission est saisie de l'amendement CL 566 de la rapporteure pour avis.

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Il s'agit d'éviter qu'un salarié marié avec une personne de même sexe voie sa carrière compromise parce qu'il aurait refusé une mutation dans un pays condamnant pénalement l'homosexualité.

En effet, certains contrats de travail comportent une clause de mobilité géographique. Le refus par le salarié d'une modification de son lieu de travail constitue alors, selon la jurisprudence, une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Il doit donc être expressément prévu que le refus par un salarié marié avec une personne de même sexe d'une mutation dans un pays incriminant l'homosexualité ne constitue pas une cause réelle et sérieuse de licenciement ou de sanction.

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Favorable. Dans le prolongement de la jurisprudence de la Cour de cassation, le juge fera bénéficier aussi les couples pacsés de personnes de même sexe de cette disposition, mais nous pourrions améliorer la rédaction de cet amendement pour qu'il fasse mention de ces derniers.

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La loi comporte déjà de nombreuses dispositions visant les discriminations en raison de l'orientation sexuelle et, à mon sens, les sanctions prises après le refus d'une mutation dans les conditions que vous évoquez auraient bien un caractère discriminatoire.

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Le mariage entre homosexuels créera une situation nouvelle ; or, dans une dizaine de pays du monde, l'homosexualité est condamnée par la peine de mort. Il paraît donc normal qu'un homosexuel puisse refuser une mutation ou une expatriation d'ordre professionnel dans un de ces pays, sans que ce refus constitue un motif légitime de licenciement.

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Le droit protège-t-il aussi, sur ce plan, les homosexuels célibataires, voire les hétérosexuels en couple dont les comportements sexuels varient ?

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Il ne s'agit pas de cela ici. Mais le mariage crée une situation nouvelle, il permet à l'employeur de connaître l'orientation sexuelle du salarié.

La Commission adopte l'amendement.

Article 17 (art. 34 et 40 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'État) : Conséquences de l'ouverture de l'adoption sur les congés d'adoption et de présence parentale dans la fonction publique de l'État

La Commission adopte l'amendement CL 541 du rapporteur, tendant à la suppression de l'article ainsi que les amendements ayant le même objet CL 567 de la commission des Affaires sociales, CL 128 de M. Philippe Gosselin, CL 142 de M. Jean-Frédéric Poisson et CL 304 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 17 est supprimé.

Article 18 (art. 57 et 60 sexies de la loi n° 84-53 du 24 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale) : Conséquences de l'ouverture de l'adoption sur les congés d'adoption et de présence parentale dans la fonction publique territoriale :

La Commission adopte l'amendement CL 542 du rapporteur, tendant à la suppression de l'article ainsi que les amendements ayant le même objet CL 568 de la commission des Affaires sociales, CL 129 de M. Philippe Gosselin, CL 158 de M. Jean-Frédéric Poisson et CL 305 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 18 est supprimé.

Article 19 (art. 41 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalières) : Conséquences de l'ouverture de l'adoption sur les congés d'adoption et de présence parentale dans la fonction publique hospitalière :

La Commission adopte l'amendement CL 543 du rapporteur, tendant à la suppression de l'article ainsi que les amendements ayant le même objet CL 569 de la commission des Affaires sociales, CL 130 de M. Philippe Gosselin, CL 159 de M. Jean-Frédéric Poisson et CL 306 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 19 est supprimé.

Article 20 (art. 5-2 de l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945) : Coordination dans l'ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l'enfance délinquante :

La Commission adopte l'amendement CL 544 du rapporteur, tendant à la suppression de l'article ainsi que les amendements ayant le même objet CL 570 de la commission des Affaires sociales, CL 131 de M. Philippe Gosselin, CL 157 de M. Jean-Frédéric Poisson, et CL 307 de M. Hervé Mariton.

En conséquence, l'article 20 est supprimé.

