La réunion

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Les membres de la mission d'information examinent le rapport d'information (M. Richard Ferrand, président-rapporteur).

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Nous arrivons à la conclusion de nos travaux, au moins dans le cadre de cette législature. Le rapport que je vous présente aujourd'hui vient compléter et actualiser un premier rapport paru il y a près d'un an, en mars dernier. Ces deux rapports doivent être considérés comme un tout indissociable et ne peuvent être lus indépendamment l'un de l'autre.

Depuis la parution du premier rapport, la mission d'information a continué ses travaux, procédant notamment à trois auditions supplémentaires, toutes consacrées au volet professions réglementées du droit. Parallèlement, notre collègue Gilles Savary, ancien rapporteur thématique du volet mobilité de la loi, a procédé à plusieurs auditions portant sur la réforme du permis de conduire.

Comme le premier rapport, le rapport d'aujourd'hui comporte plusieurs parties. La première partiese veut un état des lieux chiffré de la mise en oeuvre de la loi.

Je rappelle que le premier rapport de mars 2016 faisait apparaître que 80 % des articles de la loi étaient entièrement applicables près de huit mois après sa promulgation, si on ajoutait aux articles d'application directe ceux devenus entièrement applicables du fait de la parution de l'intégralité des mesures réglementaires qu'ils nécessitaient ou des ordonnances dont ils contenaient l'habilitation. À cette date, plus de la moitié des mesures réglementaires d'application nécessaires, soit 56 %, avait été publiée.

Un an plus tard, soit environ dix-huit mois après la promulgation de la loi, ce taux de mise en oeuvre est désormais de plus de 97 %. En effet, la quasi-totalité des textes réglementaires prévus par la loi ont été pris. Seules cinq dispositions de la loi doivent encore être précisées par le pouvoir réglementaire. Vous en trouverez la liste dans le rapport.

Le rapport s'intéresse également aux textes d'application de niveau 2, par exemple les décrets mentionnés dans les ordonnances publiées ou les arrêtés prévus par certains décrets. En la matière, le taux de mise en oeuvre apparait moins satisfaisant : d'après nos calculs, seulement 45 % des dispositions des ordonnances nécessitant un décret auraient effectivement fait l'objet d'une mesure d'application. Certes, certaines ordonnances n'ont été publiées qu'au début de l'année, mais la plume étant tenue en la matière par le seul pouvoir exécutif, la préparation conjointe des ordonnances et de leurs décrets d'application, beaucoup plus facile que dans le cas des projets de loi, aurait dû conduire, me semble-t-il, à une publication plus précoce des mesures d'application.

En outre, il est un domaine où la mise en oeuvre de la loi n'est absolument pas satisfaisante, c'est celui des rapports demandés au Gouvernement. Lors de la parution du premier rapport, aucun des dix rapports demandés n'avait été transmis au Parlement. La situation s'est à peine améliorée en moins d'un an, puisque seulement trois rapports ont été remis. Si, pour trois des rapports encore attendus, le Gouvernement est encore dans les délais, ce n'est pas le cas des quatre autres.

La deuxième partie, établie sous la responsabilité de notre collègue Gilles Savary qui ne peut être des nôtres aujourd'hui, traite des dispositions relatives à la mobilité. Elle met à jour les données du premier rapport concernant le transport de voyageurs par autocar et comporte des développements nouveaux sur les dispositions relatives aux autoroutes et à la réforme du permis de conduire. Je vous y renvoie.

La troisième partie, la plus fournie comme la fois précédente, traite des professions réglementées. Depuis un an, l'actualité en la matière a été riche. Je laisserai notre collègue Cécile Untermaier présenter cette partie du rapport.

La quatrième partie, établie sous la responsabilité de notre collègue Stéphane Travert, traite du travail dominical. Elle fait état notamment de l'aboutissement des négociations sociales dans les grands magasins qui ont permis leur ouverture le dimanche. Je rappelle que le principe de la réforme était « pas d'accord, pas d'ouverture ». Celui-ci a été respecté et il convient de s'en féliciter.

Enfin, la cinquième et dernière partie fait le point sur la mise en oeuvre des nombreuses autres dispositions de la loi du 6 août 2015.

Après cette présentation très rapide du rapport, je souhaite terminer mon intervention liminaire en tirant les leçons de nos travaux.

En premier lieu, si la quasi-totalité de la loi est désormais effectivement applicable, le recul dont nous disposions était insuffisant pour mesurer ses effets ou apprécier si elle a atteint les objectifs que lui avaient assignés le législateur et le Gouvernement.

À titre d'exemple, le marché du transport de voyageurs par autocar, qui s'est développé très rapidement, n'est pas encore consolidé. S'agissant des notaires, alors que la liberté d'installation était au coeur de la réforme des professions réglementées contenue dans la loi, les péripéties de sa mise en oeuvre font que les premiers nouveaux notaires ne pourront pas « visser leur plaque » avant la fin de la législature.

Il appartiendra donc aux députés de la prochaine législature de s'emparer d'une évaluation plus qualitative de l'application de la loi du 6 août 2015.

En second lieu, j'ai toujours répété que notre mission d'information poursuivait un double but.

Le premier est devenu classique : il s'agissait de suivre de près le calendrier de publication des textes d'application, condition indispensable à une entrée en vigueur effective de la loi. Je crois que nous pouvons conclure que, d'un strict point de vue temporel, la mise en oeuvre de la loi du 6 août 2015 a été très satisfaisante. Permettez-moi de penser, en toute immodestie, que notre mission n'y est pas pour rien.

Mais, nous ne pouvions nous contenter de ce travail de greffier de l'activité réglementaire. Notre second objectif était, lui, sans précédent : il s'agissait de s'assurer que le contenu des textes d'application était bien conforme à l'intention du législateur.

Je rappelle que j'ai obtenu du Premier ministre que la mission d'information soit destinatrice des projets de décrets ou d'ordonnances, au rythme des arbitrages rendus en réunions interministérielles – les « fameuses » RIM –, le cabinet du Premier ministre centralisant ces transmissions.

Cette méthode nous a incontestablement permis de travailler efficacement. Elle m'a donné l'occasion de saisir le Premier ministre ou les ministres compétents de points précis sur lesquels nous souhaitions des inflexions.

Le rapport de mars 2016 mentionne les cas où ces remarques ont été suivies d'effets. Postérieurement à la publication du rapport, une autre suggestion de la mission a été partiellement suivie à propos de la sanction de nullité du non-respect des formalités de saisine de la justice prud'homale.

De même, nos travaux ont été à l'origine de deux amendements adoptés avec l'avis favorable du Gouvernement, lors de la discussion de la « loi Travail ». C'est ainsi qu'un amendement de notre collègue Stéphane Travert et de moi-même a assoupli le dispositif de fixation des « dimanches du maire ». De même, un amendement de notre collègue Denys Robiliard et cosigné également par moi a prévu la possibilité pour le bureau de conciliation et d'orientation du conseil des prud'hommes de prononcer la clôture de l'instruction par ordonnance.

Ces suites données à nos travaux suffisent à justifier a posteriori le bien-fondé de notre démarche. Elles confirment ainsi la double conviction qui était la nôtre.

D'une part,le législateur est parfaitement légitime à veiller que son intention est respectée ou n'est pas dénaturée par le pouvoir réglementaire.

