Séance en hémicycle du 30 janvier 2013 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • circulaire
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  • filiation
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  • gestation pour autrui
  • homme
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  • égalité

La séance

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Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

La séance est ouverte.

(La séance est ouverte à quinze heures.)

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L'ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

Nous commençons par une question du groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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La parole est à M. Jean-François Copé. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Ma question s'adresse à M. le Premier ministre.

Monsieur le Premier ministre, les masques sont en train de tomber. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Vous avez refusé d'ouvrir un grand débat national sur votre projet de loi qui bouleverse le cadre juridique du mariage, de l'adoption et de la filiation, vous avez méprisé tous ceux qui vous invitaient à la sagesse, les 800 000 Français qui ont manifesté (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe SRC), les plus hautes autorités civiles, morales et religieuses, auditionnées dans des conditions lamentables, vous privez le peuple français d'un référendum sur cette question fondamentale,…

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…et maintenant vous allez jusqu'à l'excès de pouvoir en court-circuitant la représentation nationale.

Notre excellent collègue Daniel Fasquelle (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe SRC) a en effet levé le lièvre en révélant une circulaire d'application immédiate prise vendredi dernier en catimini par votre garde des sceaux. Cette circulaire a des conséquences indirectes majeures sur le droit de la famille et même le droit de la nationalité, sans passer par la loi. En plein débat sur votre projet de loi, c'est une provocation inacceptable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Cette circulaire a pour conséquence de reconnaître en droit français la validité de la gestation pour autrui réalisée à l'étranger.

De nombreux députés du groupe SRC. Non !

De nombreux députés du groupe UMP. Si !

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Ce faisant, vous encouragez directement le recours à des méthodes illégales dans notre pays, des méthodes qui portent atteinte à la dignité humaine.

De quoi s'agit-il ? Il s'agit de payer une femme démunie pour qu'elle porte l'enfant d'un autre. L'enfant devient un objet qui s'achète, privé du droit de connaître sa mère, et la femme est exploitée dans une forme d'esclavage moderne, comme le dénonce si justement Sylviane Agacinski.

Quelle société voulez-vous pour les générations à venir, monsieur le Premier ministre ?

Mme Taubira nous parlait hier avec grandiloquence du « mariage pour tous » comme d'une marche vers la civilisation. Je vous demande donc de retirer immédiatement cette circulaire. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.)

Vous refusez le référendum, vous refusez le Parlement. C'est un coup de force ! (Nouveaux applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.)

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La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. (Vives protestations et huées sur les bancs du groupe UMP. – Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP, les députés socialistes se levant.)

Mes chers collègues, écoutez la réponse…

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Je vous rappelle, monsieur le député, que parmi les principes d'ordre public du droit français se trouve le principe d'indisponibilité du corps humain,…

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

…qui est inscrit à l'article 16 du code civil. Le Gouvernement s'est déjà prononcé sur ce point et vous me fournissez l'occasion de réaffirmer formellement ici qu'il est absolument opposé à la gestation pour autrui et n'ouvrira pas un tel droit. (Exclamations sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI. – Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

La Cour de cassation, par trois arrêts datant d'avril 2011, a confirmé ce principe d'indisponibilité du corps humain, le Président de la République l'a réaffirmé, de même que le Premier ministre.

De nombreux députés des groupes UMP et UDI. Pourquoi la circulaire ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

J'ai moi-même indiqué le 16 janvier devant la commission des lois que nous ne tolérerions pas la moindre éraflure à ce principe d'indisponibilité du corps humain.

De nombreux députés des groupes UMP et UDI. Et la circulaire ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Les enfants concernés par la circulaire étaient au nombre de onze en 2012, de quarante-quatre entre 2008 et 2011. Cette circulaire porte, non pas sur l'état-civil, mais sur le constat de nationalité. (« Non ! » sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.) La filiation de ces enfants est établie par document probant. Les juridictions délivrant le certificat de nationalité française dans certains cas et non dans d'autres, j'ai demandé aux greffiers en chef, étant donné que ce certificat de nationalité française est dû (Vives protestations sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI), de veiller à ce que, conformément à votre souci de l'intérêt supérieur des enfants (Nouvelles protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI), dans une République qui veille à l'égalité, la justice traite les enfants de la même façon sur l'ensemble du territoire et leur délivre ce certificat de nationalité. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR, les députés des groupes SRC et écologiste se levant. – Huées sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

De nombreux députés du groupe UMP. Démission ! Démission !

Plusieurs députés du groupe SRC. Voyous !

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Soyez conscients, mes chers collègues, de l'image que nous donnons. Vous avez eu la réponse à votre question.

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La parole est à M. Luc Belot, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le ministre de l'éducation, il y a un peu plus de six mois, vous lanciez la concertation sur la refondation de l'école. Plus de 300 heures d'atelier, plus de 120 réunions décentralisées ont permis de réunir l'ensemble des acteurs de la communauté éducative : parents, enseignants, acteurs associatifs, élus.

Le projet de loi que vous avez présenté la semaine dernière en conseil des ministres découle directement des conclusions de ces travaux : il définit un cadre et porte une véritable ambition. Nous avons enfin un projet global qui met l'enfant au coeur des réflexions (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), prévoit d'investir dans des moyens humains, donne la priorité à l'école primaire et fait évoluer les contenus et l'organisation des enseignements.

Faire aboutir ce projet est une priorité. À cette fin, il faut pouvoir s'appuyer sur deux piliers : la réussite scolaire, bien sûr, mais aussi la réussite éducative.

En ce qui concerne la réussite scolaire, les premières mesures budgétaires prises par la majorité sont annoncées dans nos territoires. Ce projet de loi vient les structurer et leur donner sens, avec pour objectif la réussite pour tous. Pouvez-vous nous dire quelles seront les règles de déploiement de ces moyens ?

S'agissant de la réussite éducative, complémentaire de la réussite scolaire, nous avons pu constater avec plaisir que vous avez inscrit dans le texte les projets éducatifs de territoire. Ils doivent pouvoir porter un objectif – celui de la réussite pour tous –, dessiner une méthode – construire avec tous les acteurs –, mais aussi être une boîte à outils en permettant la construction de parcours éducatifs.

Au regard de l'importance de ces projets, pouvez-vous nous indiquer quels moyens et accompagnements vous allez mettre à la disposition des maires et de la communauté éducative pour permettre enfin la réussite de tous les élèves, réussite dont trop d'enfants ont été privés ces dernières années ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Monsieur le député, depuis la loi Jospin de 1989 et la loi Fillon de 2005, notre pays n'a pas assez débattu de l'école et n'a pas fixé ses grandes orientations. (« C'est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Nos résultats ne sont pas bons, parce que nous nous heurtons à un plafond de verre – nous n'arrivons pas à augmenter le nombre des élèves atteignant le baccalauréat ou commençant des études supérieures –, parce que les inégalités augmentent et parce que les performances scolaires sont de moins en moins bonnes, tant selon les évaluations nationales qu'internationales. C'est un grand gâchis pour des individus, des enfants, des élèves, et c'est mauvais pour notre nation, en termes de compétitivité économique, de cohésion sociale, d'esprit civique.

C'est pourquoi le Président de la République et le Premier ministre ont décidé de faire de l'école la priorité. J'espère donc que nous serons capables d'avoir un grand débat parlementaire autour de ces priorités que sont le primaire et les apprentissages fondamentaux pour tous les enfants de France, le rétablissement d'une formation initiale et continue des enseignants ainsi que de rythmes plus adaptés pour les élèves, l'entrée dans la modernité grâce à l'apprentissage d'une langue étrangère, la création d'un service public du numérique et, enfin, la possibilité – car les orientations subies sont trop nombreuses – de créer dans ce pays un service public territorialisé de l'orientation efficace et de réaliser un meilleur ajustement entre les études et les métiers.

Nous avons besoin, autour de l'école, de la mobilisation de toute la nation. Lorsqu'on a des convictions, on n'est pas obligé de vociférer. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Notre grande tradition, c'est celle qui doit permettre de se rassembler autour de l'école, dans l'intérêt des élèves, qui est aussi l'intérêt de la France. Nous sommes prêts à mener ce grand débat parlementaire, et j'espère que le Parlement nous accompagnera tout au long des mois à venir pour améliorer encore ce projet de refondation. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le Premier ministre, le groupe UDI souhaite revenir sur la circulaire Taubira, qui vient d'être évoquée, afin de vous offrir l'opportunité de clarifier vos positions.

Le premier point qui nous a surpris et choqués, c'est que la loi française relative aux mères porteuses et à la GPA n'est nulle part rappelée dans cette circulaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.) Le sujet est d'autant plus sensible que nous sommes en pleine discussion sur le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels.

Le second point, qui s'inscrit également dans le cadre de ce projet sur le mariage pour tous – dont nous avons discuté hier pendant plusieurs heures dans une relative sérénité –, c'est que les questions essentielles qui sous-tendent nos débats sont celles de l'adoption, de la PMA et de la GPA. Nous avons donc besoin d'une clarification de votre part.

Soit le Gouvernement est favorable aux mères porteuses et à la GPA, et il faut le préciser. Nous avons en effet besoin de savoir si cette circulaire ne serait pas un signe avant-coureur, une première étape. (« Très juste ! » sur les bancs du groupe UDI. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Soit le Gouvernement y est défavorable, et il faudrait, là aussi, être beaucoup plus clair et ne pas laisser passer une telle circulaire.

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Celle-ci est en effet un signal très clair adressé aux familles qui souhaitent recourir à ce type de méthodes, car elle les encourage à se rendre à l'étranger pour avoir recours à la gestation pour autrui.

Monsieur le Premier ministre, nous avons besoin de cette double précision. Nous vous demandons expressément de nous l'apporter personnellement et solennellement dans cet hémicycle, cet après-midi. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

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La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. (Vives protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Mes chers collègues, c'est le Gouvernement qui désigne le ministre chargé de répondre à vos questions.

Vous avez la parole, madame la garde des sceaux. (« Démission ! Démission ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur le député, il me faudra faire quelques efforts pour m'habituer à la nécessité de répéter constamment les mêmes réponses aux mêmes questions. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Plusieurs députés des groupes UMP et UDI. Référendum !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Mais cela permet au moins de démontrer la constance du Gouvernement et la rectitude de ses positions.

Je rappelle simplement que la circulaire s'adresse aux greffiers en chef et qu'elle concerne un acte administratif. (« Non ! » sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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Mes chers collègues, écoutez la réponse de Mme la ministre, s'il vous plaît !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Il ne s'agit pas d'un acte judiciaire. Cet acte administratif est fondé sur des documents établis sur la base du droit. Aussi suis-je étonnée que des législateurs, dont d'anciens ministres, familiers de la hiérarchie des normes, accoutumés à nos dispositifs juridiques et judiciaires, y compris de contestation, organisent délibérément l'amalgame, la confusion et le désarroi. Cela ne marchera pas souvent ! Cela ne marchera pas longtemps ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste. – « Répondez à la question ! » sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Je me suis exprimée sur cette circulaire le 16 janvier : vous vous réveillez bien tard ! (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe UMP.) Ceux qui étaient présents ont pu entendre très clairement la position du Gouvernement,…

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

…au sujet de l'amendement qu'il a rejeté. Quant à ceux qui étaient absents, ils savent que la splendeur de votre maison consiste à retenir tous les propos qui y ont été prononcés.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Le Gouvernement reste opposé à la GPA. Nous vous le répéterons aussi souvent que nécessaire. Cette circulaire concerne onze enfants pour l'année 2012. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP. – Protestations sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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La parole est à Mme Barbara Pompili, pour le groupe écologiste.

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Monsieur le ministre du redressement productif (« Ah ! » sur les bancs des groupes UMP et UDI), nous redoutons pour demain une mauvaise nouvelle, l'annonce de la fermeture du site d'Amiens de l'entreprise Goodyear : 1 250 personnes vont se retrouver au chômage. Un repreneur, le groupe Titan, s'était déclaré intéressé par la production de pneus agricoles sur le site. Si cette piste préservait l'emploi d'un tiers des salariés, la situation des autres, majoritaires et non concernés par un potentiel repreneur, était au coeur des combats que les syndicalistes ont menés pendant cinq ans, mais les discussions ont achoppé. Les 1 250 salariés ne doivent pas être abandonnés. La mauvaise gestion de quelques-uns et le manque d'anticipation ne doivent pas peser sur ces salariés, qui ne sont pas une variable d'ajustement.

Monsieur le ministre, vous êtes sensible à ce qui se passe à Amiens. Vous vous êtes rendu sur le site de Goodyear à deux reprises. Comment le Gouvernement va-t-il s'engager pour défendre les salariés et favoriser une reprise de l'activité sur le site d'Amiens ?

Le bassin d'Amiens et la région Picardie ont déjà beaucoup souffert de la restructuration de l'industrie automobile : PSA, Renault, la crise de l'automobile et celle de la société du pétrole rappellent l'urgence de la transition énergétique créatrice d'emplois locaux non délocalisables. Il est grand temps de reconvertir les bassins industriels. Alors que les fonds de modernisation fleurissent, aucun n'est consacré à la reconversion des sites industriels. Pourtant, cette reconversion exige des financements importants pour accompagner l'effort de formation, de recherche et d'investissement, et ne pas perdre les savoir-faire des salariés.

Quelles mesures structurantes envisagez-vous de prendre pour financer la reconversion d'une partie de la filière automobile ? (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et sur plusieurs bancs des groupes SRC et GDR.)

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La parole est à M. le ministre du redressement productif.

Debut de section - Permalien
Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif

Madame la députée, la question d'Amiens-Nord et du site de Goodyear est un dossier difficile et qui préoccupe, vous le savez, le Gouvernement. C'est un dossier au long cours. Goodyear a annoncé dès 2009 son intention de se désengager de l'activité de fabrication de pneumatiques pour les véhicules de tourisme et de céder la production de pneumatiques pour l'activité agricole à un repreneur nommé Titan. Ce dernier a repris l'intégralité dans le monde des activités agraires de Goodyear, à l'exception du site d'Amiens, qui est resté en discussion jusqu'au mois de juin.

Les salariés, à travers leurs organisations syndicales, ont obtenu la suspension du plan social par deux fois, en 2009 et en 2011. Des points de vue qui étaient étrangers et éloignés se sont rapprochés.

Debut de section - Permalien
Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif

Je crois que votre collègue Pascale Boistard, qui suit ce dossier, est parfaitement informée de ces difficultés.

Ces points de vue se sont rapprochés au point que nous étions presque arrivés à un accord au mois de juin entre Goodyear, Titan et le personnel, mais un certain nombre d'engagements n'ont pu être obtenus, notamment sur le maintien de la production pendant un certain temps.

Plusieurs députés du groupe UMP. Zéro !

Debut de section - Permalien
Arnaud Montebourg, ministre du redressement productif

Le Gouvernement a reçu hier les dirigeants de Goodyear, notamment à mon ministère. Nous leur avons dit que nous souhaitions que Goodyear remette son poids dans la balance pour trouver une solution qui permette aussi à Amiens-Nord d'échapper à l'application d'un plan social. Nous préférons le plan de départs volontaires et la reprise par Titan, et nous avons repris contact avec ce dernier, de manière que les points de vue puissent évoluer encore. J'adresse un message à tout le monde : il est possible d'éviter le pire demain. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC et sur plusieurs bancs du groupe écologiste. – « Baratin ! » sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme Carole Delga, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le président, mes chers collègues, ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie et des finances.

La Banque de France a présenté à l'automne dernier un projet de modernisation de son réseau. Ce projet, dont le but principal semble être la réduction des effectifs dans les territoires, suscite de vives inquiétudes quant à l'implantation locale de la Banque de France. Et pour cause puisqu'il est prévu la fermeture des bureaux d'accueil et d'information dans vingt-six villes ainsi que la transformation d'une cinquantaine de succursales départementales, soit la moitié d'entre elles, en simples bureaux de réception.

Un député du groupe UMP. Eh oui !

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De telles mesures auraient pour conséquence l'inévitable éloignement de l'offre de services publics. La qualité des prestations de la Banque de France tient en grande partie à une connaissance fine de nos territoires, tant pour ce qui est des analyses économiques sur les entreprises que pour le traitement du surendettement, dont le nombre de dossiers ne cesse d'augmenter. Or un traitement efficace des situations de surendettement implique des réponses personnalisées que seuls les services de la Banque de France, au plus près des citoyens, peuvent apporter. La suppression de plus de 2 500 emplois entre 2013 et 2020 ainsi que la centralisation de ses établissements qui se profile vont à l'inverse de cette logique de proximité.

Les conclusions du rapport d'expertise du cabinet Secafi, présentées hier devant le comité central d'entreprise extraordinaire, viennent confirmer ces craintes. Les experts soulignent en effet l'absence de chiffrage économique global du projet et le manque de précision de l'évaluation de l'impact social, au mépris de l'approche territoriale.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous préciser quelles mesures vous avez l'intention de mettre en oeuvre pour garantir le maillage territorial de la banque de France, gage d'accompagnement économique pour nos entreprises et d'efficacité sociale pour les citoyens ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC et sur les bancs du groupe GDR.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation.

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Madame la députée, je vais au préalable vous demander d'excuser mon collègue Pierre Moscovici, retenu au Palais de l'Élysée. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Les priorités du Gouvernement consistent, vous le savez, à moderniser l'action publique tout en combinant celle-ci avec la nécessité de l'adapter aux besoins et de maintenir une haute qualité de service public. C'est notamment le cas de la Banque de France, une autorité indépendante mais à laquelle l'État a délégué la gestion de dossiers de surendettement, dont vous avez rappelé qu'ils étaient nombreux – autour de 200 000 cette année. Le nombre de dossiers susceptibles d'être gérés pourra encore croître demain dès lors que, sous l'autorité du Président de la République et du Premier ministre, nous mettrons en oeuvre le Registre national du crédit. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

De nombreux députés du groupe UMP.Allô ! Allô !

Debut de section - Permalien
Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Ces défis ont poussé la Banque de France a engagé une réflexion sur son organisation. Ainsi, le gouverneur Noyer a présenté, lors du comité central d'entreprise du 21 septembre dernier, un plan de réorganisation qui fait aujourd'hui l'objet d'une consultation.

En tant qu'actionnaire, l'État est particulièrement attentif à deux principes.

Tout d'abord, le principe du maintien d'une couverture géographique robuste, notamment par la présence d'au moins une succursale de la Banque de France dans chaque département. Le Gouvernement est attentif à ce que cette règle prenne en compte, comme vous l'avez demandé, la réalité du terrain afin que l'accueil des surendettés soit possible au plus près, dans les succursales et les bureaux d'accueil. (« Allô ! Allô ! » sur les bancs du groupe UMP.) C'est pourquoi il est important que plusieurs implantations continuent à exister là où les conditions géographiques ou économiques le justifient.

Secondement, il est attentif au principe d'une nouvelle organisation de la gestion des activités qui ne nécessitent pas de contact avec le public, ce que l'on appelle le back office : ces activités seront réparties entre les chefs-lieux de région et les succursales départementales ayant un volume d'activité suffisant. Nous veillerons à ce que cette réorganisation soit progressive d'ici l'horizon 2016. Je peux vous assurer qu'à la suite notamment du mouvement national d'hier, l'État sera attentif à la qualité du dialogue social avec les salariés, les élus locaux et la Banque de France. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. François de Mazières, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire

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Ma question s'adresse à Mme la garde des sceaux, mais, tout d'abord, je voudrais vous dire, monsieur le Premier ministre, que nous sommes choqués (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) : …

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…vous avez été interpellé par le président du groupe UMP hier, et vous vous êtes défilé ; vous êtes interpellé encore aujourd'hui par le président du premier groupe d'opposition de France, et vous vous défilez encore… Il y a un minimum de respect républicain à avoir entre nous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur de nombreux bancs du groupe UDI.)