Article 21 (art. 6 de l'ordonnance n° 2002-149 du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte) : Coordination dans la législation relative aux prestations familiales et à la protection sociale applicable à Mayotte :

La Commission examine trois amendements tendant à la suppression de l'article : CL 143 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 285 de M. Philippe Gosselin et CL 308 de M. Hervé Mariton.

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La République, bonne fille, reconnaît la diversité des outre-mer en leur réservant des traitements spécifiques, qui ne seraient pas forcément acceptés en métropole. Ainsi les monarchies coutumières à Wallis-et-Futuna, ou la polygamie, les cadis et le droit successoral à Mayotte, quoique la départementalisation ait changé la donne. L'unité dans la diversité est donc possible ; c'est pourquoi je propose la suppression de l'article.

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Le texte est plus critiqué encore dans les outre-mer, dont la réalité sociopolitique est connue, qu'en métropole : les parlementaires de ces territoires s'en sont fait l'écho. France-Antilles a consacré plusieurs dossiers au sujet. Ces parlementaires, dont la plupart appartiennent à la majorité, sont vivement opposés au texte, ils n'ont pas participé aux débats en commission, et j'ignore s'ils le feront en séance. Comment le Gouvernement entend-il répondre aux problèmes spécifiques qui se posent sur leurs territoires ? La question de la liberté de conscience des maires et de leurs adjoints, notamment, s'y posera avec une acuité toute particulière.

À ces difficultés s'ajoute une question politique : je ne sais si les parlementaires ultramarins opposés au texte seront assez nombreux pour faire basculer la majorité à l'Assemblée, mais ils le seront sans doute au Sénat. J'espère en tout cas qu'ils auront la liberté d'exprimer leurs convictions en séance.

On a peu évoqué les outre-mer au cours des travaux préparatoires, monsieur le rapporteur. Comment, au-delà des spécificités législatives prévues, appréhender les difficultés que le texte soulèvera dans ces territoires ?

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L'objet de l'article est d'opérer des coordinations dans l'ordonnance du 7 février 2002 relative à l'extension et la généralisation des prestations familiales et à la protection sociale dans la collectivité départementale de Mayotte. Avis défavorable à ces amendements de suppression.

Monsieur Mariton, je vous renvoie à la contribution de l'association Total respect-Tjenbé rèd, page 657 du tome II de mon projet de rapport : elle est particulièrement intéressante pour analyser la situation des LGBT en outre-mer.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

La diversité sociologique, géographique et culturelle des outre-mer est une réalité, dont je me réjouis qu'elle soit reconnue par la représentation nationale et, au-delà, par l'ensemble de nos concitoyens. Cela ne fait pas une politique, bien entendu, mais l'amour est toujours bienvenu, quelle que soit la forme sous laquelle il s'exprime. Cette diversité est au demeurant très forte entre les outre-mer eux-mêmes.

Reste qu'elle ne doit pas être confondue avec les droits et libertés des individus. Certes, malgré leur étendue géographique, les outre-mer sont parfois perçus comme de « petits » territoires – ce qui me choque beaucoup –, et le regard social peut y être pesant, voire réprobateur ou discriminatoire. Mais cela justifie-t-il des nuances quant aux droits et libertés accordés aux individus ? Je réponds sans état d'âme par la négative. Le PACS avait suscité des résistances très fortes et certains parlementaires l'ayant voté, dont je fus, furent pris à partie. Mais il avait permis des débats et des remises en question. Je récuse donc toute idée d'atténuation des dispositions législatives dans les outre-mer, d'autant que celles-ci leur permettront vraisemblablement d'évoluer vers l'acceptation de l'autre.

Enfin, même si je comprends les difficultés particulières qui s'y posent, leur spécificité ne saurait évidemment servir de prétexte aux maires ou aux officiers d'état civil qui souhaiteraient s'affranchir de leurs obligations légales.