Je ne prendrais qu'un exemple. Nous avons pu constater l'émoi qu'a suscité chez les intéressés la possibilité offerte par deux décrets à une société d'officier public et ministériel d'être titulaire de plusieurs offices. Cette possibilité n'est certes pas contraire à la loi votée, mais elle n'en est pas non plus une conséquence nécessaire. Il ne s'agit pas de contester la capacité pour le pouvoir réglementaire de prendre une telle initiative. Cependant, il est apparu que cette question a fait l'objet de divergences profondes entre les deux ministères compétents et que l'arbitrage finalement rendu l'a été au nom du respect des travaux parlementaires et de l'intention du législateur. S'il ne faut faire de procès d'intention à quiconque, il me semble que si des doutes existaient sur la portée de la lettre ou de l'esprit de la loi, les rapporteurs de la commission spéciale qui a examiné le projet de loi n'étaient pas les plus mal placés pour apporter leur éclairage.

Quand on veut connaître l'intention du législateur, autant la lui demander. Cela évite les exégèses fallacieuses.

D'autre part,les observations susceptibles d'être formulées par les parlementaires ne sont pas moins illégitimes ni plus intrusives que celles que le pouvoir réglementaire recueille, en application de textes ou de sa propre initiative, auprès des professionnels ou des personnes concernés ou des multiples commissions ou comités consultatifs que notre pays multiplie à l'envi.

À cet égard, la genèse de l'ordonnance du 26 janvier 2017 relative à l'autorisation environnementale est éclairante. Le Gouvernement a, en effet, recueilli l'avis de sept conseils ou comités consultatifs, d'une mission interministérielle et d'une autorité administrative indépendante. Il a, en outre, organisé une consultation du public. Ainsi donc, les dizaines de personnes composant ses instances et les dizaines d'organismes qu'elles y représentent peuvent disposer des textes, à un stade parfois précoce de leur rédaction.

Comment dès lors comprendre que la transmission des mêmes documents au Parlement puisse apparaître incongrue ?

Au-delà du seul cas de la loi du 6 août 2015, je suis convaincu que le prochain Parlement devra se saisir, en l'approfondissant, de l'exemple de notre mission d'information. À cet égard, il est indispensable que, désormais, les commissions permanentes soient destinatrices de tous les projets de décrets ou d'ordonnances. Grâce à l'acquis de l'expérience, cette transmission ne devrait pas se faire uniquement au rythme des arbitrages interministériels, mais à un stade plus précoce, lors des différentes consultations auxquelles le Gouvernement procède, et au moment de la saisine effective du Conseil d'État.

En ce qui concerne les ordonnances, dans la mesure où celles-ci doivent depuis 2008 faire l'objet d'une ratification expresse, les commissions permanentes devraient également systématiser l'initiative prise par l'ancien président de la commission des affaires économiques, notre ancien collègue François Brottes, d'auditionner le Gouvernement sur les projets d'ordonnances avant leur adoption par le Conseil des ministres.

La réforme constitutionnelle de 2008 a expressément inscrit le « contrôle de l'action du Gouvernement » parmi les missions dévolues au Parlement. Je pense que nous sommes tous convaincus que ce contrôle de l'action du Gouvernement commence dès l'élaboration des mesures d'application des lois.

Encore une fois, il ne s'agit que d'un devoir d'information du Parlement. Celui-ci en fera l'usage qui lui paraîtra le plus opportun. Répétons-le, il ne s'agit pas de donner au pouvoir législatif quelque droit de veto ou d'injonction que ce soit. Il s'agit plus simplement d'organiser un espace de collaboration et de co-construction de la loi, dans le respect des prérogatives de chacun.

J'espère donc vivement que nous avons été les précurseurs d'un renforcement concret de la place du législateur dans la confection et la mise en oeuvre de la loi.

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À l'instar de notre collègue Gilles Savary, j'assisterai aussi tout à l'heure à l'audition, par la commission des affaires sociales, de Mme Marianne Thyssen, commissaire européenne en charge de la directive relative au détachement international. Vous voudrez bien, je l'espère, excuser mon départ anticipé de notre réunion, car je veux l'entendre et, le cas échéant, l'interroger sur les questions soulevées.

J'en viens à l'application de la loi du 6 août 2015, dite « loi Macron ». Je vous dirai quelques mots sur les derniers développements depuis notre premier rapport d'application, notamment en ce qui concerne les aspects de droit du travail et, plus précisément, la justice prud'homale.

Le décret du 23 novembre 2016 a réformé cette dernière. Il fixe le référentiel commun en matière d'indemnisation du préjudice, quand il y a licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Je m'attarderai sur deux points, relativement à ce décret.

Premièrement, quant à sa construction, il tient compte presque exclusivement de l'ancienneté, puisqu'il ajoute un mois au total des mois d'indemnisation déterminé par rapport à l'ancienneté, quand le salarié a plus de cinquante ans ou qu'il a une situation personnelle qui le handicape au regard de la situation sur le marché du travail. Ce référentiel fait croître l'indemnisation de 0,5 mois par année d'ancienneté supplémentaire, jusqu'à 18 mois cumulés ; au-delà, l'indemnité ne croît plus que de 0,25 mois par année d'ancienneté supplémentaire. Il ne sera pas très facile d'expliquer pourquoi l'augmentation annuelle de l'indemnité diminue au fur et à mesure que l'ancienneté du salarié s'accroît.

En outre, on arrive ainsi à une indemnité maximale de 21,5 mois, ce qui me paraît être en deçà de ce que reçoit un salarié licencié qui a une forte ancienneté. Même si ce n'est pas fréquent, on voit des situations où les salariés reçoivent des indemnités équivalant à deux ans de salaire lorsqu'ils sont licenciés après vingt ou vingt-cinq ans de métier. Je crois d'ailleurs qu'il est important que les préjudices soient effectivement réparés.

Deuxièmement, ce barème de dédommagement en matière de licenciement pour cause réelle et sérieuse est identique, que l'on passe en bureau de conciliation ou en bureau de jugement. L'outil fourni aux prud'hommes est le même dans les deux cas. Naturellement, c'est voulu. Il est vrai, d'ailleurs, que le barème initial prévu pour la conciliation était trop faible, de sorte qu'il était très peu employé.

Pourtant, à mon sens, ce me semble être une erreur que d'avoir un barème identique dans les deux cas. Au stade de la conciliation, en effet, la situation n'est pas la même que devant le bureau de jugement. Au stade de la conciliation, l'employeur ne prend pas le risque d'être condamné à tout ce que demande le salarié ; le salarié ne prend pas non plus le risque d'être débouté de toutes ses demandes. Dans cette situation de conciliation, comme en matière de transaction, il y a donc un échange de risques. Le salarié n'est en effet jamais sûr d'obtenir satisfaction, sauf lorsque la lettre de licenciement n'est pas motivée. À l'inverse, l'employeur n'est jamais complètement sûr que son salarié sera débouté.

Il en va différemment dans une situation de bureau de jugement. Faute de conciliation, l'enjeu porte à la fois sur la condamnation pour cause réelle et sérieuse, d'une part, et sur l'indemnité qui sera fixée, d'autre part. Mais il n'y a pas d'abattement à prévoir sur la condamnation relative à la cause réelle et sérieuse, puisque l'indemnité n'est précisément envisagée qu'une fois établie l'absence de cette cause.

Bien que les situations soient différentes, l'outil donné est le même. Je regrette donc cette sorte de fragilité du décret, qui ne correspond pas en tous points à ce qui était souhaité, du moins par moi. Il fallait rehausser le barème devant le bureau de conciliation, mais celui-ci ne pouvait pas être le même que celui devant le bureau de jugement.

Mais le règlement a précisément pour avantage de pouvoir être modifié beaucoup plus facilement que la loi. Il sera donc toujours temps d'y revenir.

Cela étant, la réforme des prud'hommes est pratiquement achevée, puisque le décret sur la déontologie et la procédure disciplinaire applicables aux conseillers prud'hommes est paru le 28 décembre 2016, et que le décret sur la constitution des listes des défenseurs syndicaux a été publié le 18 juillet 2016. Nous attendons néanmoins encore le décret concernant les modalités d'indemnisation de ces derniers. Annoncé pour mars 2016, il n'est toujours pas paru un an plus tard ; il serait souhaitable que ce soit chose faite avant la fin du quinquennat.