Madame la garde des sceaux, hier, vous avez invoqué à plusieurs reprises l'égalité et la fraternité comme fondements de votre projet de réforme du mariage, mais dans la pratique, ce que constatent les Français, c'est la politique des deux poids et deux mesures.

Ainsi, 220 députés et sénateurs demandent à être reçus par le Président de la République : ils ne le sont pas ! Une délégation de l'Inter-LGBT demande audience : elle l'obtient le lendemain, et ses représentants peuvent annoncer sur les marches de l'Élysée que le chef de l'État est revenu sur l'engagement pris devant le Congrès des maires ouvrant droit à la clause de conscience ! (« Eh oui ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP. – « Non ! » sur les bancs du groupe SRC.) Y a-t-il égalité de traitement ?

Le 13 janvier, une gigantesque foule de Français sincères (Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR) demande à être entendue, et reçoit pour seule réponse que vous êtes résolus à passer en force sans accepter aucune concession ! Ces Français se sentent profondément humiliés quand votre majorité fait tout pour les faire passer pour des homophobes afin d'éviter un débat public. Madame la ministre, où est votre souci de la fraternité ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Ces Français, tous les Français, ont droit à des réponses claires. Nous voulons que vous répondiez à deux questions : Le Gouvernement va-t-il soutenir l'ouverture de la PMA aux couples homosexuels ? Oui ou non ?

De nombreux députés du groupe SRC. Oui !

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Allez-vous retirer la circulaire qui introduit la légalisation en France de la gestation pour autrui réalisée à l'étranger ? Oui ou non ?

De nombreux députés du groupe SRC. Non !

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J'attends des réponses claires. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP et sur de nombreux bancs du groupe UDI.)

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La parole est à Mme la garde des sceaux, ministre de la justice. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Monsieur de Mazières, le Premier ministre s'est très clairement exprimé il y a quelques semaines à propos de la PMA. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) J'ai constaté que vous et vos collègues n'entendez pas, ne lisez pas, et que, par conséquent, vous me demandez peut-être un exploit au-dessus de mes forces.

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Madame, le Premier ministre est ici pour s'exprimer devant le Parlement !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

J'ai d'ailleurs noté dans votre tribune, monsieur de Mazières, que j'avais été hissée au rang d'éminente juriste huit mois après avoir été ignorante de toute question relative au droit. Je trouve que c'est un bel encouragement pour les étudiants en droit dans ce pays ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR.)

Je vais donc répéter que le chef du Gouvernement s'est très clairement exprimé sur le sujet. Nous débattons, depuis hier, de la loi qui ouvre le mariage et l'adoption aux couples de même sexe, donc du code civil, et nous allons poursuivre nos travaux pendant deux semaines, week-ends compris, vous le savez. Mais j'ai compris qu'il faut répéter sans cesse, et je m'y contrains donc. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

S'agissant de la fraternité, monsieur de Mazières, le Gouvernement en donne la preuve au quotidien.

Plusieurs députés du groupe UMP. Oui ou non ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Je vous invite à vous intéresser aux travaux, au cours desquels le Gouvernement s'exprima très longuement. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce texte est passé en commission des lois ; il fait son parcours au Parlement ; la loi qui en sortira sera issue d'un travail parlementaire ; par conséquent, c'est bien la voix du Parlement qui en sera sortie.

Plusieurs députés du groupe UMP. Oui ou non ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Quant aux maires de France, ils sont républicains. Ils appliqueront le droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Gwendal Rouillard, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Monsieur le président, ma question s'adresse au ministre des transports, de la mer et de la pêche. J'espère que ce sujet permettra de détendre l'opposition et de prendre un peu de hauteur de vue eu égard à l'actualité. (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Je vais vous parler du fait maritime, de la stratégie de croissance bleue et de la politique commune des pêches. Premier rappel : le secteur maritime pèse 1 500 milliards d'euros par an, dont 52 milliards sont issus de la cinquantaine d'entreprises du cluster maritime français, lequel représente 310 000 emplois. Deuxièmement, le secteur maritime est fondé sur plusieurs piliers : la navale, l'offshore, les énergies marines, la plaisance et bien évidemment la pêche.

En matière de pêche, la France est le quatrième producteur européen, même si nous ne couvrons que 40 % de nos besoins. La France pèse 5,5 milliards d'euros ; le secteur de la pêche représente 42 000 emplois directs et indirects. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Je rappelle, ce qui devrait vous intéresser, que les lycées maritimes français sont plutôt bien remplis. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le ministre, conscients de ces réalités, nous souhaitons vous accompagner pour mener à bien les négociations en matière de politique commune des pêches. (Mêmes mouvements.) Pouvez-vous nous éclairer sur vos négociations à Bruxelles en matière de politique commune des pêches et sur la capacité de la France à nouer une stratégie de croissance bleue ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche.

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Frédéric Cuvillier, ministre délégué chargé des transports, de la mer et de la pêche

Monsieur le député, cher Gwendal Rouillard, merci pour votre question (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI) qui permet de prendre la mesure de ce qui se joue dans les négociations dans le cadre de la politique commune des pêches. (« Allô ! Allô ! » sur les bancs du groupe UMP.)

Vous avez raison de souligner que nous avons hérité d'une politique maritime laissée en jachère par l'ancienne majorité (Exclamations sur les bancs des groupes UMP et UDI), qui pratiquait la politique de la chaise vide vis-à-vis de la Commission européenne. Cette attitude a mis les pêcheurs en situation difficile, les obligeant à rembourser des aides illégales accordées par l'ancien Gouvernement. Quant à nous, il nous revient maintenant d'honorer des engagements contractés parfois dès 2008.

Nous n'avons pas choisi la politique de la chaise vide et nous avons participé à chacune des rencontres européennes. Nous enregistrons les premiers résultats du dialogue renoué avec la Commission. D'une part, nous avons obtenu que les taux autorisés de capture et les quotas soient stables ou en augmentation, conformément aux avis scientifiques.

D'autre part, des initiatives de la France ont conduit à des avancées dans plusieurs domaines : aides au renouvellement ou à la modernisation de la flotte et à l'installation de jeunes ; abandon des quotas individuels transférables, qui sont une véritable marchandisation de la mer ; mesures en faveur de l'outre-mer dont nous avons beaucoup parlé, cher Victorin Lurel, dans le cadre du rendement maximum durable.

Nous accompagnons les pêcheurs. Nous mesurons l'enjeu que représente la croissance bleue dans le cadre d'une politique maritime intégrée, voulue par le Premier ministre lors de l'installation du Conseil national de la mer et des littoraux. Cette croissance bleue doit mêler à la fois les enjeux de pêche, de mer, de croissance, de redressement productif, d'énergie et d'environnement. Telle est la volonté que le Gouvernement affiche aux côtés des pêcheurs de toutes les façades littorales. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme Bérengère Poletti, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le président, ma question s'adresse à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Ce sont les femmes qui assument le contrôle des naissances et, en France, elles le font beaucoup trop souvent à travers la pilule oestroprogestative. De ce fait, et malheureusement, elles exposent ainsi leur santé, voire leur vie, ce qui n'est pas acceptable. La pilule oestroprogestative n'est pas un médicament comme les autres. Ce sont des femmes en bonne santé qui l'utilisent, et en très grand nombre. Aujourd'hui, elles sont inquiètes.

Le Diane 35 est un médicament destiné aux femmes notamment atteintes d'acné sévère. L'usage de ce médicament est depuis de nombreuses années détourné en contraceptif. Depuis quelques jours, un vent de panique pousse les femmes dans les cabinets de leur médecin. L'Agence nationale de sécurité du médicament vient de rendre son avis. Il a été décidé que les autorisations de mise sur le matché du Diane 35 et de ses génériques seront suspendues dans un délai de trois mois.

Pour la sécurité des Françaises, j'ai plusieurs questions à vous poser, madame la ministre. Que leur recommandez-vous pour les trois mois à venir ? Qu'en est-il de toutes les pilules de troisième génération ?

Vous voyez bien aujourd'hui l'importance de l'encadrement médical pour la prescription de la pilule. Vous avez décidé, à l'occasion de la dernière loi de financement de la sécurité sociale, de rendre gratuite et anonyme la délivrance de la pilule aux mineures, mais vous avez refusé la prise en charge de la consultation et de l'examen biologique que je vous avais demandée.

Vous constatez aujourd'hui, à la lumière de ces événements, combien cette question est importante pour la sécurité des jeunes filles. On attend de vous, madame la ministre, que vous rassuriez les femmes françaises. (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Madame la députée, la contraception est l'un des grands acquis des dernières décennies. Il faut être attentif, en cette période, à ne pas lever la suspicion sur la contraception, sur l'ensemble des pilules. Ma responsabilité, comme celle du Gouvernement, est de faire que les femmes soient assurées de pouvoir compter sur la bonne prescription de contraception au bon moment de leur vie.

C'est pourquoi, pour éviter toute inquiétude exagérée et tout mouvement de panique, j'ai mis en place un centre avec un numéro d'appel gratuit que les femmes peuvent appeler – elles sont d'ailleurs très nombreuses à le faire – pour recevoir une information objective et transparente concernant leur situation.

Les femmes qui prennent une pilule de troisième ou de quatrième génération ne doivent pas interrompre brutalement leur traitement ; elles doivent consulter un médecin et déterminer avec lui la manière de poursuivre leur contraception.

Quant au médicament Diane 35 que vous évoquez, il s'agit d'un médicament contre l'acné qui a été prescrit à tort comme une pilule contraceptive.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

C'est parce que cette pilule a été prescrite en dehors de son autorisation de mise sur le marché que l'Agence nationale de sécurité du médicament a pris la décision de suspendre cette AMM pour trois mois. Les femmes qui prennent actuellement une pilule Diane 35 doivent pouvoir prendre un rendez-vous avec leur professionnel de santé pour faire évoluer leur contraception.

Comme vous, madame la députée, je suis attentive à ce que les femmes soient assurées dans la contraception à laquelle elles ont droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme Marie Récalde, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Avant de poser ma question à M. le ministre de l'économie et des finances, je voudrais rendre hommage à la force et à la conviction de Christiane Taubira, une grande dame. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, RRDP et GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Monsieur le ministre, dans dix jours, notre assemblée examinera une loi majeure, promise par le président de la République : la loi portant séparation et régulation des activités bancaires.

Elle apporte la preuve que notre majorité a pleinement pris en compte les conséquences de la crise financière. La France sera ainsi le premier pays en Europe à mettre en place une réforme structurelle des banques. Nous n'avons eu de cesse de le répéter : l'économie ne doit pas être au service de la finance, c'est à la finance d'être au service de l'économie, de l'emploi, des entreprises petites ou grandes, des ménages modestes ou fortunés.

Avec ce projet de loi, les citoyens ne seront plus les victimes collatérales des activités à haut risque des banques.

Le Gouvernement a, en outre, décidé de ne pas se contenter de cette nécessaire séparation des activités bancaires. Il va plus loin dans la régulation et comporte une dimension plus protectrice des usagers des banques.

Agios, dépassements de découvert, frais de rejet, services surtaxés : trop d'abus ont été constatés ces dernières années. Il était nécessaire de mieux réguler les pratiques du secteur notamment pour soutenir les populations les plus fragiles.

En effet, les tarifs bancaires continuent d'être très, trop élevés. Un premier incident de paiement peut rapidement faire plonger dans une spirale tarifaire redoutable.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous dire comment la nouvelle loi de régulation bancaire va permettre de mieux protéger les consommateurs et de mettre bon ordre dans un secteur au fonctionnement parfois contestable ?

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La parole est à M. le ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.)

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Benoît Hamon, ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation

Monsieur le président, madame la députée, mesdames et messieurs les députés, avec la réforme bancaire, la France sera la première en Europe à mettre en place une réforme complète touchant la structure des banques.

Cette réforme, c'est la réponse de la gauche et des socialistes à la crise financière de 2008. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Le projet de loi protège les dépôts des épargnants, s'attaque aux activités spéculatives des banques et instaure un contrôle préventif des risques au sein des banques et du système financier dans son ensemble.

Mais ce n'est pas tout. Le Gouvernement a tenu à ce que le projet de loi contienne des mesures de protection des consommateurs qui soient conséquentes. Quelques exemples : elles concernent bien sûr les commissions d'intervention, ces frais que chacun d'entre nous connaît ou a bien connu et qui peuvent très rapidement se multiplier ; le droit au compte et à des services bancaires de base pour les populations les plus fragiles ; la simplification des procédures de gestion du surendettement ; l'assurance emprunteur afin de renforcer l'information et la concurrence au bénéfice des Français ; l'égalité entre les femmes et les hommes en matière de tarifs et de prestations d'assurance.

Ces mesures vont faciliter la mobilité bancaire, stimuler la concurrence entre les banques et permettre ainsi aux emprunteurs et aux clients de réaliser des économies, et par conséquent d'améliorer leur pouvoir d'achat.

La réforme du secteur bancaire, madame la députée, ce sont bien sûr des mesures systémiques permettant d'éviter que les épargnants et le contribuable paient pour le spéculateur. Ce sont aussi des mesures simples, de bon sens qui doivent protéger les consommateurs et particulièrement les plus fragiles. C'est une réforme de gauche que le Gouvernement est très fier de vous présenter. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Alain Marty, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Ma question s'adresse à M. le Premier ministre. Hier, mon collègue Christian Estrosi vous a interrogé sur la réforme des rythmes scolaires. Le ministre de l'éducation n'a apporté aucune réponse à nos interrogations, cela devient une habitude. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Il s'est contenté de critiquer le passé en se faisant donneur de leçons. Mais cela ne fait pas une politique !

L'objectif de mieux répartir les heures d'enseignement pourrait nous rassembler, puisque nous avions travaillé sur ce sujet avec Luc Chatel. En revanche, votre méthode pour réformer est incompréhensible.

Votre décret a été rejeté par le conseil supérieur de l'éducation, le comité technique ministériel et par les enseignants qui sont descendus dans la rue. D'ailleurs, même l'un des vôtres, M. Cambadélis, relève le manque de doigté du ministre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Nos interrogations restent entières. Elles sont partagées par les enseignants, les parents d'élèves et par les élus en charge de ce dossier.

Comment organiser la prise en charge des enfants à 15 heures 30 ? Pour quel projet éducatif ? Avec quelle organisation, quels moyens financiers ? Les communes élaborent leur budget dans un contexte très contraint, les moyens financiers manquent. Ce n'est pas l'aumône que vous proposez pour une année qui réglera la question de façon pérenne.

Malgré les avis négatifs et unanimes, malgré l'engagement du Premier ministre la semaine dernière de poursuivre la concertation, vous avez décidé de passer en force en publiant ce décret.

Il est temps d'écouter et d'entendre. Allez-vous revenir sur ce décret et engager une véritable concertation avec les enseignants, les parents d'élèves et les élus, dans l'intérêt des élèves ? (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale.

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Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Monsieur le député, la concertation, vous le savez, a duré plusieurs mois.

Plusieurs députés du groupe UMP. Zéro !

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Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Vous y avez participé (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et vous devez le dire et l'assumer devant les Français avec courage, et avec un peu de respect pour eux.

Il y a d'abord eu la consultation nationale menée par mon prédécesseur, puis la grande concertation nationale…

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Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

…qui a été ouverte par le Premier ministre et conclue par le Président de la République – un an de concertation. Vous avez présenté un certain nombre de demandes qui étaient légitimes : la première, comme vous le faites élégamment dans cette assemblée, concernait l'argent pour les collectivités locales. Un fonds, doté de 250 millions d'euros et qui prend en compte la différence entre communes riches et pauvres, a donc été créé. (« Zéro ! » sur de nombreux bancs des groupes UMP et UDI.)

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Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

Une deuxième demande portait sur l'assouplissement des taux d'encadrement, en passant d'un taux de 10 à 14 pour les enfants de moins de six ans et de 14 à 18 pour les plus de six ans. Elle a été acceptée.

Les enseignants ont demandé des modifications concernant l'organisation de leur service. Une négociation a eu lieu, saluée par les enseignants, sur les 108 heures supplémentaires.

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Vincent Peillon, ministre de l'éducation nationale

La commission des normes du ministère de l'intérieur, au sein de laquelle les élus locaux sont représentés, a approuvé la semaine dernière par huit voix contre deux notre principe d'organisation.

Si c'est vraiment l'intérêt des enfants qui vous guide (Vives exclamations sur les bancs du groupe UMP), si vous partagez la nécessité de revenir sur cette exception française délétère, nous entrons maintenant dans la phase de concertation sur le terrain qui va durer plusieurs mois et exige l'implication de tous. Cela suppose d'abord de dire la vérité. Faites un effort pour connaître et diffuser la réforme ! C'est aussi votre mission de législateur que de penser à la loi, c'est-à-dire à l'intérêt général, et non pas seulement de représenter des intérêts particuliers. (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Bruno Nestor Azerot, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.

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Ma question s'adresse à M. Victorin Lurel, ministre des outre-mer.

Monsieur le ministre, à la suite de l'engagement de campagne du Président de la République pour le maintien de la défiscalisation qui finance outre-mer des activités productives et le logement social, un consensus avait été trouvé à l'automne pour préserver un plafond global aux dispositifs incitatifs aux investissements outre-mer en contrepartie d'un engagement du Gouvernement à réformer ces dispositifs dans le cadre du projet de loi de finances pour 2014.

Or des parlementaires de l'opposition ont demandé et obtenu du Conseil constitutionnel qu'il annule ces dispositions, qui auraient pourtant permis la relance de l'activité économique de nos régions déshéritées et de préserver des emplois dans des économies fragiles où le taux de chômage des jeunes dépasse souvent les 60 %. La décision du Conseil constitutionnel compromet donc les investissements prévus en 2013 et non engagés, ou non encore agréés.

J'entends bien que le Gouvernement a indiqué qu'il y aurait compensation globale, mais cela veut dire, dans les faits, que les contribuables vont d'abord imputer sur le plafond les réductions correspondant à un service ou à un patrimoine, et ensuite seulement les réductions pour investissements outre-mer. D'autre part, Le plafond effectivement disponible pour 2013 ne sera plus de 18 000 euros, mais, au mieux, de 8 000 ou 10 000 euros. Cela revient à diviser par deux, voire par quatre, l'attractivité du dispositif.

Déjà, de nombreuses opérations de logement social et d'investissement productif sont en passe d'être annulées. La moitié des dossiers, représentant les deux tiers des montants, vont être supprimés. Or l'outre-mer est déjà au bord de la révolte faute de développement. Dans ces conditions, que comptez-vous donc faire, monsieur le ministre ? (Applaudissements sur plusieurs bancs.)

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Victorin Lurel, ministre des outre-mer

Je commence, monsieur le député, par vous rassurer : les outre-mer auront les moyens nécessaires à leur développement.