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Si ce texte devient la loi, madame la garde des Sceaux, nous ferons tout pour qu'il soit appliqué en Polynésie, compte tenu de la marge de manoeuvre laissée aux officiers d'état civil. Mais je rappelle que l'adoption du PACS avait suscité un tollé dans ces territoires, tout comme en Guadeloupe et en Nouvelle-Calédonie.

Le problème, d'ailleurs, ne vient pas de l'homosexualité elle-même : elle existe dans nos sociétés, même si elle n'a pas le même visage qu'en métropole. Les « rae rae » et les « mahu » ne vivent pas en ménage, sur le modèle européen ou américain. L'accès aux modes de communication modernes, notamment à travers Internet, n'a pas été suffisant pour transformer en profondeur les réalités sociales de nos territoires. Les homosexuels vivent au sein des familles, dont ils adoptent et prennent en charge les enfants abandonnés. Ayant participé aux dernières campagnes présidentielle et législative, je puis témoigner qu'il n'existe, en Polynésie, aucune revendication des homosexuels en faveur du mariage. On s'interroge beaucoup, en revanche, sur la non-application du PACS.

La Polynésie compte 250 000 habitants, dont 75 % habitent sur deux îles et 25 % sur 120 autres. C'est dire la particularité de cette société, qui associe la culture française – empreinte de christianisme, puisqu'elle fut apportée par des missionnaires – à la culture locale traditionnelle. Les valeurs familiales, et celles qui concernent la filiation, s'en ressentent profondément.

Mes amendements CL 456 et CL 457, qui viendront tout à l'heure, tendent à faire appliquer le PACS en Polynésie, car c'est lui qui a permis, en métropole, d'évoluer vers le mariage homosexuel, pour lequel nous réclamons du temps. Autoriser celui-ci dès à présent serait un véritable choc pour nos territoires : le mot même d'« homosexuel » est intraduisible en polynésien – les « rae rae » sont littéralement des hommes aux moeurs efféminées.

Si le PACS n'a pas été appliqué en Polynésie française, c'est aussi en raison du régime de solidarité instauré en 1996 : qu'ils cotisent ou non, tous les Polynésiens sont assurés, des enfants jusqu'aux personnes âgées. Ainsi, nul ne se sent rejeté.

Je comprends le projet dont nous discutons, mais transférer son contenu tel quel en Polynésie, voire à Wallis-et-Futuna, poserait de sérieux problèmes.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

J'ai déjà eu soin, monsieur le député, de répondre à toutes vos questions par courrier.

Pour la Polynésie, les contrats relèvent de la compétence territoriale. Le PACS étant un contrat, il ne s'y applique donc pas automatiquement. Nous pourrons, si vous le souhaitez, organiser une séance de travail afin de définir le meilleur véhicule juridique – ordonnance ou loi du pays, par exemple – pour relayer votre demande.

Quant au mariage entre homosexuels – quelles que soient les façons, parfois déconcertantes, par lesquelles on les définit –, il ne s'agit que d'un droit offert aux couples qui le souhaitent, et non, bien entendu, d'une obligation. J'ajoute que la condition de résidence, telle qu'elle figure actuellement dans le code civil, sera maintenue.

En revanche, je ne m'associerai pas à une disposition qui atténuerait les droits et les libertés individuels au nom de spécificités territoriales, car cela reviendrait à priver certains citoyens d'un droit que l'on reconnaît à d'autres. Il est vrai que des parlementaires ultramarins, y compris de la majorité, ont exprimé des réticences dès le mois de juin dernier, lorsque j'ai entamé les consultations. Ces préoccupations sont légitimes et je les entends, mais elles ne sauraient justifier que l'on prive les citoyens des sociétés concernées d'un droit applicable aux autres territoires de la République.

Je ne sous-estime pas les difficultés, ni la pesanteur du regard social que subiront non seulement les homosexuels, mais aussi les maires qui consentiront à les unir ; peut-être certains préféreront-ils, d'ailleurs, s'exposer à des sanctions administratives et pénales. Mais c'est aussi à ce prix que les sociétés évoluent, et que les droits et les libertés progressent.