Pour ce qui concerne la discrétion à laquelle est soumise le défenseur syndical à propos des éléments ayant servi à la négociation ou lui ayant été communiqués pour les besoins de la défense d'un salarié ou d'un employeur, la loi a retenu le terme d'« obligation de discrétion » de préférence à celui de « secret professionnel », qui heurtait les avocats.

Le caractère piquant de la situation est que le Conseil national des barreaux, qui était hostile à ce que le défenseur syndical soit soumis au secret professionnel, a tiré argument, pour attaquer le statut des défenseurs syndicaux, du fait que l'avocat est soumis au secret professionnel alors que le défenseur syndical n'a qu'une obligation de discrétion, ce qui introduit une inégalité entre la personne défendue par un avocat et celle qui a confié ses intérêts à un défenseur syndical. C'est ce qu'on appelle l'arroseur arrosé, car si le Conseil constitutionnel censure cette obligation de discrétion, nous ne pourrons faire autrement que de soumettre le défenseur syndical au secret professionnel, ce que voulaient à tout prix éviter les avocats.

En ce qui concerne la procédure prud'homale, j'ai posé au Gouvernement, le 2 août 2016, une question écrite sur le régime des nullités. Je m'étonne de ne toujours pas avoir obtenu de réponse, alors que le délai légal de réponse est de deux mois. Cette situation est très surprenante : ce n'est, en effet, pas difficile pour l'auteur d'un décret de répondre à une question portant justement sur son interprétation.

Même si je n'étais pas convaincu de la nécessité d'une disposition législative, nous avons par ailleurs inscrit dans la loi, à l'article L. 1454-1-2 du code du travail, une disposition concernant la clôture de l'instruction. Reste la question du rabat de clôture – dans le cas où survient un événement après la clôture –, qu'un texte réglementaire devrait pouvoir régler assez rapidement.

Enfin, il faut signaler que le décret du 20 mai 2016 précise la nouvelle procédure écrite devant la cour d'appel et instaure une représentation obligatoire, sachant que cette représentation a ceci de particulier qu'elle peut être assurée par un défenseur syndical, qui n'a, en l'état, accès ni au réseau privé virtuel des avocats ni à celui du ministère de la justice.

Il n'y a rien à dire sur l'inspection du travail, puisque l'ordonnance a été publiée le 7 avril 2016. Comme le président-rapporteur, je fais valoir qu'il serait souhaitable que les commissions parlementaires soient saisies des projets d'ordonnance en temps utile, c'est-à-dire dès le départ, afin que nous puissions les enrichir. En l'occurrence, j'ai été, à titre personnel, saisi de ce dernier projet, et il a été tenu compte d'une partie de mes remarques. Le Gouvernement est donc sur la bonne voie.

Un mot pour conclure sur les prestations de service internationales et les cas de concurrence déloyale, rappelant que, ce qui est en cause, ce n'est pas leur principe mais leurs modalités. Tous les textes nécessaires à l'application des dispositions contenues dans la loi ont été rapidement pris. Je pense notamment au décret du 7 avril 2016, qui concerne les entreprises de transport, ou au décret du 22 février 2016, qui fixe pour le secteur du bâtiment les modalités de mise en oeuvre de la carte d'identification professionnelle, que chaque travailleur sur un chantier doit pouvoir présenter à l'inspection du travail. Si j'insiste sur cette dernière réforme, c'est que ce sont les organismes professionnels qui en sont à l'origine et qui l'ont pensée dans la perspective de lutter contre la concurrence déloyale. Cette collaboration entre une profession et le législateur me paraît assez exemplaire.

J'ajoute enfin que la transmission dématérialisée des déclarations ou attestations de détachement a été prévu par un décret du 29 juillet 2016.

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Je voudrais en premier lieu vous remercier, monsieur le président, pour le travail que vous avez mené, tant au sein de la commission spéciale comme rapporteur général de la loi que dans le cadre de cette mission de suivi. J'ai été impressionné par la constance et l'humour dont vous avez su faire preuve, dans des conditions parfois compliquées. Je remercie également les administrateurs qui nous ont accompagnés tout au long de ce travail.

Je souhaite également souligner le caractère inédit de notre démarche et son utilité. Il est de bonne pratique d'associer étroitement les parlementaires à la mise en oeuvre d'une loi qu'ils ont eux-mêmes votée, surtout lorsque son élaboration a été guidée par un souci permanent de co-construction.

Avant d'analyser en détail l'application de la loi, il n'est pas inutile de rappeler le travail colossal que son application a requis. Pour les dispositions regardant les professions réglementées, sur les quarante et une dispositions de la loi qui nécessitaient des mesures réglementaires d'application, quarante ont été précisées par vingt-cinq décrets et cinq arrêtés. La quarante-et-unième disposition concerne les clercs d'huissier, mais le Gouvernement considère qu'un décret n'est pas nécessaire pour appliquer la loi. Dont acte. Le Gouvernement a également pris quatre ordonnances sur habilitation concernant des dispositions incluses dans la partie que j'ai rapportée.

Je rappelle que la réforme des professions réglementées du droit comporte trois volets : un premier volet relatif aux tarifs, qui a fait l'objet de développements dans le premier rapport de la mission d'information ; un deuxième volet relatif au système d'accès à l'exercice libéral de ces professions, sur lequel je vais revenir en détail ; un troisième volet enfin, relatif à l'interprofessionnalité.

La loi du 6 août 2015 n'a pas remis en cause les principes fondamentaux sous-jacents à l'exercice de ces professions. Ainsi le droit de présentation existe-t-il toujours, tout comme le principe de tarifs réglementés. Les tarifs proportionnels applicables à certaines professions et à certains actes n'ont pas été supprimés.

Nous avons toutefois rénové en profondeur des règles désormais fondées sur des critères objectifs et rationnels. Elles ont été rendues adaptables en fonction de l'évolution de ces critères, par des obligations de révisions périodiques. Nous avons également fourni les outils juridiques nécessaires à l'évolution des formes d'exercice des professions, en assouplissant les conditions de détention de capital et en permettant l'exercice en commun de plusieurs des professions du chiffre et du droit.

Rappelons que l'ensemble de ces dispositions a été inspiré par plusieurs travaux préparatoires, émanant tout à la fois de représentants de l'administration, de parlementaires et de membres de l'Autorité de la concurrence. Ils ont conclu à la nécessité d'une modernisation de certaines des professions réglementées du droit.

Pour en revenir au premier des trois volets de la réforme, l'ancien système tarifaire était marqué par plusieurs insuffisances – je ne détaillerai pas ses défauts bien connus. Désormais, les tarifs sont fixés selon le principe de la rémunération raisonnable et des coûts pertinents. Les arrêtés fixant les tarifs, pour chaque profession, ont été publiés aux mois de février et de mai 2016. La nouvelle architecture normative concernant les tarifs a été décrite dans le premier rapport de la mission d'information.

En ce qui concerne à présent le sujet connexe du Fonds interprofessionnel de l'accès au droit et à la justice (FIADJ) créé par la loi, il n'était pas financé, le Conseil constitutionnel ayant censuré la première contribution envisagée par le Gouvernement. Le législateur n'avait pas épuisé sa compétence, n'ayant pas fixé l'assiette de la contribution avec suffisamment de précision. La contribution était assise sur la valeur de tout bien ou sur le montant de tout droit supérieur à un seuil de 300 000 euros, pour lequel un tarif était fixé proportionnellement à la valeur de ce bien ou de ce droit. Ce seuil pouvait encore être modifié par arrêté.