La décision du Conseil constitutionnel ne remet pas en cause le principe du plafonnement différencié pour le dispositif incitatif aux investissements outre-mer, autrement dit la défiscalisation outre-mer, mais elle en entame très sérieusement l'efficacité, en remettant en cause la part proportionnelle, égale à 4 % du revenu imposable. Le Gouvernement en a pris acte. Je tiens à rassurer sur un autre point : les dossiers déposés avant le 31 décembre 2012, qui représentent un volume important, ne sont pas affectés.

Il y a là un vrai problème, je le reconnais, pour les dossiers qui seront déposés au titre de cette année, en particulier pour les dossiers dits de plein droit. Sitôt la décision rendue, le Premier ministre en a pris acte et a décidé que les outre-mer ne bénéficieront pas d'un euro de moins. Le Président de la République a confirmé cet arbitrage dans ses voeux aux outre-mer, le 3 janvier dernier. Pour être très clair, s'agissant du logement social, à la suite de l'arbitrage rendu par M. le Premier ministre, les porteurs de projets ont été invités à déposer ceux-ci en termes identiques, conformes, si je puis dire, aux conditions antérieures. Toute décision éventuelle de financement des investissements par la défiscalisation sera intégralement compensée.

Pour le secteur des investissements productifs, de l'investissement industriel, des propositions complémentaires seront faites d'ici à un mois, après expertise de l'Inspection générale des finances.

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La parole est à M. Dominique Tian, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Ma question s'adressera au Premier ministre, mais je veux auparavant, au nom du groupe UMP, dire à M. Peillon que ses réponses sont marquées du sceau du mépris envers les députés UMP, ce qui est inacceptable. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Qu'il arrête, lorsqu'il est à court d'idées, de parler d'intérêts particuliers : nous représentons tous l'intérêt général ! (Nouveaux applaudissements.)

Monsieur le Premier ministre, le Conseil d'orientation des retraites, qui réunit les spécialistes des retraites pour conseiller le Gouvernement, vient d'indiquer que le déficit prévisionnel de l'ensemble des régimes de retraite serait de 25 milliards d'euros à l'horizon 2020.

Le gouvernement de Nicolas Sarkozy s'était attaqué avec courage à la réforme des retraites en repoussant progressivement l'âge légal du départ à la retraite et l'âge du taux plein. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Votre gouvernement revenait sur ces mesures dès le mois de juillet dernier, en permettant un retour partiel à la retraite à l'âge de soixante ans, pour un coût de trois milliards d'euros par an à l'horizon 2017.

Conscient du danger, mais sans aucune concertation et sans souci de justice, M. Cahuzac, ministre du budget, évoquait la semaine dernière comme, je le cite, une « source d'inspiration » un gel partiel des retraites complémentaires de l'AGIRC et de l'ARRCO des salariés du privé, et ce pendant plusieurs années.

Cela constituerait une diminution du pouvoir d'achat des retraités du privé, dont chacun sait qu'ils sont déjà, dans notre pays, traités de manière peu équitable, voire injuste, par rapport aux retraités du service public (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), sans même parler des régimes spéciaux – je pense à la SNCF et à EDF – qui n'hésitent pas à recourir à la force dès qu'on s'attaque à leurs privilèges.

Aussi voudrais-je savoir, monsieur le Premier ministre, si vous allez faire preuve de courage en prenant les décisions urgentes que tous les autres pays européens ont déjà prises depuis longtemps. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Effectivement, monsieur le député, le Conseil d'orientation des retraites a rendu deux rapports qui montrent, d'une part, que l'équilibre financier d'ici à 2020, contrairement à ce que vous aviez affirmé et assuré lors de la réforme de 2010, ne sera pas atteint, (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP), ce qui nous amènera à prendre un certain nombre de décisions, et, d'autre part, que la solidarité doit être revue pour que la situation de certains salariés soit améliorée. On peut parler, par exemple, de la situation des femmes, dont nous savons qu'elles touchent une retraite inférieure de 40 % en moyenne à celle des hommes, ce qui appelle aussi un certain nombre de mesures.

De leur côté, les partenaires sociaux ont engagé une discussion qui les amènera, de manière souveraine puisque le Gouvernement n'a pas à interférer avec leur négociation, à prendre les mesures utiles et nécessaires pour garantir dans la durée ces régimes complémentaires.

Pour ce qui le concerne, le Gouvernement va engager une concertation. (« Ah ! » sur les bancs du groupe UMP.) Je tiens à vous le dire, monsieur le député : pour nous, la retraite par répartition est un acquis qu'il faut sauvegarder (Même mouvement), et la notion de solidarité doit rester le socle de notre système de retraite. C'est la raison pour laquelle nous avons voulu que la justice soit au rendez-vous, en donnant à celles et ceux qui ont accompli l'intégralité de leur durée de travail et de cotisation la possibilité de partir à la retraite dès l'âge de soixante ans. Le Gouvernement va avancer avec responsabilité et justice là où vous avez échoué, puisque vous avez, vous, su concilier l'injustice de vos mesures avec l'irresponsabilité financière. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Ce n'est pas la voie que nous choisissons. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau, pour le groupe socialiste, républicain et citoyen.

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Où est passé M. le Premier ministre ? Serait-il parti ?

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Madame la ministre des affaires sociales et de la santé, vous avez annoncé, il y a plusieurs jours, un plan d'ensemble pour une juste contraception. Vous avez rappelé à juste titre que les pilules sont des médicaments, et que vous êtes résolue à ce que chaque femme ait accès à la contraception qui lui convient. L'objectif est de limiter les prescriptions de pilules de troisième et quatrième générations et de privilégier systématiquement les pilules de deuxième génération. Vous avez d'ailleurs saisi les autorités européennes de cette question particulièrement sensible.

Le médicament Diane 35 est depuis plusieurs jours sur la sellette. Destiné à lutter contre l'acné, il semble être fréquemment employé comme contraceptif. La presse s'est emparée de ce sujet, et l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé a engagé une réévaluation de ce traitement. Des informations font état de quatre décès directement imputables à la pilule Diane 35 et de plus d'une centaine de cas de thrombose depuis 1987, c'est-à-dire en 25 ans. L'Agence a annoncé, ce matin, qu'elle suspendait la commercialisation de ce médicament : c'est une bonne chose.

Madame la ministre, chers collègues, la loi Neuwirth du 28 décembre 1967 a été une avancée considérable qui a contribué à l'émancipation des femmes. Le droit à la contraception, acquis de haute lutte, doit être protégé. Il ne peut pas être abîmé par les pratiques irresponsables de quelques-uns. Il doit s'exercer dans les meilleures conditions possibles. Madame la ministre, pouvez-vous nous dire quelles initiatives seront prises dans les jours et les semaines à venir pour mieux protéger les femmes dans leur accès à la contraception ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Madame la députée, vous avez profondément raison de souligner le fait que la contraception a constitué une avancée remarquable et formidable pour l'ensemble des femmes et des couples. Il est donc absolument nécessaire de garantir à toutes les femmes un accès à une juste contraception, à la pilule qui leur convient. Il faut en effet qu'elles puissent choisir leur pilule dans les meilleures conditions de sécurité.

Je n'ai pas attendu pour prendre un certain nombre de décisions qui s'imposaient. Dès septembre dernier, j'ai annoncé le déremboursement des pilules de troisième et quatrième générations. Dans le même temps, j'ai informé l'ensemble des professionnels de santé concernés qu'il s'agissait de prescrire en seconde intention, et non pas systématiquement, ces pilules. Comme j'ai eu l'occasion de le dire, j'ai saisi l'Agence européenne des médicaments de cette question, afin qu'elle puisse revoir les conditions de mise sur le marché des pilules de troisième et quatrième générations. Je me réjouis qu'elle se soit saisie rapidement de la demande du gouvernement français.

Vous avez raison, madame la députée : au-delà de ces mesures, il nous faut garantir durablement la sécurité des femmes. Cela passe par une information pertinente et transparente, et par un renforcement des vigilances. Dans cette perspective, la Haute autorité de santé remettra à la fin du mois de mars des recommandations pour que la contraception soit adaptée aux femmes. Elle définira les conditions dans lesquelles les différents modes de contraception peuvent être prescrits. J'ai demandé que des propositions soient faites pour améliorer la vigilance dans le cadre de l'Agence de sécurité du médicament, puisque nous devons – à l'évidence – garantir la sécurité à l'ensemble des femmes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Ary Chalus, pour le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Ma question s'adresse à M. le Premier ministre ; j'y associe M. Thierry Robert et Mme Annick Girardin, et tous les députés de l'outre-mer concernés.

Les caisses générales de sécurité sociale des départements d'outre-mer font état de créances colossales auprès de nombreuses entreprises, d'hôpitaux, de cliniques, et même auprès de certaines collectivités. L'exécution du dispositif de relance amiable des entreprises bénéficiant d'exonérations au titre de la loi pour le développement économique des outre-mer, dite LODEOM, augmentera de 9 millions d'euros par mois les charges sociales à recouvrer : cela aggravera d'autant la situation des entreprises affectées. Parmi les 23 400 entreprises concernées, 67 % bénéficiaient d'exonérations de charges au titre de la LODEOM. Ceci démontre que les dispositifs législatifs précédemment mis en place pour répondre à ce problème n'ont pas obtenu les résultats escomptés.

Il ne s'agira donc pas ici de demander une énième exonération. Nos régions comptent bien prendre part au redressement des comptes de la nation. Nous avons d'ailleurs noté, en 2012, une diminution de 5 %.

J'ai déjà eu l'occasion d'interpeller le ministre de l'économie et des finances sur la nécessité de revoir la réglementation liée au recouvrement de ces créances. L'inadaptation du cadre réglementaire actuel, soulignée par les conseils d'administration des caisses des DOM, ne leur permet pas de casser la spirale infernale de la dette sociale des entreprises de nos régions d'outre-mer. Il s'agit de les rendre plus efficaces, et non de les soustraire à leurs obligations sociales.

Dans l'immédiat, nous devons tout faire pour que soient évités les dépôts de bilan en cascade. Plus de 6 000 entreprises sont concernées en Guadeloupe, représentant plus de 18 000 emplois. Aussi, monsieur le Premier ministre, pourriez-vous envisager une mesure sociale exceptionnelle, consistant à globaliser les dettes sociales de ces entreprises et leur permettre de bénéficier d'un moratoire de 24 mois pour le règlement de leurs dettes, précompte salarial compris ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP.)

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

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Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le député, le Gouvernement ne méconnaît bien évidemment pas les difficultés économiques de l'outre-mer. Pour autant, comme vous l'avez d'ailleurs souligné vous-même, la régularité du paiement des cotisations sociales dues par les entreprises doit demeurer la règle. Il en va de l'avenir de notre protection sociale, et de notre capacité à assurer son financement à long terme. C'est la raison pour laquelle nous ne pouvons pas remettre en question ce financement. Le fait est qu'un certain nombre de mesures généralisées – moratoires ou apurements – ont déjà été prises par le passé, et n'ont pas donné les résultats attendus. Le bilan des mesures exceptionnelles prises en 2009 montre bien que les entreprises, en tablant sur des moratoires successifs, ne se mettent pas en situation de répondre à leurs obligations. La politique suivie a ainsi encouragé des comportements attentistes.

C'est la raison pour laquelle il ne paraît pas souhaitable, ni sur le plan financier, ni sur le plan social, ni même sur le plan économique, de mettre en oeuvre un nouveau dispositif généralisé. Nous devons appréhender la situation des entreprises au cas par cas, afin de tenir compte du contexte local. Le Gouvernement travaille donc en relation avec l'ACOSS et les caisses générales de sécurité sociale, pour leur donner les moyens d'action nécessaires. Il s'agit d'enclencher une spirale vertueuse permettant aux entreprises de respecter leurs obligations sociales tout en tenant compte de la réalité économique à laquelle elles sont actuellement confrontées. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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La parole est à M. Martial Saddier, pour le groupe de l'Union pour un mouvement populaire.

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Monsieur le Premier ministre, en 1985, le Parlement a voté à l'unanimité une grande loi d'aménagement durable du territoire, qui concerne près d'un quart de notre territoire national : la loi dite « montagne ». Cette loi demeure reconnue par tous aujourd'hui.

Si elle pose les bases d'un développement équilibré de la montagne, entre protection et développement économique, si elle permet aussi de régir, grâce à de grands principes, l'urbanisme de montagne, cette loi a également fait instituer le Conseil national de la montagne, présidé par le Premier ministre et censé donner son avis sur la politique menée par le Gouvernement.

Ce conseil est une assemblée pluraliste, car sa composition lui fait transcender les clivages politiques, tout en regroupant en son sein la plupart des acteurs socio-professionnels des territoires de montagne.

Monsieur le Premier ministre, ma question s'inscrit dans l'esprit de cette loi et dans la logique du fonctionnement du CNM, dont j'ai eu, comme d'autres sur ces bancs, l'honneur de présider la commission permanente – je tiens d'ailleurs à saluer et à remercier les membres du CNM qui ont fait un travail colossal et précis par le passé, et ce durant plusieurs législatures.

Alors que le Gouvernement a annoncé un certain nombre de textes ou de débats législatifs qui ont un impact très fort sur les communes de montagne – je pense à l'acte III de la décentralisation, aux rythmes scolaires, à la modification du calendrier des vacances scolaires, à celle des modes de scrutin électoraux pour la représentativité, à la fiscalité écologique, au grand rendez-vous de la Politique agricole commune en 2013 ou au schéma des infrastructures de transport –, quand comptez-vous installer le CNM dans sa nouvelle composition issue des élections législatives du mois de juin 2012 ?

Est-ce à vos yeux une instance consultative sur laquelle le Gouvernement compte s'appuyer ? Si c'est le cas, quelle feuille de route comptez-vous donner aux futurs membres du CNM ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à Mme la ministre de l'égalité des territoires et du logement.

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Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement

Monsieur le député, votre question est importante et vous avez raison d'alerter le Gouvernement, comme vous l'avez déjà fait avec délicatesse. Nous devons en effet renommer le CNM, et nous allons le faire avant le printemps.

Vous avez raison de dire que nous devons traiter ces questions en amont. Aux sujets que vous avez évoqués, je voudrais ajouter, à la suite du rapport constitué par MM. les sénateurs Fichet et Morel, la question de la santé et de la présence médicale dans les zones de montagne. Dans l'esprit du Gouvernement, respecter l'égalité des territoires, c'est respecter leur diversité : aussi la question de la politique des zones de montagne est-elle décisive en cette période.

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Cécile Duflot, ministre de l'égalité des territoires et du logement

Ce sujet, auquel j'ai déjà eu l'occasion de réagir dans le cadre de la préparation du prochain projet de loi, englobe des problèmes qui concernent tout particulièrement les territoires de montagne : le logement des saisonniers ou la question des unités touristiques nouvelles, sujets qui nécessitent une prise en compte particulière de la spécificité des zones de montagne, à laquelle les élus locaux sont les plus susceptibles d'apporter des réponses pertinentes.

Vous pouvez donc compter sur le Gouvernement pour nommer un nouveau CNM et pour associer celui-ci à ses réflexions. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Conseil national de la montagne

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La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures vingt-cinq.)

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L'ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe (n°s 344, 628, 581)

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Hier soir, l'Assemblée a commencé d'entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.

La parole est à M. Bernard Accoyer.

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Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre chargée de la famille, mes chers collègues, ce projet de loi ouvrant l'institution du mariage aux couples formés de deux personnes de même sexe est avant tout une occasion manquée et, nous le constatons d'avantage encore aujourd'hui, une initiative fondée sur la confusion – le mot est probablement un peu faible –, lorsque l'on mesure les conséquences de la circulaire parue, hier, (Exclamations sur les bancs du groupe SRC),…

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On en a parlé le 17 janvier et vous étiez là !

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…qui, à l'évidence, traduit une dérive tout à fait préoccupante.

C'est une occasion manquée, disais-je, parce que le Président de la République aurait dû rechercher, pour une de ses promesses de campagne, une solution de compromis, une solution rassemblant le plus de convergence d'avis qui se seraient, nous en sommes certains, retrouvés, tant le regard porté sur les couples homosexuels a évolué en quelques décennies. Le Président de la République n'a pas fait ce choix. Si les Français considèrent qu'il est normal que les couples de même sexe puissent se voir réserver des conditions de vie les protégeant au mieux, ils rejettent dans le même temps l'idée que cette union puisse donner droit à l'adoption, à la filiation et à tout ce que cela comporte, nous le verrons tout à l'heure. Cela, c'est le cadre du mariage. C'est la voie d'une union n'ouvrant pas à l'adoption que refuse encore, à ce moment, le Gouvernement, mais peut-être peut-il encore changer d'avis…

Alors que nos compatriotes sont confrontés à une crise grave, à une désindustrialisation particulièrement préoccupante, à l'heure où ces angoissent les taraudent, le Président de la République se serait grandi en leur épargnant ce débat clivant, clivant au point de mobiliser, le 13 janvier, dans les rues de Paris plus de monde qu'aucune manifestation depuis trente ans ! (Applaudissements sur de très nombreux bancs du groupe UMP.) Le Président de la République a préféré cet affrontement. Cette attitude est incompréhensible, à moins de penser qu'il s'agit d'un leurre pour cacher aux Français les conséquences d'une politique qui ne maîtrise pas la crise et qui laisse la France s'enfoncer dans les difficultés économiques et sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP), à moins encore qu'il ne s'agisse de rassembler sa majorité pour lui faire accepter des mesures dont elle ne veut justement pas.

Mesdames les ministres, pourquoi avoir refusé cette grande concertation, ce vaste débat, au point que l'opposition, comme l'a excellemment demandé, hier, Henri Guaino, exige un référendum ? (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Pourquoi refuser, madame la garde des sceaux, ce grand débat qu'exige légitimement un texte à portée éthique et sociétale ?

Pourquoi, monsieur le président de l'Assemblée nationale, avoir refusé la création d'une commission spéciale, alors que c'est une tradition dans cette grande institution que, pour les textes éthiques et les textes de société on procède ainsi ? C'était d'ailleurs le cas en 2011 pour la loi sur la bioéthique.

En outre, pourquoi ne pas avoir choisi la procédure du temps législatif programmé, qui avait justement été appliquée pour l'examen de cette loi en 2011 ? Cette procédure avait d'ailleurs été saluée par votre groupe à l'époque, tout simplement parce qu'elle permet de développer longuement les arguments sans être sous la pression du chronomètre que vous-même, monsieur le président, et les autres présidents de séance devrez manipuler en coupant la parole toutes les deux minutes, à la fin du temps réglementaire, lorsque l'opposition exposera ses arguments.

On le voit, toute une série de choix s'additionnent qui visent à éviter le débat, à ne pas permettre qu'on puisse entrer pleinement dans le débat. Franchement, c'est une occasion manquée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Mais au-delà de cette occasion manquée, ce projet de loi est surtout celui de la confusion.

Il y a d'abord confusion quant au nom du texte proposé, qui porte « ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe » alors que vous parlez, madame la garde des sceaux, chers collègues de la majorité, du « mariage pour tous ». En réalité, vous avez là un slogan.

La confusion est également de nature anthropologique, entre le genre et l'orientation sexuelle.