La Commission rejette les amendements de suppression.

Puis elle adopte l'article 21 sans modification.

Chapitre IV Dispositions diverses, transitoires et finales

Article 22 : Conditions de reconnaissance et de transcription des mariages contractés à l'étranger avant l'entrée en vigueur de la loi :

La Commission est saisie des amendements CL 132 de M. Xavier Breton, CL 144 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 286 de M. Philippe Gosselin et CL 309 de M. Hervé Mariton, visant à supprimer l'article 22.

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L'article devrait tout d'abord préciser qu'il vise spécifiquement les mariages célébrés à l'étranger.

Par ailleurs, non seulement le fait de reconnaître les effets à l'égard des époux d'un mariage entre personnes de même sexe contracté avant l'entrée en vigueur de la présente loi est contraire au principe de la non-rétroactivité des lois, mais, ce qui est plus grave, reconnaître ses effets à l'égard des enfants est contraire au principe essentiel de la filiation reposant sur l'altérité des sexes. Cet article, en donnant une suite légale en France à des actes illégaux, reviendrait à un contournement de la législation française.

Il entraînerait, de plus, une rupture d'égalité avec les enfants élevés par des couples de personnes de même sexe mariés en France.

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Cet article présente des risques de contournement de la législation française – le Gouvernement a lui-même évoqué hier un risque de « tourisme nuptial ». Si cet article vise à transcrire dans le droit français la situation de couples de bonne foi mariés à l'étranger, il est toutefois contraire à la loi qui veut que les conditions de validité d'un mariage s'apprécient au regard de la loi personnelle des parties, en vigueur au jour de la célébration.

S'agissant par ailleurs de la question de l'immigration, le Gouvernement et le rapporteur ont-ils évalué le risque de voir des étrangers en situation irrégulière déjà mariés à des ressortissants français de même sexe à l'étranger faire valoir leur nouvelle situation ?

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Avis défavorable.

Monsieur Breton, il est inutile de préciser que les mariages entre personnes de même sexe célébrés avant la publication de la loi l'ont été à l'étranger puisqu'ils n'ont pas pu l'avoir été en France.

Monsieur Mariton, pour la transcription dans l'état civil français d'un mariage célébré à l'étranger, un des deux conjoints doit être français, ce qui interdit le tourisme nuptial ou tout autre contournement de la législation française.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Cette disposition concerne des couples déjà mariés à l'étranger, dont un au moins des conjoints est français. Afin qu'ils n'aient pas à se marier de nouveau en France, une fois la loi adoptée, ils pourront faire transcrire leur mariage, si celui-ci a été régulièrement célébré dans un pays qui reconnaît déjà le mariage entre personnes de même sexe – ces pays sont peu nombreux.

Les effets du mariage seront pris en considération pour les époux et les enfants dès la date de la célébration et pour les tiers à compter de la date de transcription.

La Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l'article 22 sans modification.

Article additionnel après l'article 22 :

La Commission examine l'amendement CL 456 de M. Jonas Tahuaitu, portant article additionnel après l'article 22.

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Je fais miens les propos de Mme la garde des Sceaux : seule l'assemblée de la Polynésie française peut instaurer le PACS sur son territoire. Avis défavorable.

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L'amendement précise simplement que « les articles 515-1, 515-2 et 515-8 du code civil sont applicables en Polynésie française », afin d'y rendre applicable le PACS.

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Aux yeux du rapporteur, l'Assemblée nationale n'a pas cette compétence.

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Le code civil est de la compétence de l'Assemblée nationale.

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Pas en ce qui concerne le droit des contrats. Or, le PACS relève du droit des contrats et non du droit des personnes.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des Sceaux, ministre de la Justice

Il revient à l'assemblée de la Polynésie française d'adopter une loi du pays reprenant les dispositions du code civil relatives au PACS, éventuellement en y introduisant des dispositions spécifiques.