Dans le projet de loi de finances rectificative pour 2016, le Gouvernement avait donc proposé la création d'une nouvelle contribution. Due par les titulaires d'un office ministériel de commissaire-priseur judiciaire, de greffier de tribunal de commerce, d'huissier de justice et de notaire et par les administrateurs et mandataires judiciaires, son taux était unique et fixé à 1,09 % ; elle était assise sur le chiffre d'affaires par associé, à partir d'un certain seuil.

Afin de conférer un caractère plus progressif à la contribution, le président-rapporteur et moi-même avons introduit un amendement instaurant un barème proportionnel, adopté par le Parlement. Néanmoins, le Conseil constitutionnel a également censuré cette contribution. Il a estimé que le législateur avait instauré une différence de traitement entre les personnes morales et les personnes physiques, dès lors que, pour les personnes morales, l'assiette dépendait du nombre d'associés. Selon lui, la différence de traitement était sans rapport avec l'objet de la disposition. Par conséquent, la disposition contrevenait au principe d'égalité.

Ce fonds de solidarité doit distribuer des aides à l'installation et au maintien, dans le contexte de la réforme du système d'installation. Son objectif est la garantie d'un maillage territorial satisfaisant. J'y suis personnellement très attachée. Il s'agira de lui trouver une nouvelle source de financement.

Rappelons que les tarifs proportionnels pour les transactions importantes génèrent des rémunérations justifiant le prélèvement au profit d'un fonds de solidarité. Ces tarifs ont été maintenus, mais le fonds n'a pas été mis en place. Il y a donc nécessité soit de revoir les tarifs – à la baisse –, soit de repenser la constitution de ce fonds, sur une base que l'exécutif devra nous proposer.

S'agissant justement, en deuxième lieu, des règles relatives à l'installation des professionnels, la phase d'application de la loi a suscité des incompréhensions. Rappelons que la loi apporte une réponse à une situation marquée par l'excessive restriction de l'accès aux professions.

Les professionnels installés étaient impliqués à la fois dans l'évaluation des besoins en nombre de professionnels et dans les procédures de nomination, sans qu'ils aient intérêt à l'ouverture de leur profession. Cette logique d'autorégulation a été inefficace et source de tensions. Voilà pourquoi la loi a instauré, pour les officiers publics et ministériels, un système de liberté d'installation régulée. Il repose sur une distinction entre deux types de zones géographiques, déterminées par une carte que le Gouvernement arrête sur proposition de l'Autorité de la concurrence : les zones de libre installation, dites « zones vertes », et les autres zones, dites « zones orange ». Les zones vertes sont celles où l'implantation d'offices supplémentaires est utile pour renforcer l'offre de services ; les zones orange sont celles où les besoins sont a priori satisfaits.

Pour comprendre les difficultés qui sont apparues dans l'application de la loi, il est nécessaire de se pencher sur les critères qui ont conduit à la construction de la carte pour les notaires. L'Autorité de la concurrence a considéré que l'échelle pertinente était celle des zones d'emploi de l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Pour déterminer si une zone devait être classée en zone verte ou en zone orange, elle a utilisé le critère du chiffre d'affaires par notaire installé dans la zone. Au-delà d'un certain seuil, l'Autorité de la concurrence considère que l'offre peut être renforcée par la création d'offices, menant à la nomination d'un certain nombre de notaires libéraux supplémentaires. Elle a identifié 247 zones vertes, pour chacune desquelles un objectif exprimé en nombre de notaires libéraux supplémentaires est fixé. J'insiste sur le mot « supplémentaires » car, selon le raisonnement de l'Autorité de la concurrence, la nomination dans une zone donnée d'un notaire déjà installé à un office créé dans la même zone ne renforce pas l'offre de services.

Pour les notaires, l'Autorité a recommandé que 1 650 notaires libéraux supplémentaires soient nommés. Par l'arrêté du 16 septembre 2016, le Gouvernement a confirmé la carte proposée par l'Autorité, en précisant qu'il y avait lieu de raisonner en nombre d'offices. Au total, il prévoit la création de 1 002 offices supplémentaires devant mener à la nomination de 1 650 notaires libéraux. Si, à l'issue d'un délai d'un an, dans les zones dont le nombre d'offices créés est conforme à la recommandation, l'objectif en termes de nombres de notaires libéraux n'est pas atteint, le garde des sceaux reprend l'instruction des dossiers et les nominations pour atteindre ce nombre.

Par ailleurs, dans les zones qui ne sont pas classées « zones vertes », en vertu de l'article 52 de la loi, rien n'interdit au garde des sceaux de nommer des candidats à l'installation.

Ces éléments rappelés, revenons sur la procédure de nomination qui a cours, en ce moment, pour les notaires. Il s'agit d'être précis sur ce sujet complexe. Des décrets, en date du 29 juin et du 9 novembre 2016, ont permis aux sociétés civiles professionnelles (SCP) et aux sociétés d'exercice libéral (SEL) d'officiers publics et ministériels d'être titulaires de plusieurs offices : c'est ce qu'on appelle la multi-titularité. Cette disposition est le résultat d'un arbitrage dont la mission d'information n'a absolument pas eu connaissance. La loi ne la rend pas nécessaire et elle a été introduite à la seule initiative du Gouvernement. Elle pose de nombreux problèmes et peut aller jusqu'à remettre en question à terme la notion même d'office.

Les décrets du 9 novembre 2016 sont intervenus une semaine seulement avant l'ouverture du dépôt des candidatures pour les notaires. Dans toutes les zones vertes, le nombre de demandes enregistrées dans les premières vingt-quatre heures a été supérieur au nombre de recommandations pour la zone. Il y avait donc lieu de procéder à des tirages au sort dans chacune des 247 zones vertes, conformément aux dispositions du décret du 20 mai 2016.

Or, la faculté pour les sociétés de détenir plusieurs offices a perturbé le déroulement de la procédure et a suscité l'incompréhension. En effet, à partir du moment où cette possibilité a été ouverte par les décrets mentionnés, il devenait impossible de refuser aux sociétés existantes de participer au tirage au sort. Au total, le ministère de la justice a ainsi enregistré près de 30 000 demandes de nomination, de nombreux demandeurs ayant effectué plusieurs demandes dans des zones différentes, comme le décret du 20 mai 2016 le permet. À ce stade, il n'est pas possible de connaître le nombre total de sociétés existantes parmi les demandeurs mais, fort heureusement, il semble qu'au 1er février 2017, sur les 74 zones pré-instruites, seules 9 % des demandes émanaient de sociétés existantes. Nous espérons donc que l'objectif recherché, c'est-à-dire l'installation de nouveaux officiers publics et ministériels puisse être atteint.

Je suggère dans le rapport deux pistes pour que, in fine, 1 650 nouveaux notaires soient nommés, sans fermer aux sociétés existantes la possibilité d'être nommées dans des offices créés. Toutes deux se fondent sur la méthode de l'Autorité de la concurrence pour évaluer les besoins en offre de service.

L'urgence est désormais de nommer ces professionnels et donc de procéder aux tirages au sort. Après la suspension par le juge des référés du Conseil d'État du premier arrêté fixant les modalités pour les tirages au sort, les garanties de régularité de la procédure ont été renforcées par un nouvel arrêté. Les tirages au sort ont repris, sans qu'il ait été possible de conserver les résultats obtenus antérieurement à la suspension par le Conseil d'État. Ils ont désormais lieu tous les mercredis à la Chancellerie. À ce jour, 29 zones ont été tirées au sort. Le retard pris justifie, s'agissant des notaires, que ces tirages au sort s'effectuent dans un délai très rapproché, les postulants aux charges d'officiers publics et ministériels attendant souvent dans des conditions difficiles.