Mais la confusion porte surtout sur la portée du projet de loi, car le mariage, dans le code civil, ce n'est pas que l'union d'un homme et d'une femme. C'est également la filiation, la présomption de paternité ; c'est automatiquement le droit à l'adoption et, pour les couples stériles, l'accès à la procréation médicalement assistée. Et ce qui est caché, ce qui n'est pas dit suffisamment clairement et que le débat aurait mis en évidence – ç'aurait été une avancée considérable –, c'est que si ce texte est voté, si le mariage de deux personnes de même sexe est à l'avenir rendu possible, alors automatiquement ces couples auront droit non seulement à l'adoption mais aussi à la procréation médicalement assistée, au besoin en passant par le biais d'une question prioritaire de constitutionnalité.

En effet, comment le Conseil constitutionnel pourrait-il considérer qu'il y aurait égalité de droits entre tous les couples mariés si certains d'entre eux peuvent avoir accès à la PMA et d'autres non ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

L'étape suivante verra surgir la même revendication, suivant la même procédure de la question prioritaire de constitutionnalité : les couples composés de deux hommes demanderont, s'appuyant sur le fait qu'un couple formé de deux femmes a accès à la PMA, à avoir eux-mêmes accès à un moyen d'avoir des enfants ; et ce sera évidemment, mécaniquement, l'accès à la gestation pour autrui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Tel est le mécanisme que vous êtes en train de mettre en marche, et celui-ci comporte une composante cachée, pour ne pas employer un mot beaucoup plus fort.

D'ailleurs, la sincérité de la démarche vient aujourd'hui d'être encore un peu plus mise en cause. On avait entendu voilà quelques années, lors des discussions qui ont eu lieu dans cet hémicycle sur le pacte civil de solidarité, Mme Guigou, alors garde des sceaux – elle vous a précédée, madame la garde des sceaux – dire à cette même tribune qu'un enfant avait besoin d'un père et d'une mère et qu'il ne serait jamais question de s'exonérer de cette vérité anthropologique.

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Eh bien, aujourd'hui, nous sommes en train de dépasser cette étape et vous oubliez l'engagement d'une garde des sceaux qui vous a précédée et qui, pourtant, siégeait sur les mêmes bancs que la majorité actuelle.

Finalement, le fait le plus marquant aujourd'hui, c'est la circulaire qui vient d'être publiée (Exclamations sur les bancs du groupe SRC) et qui en réalité – je mesure mes mots – vous conduit, madame la garde des sceaux, à accepter le principe de la gestation pour autrui et, surtout – combien est-ce hypocrite ! – à l'accepter au-delà de nos frontières en prétendant l'interdire à l'intérieur de notre pays. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Et l'intérêt de l'enfant ? Qu'en faites-vous ?

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Vous tenez un double langage, proprement insupportable et de nature à remettre complètement en cause les discussions ouvertes aujourd'hui.

Un député du groupe UMP. C'est affligeant !

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D'ailleurs, cette marchandisation du corps est absolument inadmissible et une telle démarche ne saurait être tolérée alors que les juridictions, jusqu'à présent, résolvaient les problèmes que vous prétendez vouloir résoudre avec la circulaire que vous avez fait publier.

J'en appelle, madame la garde des sceaux, à toute l'honnêteté qui, je n'en doute pas, est la vôtre, pour que vous reconsidériez cette décision et que vous abrogiez cette circulaire scandaleuse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

La confusion porte encore sur les motivations justifiant ce projet de loi, lesquelles s'appuient sur de prétendues inégalités ou discriminations. Il n'en est rien car, en France, les droits garantis par la Constitution sont les mêmes pour tous les citoyens, quelle que soit leur orientation sexuelle.

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Le droit français prévoit que des situations différentes soient traitées par la loi de façon différente. Or qui peut nier qu'un couple formé d'un homme et d'une femme est différent d'un couple formé de deux personnes de même sexe ? Notre droit comporte des dispositions spécialement applicables aux enfants élevés par des couples formés de deux personnes de même sexe.

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Tel est le cas de la délégation d'autorité parentale – instaurée d'ailleurs par la précédente majorité –, des dispositions testamentaires ou encore de la tutelle testamentaire.

La confusion porte en outre sur les origines des enfants à venir, sur leur filiation, sur leur propre histoire. Et qu'y a-t-il de plus important pour un enfant que de pouvoir se construire à partir de sa propre histoire, même si celle-ci est reconstruite parce qu'il aurait été adopté ?

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Je me souviens de ce que vous disiez sur le Pacs, monsieur Accoyer ! Souhaitez-vous que je vous le rappelle ?

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Mes chers collègues, nous n'avons pas le droit de nous engager, d'engager notre pays dans cette voie qui consiste tout simplement à risquer de mentir aux enfants de France.

Une telle confusion peut avoir et aura des conséquences évidentes sur la santé de ces enfants, sur leur état psychologique (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP),...

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…car il n'existe aucune étude scientifique sur les conséquences de l'éducation d'un enfant par un couple formé de deux personnes de même sexe en dehors des études militantes. Aucune étude scientifique n'a à ce jour été publiée dans le monde sur ce thème ô combien important. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Psychologues, psychiatres et psychanalystes s'accordent à dire que les troubles suscités par un tel environnement au cours de l'enfance pourraient entraîner des troubles psychologiques, voire psychiatriques, au bout d'une ou de plusieurs générations. Telle est votre responsabilité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Et que faites-vous des enfants maltraités par les couples hétérosexuels ? Cela n'existe pas, peut-être ?

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Le présent texte – et c'est là la plus importante, la plus grave des confusions – confond le droit à l'enfant et le droit des enfants. Madame la garde des sceaux, hier, à plusieurs reprises – nous y avons d'ailleurs prêté attention parce que cela nous a surpris –, vous avez insisté sur le fait que ce texte était centré sur le droit à l'enfant. Or le droit des enfants est quelque chose de sacré et il est impossible de donner au droit à l'enfant une priorité sur le droit des enfants. J'espère que c'était un lapsus et que vous l'avez répété par inadvertance.

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Ce n'est pas digne de vous, monsieur Accoyer !

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En tous les cas, sur ce point, il nous est impossible de vous suivre. Car les conséquences de ce texte, s'il était adopté, ce sont bien les enfants à venir qui les subiront. Il s'agira de conséquences psychologiques – je les ai évoquées – mais également de nouvelles discriminations, des discriminations créées par le texte même entre les enfants adoptés par un couple formé d'un homme et d'une femme, qui auront donc un père et une mère, et ceux qui seront adoptés par deux parents de même sexe, c'est-à-dire qui n'auront pas et un père et une mère.

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D'ailleurs, le texte aura également des conséquences sur l'adoption internationale. La situation est si grave qu'elle a interpellé le Président de la République, qui a hésité et a même été jusqu'à annoncer que les maires pourraient recourir à la clause de conscience, ce qui serait bien la moindre des choses.

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Madame la garde des sceaux, madame la ministre chargée de la famille, mes chers collègues, il est encore temps, surtout après les dérapages au sujet de la circulaire sur la gestation pour autrui (Exclamations sur les bancs du groupe SRC), de faire évoluer le texte.

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S'il vous plaît, mes chers collègues, laissez l'orateur conclure !

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Il est encore temps de choisir une solution souhaitée par de nombreux homosexuels que nous avons rencontrés et qui nous ont fait part de leur volonté de bénéficier d'une union qui soit plus solide, plus sûre,…

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…avec une garantie réciproque plus forte. En réalité, cette voie qui n'implique pas le droit à l'adoption pour les couples de même sexe – avec toutes les conséquences que celui-ci comporte – est proposée par un certain nombre d'homosexuels…

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…et reprise dans des amendements portés par l'opposition. Il s'agit tout simplement de l'alliance civile.

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Madame la garde des sceaux, je vous invite à examiner ces amendements : ils constituent une sortie qui vous grandirait si vous l'acceptiez.

Il est encore temps d'opter pour une telle solution car, si ce texte était adopté, le Conseil constitutionnel aurait à se prononcer sur sa conformité à la Constitution, en particulier au principe fondamental reconnu par les lois de la République qui affirme que le mariage est bien l'union d'un homme et d'une femme.

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Il est encore temps d'entendre la détresse de ceux qui ont été élevés par deux personnes de même sexe et qui expriment leur souffrance.

Il est encore temps…

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Il est surtout temps que vous vous arrêtiez !

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…d'éviter les conséquences de ce texte en adoptant un projet réaliste privilégiant l'enfant.

Il n'est pas temps, madame la garde des sceaux,…

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…de diviser les Français. Nous avons d'autres priorités en raison de la situation dans laquelle le pays se trouve, de la situation de l'Europe et de la priorité que nous voudrons toujours réserver aux enfants de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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En application de l'article 122 du règlement, j'ai reçu de M. Christian Jacob et de cinquante-neuf de ses collègues une motion tendant à proposer de soumettre au référendum le projet en discussion.

Je vais procéder à l'appel nominal des signataires dans l'ordre figurant sur la liste présentée à l'appui de la motion.

(Il est procédé à l'appel nominal des signataires de la motion.)

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Acte est donné de la présence effective en séance des signataires de la motion.

La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour la présenter.

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Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre chargée de la famille, mesdames, messieurs les députés, avant de présenter la motion référendaire que nous avons signée, je voudrais revenir sur un certain nombre de propos.

Ici, dans cet hémicycle, madame la garde des sceaux, nous sommes tous des élus de la République. Il n'y a pas d'intolérants, pas d'hypocrites, pas d'égoïstes. Il n'y a pas d'un côté ceux qui sont dans la moralité et de l'autre ceux qui seraient contre. Surtout, il n'y a pas de place pour les anathèmes avec lesquels vous avez choisi de commencer l'examen de ce texte.

Ce débat n'est pas celui des modernes contre les anciens, ce n'est pas celui des tolérants contre les intolérants, ce n'est pas celui des visionnaires contre les réactionnaires. (« Si ! » sur les bancs du groupe SRC.)

Dans cet hémicycle, madame la garde des sceaux, je le répète, nous sommes tous des élus de la République…

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…qui exprimons nos convictions sur un sujet de conscience pour lequel, contrairement à ce que vous avez voulu nous faire croire, les choses sont loin d'être claires et évidentes. Dans ce domaine, la part d'interrogation, au plus intime de chacun d'entre nous, doit être respectée par des propos autres que ceux que vous avez choisi de tenir dans votre premier discours.

Les nombreux députés qui ont signé cette motion en appellent à l'arbitrage du peuple par un référendum. Ils le font aussi parce que, par la litanie de vos attaques, vous avez transformé ce débat en une arène où la moindre voix dissonante est immédiatement caricaturée. Nous sommes convaincus que ce débat méritait mieux.

Je vous le dis simplement mais clairement : vous ne nous condamnerez pas au silence par vos brevets de bien-pensance ; vous ne condamnerez pas au silence les députés qui déposent cette motion (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) ; vous ne condamnerez pas au silence les millions de Français qui partagent nos inquiétudes et dont nous voulons qu'ils retrouvent la parole, par le référendum.

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Mais nous ne vous avons pas entendu en commission ! Vous n'y étiez pas ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.)

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Depuis le début, le Président de la République – nous en avons encore une illustration –, le Gouvernement et la majorité se sont efforcés de faire taire ces voix dissonantes. Nous exprimions des craintes, nous étions des ringards. Nous avions des interrogations, nous aurions dû faire des efforts intellectuels pour nous rendre à l'évidence, monsieur le rapporteur. Nous avons manifesté, vous nous avez accusés – avec une élégance que l'on appréciera – de défiler contre l'amour.

Maintenant que le débat commence et que nous avons l'audace de défendre nos convictions, vous nous accusez d'obstruction. Songez donc : les députés de l'opposition ont déposé chacun en moyenne 30 amendements. Quelle obstruction ! Est-ce trop pour vous ? Ce débat sur un sujet aussi important ne durera que quelques jours. Est-ce trop long pour vous ? Votre capacité d'écoute et de dialogue est-elle donc si faible ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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M. Guaino a quitté l'hémicycle deux minutes après son intervention !

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Les Français peuvent se demander pourquoi vous vous acharnez depuis tant de mois à vouloir faire taire, ainsi que le président Accoyer l'a souligné, les oppositions à cette loi. En réalité, vous cherchez à dissimuler la portée de ce que vous êtes en train de faire et les choix lourds que vous allez imposer dans la conception de la famille. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vous avez tout fait pour faire croire que ce projet de loi avait la vertu de l'évidence : il ne s'agirait que de lutter contre les discriminations ; on ne modifierait que quelques articles du code civil, rien de plus ; tout cela ne porterait que sur le mariage.

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À ce sujet, je voudrais écarter un argument que vous avez instrumentalisé comme jamais, l'accusation d'homophobie. Nous sommes tous ici opposés aux discriminations, nous combattons les caricatures, d'où qu'elles viennent, et nos interrogations ne portent pas sur la reconnaissance et la place légitime qui doit être faite aux couples homosexuels dans la société française. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Que la majorité écoute, elle s'instruira ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

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N'en rajoutez pas, monsieur Jacob, c'est suffisamment compliqué comme cela !

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Pour beaucoup de personnes présentes ici, la préoccupation majeure, le sujet qui nous guide plus que tout autre, c'est la place de l'enfant dans la société. Ce projet de loi, madame la garde des sceaux, ne porte pas, loin s'en faut, sur le seul mariage.

Notre conception de la relation entre parents et enfants a été construite sur le modèle biologique de la procréation. Cette vision de la famille repose sur quelques convictions simples : la parentalité, c'est à la fois la paternité et la maternité ;…

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…les données naturelles et notamment le sexe contribuent à constituer une identité ; l'enfant est un sujet et non un objet auquel chacun aurait droit. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Dans ce que vous êtes en train de faire, contrairement à ce que vous avez tenté de démontrer hier, le plus important n'est pas le mariage mais la place que vous dévouez à l'enfant.

Vous nous avez accusés d'être égoïstes. Mais qui est égoïste, madame la garde des sceaux ? Ceux qui parlent d'un droit à l'enfant, comme vous, ou ceux qui défendent les droits de l'enfant ? (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) De quel côté faut-il chercher l'égoïsme et l'individualisme ?

L'entreprise que vous commencez aujourd'hui est en réalité un ensemble. La loi que vous nous présentez n'est pas un point d'arrivée, mais un point de départ qui nous amène évidemment à la procréation médicalement assistée et à la gestation pour autrui.

On nous dit que ce n'est pas le sujet, que tout cela viendra dans une autre loi, que nous en débattrons plus tard. Ah bon ? Croyez-vous vraiment pouvoir abuser les Français ? Les bébés éprouvette et la location du ventre d'une mère sont évidemment les destinations vers lesquelles vous voulez nous emmener aujourd'hui.

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Vous avez joué ces derniers mois avec l'opinion et avec les parlementaires. À vous écouter hier, il n'était même pas question d'adoption.

Et pourtant, la logique même de votre raisonnement vous porte jusqu'à ce point. Reprenons votre démonstration. Vous posez la liberté des adultes comme principe absolu. Vous considérez que les règles biologiques de la procréation sont source de discrimination. Vous faites évoluer les règles de l'adoption pour ouvrir le droit à l'enfant. La suite évidente de ce raisonnement est la procréation médicalement assistée, le passage, à terme, par les bébés éprouvette. Certains parmi vous ont d'ailleurs eu la franchise, hier, de l'admettre.

Dès lors, pourquoi s'arrêterait-on à la procréation médicalement assistée ? Comment expliquer, en vertu de votre raisonnement, que ce que vous accordez aux couples homosexuels féminins ne soit pas ouvert aussi aux couples homosexuels masculins ? La suite logique sera la gestation pour autrui, au nom précisément de votre conception de l'égalité et de la lutte contre les discriminations. Assumez au moins l'ensemble de votre pensée ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Ce n'est même pas la cohérence de votre pensée que nous vous reprochons, mais les efforts que vous faites pour la dissimuler dans les méandres de l'ambiguïté. Assumez au moins devant les Français l'ensemble du projet que vous cherchez à mener à bien !

Madame la garde des sceaux, pour reprendre les propos que vous avez tenus hier, qui est hypocrite ici ? Qui dissimule la vérité aux Français ? (« Vous ! » sur les bancs du groupe SRC.) Qui joue avec les convictions ? (« Vous ! » sur les bancs du groupe SRC.) Qui se drape dans la moralité pour cautionner une marchandisation du corps féminin qui n'a rien de moral ? (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Oui, vous avez caché la réalité de votre projet. Alors que nous nous apprêtions à débattre d'une loi, vous faisiez passer à la sauvette une circulaire. Alors qu'ici, devant les députés, vous refusiez de donner votre position, on préparait discrètement dans les bureaux de votre ministère ce document. Alors que le Président de la République feignait d'émettre des réserves, vous ouvriez la voie pour la première fois en France à la reconnaissance de la marchandisation du corps. Au moins cette circulaire met-elle fin au jeu de dupes que vous avez pratiqués ! (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

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Vous aurez l'occasion de répondre ! Laissez parler l'orateur !

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Il est surprenant de constater comme vous avez du mal à pratiquer l'écoute et à respecter la contradiction ! (Protestations sur les mêmes bancs.)

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Les orateurs des différents groupes pourront prendre la parole lors de l'explication de vote sur cette motion. Veuillez écouter l'orateur.

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Quelle étonnante illustration de l'absence de sérénité dans laquelle vous cherchez à plonger l'hémicycle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

C'est bien de marchandisation du corps féminin qu'il est question. Vous ne voulez pas d'hypocrisie ? Très bien ! Mais alors, la vérité est brutale. Ce vers quoi nous nous dirigeons, c'est la possibilité pure et simple de louer le corps d'une femme pour obtenir un enfant. (Vives protestations sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.) On utilise la femme, on lui fait porter un enfant, puis on le lui enlève et on la rémunère. Oui, on rémunère une femme dont le corps a été utilisé pour faire un enfant. Voilà ce vers quoi vous voulez diriger la société française. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Vous affirmez, madame la garde des sceaux, qu'il ne s'agit que de quelques cas. Même s'il ne s'agissait que d'un seul cas, ce chemin serait inacceptable car il est sans retour. Ce choix serait en rupture totale avec tous les principes de la dignité du corps humain, qui ont toujours été défendus par la République française ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Mesdames et messieurs les députés qui êtes attachés à la défense de la femme dans la société, comment pouvez-vous ainsi proposer de revenir des décennies en arrière ? C'est le travail patient de la République qui a permis de protéger progressivement le corps de la femme. Victor Hugo lui-même l'avait dénoncé avec la vigueur qu'on lui connaît : « Dans notre législation telle qu'elle est, la femme ne possède pas, elle n'este pas en justice, elle ne vote pas, elle ne compte pas, elle n'est pas. […] C'est là un état violent : il faut qu'il cesse. » Cet état avait cessé. Le travail patient de générations de républicains et de républicaines avait permis qu'il cesse. Depuis Olympe de Gouges jusqu'à Simone Veil, en passant par Hubertine Auclert, la République a progressivement trouvé les protections nécessaires.

Madame la garde des sceaux, vous avez voulu donner hier une leçon d'histoire du droit. Fort bien ! Mais comment avez-vous pu passer sous silence ce que sont aussi les grandes conquêtes législatives qui ont protégé la femme dans une société de la marchandisation ?