Si nous adoptions votre amendement, l'assemblée de la Polynésie française serait la première à nous reprocher d'avoir voté une disposition qui ne relève pas de la compétence de l'Assemblée nationale.

La Commission rejette l'amendement.

Article 23 : Application outre-mer du présent projet de loi :

La Commission examine les amendements CL 145 de M. Jean-Frédéric Poisson, CL 287 de M. Philippe Gosselin et CL 310 de M. Hervé Mariton, visant à supprimer l'article 23.

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Si ce texte est mauvais pour la métropole, il le sera tout autant, voire davantage, outre-mer, compte tenu des situations locales. L'outre-mer sert de révélateur aux difficultés et aux incompréhensions provoquées par ce texte.

Le raisonnement de M. Fritch ne doit pas être négligé : outre-mer comme en métropole, il était possible de recourir à des solutions concrètes pour répondre à des situations de fait. Le Gouvernement a fait le choix du dogmatisme.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, la Commission rejette les amendements.

Puis elle adopte l'amendement de cohérence CL 545 du rapporteur.

Suivant l'avis défavorable du rapporteur, elle rejette ensuite l'amendement CL 457 de M. Jonas Tahuaitu.

Puis elle adopte l'article 23 modifié.

Titre :

La Commission examine l'amendement CL 133 de M. Jean-Frédéric Poisson.

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Cet amendement vise à rédiger ainsi l'intitulé du projet de loi : « Projet de loi ouvrant le mariage et l'adoption aux couples de même sexe et supprimant la distinction des sexes dans la filiation. » Il convient en effet que le titre corresponde à l'ensemble du texte.

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Avis défavorable. Cet amendement est une provocation.

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Nommer les choses, ce n'est pas faire de la provocation. La provocation, c'est le titre actuel qui ne mentionne que l'ouverture du mariage aux personnes de même sexe, alors que le texte vise également à leur ouvrir l'adoption contre l'avis de la majorité des Français – mais peut-être est-ce la raison pour laquelle vous n'osez pas le préciser dans le titre. De plus, le texte supprimera la distinction des sexes dans la filiation, ce que contestent également les Français, comme l'a montré la manifestation rassemblant des centaines de milliers de personnes, dimanche 13 janvier, dans les rues de Paris. Il y a aujourd'hui, dans le pays, une demande très forte pour un référendum sur le sujet, et nous ne cesserons pas de la relayer.

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Le texte du Gouvernement s'affichait comme celui du « mariage pour tous ». Le titre final est plus modeste : « Projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe ». La filiation n'y est même pas évoquée.

C'est pourquoi cet amendement vise à ce que le titre précise, de manière explicite, les différentes dimensions du projet de loi et ses conséquences. Tel est son mérite.

Le texte n'aura finalement que peu de conséquences en matière d'adoption. Il y en aura beaucoup en revanche, en termes de principes, avec la suppression de la distinction des sexes dans la filiation.

Le Gouvernement et la majorité doivent mesurer la gravité de leur projet, et nos concitoyens doivent en être avisés, même si les amendements-balai ont permis de masquer une part importante de la vérité des articles – à preuve, le grand nombre des amendements qui sont tombés.

C'est pourquoi il convient de rendre le titre du projet de loi plus explicite.

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Loin d'être un amendement de provocation, c'est un amendement d'alerte sur les conséquences explicites et implicites du projet de loi, qui conduira à terme, avec l'introduction en catimini de la théorie du genre, à nier de manière générale la distinction des sexes, et tout d'abord, à travers ce texte, dans la filiation. Cet amendement doit être adopté, afin que nul n'en ignore.

La Commission rejette l'amendement.

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Les groupes présents dans la salle sont conviés à présenter leur explication de vote sur l'ensemble du texte.