Concernant la réforme de l'accès à la profession d'avocats au Conseil d'État et à la Cour de cassation, je regrette que nos remarques sur la procédure de nomination n'aient pas été entendues. Malgré les réticences que le président-rapporteur et moi-même avons exprimées, nous constatons avec regret que la commission chargée de classer les candidats aux offices créés n'a pas été supprimée. La logique de l'entre-soi perdure donc au sein de cette profession, qui fait prévaloir tantôt la logique libérale tantôt la logique du service public, c'est selon.

S'agissant en troisième lieu de l'interprofessionnalité, nous n'avons pas à ce stade rencontré de difficultés particulières.

Un mot enfin sur la création de la profession de commissaire de justice. L'ordonnance du 2 juin 2016 fixe les règles relatives au statut de cette nouvelle profession, issue du rapprochement entre les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers de justice. Ses dispositions entreront en vigueur au 1er juillet 2022.

Mes chers collègues, la loi pour la croissance et l'activité est également la loi pour l'égalité des chances économiques. Les dispositions sur les professions du droit s'inscrivent pleinement dans cet esprit. Cette mission d'information s'est attachée, depuis sa constitution, à ce que le pouvoir réglementaire retranscrive au mieux l'intention de la loi. La démarche est novatrice. Elle s'est révélée d'autant plus essentielle que la phase d'application de la loi n'a pas été un long fleuve tranquille. On peut simplement regretter que la mission n'ait pas été sollicitée lorsque des arbitrages importants devaient être rendus, en particulier s'agissant du volet relatif à la libre installation des professions.

Le système doit maintenant trouver son rythme de croisière, sachant qu'il répond désormais pour partie au principe de révisions périodiques propres à adapter le cadre juridique aux situations nouvelles.

Cette mission est inédite, comme l'était la commission spéciale mise en place pour travailler sur cette loi. Je pense qu'elle est résolument moderne. Elle s'inscrit dans ce travail de qualité et de transparence qu'attendent de nous les citoyens, et dans le travail de contrôle que le Parlement doit effectuer depuis la révision constitutionnelle de 2008 et qui impose l'usage de nouveaux outils, dont cette commission de suivi est un exemple dont devra s'inspirer la prochaine législature.

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Merci, chère collègue, de votre engagement dans cette mission. Vous montrez bien que, pour les décrets relatifs à la multi-titularité, la terre entière, si je puis dire, a été « concertée » sauf nous, et qu'il est ressorti des réunions interministérielles l'idée que cette trouvaille était conforme à l'intention du législateur alors que ce n'est absolument pas le cas. Il faudra à l'avenir faire en sorte que cette concertation en amont ait lieu, faute de quoi notre intention peut être dénaturée par les décrets. L'absence de concertation nous contraindrait à écrire des lois beaucoup trop bavardes – alors que l'on dit qu'elles le sont déjà – pour prévenir de telles bifurcations réglementaires.

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Les articles 241 à 257 de la loi du 6 août 2015 ont apporté de nombreuses modifications aux dispositions organisant le travail des salariés le dimanche et en soirée. Les principales innovations ont permis d'ajouter aux zones touristiques et aux zones commerciales les zones touristiques internationales (ZTI),de modifier le régime et d'étendre potentiellement le nombre de « dimanches du maire » de cinq à douze par an,de refondre et d'harmoniser les régimes existants afin que les conditions d'ouverture et les nécessaires compensations pour les salariés concernés fassent l'objet d'un accord collectif ou, dans les établissements de moins de onze salariés, d'une décision de l'employeur approuvée par la majorité des salariés.

Depuis le premier rapport d'étape du 22 mars 2016, trois types d'évolution peuvent être constatées : tout d'abord, le régime d'ouverture local a été modifié de façon marginale, ensuite, deux mesures d'application complémentaires ont été prises, à savoir la création de trois zones touristiques internationales supplémentaires et la mise en place d'un Observatoire du commerce, enfin les négociations collectives ont pu se poursuivre et aboutir dans plusieurs secteurs emblématiques comme celui des grands magasins.

En ce qui concerne les dimanches du maire, deux évolutions ont eu lieu. L'article 250 de la loi a apporté plusieurs modifications au dispositif permettant au maire d'accorder, par arrêté, l'autorisation d'ouvrir certains dimanches aux commerces. Le nombre de dimanches pouvant ainsi faire l'objet d'une ouverture dominicale est passé de cinq à douze par an. Ce même article 250 n'a pas modifié les dispositions préexistantes qui confiaient, par voie d'exception pour la seule ville de Paris, le choix des dimanches concernés au préfet de police.

Saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité à ce sujet, à l'initiative de la maire de Paris, le Conseil constitutionnel a jugé le 24 juin 2016 qu'« aucun motif d'intérêt général ne justifie que, s'agissant du pouvoir de déterminer les dimanches durant desquels les établissements de commerce de détail sont autorisés à supprimer le repos hebdomadaire dominical, la ville de Paris soit traitée différemment de toutes les autres communes », et déclaré contraire à la Constitution ces dispositions dérogatoires.

En conséquence, la maire de Paris a pu exercer cette compétence et a proposé au Conseil de Paris du 9 novembre 2016 d'autoriser les commerces parisiens à ouvrir douze dimanches en 2017, soit le maximum possible, pour « soutenir les commerces de proximité, qui sont confrontés à la concurrence des grandes enseignes situées dans les zones touristiques internationales ».

Par ailleurs, dans le premier rapport d'application, nous avions constaté, Richard Ferrand et moi-même, que le dispositif de fixation des dimanches du maire retenu par le législateur était excessivement rigide.

Alors que la décision du maire n'était précédemment enserrée dans aucun délai ni obligation de consultation, il est désormais nécessaire de consulter les représentants locaux des employeurs et des salariés, de recueillir l'avis du conseil municipal et, si le nombre de dimanches excède cinq, l'avis conforme ou implicite de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale (EPCI), en temps utile pour que l'arrêté municipal puisse être pris avant le 31 décembre de l'année précédente. Cette date butoir apparaissait en pratique à la fois trop rapprochée pour que les commerces organisent en concertation avec leurs salariés une ouverture pour les soldes de janvier, et trop éloignée quand il s'agit de fixer plus d'un an à l'avance les ouvertures dominicales de décembre.

Aussi, nous avons déposé un amendement qui a été intégré au projet de loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels, afin d'introduire plus de souplesse dans la détermination par les maires des dimanches ouvrables, en ouvrant la possibilité de modifier en cours d'année la liste des dimanches concernés, tout en respectant les mêmes formes – consultation des organisations syndicales et patronales, du conseil municipal et, lorsque le nombre de dimanches excède cinq, de l'organe délibérant de l'EPCI – et en imposant un délai minimal de deux mois avant le premier dimanche concerné par cette modification.

En ce qui concerne les mesures d'application de la loi, tous les textes réglementaires d'application nécessaires avaient été pris entre le 23 septembre 2015 et le 10 février 2016, après achèvement des procédures de consultation prévues par le législateur ou le pouvoir réglementaire.

Cependant, deux mesures complémentaires ont été prises depuis cette date : d'une part, la création de trois zones touristiques internationales supplémentaires, à Antibes, Dijon et La Baule le 25 juillet 2016, qui sont venues rejoindre les douze ZTI parisiennes et les six ZTI de province, et, d'autre part, la mise en place d'un Observatoire du commerce dans les ZTI, créé par arrêté conjoint du ministre des affaires étrangères, de la ministre du travail et du ministre de l'économie du 20 juin 2016, afin d'« évaluer la réforme de l'ouverture dominicale des commerces, d'en suivre la promotion internationale, d'en mesurer les effets sur le commerce, l'activité économique, l'emploi et le dialogue social »

Sous la coprésidence des ministres chargés de l'économie et du travail, il réunit neuf représentants des organisations professionnelles, cinq représentants des organisations syndicales de salariés, quatre représentants de l'État, deux représentants des organismes consulaires, onze personnalités qualifiées et les maires des communes concernées par l'implantation d'une zone touristique internationale.