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Comment avez-vous pu nier qu'au coeur de notre conception française de l'éthique il y a cette conviction simple que le corps humain ne se monnaye pas ? Nous n'avons jamais transigé sur cette règle, contrairement à d'autres pays, et je vous le dis fermement : les députés qui ont signé cette motion refusent que vous rameniez la République en arrière. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Si nous demandons un référendum, c'est d'abord pour cela. Alors que vous essayez de tronçonnez votre projet en petits morceaux de lois séparés, nous demandons que, par un référendum, les Français puissent s'exprimer sur l'ensemble de votre projet de société, depuis le mariage jusqu'à la gestation pour autrui. (Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.) Le référendum vous obligera à la clarté là où vous cherchez à nous faire voter dans la pénombre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

De plus, le référendum est aujourd'hui la seule issue possible à cet affrontement. Je dis bien à cet affrontement car, au fond, c'est ce que l'on peut le plus vous reprocher : à aucun moment vous n'avez cherché à rassembler les Français. Or, sur un sujet de société comme celui-là, il y avait une autre voie, et vous auriez pu tenter de trouver les chemins de l'apaisement. Nous aurions pu nous retrouver autour d'une meilleure reconnaissance des droits des couples homosexuels, avec notamment la mise en place d'un contrat d'union civile.

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Vous le savez, la République se grandit toujours de ces moments où elle cherche à dégager une position commune. Par le passé, nous en avons été capables…

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Souvenez-vous des débats sur le voile à l'école ou sur la fin de vie. Nous avions eu alors des échanges constructifs…

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À travers une catharsis républicaine, nous étions parvenus à rapprocher les positions.

Mais, au lieu de cela, il n'y a pas eu de débats, il n'y a eu que des affrontements. Vous n'avez jamais cherché à faire dialoguer les points de vue. Vous n'avez pas organisé de grands échanges permettant de faire discuter les uns avec les autres.

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Au lieu de cela – et c'est un choix profondément politicien –, vous avez abordé ce débat comme un rapport de force d'un camp contre un autre. Les questionnements ? Vous les avez balayés d'un revers de main. Les inquiétudes ? Vous y avez répondu par les insultes. Les doutes ? Vous n'avez jamais cherché à modifier en quoi que ce soit votre projet, imposé brutalement.

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La réalité, c'est que votre démarche s'inspire de la loi du plus fort, de la confrontation entre majorité et opposition, de la toute-puissance, pour reprendre l'expression de Tocqueville, que s'arrogent parfois les dépositaires du pouvoir. Mais c'est précisément parce que vous avez gagné les élections que vous aviez le devoir de rechercher un consensus et d'opter pour une autre démarche que celle que vous avez choisie.

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Au lieu de cela, vous avez fait de cette loi l'otage de vos enjeux politiciens et l'arme de combat d'un camp contre un autre. Mais un débat de société comme celui-là méritait une autre approche. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Vous avez laissé les inquiétudes se cristalliser. Vous avez laissé les crispations se renforcer. Vous avez fait le choix de monter une France contre une autre. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.) Ce faisant, vous avez pris le risque de semer derrière vous amertumes et rancoeurs.

Il y a une seule façon de sortir de tout cela par le haut : c'est de redonner la parole aux Français. Il faut un référendum. Un changement de société aussi majeur ne peut résulter du seul rapport de force entre la majorité et l'opposition. C'est aux Français et à eux seuls de trancher ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Le Président de la République est le garant de l'unité nationale ; qu'il assume donc ses responsabilités. Le référendum permettra à chaque Français de s'exprimer, au lieu d'avoir le sentiment d'être dépossédé de ce choix. C'est le seul moyen pour que la décision soit ensuite respectée par tous, au lieu de nous enfermer dans une de ces guerres intestines dont notre pays a trop souvent eu le secret.

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Le référendum permettra que cette décision ne soit plus l'enjeu d'un combat politique et rendra possible son appropriation par tous les Français. Ce sera le verdict simple, clair, incontestable de la volonté collective, verdict auquel tous les Français pourront adhérer. C'est pour cette raison que nous vous demandons un référendum.

J'entends certains d'entre vous opposer démocratie représentative et démocratie référendaire. Cela n'a pas de sens. Nous sommes tous ici les dépositaires du suffrage universel. Mais sur un sujet qui relève à ce point-là de l'intime, il n'y a aucune honte, aucune abdication de notre part à rendre la décision au peuple souverain.

Surtout, comment pouvez-vous renier à ce point les convictions que vous défendiez il y a encore si peu de temps. Souvenez-vous, même si cela vous est désagréable, de votre projet socialiste 2012 : il prévoyait de rendre plus souple le recours au référendum, dont vous disiez qu'il était trop étroitement encadré. Jean-Marc Ayrault lui-même avait déposé une proposition de loi destinée à faciliter l'utilisation de l'article 11.

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Vous étiez fidèle en cela aux principes défendus par une des grandes personnalités de votre famille politique, François Mitterrand…

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En 1988, dans sa Lettre à tous les Français, il indiquait, ne vous en déplaise, monsieur Emmanuelli : « J'ai souhaité naguère que les problèmes majeurs qui naissent de l'évolution de notre société puissent être tranchés par référendum. Je le souhaite toujours. » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Comment pouvez-vous à ce point-là changer de discours ?

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Pour nous expliquer que le référendum n'aurait pas sa place dans ce débat, vous invoquez des arguties juridiques : le sujet serait sociétal et non social – appréciez la nuance ! Mais il suffit de relire votre propre étude d'impact pour apprécier l'inanité de l'argument. Vous y avez en effet vous-mêmes listé toutes les conséquences sociales de votre loi : impact sur les successions, sur les accidents du travail, sur les pensions de retraite, sur les assurances et aussi sur les congés d'adoption. Et vous nous expliquez que cette loi ne rentrerait pas dans le champs social ? (Mêmes mouvements.)

Mais surtout, vous l'avez vous-même reconnu, monsieur le président de la commission des lois, qui peut croire un instant que le Conseil constitutionnel viendrait censurer la volonté du Président de la République de consulter les Français, alors que c'est l'esprit même de la Ve République ? Ce n'est donc pas sur le terrain juridique qu'il faut chercher les arguments s'opposant à un recours au référendum.

Est-ce donc sur le terrain politique ? Vous nous dites que les Français auraient acquiescé à cette loi en votant pour François Hollande. Mais à ce compte, mesdames, messieurs les députés de l'opposition, retirons-nous sur la pointe des pieds de cet hémicycle, et laissons-le à la majorité, puisque nous sommes visiblement de trop ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Retirons-nous, puisque vous considérez que, par leur vote à l'élection présidentielle, les Français auraient confié un blanc-seing à la majorité pour tous ses projets ! Mais pensez-vous sérieusement que tous les Français qui ont voté pour François Hollande l'ont fait pour obtenir le mariage et l'adoption pour les couples homosexuels ? Le contrat social qui se noue au moment de l'élection présidentielle est infiniment plus complexe que la vision simpliste que vous êtes en train de défendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Cet argument, c'est la négation même de la démocratie. Non, mesdames et messieurs les députés de la majorité, l'exercice de la démocratie ne se pratique pas une fois tous les cinq ans, lors d'une seule élection !

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Oui, le débat est légitime sur chacun des projets que vous présentez, et les Français ne vous ont pas donné le droit de tout faire, ni surtout celui de tout défaire dans la société française ! (Mêmes mouvements.)

On nous explique enfin que le sujet – nous apprécierons – serait trop compliqué et que les Français ne seraient pas suffisamment éclairés pour se prononcer par référendum sur un tel sujet.

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Le président de la commission des lois, si vous l'aviez écouté !

Les Français ont pu s'exprimer par référendum sur un sujet aussi difficile que Maastricht, et vous comptez leur demander de se prononcer sur le cumul des mandats, mais ils ne pourraient pas s'exprimer sur le mariage et l'adoption par des couples homosexuels ? Mais dans quelle estime tenez-vous le peuple de France ?

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La vérité, c'est que vous vous grandiriez et que vous grandiriez la démocratie en consultant les Français sur un sujet aussi fondamental. Alors, pourquoi hésitez vous ? De quoi avez-vous peur ?

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Vous avez peur du peuple ! Vous avez peur du verdict des Français. Vous préférez la facilité du passage en force brutal à la consultation indispensable et transparente de tous les Français. C'est cette peur qui vous guide, la peur du message que vous renverraient les Français sur un changement de société aussi fondamental que celui que vous êtes en train de proposer.

Vous avez d'ailleurs tellement peur de la diversité des opinions sur ces sujets que vous avez muselé vos propres collègues. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) Dans notre groupe, Christian Jacob a veillé à ce que chacun puisse s'exprimer, tandis que, sur vos bancs, vous imposez la discipline de vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Chez nous, la diversité des opinions existe ; chez vous, vous menacez ceux qui osent exprimer leurs différences : est-ce cela votre conception d'un débat ?

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Mesdames et messieurs les députés, je voudrais, pour finir, revenir sur le sens de notre rôle politique. On veut nous expliquer que voter ce texte, c'est prendre le train de l'histoire, argument majeur et définitif qui voudrait condamner d'emblée toute discussion. Mais ce n'est pas comme cela que je conçois mon rôle. Notre rôle en tant qu'élus de la nation, ce n'est pas de répondre à une prétendue modernité que nous serions sommés de valider ; notre rôle, c'est de nous demander, chaque fois que la question se pose, si cette modernité est positive ou non, puis de réfléchir au modèle de société que nous souhaitons proposer à nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Non, madame la garde des sceaux, je ne crois pas qu'il y ait une évolution de société qui nous amène inéluctablement au projet que vous défendez. Je crois en revanche que ce que vous proposez marque une césure historique dans notre vision de la famille ; je crois que la société de demain ne ressemblera plus, avec votre projet, à celle d'aujourd'hui, et je suis loin d'être convaincu que cette société sera meilleure.

Si la modernité pour vous, c'est de parler d'un droit à l'enfant comme d'un objet, alors nous vous laissons cette modernité ; si la modernité pour vous, ce sont les bébés éprouvette, alors nous vous laissons cette modernité ; enfin, si la modernité pour vous, c'est de pouvoir louer le ventre d'une femme, alors oui, nous vous laissons aussi cette modernité ! (Vives exclamations et huées sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

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Nos convictions sont autres. Ces convictions, je vous demande de laisser les Français les exprimer. Et c'est au nom de ces convictions que nous demandons solennellement un référendum. (Mmes et MM. les députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent.)

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La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille.

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Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, ce n'est pas une ministre terrorisée qui vous répond et je n'ai pas le sentiment que Mme Taubira le soit, non plus que les députés sur les bancs de la majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Les questions soulevées par M. Wauquiez ont au moins eu le mérite de faire émerger un consensus formidable : je n'ai jamais vu un tel hymne d'amour pour les homosexuels ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Vous les aimez tellement que vous voulez pour eux un contrat d'union civile. Or le contrat d'union civile est une proposition de loi de 1992, présentée par Jean-Pierre Michel et Jean-Michel Belorgey. Il vous faut vingt ans pour y arriver. Nous allons beaucoup plus vite que vous, en effet ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Venons-en au référendum. Vous appelez à la tolérance mais la première des tolérances serait de respecter les 18 millions de voix qui se sont portées sur François Hollande le 6 mai, de respecter les millions de voix qui ont permis d'élire cette majorité. C'est cela aussi, le respect du peuple !

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Nous devrions nous excuser d'être là, n'est-ce pas ?

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Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

C'est aussi le respect non pas d'une promesse, comme M. Bernard Accoyer l'a dit, mais d'un engagement, le trente-et-unième, qui faisait partie des soixante engagements de François Hollande, et je tiens à vous en rappeler le contenu: l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe. Ce projet de la loi ne porte que sur l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe, ne vous en déplaise. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC. – Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Le champ de l'article 11 de notre Constitution ne nous permet pas de soumettre ce type de question au référendum. Vous pouvez très bien parler d'argutie juridique, MM. Guy Carcassonne et Didier Maus apprécieront.

Il n'en reste pas moins vrai que si vous aviez voulu que le référendum puisse porter sur ce type de question, vous seriez allés jusqu'au bout de la révision constitutionnelle de 2008 qui instituait un référendum d'initiative populaire, en prenant des mesures pour que la loi organique soit votée, et cette discussion n'aurait pas eu lieu.

On voit bien de quelle façon vous cherchez à éluder le débat.

En effet, le champ de l'article 11 n'ouvre pas cette possibilité et je rappellerai les propos d'un ancien garde des sceaux, Jacques Toubon : « En limitant l'extension du champ référendaire aux matières économiques et sociales, le Gouvernement a choisi d'exclure les sujets touchant à la souveraineté, comme la défense ou la justice, ou ce qu'il est convenu d'appeler les questions de société avec les libertés publiques, le droit pénal, ou encore les lois de finances, dont l'examen relève des prérogatives traditionnelles du Parlement. Il doit donc être clair qu'il ne saurait y avoir de référendum sur des sujets comme la peine de mort, la repénalisation de l'avortement ou l'expulsion des immigrants clandestins, le référendum n'étant pas et ne devant pas être un instrument de démagogie ». (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et écologiste.)

Et de citer les exemples suivants quant au champ du référendum : en matière économique, les privatisations, le plan ou les lois d'orientation pluriannuelles, et, dans le domaine social, les orientations générales du droit du travail, de la sécurité sociale, de la politique de santé, l'exclusion ou l'aide sociale.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Se retrouvent en revanche exclus du nouveau champ d'application le droit pénal, l'entrée et le séjour des étrangers en France, les libertés publiques, les prérogatives de police, la politique étrangère, la défense, la justice et le droit civil.

Debut de section - Permalien
Dominique Bertinotti, ministre déléguée chargée de la famille

Les deux motions que vous avez présentées hier ne sont, comme celle d'aujourd'hui, qu'un prétexte pour essayer d'enliser le débat sans le porter sur le contenu même du texte dont je répète qu'il ne concerne que l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et écologiste.)

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La parole est à Mme Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice.

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Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Mme la ministre chargée de la famille vient de répondre aux questions d'ordre constitutionnel mais vous connaissez déjà parfaitement tout cela. Vous vous réclamez volontiers d'un courant de pensée politique qui a considéré le référendum comme un instrument de recours au peuple, mais en en définissant précisément le champ d'application. Je ne m'appesantirai pas sur la question.

Vous connaissez aussi la tradition philosophique du droit français qui relève de Rousseau, avec le recours à la souveraineté populaire, mais aussi de Montesquieu, avec la démocratie représentative. Vous savez parfaitement que, dans l'histoire du droit et dans l'histoire des grandes politiques publiques, cette double filiation philosophique a toujours été respectée.

Je m'arrêterai très brièvement sur les propos de M. Wauquiez et le réquisitoire qu'il a essayé de dresser contre moi y compris ad hominem, en m'attribuant des propos que je n'ai jamais tenus. Tout cela n'est pas très important et se reproduira sans doute fréquemment ces deux prochaines semaines. Je n'y répondrai pas forcément.

Pourquoi parlez-vous, à propos de la circulaire de ce matin, de circulaire en catimini ? Les circulaires ne sont jamais des documents classés secret-défense, elles sont toujours publiées au Bulletin officiel. Par ailleurs, j'en ai fait état le 16 janvier devant la commission des lois (« Non, non ! » sur les bancs du groupe UMP) et mon audition a été retransmise en direct, notamment sur la chaîne parlementaire. En tout état de cause, le procès-verbal fera foi si c'est nécessaire.

Que dit cette circulaire ? Parce que le Gouvernement est indéfectiblement attaché au principe de l'indisponibilité du corps humain, il évite justement que, par ce biais-là (Exclamations sur les bancs du groupe UMP)…

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S'il vous plaît, M. Wauquiez a posé des questions, écoutez au moins les réponses !

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Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Vous le savez très bien, monsieur Wauquiez, l'arrêt de la Cour de cassation va exactement dans le même sens. J'y reviens pour éclairer la représentation nationale et les Français.

Chaque année, 450 000 actes d'état civil sont enregistrés à l'étranger. Ils sont enregistrés dans nos consulats. Lorsqu'un consul a un doute sur l'enregistrement d'un acte, il le signale au ministère des affaires étrangères, qui en avertit le parquet de Nantes.

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Mais ce n'est pas de cela qu'il est question dans votre circulaire ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Je comprends parfaitement que cela vous dérange profondément que je clarifie la situation.

Reprenons : le consulat fait saisir le parquet et le parquet examine les cas. Sous le dernier quinquennat, entre 2008 et 2011, quarante-quatre cas ont été signalés au parquet parce que le consul soupçonnait une gestation pour autrui. Le doute a été confirmé pour 38 d'entre eux par décision du procureur de la République. Rendons hommage à la vigilance de nos consulats, qui repèrent ces cas de gestation pour autrui, les signalent et permettent ainsi au parquet d'accomplir son travail.

Pour l'année 2012, les chiffres sortis en décembre font état de douze dossiers. Lorsque les contentieux sont différents, les décisions de justice sont différentes, mais les actes administratifs, fondés sur le droit, doivent être égaux et identiques dans toutes nos juridictions. Dans certaines juridictions, les greffes des tribunaux d'instance délivrent le certificat de nationalité française, qui n'est pas à attribuer puisque ces enfants sont Français du fait de leur filiation paternelle.

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C'est bien une reconnaissance de la gestation pour autrui !

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Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Non, monsieur Wauquiez, ce n'en pas une, quoi que vous disiez !

Par cette circulaire, nous demandons aux greffiers que, sur la base du document d'état civil probant, ils délivrent le certificat national de nationalité française.

Si dans deux semaines vous voulez nous reposer la question, par respect pour le Parlement, nous vous répondrons à nouveau.

Vous avez prétendu que je vous aurais traité d'hypocrites. Je répète ce que j'ai dit, mais le compte rendu fait foi de toute manière : puisque le mariage des homosexuels n'enlève strictement rien aux hétérosexuels….

Plusieurs députés UMP. Ce n'est pas le problème !

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Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Posons des mots sur des sentiments et des comportements. Je maintiens mes propos : oui, il est hypocrite de faire semblant de ne pas voir ces familles homoparentales et ces milliers d'enfants qui sont exposés à un regard social réprobateur (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Vous nous parlez des effets psychologiques sur les enfants, mais ces effets sont d'abord le fait du regard social, des discriminations, du rejet, du refus d'une citoyenneté ! ( Les députés des groupes SRC, GDR et écologiste se lèvent et applaudissent).

Alors, oui, nous le refusons. Je suis désolée de vous déplaire si, par hasard, il vous est arrivé de penser que je vous traitais d'hypocrites.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Vous nous parlez de l'intime mais, monsieur Wauquiez, en ce domaine, nous nous faisons un devoir de réfréner nos élans, nos sympathies, nos aversions, parce que nous statuons en droit. Il s'agit ici de droits et de libertés. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et écologiste.)

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La parole est à M. le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.

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Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre chargé des relations avec le Parlement, chers collègues, comme nous tous ici, j'ai écouté Laurent Wauquiez avec d'autant plus d'attention que nous n'avons pas souvent ce plaisir ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP.) Je l'ai fait avec d'autant plus d'attention que c'est la première fois, dans cet hémicycle ou en commission, que nous entendons Laurent Wauquiez, lequel, jusqu'à présent, ne s'était pas exprimé sur ce sujet. (Huées sur les bancs des groupes SRC,GDR, écologiste et RRDP. – Exclamations et claquements de pupitres sur de très nombreux bancs du groupe UMP.)

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Je demande la parole, monsieur le président, c'est intolérable !