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Nous regrettons la rudesse, durant ces deux jours de débat, de la présidence, la manière expéditive avec laquelle certains échanges ont été menés, leur caractère peu éclairant ou les trop nombreuses interruptions de parole. La forme est importante en démocratie. La rareté des explications du rapporteur n'a pas non plus permis d'approfondir le débat.

Je tiens en revanche à remercier le Gouvernement d'avoir à plusieurs reprises apporté des réponses aux questions que nous posions. Il a pris notre approche plus au sérieux que nos collègues de la majorité, livrés à leur passion.

Vous vous apprêtez à voter en commission un projet de loi qui, visant à résoudre certaines situations personnelles ou à répondre à certaines interrogations de la société, le fait dans les plus mauvaises conditions, celles de l'enfermement idéologique alors qu'il faudrait faire preuve de pragmatisme. Compte tenu de son impact sur le plus grand nombre de nos concitoyens, ce texte les rassemblera d'autant moins que vous avez choisi la stratégie la plus clivante, quand d'autres solutions étaient possibles, comme le contrat d'union civile. On aurait pu également modifier l'adoption civile pour résoudre certaines situations. C'est avec rudesse, je le répète, que la majorité a récusé toutes ces pistes, même lorsque le Gouvernement souhaitait les examiner.

Ce texte est donc une occasion manquée. Le débat est si important pour la dignité, tant des personnes concernées que de l'ensemble des Français, qu'il n'est pas possible de nous satisfaire de votre blocage idéologique, ni d'accepter les contorsions de l'article balai. Votre méthode est insultante à l'encontre des personnes de même sexe concernées par le projet de loi, comme à l'égard de la construction même du droit.

Alors que le Gouvernement avait choisi une approche légistique plus classique pour apporter la réponse que vous souhaitiez sur le plan politique, vous pensez que l'article balai permettra de passer plus facilement l'obstacle en rassurant nos concitoyens. Mais nous les avons alertés. Sachant à quoi s'en tenir, ils veulent aujourd'hui prendre la parole.

C'est la raison pour laquelle nous réclamons un référendum – que le président de la République le propose ou que les procédures parlementaires permettant la tenue d'un référendum d'initiative populaire aboutissent enfin. Les Français ne comprendraient pas que les différents groupes politiques refusent de faire aboutir au Parlement les procédures permettant l'instauration d'un tel référendum.

Comme nous serons alors libres de formuler le titre du projet de loi référendaire, celui-ci pourra rendre compte de l'ensemble des dimensions, notamment sociales, du texte. Les Français doivent être consultés et pouvoir donner leur avis. Nous leur proposerons de privilégier la voie du consensus et de la conciliation.

Si ce texte nous inquiète, le projet de loi sur la famille et la procréation médicalement assistée, que le Gouvernement a annoncé préparer, nous inquiète tout autant. Depuis le Conseil national de la résistance, les enjeux de la politique familiale avaient fait consensus dans le pays. Or, la gauche a fait le choix depuis quelques mois – c'était un des enjeux de l'élection présidentielle – de diviser les Français sur un terrain qui, jusqu'à présent, les avait plutôt rassemblés.

Que le président de la République, le Gouvernement et la majorité aient aujourd'hui la sagesse de ne pas provoquer des divisions supplémentaires dans une société française qui ne les demande pas.

Nous espérons que le peuple français aura le dernier mot. C'est pourquoi nous ne voterons pas le projet.

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Ceux qui nous écoutent, puisque les séances de la commission des Lois sont télédiffusées – auront pu juger par eux-mêmes la manière dont nos travaux se sont déroulés.

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C'est un choix de société que nous avons à faire avec ce projet de loi : le choix de l'égalité des droits pour toutes les familles de France.

Les débats de ces deux derniers jours l'ont montré : nous devons être conscients de notre responsabilité. Ce texte restera dans l'histoire comme une avancée primordiale pour la France. Il est plus que temps que le Parlement fasse cesser la violation continue de l'intérêt des couples de même sexe et de leur famille, en leur garantissant le droit de mener une vie familiale normale.