L'arrêté prévoit que « l'Observatoire du commerce dans les zones touristiques internationales dispose d'un site internet », afin de diffuser des informations d'ordre documentaire sur les différents dispositifs relatifs à l'ouverture dominicale et en soirée des commerces, à destination des commerces et des consommateurs. Dans le précédent rapport d'étape, j'avais souhaité un tel renforcement des moyens d'information ; aussi regretté-je particulièrement que ce site ne soit pas en ligne à ce jour.

Enfin, il est possible de faire un nouveau bilan de la mise en oeuvre de la loi, qui repose sur la négociation collective. Si de nombreuses branches ou entreprises avaient abouti à un tel accord avant la parution du premier rapport d'étape le 22 mars 2016, l'année écoulée a été mise à profit pour permettre l'engagement ou l'aboutissement de négociations dans de nombreux commerces. Le rapport d'étape permettra de détailler trois exemples emblématiques : les grands magasins parisiens, la FNAC et les hypermarchés.

Après l'échec des négociations au niveau de la branche en 2015, des négociations ont eu lieu dans chaque enseigne de grands magasins parisiens. Un accord de branche aurait eu l'avantage d'harmoniser les compensations salariales dans l'ensemble des enseignes ; dans les faits, chaque magasin a négocié son propre régime de compensation.

Le BHV Marais a été le premier grand magasin parisien à signer un accord de compensation salariale avec les syndicats, le 6 mai 2016. L'accord conclu pour trois ans prévoit pour les salariés travaillant habituellement la semaine un plafond de quinze dimanches travaillés par an, assortis d'une majoration de salaire de 100 % et d'une récupération. Le BHV Marais est ainsi ouvert tous les dimanches depuis le mois de juillet 2016. Ont suivi les Galeries Lafayette, où 92 % des salariés se sont inscrits pour travailler le dimanche, le Bon Marché, Monoprix et finalement, en janvier 2017, le Printemps. Ainsi, toutes les enseignes de grands magasins vont pouvoir dorénavant ouvrir leurs établissements situés dans les ZTI.

Les premières données disponibles, communiquées le 4 novembre 2016 par l'Observatoire du commerce dans les zones touristiques internationales, montrent que 15 % des magasins situés dans les ZTI sont déjà ouverts le dimanche et 2,5 % le soir. Cela concerne près de 1 500 magasins, essentiellement des petits commerces de moins de onze salariés.

Six mois après le début de l'ouverture dominicale du BHV Marais, « le bilan est extrêmement positif, avec un chiffre d'affaires additionnel de 10 % depuis la mise en place des ouvertures dominicales », selon la direction : le dimanche est devenu le deuxième meilleur jour de ventes, derrière le samedi. Les ouvertures dominicales ont attiré une nouvelle clientèle, mais essentiellement locale et francilienne. En termes d'emplois, le BHV Marais fait valoir la création de 150 postes en contrat à durée indéterminée (CDI) de fin de semaine grâce aux ouvertures dominicales. Les Galeries Lafayette ont recruté 330 personnes en vue des prochaines ouvertures du dimanche, et prévoient de créer 500 postes nouveaux grâce à ces dimanches désormais travaillés, sans compter les emplois indirects, comme ceux de démonstrateurs de marques.

En termes de fréquentation touristique, le centre commercial Beaugrenelle, situé non loin de la Tour Eiffel, a indiqué qu'un an après avoir obtenu le droit d'ouvrir le dimanche, il a vu sa fréquentation touristique bondir de 28 %.

Dans certaines enseignes, les négociations ont pris un certain temps mais ont abouti à des dispositifs de compensation du travail dominical avantageux pour les salariés concernés. Ainsi, la direction de la FNAC a conclu, le 26 janvier 2017, un accord relatif au travail dominical et au travail de soirée qui prévoit une majoration de salaire à hauteur de 200 % par dimanche pour les douze dimanches générant l'activité la plus importante sur l'année, et de 100 % pour les autres dimanches. Concernant les douze dimanches majorés à 200 %, le salarié pourra choisir entre la totalité de la majoration ou le paiement à hauteur de 100 % et un repos équivalent au nombre d'heures travaillées et crédité dans le compteur des heures à compenser.

Enfin, les enseignes d'hypermarchés ont entrepris des négociations. En application de l'article L. 3132-13 du code du travail, les commerces de détail alimentaire bénéficient d'une dérogation permanente de droit au principe du repos dominical puisqu'ils peuvent ouvrir le dimanche matin jusqu'à treize heures ; la loi a prévu que, dans les commerces alimentaires dont la surface de vente est supérieure à 400 mètres carrés, les salariés devront bénéficier pour cette période d'une majoration de 30 % de leur rémunération.

Lors des auditions menées début 2016, l'ouverture dominicale n'apparaissait pas comme une priorité des chaînes d'hypermarché ; cependant, les réflexions semblent avoir évolué en la matière. La direction du groupe Carrefour a convoqué en décembre 2016 les syndicats pour négocier l'ouverture dominicale. Elle souhaite ainsi remettre en cause un accord d'entreprise de 1999 qui, contrairement à ses concurrents comme Auchan ou Casino, prévoyait explicitement que le repos hebdomadaire était donné le dimanche et bloquait ainsi les ouvertures dominicales, exception faite des dimanches du maire.

Si la négociation semble difficile, un accord permettrait aux 191 hypermarchés Carrefour SAS, représentant quelque 60 000 salariés, d'ouvrir le dimanche matin, même si l'enseigne n'entend pas forcément ouvrir tous ses hypermarchés tous les dimanches matin. Selon les syndicats, parmi ces magasins de plus petite taille, supérettes et supermarchés, Carrefour détiendrait déjà 5 000 points de vente ouverts le dimanche.

Dans le même temps, M. Michel-Édouard Leclerc, dirigeant du groupement de distributeurs indépendants Leclerc, a indiqué en janvier 2017 qu'il ne souhaitait pas une généralisation du travail dominical dans les hypermarchés – seuls 15 % à 20 % de centres Leclerc étant actuellement ouverts le dimanche matin.

Chez Auchan, un tiers des hypermarchés s'apprêterait à ouvrir le dimanche matin, en prenant en compte l'évolution des modes de vie, en offrant une compensation salariale de 50 % à leurs salariés.

On constate donc que, malgré des débuts difficiles, le pari du législateur, qui a fait confiance à la négociation collective, a été concluant : les négociations ont abouti à des régimes de compensation substantiels pour les salariés concernés. Nous avons apporté de la régulation là où il n'y en avait pas ; c'était l'enjeu des accords gagnant-gagnant que nous avons souhaités.

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Puisque nous sommes au moment de tirer quelques leçons, je rappelle que certains n'avaient pas souhaité voter la loi au motif qu'elle n'imposait pas de plancher pour le surcroît de rémunération offert aux salariés travaillant le dimanche. Ayant un peu d'expérience du monde du travail, contrairement à l'auteur de certains de ces amendements, nous avions fait valoir que ce qui est fixé comme étant un plancher devient rapidement un plafond. De surcroît, une telle proposition déniait aux partenaires sociaux leur capacité à négocier et à trouver les bonnes solutions. Ce que vient d'indiquer Stéphane Travert l'illustre parfaitement. Les négociations entre direction et représentants du personnel ont permis d'aboutir à des compensations largement supérieures à tout plancher qui avait été le prétexte à des querelles fort longues. Faire confiance aux partenaires sociaux a été plus pertinent que de légiférer pour une cote mal taillée qui aurait privés d'initiative lesdits partenaires sociaux, de chiffre d'affaires les entreprises et de revenus supplémentaires les salariés – sans compter les créations d'emplois.