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Monsieur Jacob, je vous donnerai la parole quand M. Urvoas aura fini. (Exclamations et claquements de pupitres sur les bancs du groupe UMP. – M. Christian Jacob persiste à demander la parole.) L'orateur seul a la parole, monsieur Jacob, et vous le savez très bien. Vous l'aurez ensuite. (Nouvelles exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Monsieur Jacob, nous sommes dans le cadre des explications de vote. Il n'y a pas de rappel au règlement ni de suspension de séance une fois qu'un orateur a pris la parole.

Veuillez poursuivre, monsieur le président de la commission !

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Je vous ai écouté, monsieur Wauquiez, et vous avez dit que nous avions peur. De quoi aurions-nous peur ? De nos convictions ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Je vous le dis, mes chers collègues, nous sommes fiers de nos convictions (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC,GDR, écologiste et RRDP), fiers de la victoire de François Hollande (Mêmes mouvements), fiers de l'engagement 31 de François Hollande, fiers du combat de Dominique Bertinotti au service de toutes les familles, fiers de Christiane Taubira dans son combat pour l'égalité (Mêmes mouvements).

Nous aurions peur ? Qui, ici, parle de peur ? Vous passez votre temps à nous parler de vos craintes, de vos fantasmes, de GPA. Une fois pour toutes, cette majorité ne veut pas de la GPA et il n'y aura pas de GPA ! (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes SRC, GDR, écologiste et RRDP. – Claquements de pupitres sur les bancs du groupe UMP.)

Vous avez, monsieur Wauquiez, défendu avec talent une motion référendaire pour que le peuple puisse se prononcer.

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En tant que président de la commission des lois, je vais essayer de répondre sur le fond à votre demande de motion référendaire – et ce ne seront pas des arguties juridiques.

J'ai été surpris que vous empruntiez cette voie, parce que vous la suivez…

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Rigolo ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC,GDR, écologiste et RRDP.)

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Cher collègue, relisez donc Talleyrand : « Tout ce qui est excessif est insignifiant ». (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC,GDR, écologiste et RRDP.)

Juridiquement, la voie que vous avez choisie est une impasse. Je suis convaincu que vous en êtes persuadés, mais que, par pur opportunisme, vous feignez de l'ignorer. Pourquoi ? Parce que c'est votre majorité, en 1995, qui a apporté la réponse. Jacques Chirac est le dernier Président de la République à avoir engagé une révision constitutionnelle pour élargir l'article 11. Et puisque ce ne sont pas nos arguments qui arrivent à vous faire douter, je vais en appeler à des membres de votre majorité de l'époque.

On nous a déjà parlé de Jacques Toubon. Aussi vais-je citer quelqu'un d'autre, qui a, lui aussi, présidé la commission des lois entre 1993 et 1997 avant d'être nommé au Conseil constitutionnel par Jacques Chirac. Ce collègue éminent, bien plus compétent, naturellement, c'est Pierre Mazeaud, qui a présidé le Conseil constitutionnel en 2004. Pierre Mazeaud a rapporté la révision constitutionnelle de 1995 et a signé un rapport le 5 juillet 1995. Il pose cette question : « que va donc couvrir le champ de l'article 11, que nous allons élargir, et que va-t-il interdire ? »

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Vous n'en serez pas surpris, il affirme qu'il va reprendre ce que disait tout à l'heure Dominique Bertinotti : en seront exclus le droit pénal, les libertés publiques, les prérogatives de police et le droit civil.

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Nous avons le sentiment de parler ici de la modification du droit civil de la famille.

Monsieur Wauquiez, vous avez dit : « Non, c'est une réforme sociétale, c'est donc une réforme sociale, cela relève de l'article 11 de la Constitution. » Là encore, je vais faire appel à votre mémoire et aux écrits de Pascal Clément et de Jacques Toubon.

Pascal Clément, juriste éminent, a présidé la commission des lois de notre assemblée et a été garde des sceaux. Le 11 juillet 1995, il a déposé un amendement visant à ouvrir le référendum aux questions de société. Il disait – j'imagine que vous allez vous retrouver – qu'il fallait cet élargissement parce que restreindre la compétence du peuple français aurait quelque chose d'inexplicable. Vous en êtes d'accord.

Jacques Toubon, garde des sceaux, membre de vos organisations politiques, a répondu : « Non, nous ne ferons pas cela, parce que nous considérons qu'il ne faut pas se risquer sur ce terrain, de peur de remettre en cause les principes fondamentaux reconnus par le Conseil constitutionnel et par l'ensemble des textes depuis le Préambule de 1946. Cela ferait courir un très grand risque à l'équilibre des institutions et aux libertés dont bénéficient les Français, et nous nous y refusons ». C'est Jacques Toubon qui parle, ce n'est pas Christiane Taubira, ce n'est pas non plus Dominique Bertinotti. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Depuis, rien n'a bougé. Pourtant, cela aurait pu en 2008, parce que des amendements ont été déposés dans cet hémicycle par des collègues membres du groupe UMP qui demandaient l'élargissement du champ du référendum aux questions de société. C'est Mme Rachida Dati, garde des sceaux (« Ah ! » sur les bancs des groupes SRC, écologiste et RRDP), c'est Jean-Luc Warsmann, président de la commission des lois qui ont dit non !

Vous nous avez parlé de François Mitterrand, monsieur Wauquiez. François Mitterrand avait en effet proposé, en 1984, d'élargir le champ du référendum. Qui a dit non ? Le Sénat, où vous étiez majoritaires !

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Depuis, rien n'a bougé. En 1984, en 1995 et en 2008, c'est vous qui vous êtes opposés à l'élargissement du champ du référendum ! Il est donc pour le moins savoureux que vous le proposiez aujourd'hui !

À la question « Les réformes de société sont-elles relatives aux réformes sociales de la nation, comme le prévoit l'article 11 ? », vous répondez « oui », monsieur Wauquiez, dans votre motion référendaire. Parfait !

Les manuels de droit constitutionnel répondent « non ». Balayons-les et prenons un autre ouvrage, celui-ci, par exemple : Les 101 mots de la démocratie. Pas mal ! Il a été publié chez Odile Jacob en 2002. À la page 444, à la question « Les réformes de société relèvent-elles des réformes sociales de la nation dans l'article 11 ? », les auteurs répondent « non ». Les auteurs sont Raphaël Hadas-Lebel et Laurent Wauquiez. (Mmes et MM. les députés des groupes SRC, GDR, écologiste et RRDP se lèvent et applaudissent.)

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Dans les explications de vote, la parole est à M. Bernard Roman, pour le groupe SRC.

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Monsieur le président, pour l'explication de vote du groupe SRC, je pensais répondre à une motion référendaire. J'avais donc préparé quelques notes pour contrecarrer des arguments qui, même s'ils n'ont pas été totalement développés, ont été contrebattus à l'instant avec un talent remarquable par le président de la commission des lois. Je ne m'y attarderai donc pas.

D'abord, il y a une vraie contradiction à voir les orateurs défiler à la tribune au nom du groupe UMP pour dire qu'il y a des choses plus importantes et que nous essayons d'allumer un contre-feu avec un texte de société, alors que les gens nous parlent du chômage, de la situation économique et des difficultés qu'ils rencontrent, tout en demandant en même temps que l'on utilise le dispositif qui mobilise le plus la société, c'est-à-dire le référendum. Il y a là, je le répète, une vraie contradiction. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

Deuxièmement, je me demande ce qu'aurait dit M. Wauquiez dans une moitié de son exposé s'il n'y avait pas eu la circulaire Taubira. Il a effectivement passé vingt minutes sur une demi-heure à parler de la GPA et de cette circulaire.

Puisque les choses ne sont pas dites comme elles sont écrites, j'ai en main le compte rendu officiel de la commission des lois du 16 janvier. Je ne vous en lis que trois lignes. La garde des sceaux répondait aux interpellations de M. Mariton et de M. Gosselin, les deux porte-parole de l'UMP sur ce texte, ainsi que de M. Poisson.

Je cite le compte rendu de la commission des lois : « J'ai fait préparer une circulaire qui doit être adressée de façon imminente aux tribunaux d'instance afin de faciliter la délivrance de ces certificats, aucun élément de droit ne justifiant qu'elle soit refusée à ces enfants qui sont Français. » Aucune réaction ni de M. Poisson ni de M. Gosselin ni de M. Mariton ! (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.) Je l'avoue, j'ai du mal à comprendre que leur approbation tacite en commission se transforme en cris de vierges effarouchées à la suite d'un article paru dans Le Figaro !

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Enfin, je vous le dis de la manière la plus ferme, je n'accepte pas ces mises en cause, monsieur Wauquiez, que vous avez faites à la tribune. Lorsqu'une mission a été mise en place pour la révision des lois de bioéthique, il y a deux ans, elle était présidée par l'un de nos éminents collègues socialistes – qui est toujours député – Alain Claeys. Cette mission a rendu des conclusions validées par la formation à laquelle nous appartenons, le parti socialiste, à l'unanimité de ses membres, disant que jamais nous n'accepterions la marchandisation du corps des femmes et que jamais nous n'approuverions la GPA. Par conséquent, faire ce procès aujourd'hui est indigne de vous !

Pour toutes raisons, nous voterons contre votre motion référendaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR, écologiste et RRDP.)

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La parole est à M. Jean-Frédéric Poisson, pour le groupe UMP.

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Monsieur le président, mes chers collègues, avant d'évoquer le fond de la motion excellemment présentée par Laurent Wauquiez, je m'adresse solennellement à Mmes les ministres.

Je regrette que le droit d'expression, formellement reconnu par le règlement de notre assemblée, c'est-à-dire le droit de défendre des motions, et donc des avis différents, soit considéré par vous, mesdames les ministres, comme un prétexte. Le droit fondamental de l'opposition, dans cet hémicycle comme ailleurs, c'est de faire valoir ce à quoi elle croit, et si le règlement prévoit que nous nous exprimions dans un temps donné, nous le ferons, que cela vous plaise ou non, et jusqu'au bout de ces débats ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je regrette aussi – je ne parle pas pour le président de la commission des lois, pour lequel j'aurai un mot tout à l'heure – que, pour expliquer votre position sur l'interprétation de la Constitution, vous n'ayez fait référence qu'à deux constitutionnalistes dont les orientations politiques personnelles, au demeurant parfaitement respectables, sont connues. Il y a beaucoup de professeurs de droit constitutionnel, madame la ministre, qui ne partagent pas votre avis. J'aimerais que, dans ce débat, la diversité d'opinions ait une place et qu'elle soit reconnue comme telle. Cette façon monolithique de présenter les choses comme si c'était la vérité ne convient pas à la nature de notre débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Enfin, cher président de la commission des lois, je regrette les mots que vous avez prononcés à l'encontre de notre collègue Wauquiez. Comme disait le cardinal de Retz, en politique comme en amour, on ne sort de l'ambiguïté qu'à son détriment ! Vos propos étaient suffisamment habiles pour que, derrière l'amabilité de leur ton, on puisse déceler une certaine forme d'ironie. (« Oh ! » sur les bancs du groupe SRC.) Eh oui, le président de la commission des lois pratique volontiers l'ironie. D'ailleurs, il en sourit, car il le sait bien, et je suis l'une de ces cibles préférées !

Lors de la première réunion de la commission, monsieur le président, il y avait à peine assez de sièges pour que tout le monde puisse s'asseoir, et vous avez failli lever la séance pour cette raison. Il est bien normal que des collègues qui ne siègent pas dans cette commission participent moins que d'autres à ses travaux. Il est tout aussi normal de les retrouver dans cette discussion, et nous nous en réjouissons. Monsieur le président, je ne crois pas que ce soit seulement le cas de M. Wauquiez. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Sur le fond…

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Je serai bref, monsieur le président.

Au sujet du référendum d'initiative populaire, je remercie Mme la ministre Bertinotti de nous avoir rappelés à nos responsabilités. Nous aurons d'ailleurs l'occasion de savoir ce que la majorité présidentielle en pense, puisqu'un texte relatif au référendum est inscrit à l'ordre du jour du Sénat. Nous verrons donc dans quelques jours si la gauche sénatoriale est prête ou non à installer définitivement cette initiative dans nos textes.

Enfin, sur le référendum lui-même, j'invite à convoquer les citations dans leur intégralité. Après le passage de Jacques Toubon que vous avez cité, madame le ministre, selon lequel un référendum ne doit pas être tenu pour les questions que vous avez indiquées, notre ancien collègue poursuit en précisant : « tout en respectant scrupuleusement le pouvoir du Président de la République d'apprécier si le référendum envisagé correspond à une exigence nationale ». Notre collègue Wauquiez a abondamment démontré cette exigence. Nous soutiendrons donc la motion référendaire qu'il a défendue ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Jean-Christophe Fromantin, pour le groupe Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le président, chers collègues, j'admire pour ma part l'assurance de beaucoup d'entre vous quant à ce que les Français pensent de tout cela. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.) On est sûr qu'au mariage tous répondraient massivement « oui », qu'à l'adoption tous répondraient massivement « oui », on semble sûr qu'à la PMA ils répondraient massivement « oui » et on est maintenant presque sûr qu'à la GPA ils répondraient massivement « oui » ! Je n'ai pas la chance d'avoir votre assurance et, au fur et à mesure de ces débats, j'ai de plus en plus de doutes sur les réponses qui seraient apportées à ces questions. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

Je vais d'ailleurs vous faire un aveu : je n'avais pas signé la motion référendaire et plusieurs de nos collègues du groupe UDI non plus, pensant trouver dans l'amorce des débats sur ce projet de loi si important des réponses, une écoute, des pistes peut-être plus ouvertes. Mais on ne les trouve pas et les doutes s'installent de plus en plus au fur et à mesure que les discussions avancent. C'est la raison pour laquelle la plupart de mes collègues du groupe UDI et moi-même voterons pour cette motion référendaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDI et UMP.)

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Sur la motion référendaire, je suis saisi par les groupes SRC et UMP d'une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.

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Monsieur le président, mes chers collègues, notre collègue Wauquiez a parlé tout à l'heure de peur. Je crois pouvoir dire que, depuis le début de cette discussion parlementaire, c'est dans son camp que se trouve la peur. La droite défend une France étriquée et frileuse contre ceux qui défendent une société ouverte et tolérante qui se bat pour l'égalité des droits. Nous sommes aujourd'hui dans la tradition de la gauche au sens le plus large, qui s'est toujours battue pour que les droits soient acquis à ceux qui n'en avaient pas auparavant. (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

D'autre part, monsieur Wauquiez, vous nous avez parlé de référendum, nous rappelant même celui sur le traité de Maastricht. Alors, pourquoi avez-vous refusé un référendum sur le traité de Lisbonne ? Vous avez parlé des retraites : pourquoi avez-vous refusé un référendum sur les retraites ? Laissez-moi vous dire que votre posture et celle de votre groupe vont finir, si vous me permettez cette expression un peu familière, par vous ringardiser et montrer aux Français et à votre électorat que vous n'avez absolument rien compris à l'évolution de la société, car vous sacrifiez à un jeu de rôles ! (Rires sur les bancs du groupe écologiste. - Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Enfin, vous avez essayé d'instrumentaliser la circulaire de Mme Taubira. Quoi que l'on pense de la GPA, les enfants doivent-ils être victimes des choix de leurs parents ? La réponse est non ! (Applaudissements sur les bancs du groupe écologiste.) C'est pour cette raison que Mme Taubira, à juste titre, n'a pas demandé qu'on procède à son inscription dans l'état civil, puisque la Cour de cassation ne le permet pas. Mais accorder un certificat de nationalité à ces enfants, ce n'est pas le droit à l'enfant mais le droit de l'enfant ! Mme Taubira a eu raison de produire cette circulaire en réponse à l'amendement d'un écologiste qui s'appelle Sergio Coronado ! (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.) Oui, nous sommes fiers aujourd'hui, quelles que soient nos différences, d'appartenir à cette majorité, soutien du Gouvernement qui a le courage d'assumer une loi rattrapant le retard de notre pays sur d'autres qui ont déjà ouvert des droits ! (Applaudissements sur les bancs des groupes écologiste et SRC.)

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Monsieur le président, mes chers collègues, nous nous sommes déjà en quelque sorte prononcés hier sur cette motion référendaire puisque nous avons rejeté la motion de procédure défendue par M. Guaino, et avec quel talent ! (Rires sur les bancs du groupe RRDP.) L'Assemblée a donc tranché, qu'on le veuille ou non ! Virés par la porte, vous essayez de rentrer par la fenêtre ! (Rires sur les bancs du groupe RRDP et du groupe SRC.) Qu'on le veuille ou non, votre tentative d'aujourd'hui n'est qu'un artifice de procédure !

Vous nous proposez à nouveau de saisir le peuple français, autrement dit de demander au Président de la République d'appliquer une extension de l'article 11 de la Constitution. Le président Urvoas a fort bien montré tout à l'heure les évidentes difficultés d'une telle démarche. Il suffit de rappeler tout d'abord qu'on ne peut pas consulter a priori le Conseil constitutionnel, et qu'ensuite une fois la loi votée, on ne peut plus le saisir. Dès lors, l'interprétation de l'article 11 ne peut qu'être minimaliste, faute de quoi il y aurait une interprétation laxiste du Président qui engagerait sa responsabilité : c'est ce qu'on appelle la forfaiture ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

En réalité, ce que vous nous proposez, c'est de recourir à la démocratie de l'émotion. Celle-ci n'a pas à se substituer au vote rationnel, empreint de l'esprit des Lumières de notre assemblée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) En fin de compte, messieurs de la droite, vous êtes toujours les mêmes : vous êtes des bonapartistes ! C'est cela qui vous anime ! (Protestations sur les bancs du groupe UMP.) Nous sommes, nous, des représentants de la démocratie parlementaire !

Monsieur Wauquiez, je vous ai écouté avec grande attention. Vous avez beaucoup de talent. Pourquoi le gâcher pour sombrer dans l'excessif, le dérisoire et l'insupportable en nous associant aux défenseurs de la GPA, dont j'ai dit hier qu'elle nous révulsait ? J'ai d'ailleurs proposé que la France prenne une initiative sur le plan international en vue d'une condamnation unanime de la GPA. Nous rejetterons, monsieur Wauquiez, cette motion dangereuse pour la République et la démocratie que vous nous avez proposée ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP. - Applaudissements sur les bancs du groupe RRDP et du groupe SRC.)

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Monsieur Wauquiez, vous nous avez parlé de démocratie. Celle-ci est basée sur la clarté des propos et la confiance dans l'intelligence. Or tout votre propos ne vise qu'à faire peur ! Vous évoquez la « face cachée » de la loi. Mais il n'y en a pas. La loi dit tout simplement que le mariage est un droit à un projet de vie commun basé sur l'amour et le respect de l'autre et qu'il n'est pas acceptable que les couples homosexuels en soient écartés. Voilà, tout simplement, ce que dit la loi ! Elle nous dit que ces couples, comme les couples hétérosexuels, ont le droit de fonder une famille. Voilà le projet de loi qui nous est soumis. Discutez-en, au lieu d'essayer de faire peur !

Vous créez l'amalgame entre le droit à l'enfant et le droit des enfants. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SRC.) Mais en quoi le fait qu'un couple homosexuel ait droit à l'adoption serait le droit à l'enfant, tandis que le fait qu'un couple hétérosexuel a droit à l'adoption serait le droit des enfants ? Et où est le droit des enfants quand un enfant ne sait pas si l'un de ses parents pourra venir le chercher à l'hôpital, signer des papiers qui le concernent et s'occuper de lui si l'autre parent décède ? (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.) Le droit à l'enfant, c'est que les parents soient en pleine responsabilité, des parents de plein droit, afin que les enfants soient des enfants de plein droit !