L'État se doit de protéger tous les citoyens, quelle que soit leur orientation sexuelle. C'est bien pour en terminer avec les discriminations institutionnelles que nous nous apprêtons à voter ce projet, dûment amendé.

À cet égard, je remercie le rapporteur pour l'ampleur et la qualité de son travail, aussi bien dans l'organisation des auditions que dans la préparation des amendements, et pour l'efficacité de ses interventions lors du débat.

J'avais formulé hier le voeu d'un vote qui dépasse les clivages politiques. Je regrette donc que les débats, du côté de l'opposition, se soient trop souvent résumés à une litanie, à l'image des liasses d'amendements identiques que nos collègues ont déposés.

Les socialistes ont toujours porté de grandes réformes de société, en dépénalisant l'homosexualité d'abord, en créant le PACS ensuite. Ouvrir le mariage aux couples de personnes de même sexe, c'est donner le choix aux homosexuels de se marier ou non. Ouvrir l'adoption aux couples de même sexe, c'est accepter une fois pour toutes de reconnaître que les homosexuels sont des parents comme les autres.

N'oublions pas que la loi est aussi un moteur d'évolution des mentalités. Notre travail doit donc être exemplaire, pour construire une société apaisée où chacun trouve sa place. Nous devons être à la hauteur des espérances de ces couples et de ces familles qui ne veulent qu'une chose : être considérés comme des citoyens à part entière.

Liberté, égalité, fraternité : rien de plus, rien de moins.

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C'est avec satisfaction et avec une certaine émotion que je voterai, au nom des écologistes, ce texte qui aura valu à notre Commission presque vingt-quatre heures de réunion.

Le projet de loi ouvrant le mariage aux couples de même sexe est l'aboutissement de longues années de débats et de militantisme. Je pense à ceux qui, très longtemps, ont connu l'opprobre et l'injure, et aux obstacles franchis depuis une trentaine d'années : fin du délit d'homosexualité en 1982 ; reconnaissance des couples de même sexe avec le PACS ; et aujourd'hui, entrée dans le droit commun pour les couples et les familles homosexuels.

Je souhaite aussi rendre hommage à notre collègue Noël Mamère qui, bien avant nous, a pris des risques en célébrant en 2004 un mariage qui lui a valu une suspension. Il est rare qu'une personnalité mette en danger ses fonctions au nom de ses convictions. Noël Mamère sera à mes côtés en séance publique pour défendre les amendements du groupe écologiste et je lui adresserai à cette occasion mes remerciements.

Notre groupe aurait voulu que le texte présente une plus grande cohérence et ouvre, en même temps que le mariage, l'adoption et l'accès à la procréation médicalement assistée. Nous poursuivrons le débat pour donner l'occasion au Gouvernement de confirmer ses choix et ses engagements dans le cadre du projet de loi sur la famille prévu en mars.

Je n'étais pas parlementaire en 1998-1999 mais j'ai assisté au débat sur le PACS à l'Assemblée nationale. Il est vrai, chers collègues de l'opposition, que le vocabulaire employé aujourd'hui n'est plus le même. Les dérapages verbaux ont disparu. Les mots sont mieux choisis, plus élégants. Mais la violence est toujours aussi palpable. L'idée que des hommes et des femmes ayant une orientation sexuelle différente puissent créer une famille et élever des enfants ensemble, paraît insupportable à vos yeux.

Cette réaction appartient pourtant à un autre temps. La société française, j'en ai la certitude, n'en est plus là. Et lorsque vous invoquez la manifestation de dimanche dernier, vous vous trompez : tous les ans, en France, une très grande manifestation publique réunit au mois de juin environ un million de personnes qui demandent l'égalité des droits. Cette égalité, nous la leur accorderons bientôt et je m'en félicite.

La Commission adopte l'ensemble du projet de loi modifié.

La séance est levée, le jeudi 17 janvier 2013, à une heure dix.