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Je m'associe à vos propos, monsieur le président, quand vous indiquez que cette mission pourrait servir d'exemple pour le contrôle du Parlement sur l'application de la loi par le Gouvernement. L'action de la mission, les auditions que nous avons conduites et auxquelles j'ai participé assidument, ont certainement orienté le point de vue réglementaire. Je m'associe aux remerciements qui vous ont été adressés sur la façon dont vous avez mené cette mission.

Je ne partageais pas tous les objectifs de la loi, notamment en ce qui concerne les professions réglementées, et je pourrais me réjouir du fait que certaines dispositions, présentées comme très urgentes au cours des débats, ne sont pas encore appliquées. Ce n'est pas mon état d'esprit. Je remarque simplement que la dernière audition, avec le conseiller du garde des sceaux, M. Berlioz, a été révélatrice de la tendance du pouvoir réglementaire à ne pas appliquer aussi rapidement que nous le souhaiterions ce qui a été voté et, au contraire, à retarder cette application par tous les artifices réglementaires à sa disposition.

L'objectif, considéré comme essentiel et urgent au moment du vote de la loi, de permettre à un plus grand nombre de professionnels réglementés, notamment les notaires, de poser une plaque n'est toujours pas appliqué, ce qui montre la distance pouvant exister entre la volonté du législateur et sa réalisation. Les propos de Cécile Untermaier sont tout à fait révélateurs.

Vous avez indiqué qu'il fallait attendre la prochaine législature pour tirer le bilan définitif de l'application de cette loi. Je souhaite moi aussi que ce travail se poursuive, quelle que soit la majorité qui aura en charge les destinées de notre pays, et qu'il serve d'exemple. À titre d'illustration, nous avons voté une loi de modification de notre système de santé sur laquelle nous sommes totalement incapables aujourd'hui de dire où en sont l'application et les décrets.

Le travail parlementaire serait renforcé. Selon moi, il n'y a pas de loi de droite ou de gauche ; il y a une loi au service de l'intérêt général, votée par le Parlement au service des Françaises et des Français, et notre rôle de législateur est aussi de vérifier son application.

Enfin, lors de nos auditions j'ai posé une même question à de nombreuses reprises, à l'Autorité de la concurrence, à Mme Taubira, à M. Urvoas, ainsi qu'au ministre à Bercy, concernant la rémunération des petits actes. Bernadettte Laclais est également beaucoup intervenue sur le sujet. Le ministre nous a laissé entendre qu'il n'était pas insensible à notre argumentation, mais qu'il attendait la démonstration du Conseil supérieur du notariat. La mesure n'a vraisemblablement pas porté les fruits qu'il espérait, à savoir une augmentation du nombre de transactions sur les petits actes. Je ne sais pas si le Gouvernement a décidé de revenir sur cette décision ou si elle est toujours appliquée telle quelle. En tout cas, je trouve dommage que nous n'ayons pu évoluer sur ce point.

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Je pense qu'il n'y a pas eu d'évolution enregistrée depuis.

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En vous écoutant, monsieur le président, je me disais que les motifs pour lesquels j'étais opposé au projet de loi demeuraient. C'est bien la preuve que le Gouvernement a respecté la volonté du législateur, au moins dans ses grandes lignes. Sous cet aspect, vous pouvez donc être satisfait. Il ne s'agit pas, ici, de dresser un bilan politique de la loi, mais je ne peux m'empêcher de préciser qu'elle a eu des effets politiques sur la majorité, et si ceux-ci ont dépassé l'intention des députés, ses effets économiques, en revanche, sont restés en deçà de la volonté du Gouvernement comme de sa majorité.

Je souhaiterais évoquer le mécanisme du contrôle parlementaire, d'abord pour vous adresser à mon tour mes remerciements et mes félicitations pour la création et les travaux de cette mission d'information, ensuite pour partager avec vous quelques réflexions sur le sujet.

Premièrement, quoi que l'on pense de ce que l'on entend dans les médias ou les couloirs de cette maison, il est clair que nous assistons actuellement à un terrible affaiblissement de l'autorité du Parlement, dont les moyens de fonctionnement, voire, probablement, un certain nombre de libertés sont remis en cause. Nous devons y être attentifs, et je regrette, du reste, que l'expression collective des parlementaires ne soit pas plus énergique et plus unanime car, outre que nous en pâtissons à titre personnel – mais ce n'est pas si important –, la liberté des citoyens s'affaiblit à chaque fois que celle du Parlement s'amoindrit.

Deuxièmement, la mission de contrôle du Parlement est encore assez mal maîtrisée par notre assemblée et peu connue de nos collègues eux-mêmes. Je sais, pour avoir eu l'honneur de rédiger avec Régis Juanico un rapport du Comité d'évaluation et de contrôle des politiques publiques (CEC), que les travaux réalisés dans ce cadre se déroulent pour ainsi dire dans une indifférence quasi générale. Cependant, j'ose espérer que ceux qui nous succéderont peut-être dans quelques semaines s'approprieront davantage cette mission, car s'assurer que la loi est conforme à la volonté du législateur est indissociable de l'acte de la voter. Nous disposons pour ce faire des moyens nécessaires – et je veux ici remercier les services de notre assemblée pour le travail qu'ils ont accompli à vos côtés.

Troisièmement, je me souviens que, lors de la réforme constitutionnelle de 2008, je m'étais efforcé de convaincre mes collègues que, si le législateur est parfois conduit, je dirai presque « réduit », à voter des lois qui vont très loin dans le détail – je ne parle pas ici de celles qui ne veulent rien dire ou des déclarations d'intention, qui devraient être bannies de tout code –, c'est sans doute parce qu'un climat de défiance terrible s'est installé entre les différents pouvoirs. De fait, si le législateur avait pleinement confiance dans l'interprétation que le juge fait de ses textes – je pense, en l'espèce, à la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation – et dans le pouvoir exécutif chargé de rédiger les décrets d'application, peut-être consacrerait-il moins d'énergie à entrer à ce point dans le détail. Il s'agit donc de rétablir la confiance entre les institutions, et l'un des moyens d'y parvenir réside, me semble-t-il, dans la manière dont nous écrivons la loi. Nous avons en effet perdu de vue – mais c'est un problème de notre temps – qu'une formulation universelle est en réalité bien plus forte qu'une formulation détaillée.

Toujours est-il que j'avais, à l'époque, proposé une solution pratique, qui n'a, hélas ! pas été retenue. Elle consistait à prévoir que, durant la semaine que notre ordre du jour réserve au contrôle, le Gouvernement vienne présenter, en séance publique, les textes d'application des lois votées par le Parlement. Cette solution, parfaitement conforme à l'esprit même de cette semaine de contrôle, éviterait que la restitution de ces travaux essentiels ne se limite au cercle réduit des commissions.

Si j'étais chafouin, je dirais, à ce propos, que la question de la multi-titularité est la plus belle objection de principe jamais faite à cette loi puisque, d'une certaine manière, elle fournit au ministère de la justice l'occasion de se rappeler au bon souvenir de celui de l'économie… Toujours est-il que l'on est en droit de se demander jusqu'à quel point il est tolérable que le pouvoir exécutif aille à l'encontre de la volonté du législateur. Existe-il, dans un tel cas, une instance de recours devant laquelle celui-ci puisse contester cette interprétation ? Par ailleurs, je constate, avec la même satisfaction que vous, qu'une énergie considérable a été consacrée à faire en sorte que la loi votée il y a deux ans soit traduite dans les faits aussi vite que possible. Mais le problème est toujours le même : on considère telle disposition comme urgente, mais on finit par patienter un temps interminable avant que soit mis en oeuvre ce qui était réputé imminent.