Quant à la gestation pour autrui, toute la majorité s'oppose à cette marchandisation du corps de la femme. Et franchement, monsieur Wauquiez, ce n'est pas à vous, les conservateurs, de donner des leçons aux femmes qui se sont battues pour leurs droits et qui se battent aujourd'hui pour l'égalité salariale et pour l'abolition de la prostitution ! C'est contre vous que nous nous sommes battues au fil de ces décennies ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, écologiste et SRC.)

Dès lors, arrêtez les motions de procédure, arrêtez les suspensions de séance et ayez maintenant le courage de vous attaquer aux articles du projet de loi, afin que nous puissions, nous, discuter vos amendements ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, écologiste et SRC.)

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Je mets aux voix la motion référendaire.

(Il est procédé au scrutin.)

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Voici le résultat du scrutin sur la motion référendaire :

Nombre de votants 483

Nombre de suffrages exprimés 482

Majorité absolue 242

Pour l'adoption 184

contre 298

(La motion référendaire n'est pas adoptée.)

(Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

Motion référendaire

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La séance est suspendue.

(La séance, suspendue à dix-sept heures cinquante-cinq, est reprise à dix-huit heures dix.)

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La parole est à M. Christian Jacob, pour un rappel au règlement.

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Mon intervention se fonde sur l'article 58 de notre règlement, monsieur le président, et porte sur le déroulement de nos travaux.

Comme nous l'avons constaté lors des deux jours qui viennent de s'écouler, le texte que nous sommes en train d'examiner ouvre clairement la voie à l'autorisation de la gestation pour autrui pour raisons de convenance personnelle, autorisation qui fera l'objet d'un prochain texte. La légalisation de la gestation pour autrui est clairement inscrite dans la circulaire que vient d'envoyer Mme la garde des sceaux, un texte dont il n'a pas été donné lecture tout à l'heure, ce qui a permis à plusieurs – notamment à vous, madame la ministre – d'affirmer qu'il n'y avait pas de légalisation.

Il me paraît donc utile de rappeler que cette circulaire porte sur les conditions de délivrance des certificats de nationalité française aux enfants nés à l'étranger de Français « lorsqu'il apparaît, avec suffisamment de vraisemblance, qu'il a été fait recours à une convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui ». À la lecture de ces mots, il est difficile de soutenir que la circulaire n'a pas pour effet de reconnaître la gestation pour autrui à l'étranger. Et dès lors que vous la reconnaissez à l'étranger, comment pourrions-nous nous y opposer en France ? Vous soutenez que ce sera possible, mais votre raisonnement ne tient pas ! En réalité, vous savez parfaitement que vous venez d'ouvrir le droit à la gestation pour autrui et à sa reconnaissance, donc à sa légalisation.

J'en viens à ce qui motive précisément mon rappel au règlement. Constatant que la voie est ouverte à la procréation médicalement assistée pour raisons de convenance personnelle, je demande depuis trois mois que le Comité national d'éthique soit saisi. Le Président de la République vient enfin d'annoncer, il y a quatre jours, qu'il allait consulter cette instance. Je vis la situation actuelle comme une véritable humiliation pour notre parlement : on sollicite l'avis du Comité national d'éthique alors que nous sommes en train d'examiner le texte, et en sachant pertinemment que nous n'aurons pas cet avis avant d'avoir fini de débattre. (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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De même, alors que nous sommes en train d'écrire la loi, nous voyons sortir des bureaux de Mme la garde des sceaux une circulaire bafouant la loi, puisqu'elle reconnaît la gestation pour autrui.

Face à cette situation, j'en appelle à votre responsabilité, monsieur le président, en vous demandant de défendre notre institution. Aujourd'hui, le Parlement est humilié parce qu'on n'a pas recueilli l'avis du Comité national d'éthique.

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Il est humilié parce que Mme la garde des sceaux fait sortir une circulaire au moment même où nous sommes en train de débattre d'un projet de loi.

Monsieur le président, je vous demande solennellement de défendre notre institution et de ne pas accepter que la représentation nationale soit ainsi bafouée et humiliée. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Nous comptons sur vous et vous apportons notre soutien pour défendre notre institution, ce que, nous n'en doutons pas, vous aurez à coeur de faire avec l'énergie que nous vous connaissons. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Alain Marty, pour un rappel au règlement.

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Monsieur le président, j'aimerais que vous me donniez la parole en fin de séance pour un fait personnel.

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Très bien.

La parole est à M. Claude Goasguen, pour un rappel au règlement.

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J'interviens sur le fondement de l'article 58 du règlement un peu dans le même sens que le président de mon groupe, mais pour un sujet très précis. Je regrette que le président de la commission des lois ne soit pas là, car c'est essentiellement à lui que s'adresse ma remarque, dans la mesure où le texte dont nous discutons n'est pas celui du Gouvernement, mais celui de la commission des lois.

Il nous a expliqué tout à l'heure que des cas similaires à ceux que cette circulaire entend résoudre s'étaient présentés au cours des années précédentes. Mais il n'y avait pas de circulaire. Laissez-moi vous rappeler quelle est la nature juridique d'une circulaire.

La circulaire n'est pas un papier anodin, c'est pour les tribunaux une source de droit à caractère normatif. Par conséquent, même sans entrer dans le problème de la nationalité et sa correspondance avec l'état civil, dont je veux bien admettre qu'il peut se discuter, il reste néanmoins clair que votre circulaire autorise, par la reconnaissance normative de la GPA à l'étranger, une atteinte au droit public, à l'ordre public. Vous devriez normalement être en droit de réclamer que vos procureurs poursuivent le père ayant commis une telle atteinte à l'ordre public. Or je n'ai pas entendu parler de cet aspect des choses, qui est grave.

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À partir du moment où vous ne reconnaissez pas l'atteinte à l'ordre public, en admettant que je reconnaisse le droit de la nationalité, vous renforcez le caractère normatif de la disposition qui accepte la GPA en droit français. Vous prétendez que vous n'instaurerez jamais la GPA mais, en réalité, la circulaire crée une norme qui l'autorise.

Il y a donc deux solutions : ou bien nous examinons dans le cadre de la commission des lois un article additif rappelant de manière explicite que l'intention du législateur en toute hypothèse est de ne pas reconnaître la GPA, et, dans ce cas, la circulaire s'effacera devant une norme supérieure ; ou bien vous ne faites rien et vous êtes obligés de reconnaître que, quelque part, tout de même, votre circulaire accepte une atteinte à l'ordre public, et que, dans ces conditions, vous mettez le doigt dans la GPA, et c'est un acte politique. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Olivier Dussopt, pour un rappel au règlement.

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Il s'agit toujours du déroulement de nos débats.

D'abord, monsieur le président, nous sommes nombreux à considérer que vous défendez bien notre institution et que vous veillez à la qualité de notre travail parlementaire (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

Je voudrais aussi inviter mes collègues de l'opposition à rester concentrés dans nos débats sur le contenu de ce texte. Ce texte concerne le mariage et l'adoption, il ne concerne ni la PMA, ni la GPA. Cette majorité et le Gouvernement se sont engagés à ne pas régulariser la GPA. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Monsieur Goasguen, vous auriez pu aussi préciser, parce que vous le savez, et mieux que moi d'ailleurs, que la circulaire peut certainement entraîner une interprétation et une application…

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…mais que c'est le moins important des documents dans notre hiérarchie normative. Cette circulaire ne remet en cause ni l'article 16-7 du code civil ni tout ce qui interdit la GPA dans notre pays. Elle vise uniquement, non à traiter de filiation ou d'état civil,…

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…mais à rappeler le droit qui s'applique aujourd'hui pour l'obtention d'un certificat de nationalité. Elle n'ouvre ni naturalisation ni régularisation d'enfants, elle rappelle uniquement les règles dans lesquelles on obtient un certificat de nationalité.

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La parole est à M. Xavier Breton, pour un rappel au règlement.

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Il concerne toujours le déroulement de nos débats.

J'entends la majorité, et notamment les socialistes, expliquer que tout le monde est contre la gestation pour autrui. Je voudrais simplement rappeler les débats qui ont eu lieu sur les lois de bioéthique de l'année dernière. Ce n'est pas vieux : 2011 et 2012.

M. Mamère et M. de Rugy avaient déposé un amendement visant à légaliser, en l'encadrant, la gestation pour autrui.

Pour M. Jean-Louis Touraine, la question de la GPA n'a pas été inventée avec les progrès techniques et médicaux. C'est, disait-il, « une question ancienne qui recueillira une approbation à l'avenir, je n'en ai aucun doute. La question est de savoir si la société française est prête à faire cette avancée aujourd'hui ou si elle entend différer cette évolution ».

Pour Patrick Bloche, il était important que nous ayons ces discussions. Et il poursuivait ainsi : « Il eût été inconcevable, au moment où nous révisons des lois de bioéthique, que le débat ait lieu partout dans la société et que nous ne l'abordions pas dans cet hémicycle. Par ailleurs, personne ne peut le nier, la GPA fait aujourd'hui l'objet d'une demande sociale forte correspondant à une évolution sans précédent des modèles et cadres parentaux. La Haute assemblée a d'ailleurs été amenée à déposer, venant tant des rangs de la majorité que de ceux de l'opposition, une proposition de loi dont le seul inconvénient de mon point de vue est de limiter l'accès à la GPA aux couples de sexe différent, créant par là même une discrimination ». Il était donc lui-même pour la GPA.

Je finirai par les propos de Mme Filippetti, aujourd'hui membre du Gouvernement : « Il me semble extrêmement important que nous puissions ce soir, en 2011, débattre de la gestation pour autrui. Il faudra sans doute encore du temps, malheureusement pour les couples qui ont déjà eu recours à ces techniques à l'étranger et pour ceux qui aimeraient y avoir accès en France dès maintenant, pour que ces techniques soient autorisées par la loi française, mais je pense que ce temps viendra parce que cette évolution est nécessaire et souhaitable ».

Vous masquez aujourd'hui vos opinions, qui s'étaient exprimées lors de la discussion des lois de bioéthique. Il n'y a pas du tout d'unanimité des socialistes contre la gestation pour autrui, bien au contraire. C'est une manoeuvre masquée, que la circulaire de Mme Taubira vient de démasquer. (Applaudissements sur de très nombreux bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Jean-Yves Le Bouillonnec, pour un rappel au règlement.

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C'est encore un rappel au règlement sur l'organisation de nos débats.

Je voulais rappeler à mes collègues les conditions dans lesquelles ce débat a déjà été abordé par la commission des lois, le procès-verbal faisant foi. J'ai en effet été outré que certains d'entre eux laissent entendre que nous n'avions pas abordé ce sujet…

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…et que la garde des sceaux n'avait pas évoqué une prochaine circulaire.

Notre commission a examiné des amendements, notamment ceux de M. Bompard, qui tendaient à confirmer que la GPA est prohibée dans telle et telle situation. J'ai moi-même répondu que l'amendement était superfétatoire, que l'interdiction de la GPA ne souffrait pas d'exception et que des sanctions pénales étaient prévues pour les contrevenants : commencer à énumérer les catégories de population auxquelles s'applique cette interdiction ne ferait qu'en affaiblir le caractère absolu. La garde des sceaux a repris cet argumentaire et confirmé le caractère absolu et d'ordre public de la prohibition de la GPA. M. Devedjian et M. de Courson ont prolongé cette réflexion.

À l'occasion de l'examen des amendements de M. Coronado, qui visent à donner un état civil aux enfants dont la situation a été évoquée tout à l'heure, la garde des sceaux a répondu de manière extrêmement claire : « Si ces enfants sont Français, ils sont de filiation française, personne ne peut le contester, et si leur état civil produit des effets, dans les faits, les enfants concernés rencontrent parfois des difficultés quand on demande que leur soit accordé un certificat de nationalité française. Nous avons, en conséquence, donné des consignes. J'ai fait préparer une circulaire qui doit être adressée de façon imminente aux tribunaux d'instance afin de faciliter la délivrance de ces certificats, aucun élément de droit ne justifiant qu'elle soit refusée à ces enfants qui sont français. »

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Mme la garde des sceaux nous a apporté ces précisions l'autre jour et la suite du débat avait acté cet enjeu, cette problématique et cette éventualité.

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J'ai ainsi rappelé le travail de la commission pour nos collègues qui semblent avoir oublié la matière de nos échanges.

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La parole est à M. Laurent Wauquiez, pour un rappel au règlement.

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Puisque nous parlons de la circulaire, le mieux est de la lire.

Vous nous dites que le Gouvernement est très attentif au fait qu'il y a une interdiction d'ordre public du recours à la GPA. Vous nous dites que des sanctions pénales s'appliquent à toute personne ayant recours à la GPA. Je prends votre circulaire, et là, quel contraste !

« L'attention de la Chancellerie a été appelée sur les conditions de délivrance des certificats de nationalité française aux enfants nés à l'étranger de Français. Lorsqu'il apparaît qu'il a été fait recours à une convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui – on s'attendrait à ce que, dans la foulée, soient rappelés l'interdiction absolue de la marchandisation du corps féminin et les principes de notre droit public et de l'ordre public français mais non, c'est tout le contraire –, vous veillerez alors à ce qu'il soit fait droit à celle-ci dès lors que le lien de filiation avec un Français résulte d'un acte civil étranger. J'appelle votre attention sur le fait que le seul soupçon du recours à une telle convention conclue à l'étranger ne peut suffire à opposer un refus aux demandes de CNF. »

C'est froid, c'est juridique, mais cela traduit extrêmement bien la réalité de votre approche. Il n'y a rien dans votre circulaire qui protège le corps féminin, rien qui rappelle l'interdiction de recourir à la GPA, rien qui rappelle nos principes d'éthique. Sortant à ce moment de nos débats, elle montre clairement le lien qui est établi par la garde des sceaux et le Gouvernement entre, d'un côté, la loi sur le mariage et l'adoption et, de l'autre, l'ensemble qui constitue votre projet de société, comprenant bien entendu la procréation médicalement assistée et la gestation pour autrui.

Il y a une seule manière de dissiper l'ambiguïté, c'est que vous rappeliez vous-même clairement et simplement, par le biais d'un amendement à ce texte, que la gestation pour autrui est parfaitement interdite en droit français.

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C'est la seule chose que nous sommes en droit d'attendre. (Applaudissements sur de très nombreux bancs du groupe UMP.)

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La parole est à M. Alain Claeys, pour un rappel au règlement.

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Je voudrais m'adresser à mes collègues de l'opposition.

Le Président de la République a pris un engagement, le Gouvernement propose un projet de loi.

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Il y a d'autres engagements qui n'ont pas été très respectés !

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J'écoute les débats depuis le début, je vous demande donc la même correction à mon égard.

Le Premier ministre présente un projet de loi qui traduit scrupuleusement l'engagement du Président de la République : mariage pour tous et adoption. Je comprends parfaitement que vous puissiez être contre ce projet de loi, mais discutez sur le fond,…

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…c'est-à-dire sur ces deux points : le mariage pour tous et l'adoption Si le Président de la République ou le Premier ministre avaient voulu aborder d'autres sujets, la PMA ou la gestation pour autrui, ils l'auraient fait dans le projet de loi.

J'ai présidé la mission sur la bioéthique, et j'ai vu comment les uns et les autres se comportaient. Qu'on soit pour ou contre, on ne triche pas.

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Nous affirmons aujourd'hui que le Gouvernement et le groupe socialiste, après des débats il y a deux ans, sont contre la gestation pour autrui.

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Ils ont présenté des arguments, j'en ai moi-même présenté. Il y a eu des discussions.

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Nous considérons que la gestation pour autrui est une marchandisation du corps de la femme…

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…et que tout progrès scientifique n'est pas mécaniquement applicable à la société.

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Nous en avons débattu et l'interdiction est dans la loi, assortie de sanctions. Cette loi s'impose à tous. La circulaire publiée par Mme la garde des sceaux ne la remet absolument pas en cause.

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Elle ne fait que préserver le droit de l'enfant. Vous n'êtes pas d'accord, vous critiquez, mais débattons au moins de choses claires.

Dernier point : pouvez-vous reprocher au Président de la République d'avoir saisi le Comité national d'éthique sur la PMA ?

Plusieurs députés du groupe UMP. Trois jours avant !

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Vous-même avez eu la même approche. Nous sommes dans une démarche de clarté. Si vous voulez que nous nous respections les uns les autres, ne pensez pas un seul instant que, sur des sujets comme celui-là, on puisse tricher ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.)

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Je souhaite revenir sur les propos de M. Claeys et de M. Le Bouillonnec. Nous avons, c'est vrai, entendu Mme la garde des sceaux en commission des lois le 16 janvier.

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Elle s'est exprimée, les procès verbaux sont là pour en attester, mais, je suis désolé, il y a bien un avant et un après 25 janvier. La circulaire est là. La commission des lois s'est réunie le 16 janvier. Ne faisons pas d'anachronismes.

Peu importe qu'il s'agisse, dans la hiérarchie des normes, d'une circulaire, que certains considèrent comme un acte purement administratif : la réalité politique, la réalité vraie, si j'ose dire, c'est la reconnaissance implicite de la gestation pour autrui.

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C'est une incitation à frauder : « Allez à l'étranger, organisez le tourisme reproductif, revenez : on vous donnera le certificat de nationalité. » (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.) C'est purement et simplement cela !

Il y a d'ailleurs beaucoup de cynisme de la part du Gouvernement à permettre, par ce certificat, la gestation pour autrui à l'étranger. Il devient ainsi possible de se rendre à l'étranger et de recourir avec une femme étrangère à la GPA : c'est moins grave que si cela se passait en France, et ce sera tout de même légalisé, par le certificat. Cela implique, d'une certaine façon, que la femme étrangère a moins de valeur que la femme française (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI. – Vives exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP), et je trouve cela particulièrement honteux !

Un député du groupe SRC. Honte à vous !

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Après le tourisme de transplantation, nous voilà incités – il faut le dire avec force – au tourisme reproductif. Telle est la société à laquelle on nous prépare ; il faut le dénoncer ! (Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste, GDR et RRDP.) Vous avez un moyen, madame la garde des sceaux, de témoigner de votre bonne foi, c'est de retirer cette circulaire !

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La parole est à M. Patrick Bloche, pour un dernier rappel au règlement – sinon, ce serait un détournement de la procédure.

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Je ne souhaitais pas intervenir dans ces rappels au règlement successifs, partis d'un premier rappel au règlement de M. Jacob. Celui-ci a employé les termes de « Parlement humilié », alors que nous sommes majoritairement si honorés, si fiers de voter un projet de loi qui permettra à notre pays de franchir une étape décisive sur le chemin de l'égalité des droits. Un Parlement honoré, c'est aussi un Parlement qui légifère dans la clarté.

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Cette clarté, c'est celle qu'a posée le Gouvernement en nous proposant ce projet de loi visant à ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de même sexe.

Devant intervenir dans peu de temps dans la discussion générale, je n'aurais pas pris maintenant le micro si je n'avais été interpellé par M. Breton, qui a rappelé – et c'est son droit puisque mes propos étaient publics – ma position sur la gestation pour autrui. Je précise que c'est une position minoritaire au sein du parti socialiste et du groupe SRC.