Un mot sur les ordonnances. J'ai indiqué à plusieurs reprises qu'elles n'étaient pas ma tasse de thé, même si elles sont constitutionnelles. Quoi qu'il en soit, elles mériteraient une approche ou un traitement un peu différent. À cet égard, si nos successeurs devaient envisager autrement les relations entre les différents pouvoirs, il faudrait tout d'abord qu'ils généralisent ce type de missions d'information – et je vous remercie d'avoir essuyé les plâtres, monsieur le président. La difficulté soulevée par les ordonnances réside dans le fait qu'il faut laisser sa liberté au pouvoir exécutif tout en s'assurant que les textes sont bien conformes à ce qu'ils sont censés être. Je me méfie d'autant plus de cette procédure que je connais la tentation que certains ont d'en user massivement pour gouverner de manière énergique. Cela n'a jamais été ma position : il me semble que, particulièrement en temps de crise, il revient au Parlement de débattre, dans des délais raisonnables, certes, mais il existe de nombreux moyens de mettre fin à la discussion en séance publique si le Gouvernement l'estime nécessaire.

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Nous partageons l'idée selon laquelle la mission de contrôle du Parlement doit être renforcée et davantage connue de nos concitoyens, qui doivent savoir que ce dernier a également pour rôle de contrôler le pouvoir exécutif, notamment la mise en oeuvre des lois, l'un comme l'autre devant jouir de sa totale liberté.

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Monsieur le président, je m'associe aux remerciements qui vous ont été adressés, ainsi qu'aux anciens rapporteurs thématiques. Nous sommes tous bien conscients du travail considérable que vous avez fourni, que ce soit lors de l'examen de ce projet de loi important par sa densité et la diversité des thèmes abordés ou dans le cadre de cette mission d'information, dont je salue l'existence. Cette manière nouvelle de travailler doit être utilisée avec détermination.

Comme toute réforme, cette loi comporte des dispositions dont la mise en oeuvre n'a pas soulevé de problèmes et d'autres dont l'application est plus complexe. Je ne sous-estime pas la difficulté de trouver des solutions dans certains cas mais, puisqu'il s'agit de notre dernière réunion avant la fin de la législature, je souhaite évoquer les sujets qui me tiennent à coeur et pour lesquels nous n'avons toujours pas trouvé de solution satisfaisante. Cécile Untermaier a ainsi évoqué la question du tirage au sort. La loi a maintenant été votée il y a deux ans. Or, de nombreux jeunes avaient différé leur installation ou le dépôt de leur dossier dans l'attente de ses dispositions. Il est donc urgent de procéder à ce tirage au sort, qui est très attendu dans les territoires.

Le deuxième sujet sur lequel je veux insister est celui du fonds interprofessionnel qui, selon l'intention du législateur, devait non seulement fournir une aide à l'installation mais aussi faciliter l'accès au droit. Lors de l'examen des projets de loi de finances, j'ai déposé, avec Cécile Untermaier, des amendements en ce sens, mais ils ont été rejetés à la fois par le Gouvernement et par nos collègues de la commission des finances. Je ne leur en veux pas, mais ses rapporteurs n'ont pas forcément suivi nos débats. Toujours est-il que le dispositif n'a pas, aujourd'hui, l'amplitude que nous souhaitions lui donner. C'est un regret que je souhaitais exprimer ici, en espérant que d'autres poursuivront ce travail.

Il me semble indispensable que nous observions très attentivement, car cela a été notre souci constant, ce qui se passera après le tirage au sort, notamment dans les zones les moins denses. Les petits actes, qui représentaient souvent une partie importante de l'activité des petits offices notariaux, ne sont plus très rémunérateurs. Qui les accomplira, à l'avenir ? Nombre de ces petits offices sont prêts à nous transmettre leur chiffre d'affaires de façon anonyme en en détaillant la composition, afin que nous puissions mesurer les effets de la réforme sur leur activité. Je souhaiterais que cette étude soit menée.

Enfin, notre collègue Stéphane Travert sait l'intérêt que je porte au commerce de centre-ville, en tant que députée et en tant que présidente de l'association Centre-ville en mouvement. J'étais favorable aux dispositions relatives à l'ouverture dominicale dont j'estime qu'elles sont très bonnes, et le rapport en atteste. En effet, monsieur le président, nous avons fait confiance au dialogue social, mais nous avons également fait confiance au dialogue entre l'intercommunalité et les communes. Or, je suis obligée de constater que, dans un certain nombre d'agglomérations, le nombre des dimanches ouverts dans les villes-centres est inférieur à celui des dimanches ouverts dans leur périphérie, et ce pour des raisons politiques. De fait, la ville-centre ne peut pas toujours, en raison des forces en présence, faire valoir son point de vue. J'ignore quelle mesure il faudrait proposer. En tout état de cause, il est anormal que, dans la période précédant les fêtes, certains commerces situés dans des centres commerciaux puissent ouvrir le dimanche alors que ceux du centre-ville ne le peuvent pas. Une harmonisation me semble nécessaire dans ce domaine, et je suggère que nous y réfléchissions. Les commerces de centre-ville ont besoin du soutien des élus pour continuer à renforcer l'attractivité de nos coeurs de ville, et je ne manquerai pas de le rappeler lors des assises du commerce de centre-ville qui doivent se tenir la semaine prochaine. C'est notre responsabilité de législateur d'offrir à ces commerçants la possibilité de travailler sur un pied d'égalité avec les commerces situés à la périphérie car, aujourd'hui, hélas ! cette possibilité dépend des intercommunalités dans lesquelles ils se situent.

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Comme la mission d'information commune elle-même, je souhaite que la méthode de travail que cette dernière a adoptée perdure lors des prochaines législatures. Il faut que le Parlement remplisse mieux sa mission de contrôle et d'évaluation. Le contrôle passe aujourd'hui par des séances publiques de questions orales et par des questions écrites transmises au Gouvernement, mais le rapport d'information que nous examinons aujourd'hui illustre parfaitement notre capacité à veiller à la mise en oeuvre des lois que nous avons votées. Il ne s'agit pas de mettre les administrations sous pression, même si cela peut constituer un mode d'action, mais plutôt d'augmenter nos moyens d'expertise pour mieux évaluer et contrôler les politiques publiques.

Le tirage au sort pour l'ouverture de nouvelles études de notaire a donné lieu à des problèmes, que ce soit en termes d'agenda ou de procédure. Des tirages au sort ont même été annulés, ce que nous regrettons tous. Cette situation, qui a créé des déceptions et des tensions, n'a pas contribué à crédibiliser le travail du Parlement. Il nous appartient d'exiger que des études d'impact précises et complètes nous soient transmises sur l'ensemble des conséquences prévisibles des dispositions qui nous sont proposées par le Gouvernement.

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Chers collègues, je remercie l'ensemble des membres de notre mission d'information pour leur travail. Je remercie également les services de l'Assemblée nationale pour l'aide précieuse qu'ils nous apportent. Je nous souhaite de nous retrouver bientôt pour poursuivre ce travail afin que nous puissions nous assurer que l'application de la loi donne satisfaction à nos concitoyens, et que nous soyons en mesure de corriger ce qui mérite de l'être.

La mission d'information commune adopte le rapport d'information à l'unanimité.

Membres présents ou excusés

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Mission d'information commune sur l'application de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques

Réunion du mercredi 15 février 2017 à 16 heures 20

Présents. - M. Richard Ferrand, Mme Bernadette Laclais, Mme Véronique Louwagie, M. Gilles Lurton, M. Jean-Frédéric Poisson, M. Denys Robiliard, M. Stéphane Travert, Mme Cécile Untermaier

Excusé. - M. Gilles Savary