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Pour poursuivre l'objectif de lutte contre la marchandisation du corps des femmes qui nous rassemble, ma position – je l'assume toujours en 2013, comme je l'ai assumée dans l'hémicycle en 2011 –, c'est une légalisation très encadrée, plutôt qu'une interdiction qui ne regarde pas ce qui se passe au-delà de nos frontières.

Si j'interviens maintenant, c'est qu'en prenant la parole dans la discussion générale je n'évoquerai pas la gestation pour autrui (Exclamations sur les bancs du groupe UMP), car elle est totalement étrangère au débat qui nous réunit aujourd'hui.

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Et pourquoi, chers collègues ? Tout simplement parce que le projet de loi vise à ouvrir le mariage et l'adoption à tous les couples, c'est-à-dire à donner les droits des couples hétérosexuels aux couples homosexuels, et que la gestation pour autrui n'a rien à voir.

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Elle est, vous le savez, interdite en France pour tous les couples, qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SRC et écologiste.)

Le projet de loi nous rassemblant aujourd'hui, qui vise à faire tomber des discriminations, à placer sur un même niveau les droits des couples hétérosexuels et homosexuels, ne concerne en rien la gestation pour autrui. C'est la raison pour laquelle vous êtes hors sujet, et c'est pourquoi, dans ce débat, vous maniez la confusion et l'amalgame.

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Ce n'est pas nous qui avons rédigé la circulaire !

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Enfin, je me permets de vous signaler qu'en tant que législateurs nous sommes avant tout sollicités, pour évoluer éventuellement sur la gestation pour autrui, par des couples hétérosexuels qui souhaitent avoir des enfants. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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J'ai laissé les dix rappels au règlement avoir lieu car je souhaite réellement que nous puissions poursuivre ce débat qui honore l'Assemblée.

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À voir le travail accompli en commission, les interventions de la majorité et de l'opposition, celles qui ont lieu ici depuis hier, que ce soient celles du Gouvernement ou celles des députés, de la majorité comme de l'opposition, ce débat nous honore. Même s'il y a de l'ambiance : mais qui souhaiterait une démocratie aseptisée ? Des arguments sont échangés, des réponses seront apportées. Nous avons encore toute la discussion générale pour avancer dans les échanges d'arguments entre les uns et les autres.

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Voilà pourquoi je donne à présent la parole, dans la discussion générale, à M. Daniel Fasquelle.

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Madame la garde des sceaux, alors que les débats s'ouvrent dans notre enceinte sur le projet de loi ouvrant le mariage à deux personnes de même sexe, permettez-moi de m'interroger sur vos intentions. On nous a présenté au départ un texte sur le mariage et l'adoption : pas de procréation médicalement assistée, et jamais, au grand jamais, il ne saurait être question de gestation pour autrui, qui est, comme le dit fort justement Marisol Touraine, ministre de la santé, la marchandisation pure et simple du corps humain.

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Seulement voilà, c'est la vertu de ce débat, petit à petit les masques tombent. Il y a eu tout d'abord la tentative d'une partie du groupe socialiste d'introduire la PMA dans le texte ; s'il a été fait machine arrière, tout le monde a compris que c'est pour y revenir très bientôt, dans un texte sur la famille, qui nous sera, dit-on, soumis au printemps.

Il y a aussi, madame la garde des sceaux, votre circulaire de vendredi dernier sur la gestation pour autrui.

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Incroyable circulaire ! Je veux y revenir, et d'abord sur la méthode. En tant que parlementaires, nous votons la loi mais nous avons aussi à contrôler l'action du Gouvernement. Vous avez pris la parole hier à plusieurs reprises : à aucun moment vous n'avez mentionné cette circulaire. C'est du mépris à l'égard de notre institution. Comment ouvrir un débat pareil sans faire mention de cette circulaire ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

De même, ce document a été signé vendredi, au moment où le Président de la République recevait les organisateurs de la manifestation pour tous, pour les rassurer : « Dormez tranquilles, mes enfants, Papa Hollande s'occupe de tout ! » (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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« Bien évidemment, il n'y aura pas de PMA, pas de gestation pour autrui. » Au même moment, Mme la garde des sceaux, dans son cabinet, signait une circulaire qui légalise en France la gestation pour autrui. Là aussi, quel mépris à l'égard des Français, à l'égard de ceux qui ont manifesté le 13 janvier ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP. – Exclamations sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

Je voudrais revenir également sur les engagements du Président de la République, puisqu'on nous dit que c'est en tant qu'engagement du Président que le mariage pour tous doit être mis en place.

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Ça change avec la législature précédente !

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Dans ce cas, permettez-moi de revenir sur les engagements du Président à propos de la gestation pour autrui.

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Le 27 février 2012, dans le magasin Têtu, le Président dit la chose suivante : « Je suis hostile à la GPA. » On lui demande alors s'il serait néanmoins favorable à la reconnaissance des enfants nés par GPA à l'étranger – c'est bien notre sujet et celui de la circulaire. François Hollande répond : « Vous imaginez bien que si j'ouvrais cette question-là, cela pourrait être finalement une facilité donnée à la gestation pour autrui. »

Plusieurs députés du groupe UMP. Et voilà !

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François Hollande, quand il était candidat, avait clairement dit qu'il n'était pas favorable à la légalisation de la GPA à l'étranger ; c'est pourtant ce que vous faites aujourd'hui. On voit bien qu'il y a deux poids et deux mesures : certains engagements doivent être respectés, d'autres non. On ne comprend rien à votre démarche. En tout cas, si vous voulez respecter tous les engagements de François Hollande, respectez celui-là aussi et retirez, madame la garde des sceaux, votre circulaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Je souhaite m'arrêter un instant sur le contenu de cette circulaire. Il ne faut pas mentir aux Français ni à la représentation nationale. On nous dit qu'il ne s'agit que de la délivrance d'un certificat de nationalité. Or il faut pouvoir accéder à la nationalité, et on y accède lorsque le lien de filiation est reconnu. C'est l'article 18 du code civil : « Est français l'enfant dont l'un des parents au moins est français. » Or, pour passer par le canal de l'article 18, il faut bien reconnaître cette paternité par rapport au droit français, et donc en réalité reconnaître la gestation pour autrui. Que vous le vouliez ou non, votre circulaire, c'est bien la reconnaissance de la gestation pour autrui à l'étranger.

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Ne mentez donc pas, et dites clairement les choses aux Français et à la représentation nationale !

On nous réplique encore que c'est hors sujet, que cela n'a rien à voir avec ce projet de loi. Nous sommes au contraire au coeur du sujet, car que va-t-il se passer demain ? Comme l'a dit François Hollande, la légalisation de la gestation pour autrui à l'étranger sera un encouragement à la GPA. Davantage de couples iront à l'étranger pour y recourir ; à leur retour en France, la paternité sera reconnue pour l'un d'entre eux. S'ils ne sont pas encore mariés, ils le seront, et, par l'adoption plénière, on aura créé une double filiation, et définitivement coupé le lien avec la mère naturelle. C'est ce que nous ne voulons pas et ce que vous voulez. Votre circulaire, c'est bien la légalisation de la gestation pour autrui, et, ajoutée à votre projet de loi, c'est une machine que vous mettez en marche,…

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…même si vous voulez nous faire croire le contraire.

Un pas a été franchi, avec une situation invraisemblable et de la plus grande hypocrisie. D'un côté, vous rappelez que la gestation pour autrui est interdite en France et, de l'autre, vous faites produire des effets en droit français à la GPA réalisée à l'étranger.

En conclusion, avec votre projet de loi, vous allez beaucoup trop loin ; vous méprisez les droits des enfants et des femmes ; c'est la porte ouverte à la PMA et à la gestation pour autrui. Il y a pourtant une autre voie, mais vous ne voulez pas écouter et je regrette que, ni en commission ni dans cet hémicycle, nous ne parvenions à avoir ce débat. Il y a une voie qui permet une meilleure reconnaissance des couples homosexuels : nous avons entendu leur souhait et nous avons proposé l'alliance civile. Il y a une voie qui permet de conforter les droits des enfants vivant dans des familles homoparentales. Il y a une voie moyenne…

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…entre la situation actuelle, qui n'est certes pas satisfaisante, et ce que vous proposez, qui ne l'est pas davantage. Cette voie, c'est celle de l'équilibre, de l'écoute, de la raison. Mes chers collègues, il n'est pas trop tard : empruntons cette voie ensemble ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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Madame la garde des sceaux, madame la ministre, monsieur le président, chers collègues, j'ai soutenu jusqu'à maintenant tous les projets et tous les engagements de la gauche, mais il existe aujourd'hui une profonde confusion qui m'interpelle.

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La liberté de conscience et de vote qui existe au sein de mon groupe parlementaire, le GDR, me permet d'exprimer une voix qui est celle d'un homme libre d'Outre-mer (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP) : j'en remercie mes collègues du groupe, dont les avis sont divers et très partagés sur ce texte.

Outre-mer, en revanche, la quasi-totalité de notre population est opposée à ce projet qui bouscule toutes les coutumes et toutes les valeurs sur lesquelles reposent nos sociétés ultramarines.

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Cette voix doit être entendue et comprise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.) Nous devons exprimer cette opinion de notre électorat qui ne comprend pas ce qui se passe ici et maintenant.

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Le risque est grand de plonger la population dans un profond désenchantement vis-à-vis de la politique du Gouvernement, voire de provoquer une cassure morale irrémédiable. Ce texte en effet ne donne pas une liberté supplémentaire, il fragilise au contraire le délicat édifice sur lequel se sont construites nos sociétés antillaises et guyanaise après l'abolition de l'esclavage. Il existe même, à mon sens, un risque de rupture du pacte républicain qui nous lie depuis deux siècles à la France. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

Cette question du mariage homosexuel appelle en effet de ma part des réflexions de fond. Il est nécessaire de distinguer la question de l'homosexualité de celle du mariage gay : les confondre, comme l'ont fait certains orateurs, n'est pas honnête.

L'homosexualité est une pratique qui relève de la sphère privée (« Oui ! » sur quelques bancs du groupe UMP) : c'est une réalité qu'il faut prendre en compte et qui appelle des droits et une protection de la vie privée pour ceux qui la pratiquent.

En revanche le mariage gay et l'adoption pour les couples homosexuels relèvent de la sphère publique, en ce qu'ils bouleversent la norme en vigueur, en établissant une nouvelle norme en matière de famille, de filiation et de transmission patrimoniale. Ce chemin-là, nous ne pouvons le suivre.

Peut-on véritablement parler d'un progrès et d'une nouvelle liberté ?

À l'origine, en établissant le mariage comme institution, la société a donné un cadre juridique à une donnée naturelle : l'union d'un homme et d'une femme en vue de la procréation d'un enfant. Or, à l'évidence, il ne peut en être ainsi avec le mariage gay. Certes, aujourd'hui, le mariage est plus un « mariage-sentiment » qu'un « mariage-procréation », comme il l'était autrefois : l'enfant n'est plus la finalité du mariage, si bien que des personnes hors mariage, voire des couples stériles, peuvent avoir envie d'enfant.

La question qui se pose est donc plutôt : le sentiment doit-il donc devenir le sens nouveau et unique d'un mariage qui serait ouvert à tous les hommes et à toutes les femmes, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels ?

Doit-on révolutionner ainsi le mariage en France et en Outre-mer au risque de perdre nos valeurs fondamentales ?

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Allons-nous vers cette société où l'individualisme hédoniste (Applaudissements sur certains bancs du groupe UMP) remplacera nos vieilles doctrines personnalistes et socialistes fondées sur la solidarité, la liberté et l'égalité ?

La famille, pivot de notre société depuis les Constituants et la Révolution française, depuis l'émancipation de 1848, va-t-elle, au sens littéral du terme, exploser ?

Notre responsabilité est grande devant l'Histoire.

Moi, homme issu d'un peuple opprimé, réduit en esclavage, où le système social refusait à un homme et à une femme de pouvoir avoir un enfant et se marier légitimement, où le mariage était interdit et où il a été une conquête de la liberté, j'affirme le droit à l'égalité dans la différence et non dans le même, le semblable, l'unique ! (« Bravo ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Car enfin, au nom de l'égalité et du refus des discriminations, peut-on établir une équivalence entre tous les couples ?

Au contraire, je crois que l'on ne peut mettre sur le même plan hétérosexualité et homosexualité : un homme et une femme, ce n'est pas pareil que deux hommes ou deux femmes ensemble. Établir une équivalence, une nouvelle égalité, une nouvelle norme, c'est nier la réalité, c'est rétablir une oppression en confondant genre, sexe et pratique. (« Bravo ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

C'est un diktat de la pensée contre l'humanité vitale, contre les droits de l'homme et de la femme. Refuser cette différence naturelle, c'est refuser la différence sexuée, c'est revenir sur l'oppression de la femme et de ses droits émancipés,…

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… c'est instaurer une nouvelle contrainte, car il sera interdit désormais de faire la différence entre un homme et une femme, au risque d'être discriminatoire.

Et l'enfant ? Puisque deux hommes ou deux femmes ne peuvent procréer, que va t-on faire ? Pour procréer, il faut bien un homme et une femme.

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Inéluctablement se posera la question du recours à la procréation médicale assistée…

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…car ce désir d'enfants est légitime. Toutefois, ce n'est pas le droit qui refuse aux homosexuels d'avoir un enfant, c'est la nature. Pour pallier ce problème de stérilité et d'incompatibilité, on aura recours à la PMA. Où est le progrès social ? Où la liberté nouvelle ? Comment voulez-vous qu'un homme dont les ancêtres ont été vendus et chosifiés ne soit pas inquiété par cela ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe UMP.)

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La gauche a le pouvoir dans cette assemblée, je suis un homme de gauche et c'est bien en tant que tel que je préfère l'humain et l'humanisme à ce que ce texte sous-entend. (Applaudissements sur certains bancs du groupe UMP.)

Alors qu'un tiers des hommes et des femmes d'outremer sont sous le seuil de pauvreté, que notre PIB est d'un quart inférieur à celui de l'Hexagone…

Plusieurs députés du groupe SRC. Cela n'a rien à voir !

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…et que 60 % des jeunes de moins de 25 ans sont toujours au chômage, n'y avait-il pas d'autres priorités ? (« Bravo ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe UMP.)

Que dirai-je à ce jeune Martiniquais qui, entré dans la délinquance, est sans travail, dont les parents sont aussi sans emploi, qui est sans logement et n'a pas de quoi se nourrir, qui n'a pour seule alternative que de récidiver pour pouvoir être reconduit en prison afin d'avoir enfin un toit et à manger ?

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Que lui dirai-je demain ? Que je lui ai offert, en tant que législateur, une grande liberté : non pas du travail, non pas un logement, non pas un avenir décent et un espoir de vie, mais le mariage pour tous !

À mon grand regret, mais avec ma conviction d'homme de gauche engagé et libre, je ne voterai pas ce projet (« Bravo ! » sur plusieurs bancs du groupe UMP. – De nombreux députés du groupe UMP se lèvent et applaudissent longuement) qui est attentatoire aux libertés et ne répond pas aux aspirations profondes du peuple, en particulier en Outremer.

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Vous venez de rentrer dans l'Histoire, monsieur !

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Monsieur le président, mesdames les ministres, si talentueuses, si courageuses, monsieur le ministre, si déterminé, madame et monsieur les rapporteurs, si convaincants, le 13 octobre 1999, ici même, le PACS était définitivement voté à l'issue d'un rude débat parlementaire d'une année.

Treize ans plus tard, notre assemblée est réunie pour légiférer enfin sur le mariage et l'adoption pour tous et permettre ainsi à la France, pionnière pourtant à la fin des années 1990, de rattraper un retard dont la seule cause est une décennie de pouvoir de la droite.

L'élection de François Hollande, le 6 mai dernier, a rendu enfin possible ce qui ne l'était pas, le 9 juin 2011, lorsque notre assemblée a débattu une première fois de l'ouverture du mariage à tous les couples à l'initiative de Jean-Marc Ayrault, alors président d'un groupe minoritaire.

Rappelons également qu'en 2004, à la suite de la célébration du mariage de Bègles par notre collègue Noël Mamère, Jean-Louis Debré, alors président de l'Assemblée nationale, avait pris l'initiative de créer une mission d'information sur la famille et les droits de l'enfant, qui avait remis ses conclusions en janvier 2006 – un certain nombre de nos collègues y ont d'ailleurs participé. Aussi ceux qui prétendent qu'il n'y a pas eu de débat sur le mariage pour tous sont-ils d'une mauvaise foi évidente.

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On a au moins une foi, même si elle est mauvaise !

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Hier comme aujourd'hui, force est de constater la permanence des clivages entre ceux qui veulent faire vivre la belle promesse républicaine de l'égalité et ceux pour qui il est insupportable de donner les mêmes droits à tous les couples. Je veux témoigner ici même de la sollicitation pressante dont j'avais déjà fait l'objet, en 1998, pour fermer le PACS aux couples hétérosexuels et en faire un statut spécifique réservé aux seuls couples homosexuels. C'est la même logique qui est à l'oeuvre en 2013, tant les ennemis du PACS d'hier sont les ennemis du mariage pour tous d'aujourd'hui.

Ce sont les mêmes, avec les mêmes arguments. Et s'ils parent aujourd'hui de toutes les vertus – ironie de l'Histoire – le PACS, qu'ils ont combattu souvent si violemment, leur problème demeure identique : la place du couple homosexuel dans la société française.

Comment réussir à leur ouvrir les yeux sur les réalités de cette société qui aspire à toujours plus d'égalité, de reconnaissance et d'intégration, de cette société qui sait s'enrichir de toutes les différences – notamment d'orientation sexuelle –, de cette société positive, avide d'un avenir partagé et d'un véritable vivre ensemble ?

En 2013, comment ne pas se réjouir que des enfants ne soient plus amenés à cacher leur homosexualité à leurs parents et que ceux-ci ne soient plus conduits à considérer que l'avenir de leur enfant est pour cette raison définitivement compromis ?

Comment refuser aujourd'hui de donner des droits nouveaux à certains, sans réduire les droits des autres ?

Comment ne pas constater que les nouvelles formes de parentalité ont explosé, que le progrès scientifique permet maintenant de répondre à un désir d'enfant, si facilement stigmatisé et trop rapidement opposé à l'intérêt supérieur de l'enfant, par ceux-là mêmes qui utilisent régulièrement les droits de l'enfant pour réduire les droits des femmes ?

Comment ne pas prendre la pleine mesure des évolutions des modes de vie familiaux provoquées par l'explosion du nombre des naissances hors mariage – désormais majoritaires –, par la multiplication des recompositions familiales, par le choix d'élever un enfant seul ou avec un compagnon ou une compagne du même sexe ?

Comment continuer à privilégier de manière disproportionnée la dimension biologique de la filiation, en la considérant comme une garantie de sécurité et de bonne éducation pour l'enfant ?

Cette primauté donnée au biologique conduit à justifier les conditions restrictives actuellement requises pour adopter conjointement – soit former un couple de sexe différent et marié – par la vraisemblance biologique qu'elles offrent. Peut-on toujours fonder une règle de droit sur un faux-semblant au moment même où la société aspire à davantage de transparence ?

L'intérêt de l'enfant est sans conteste le critère le plus pertinent pour faire évoluer notre droit de la famille. Il y a un demi-siècle, on imposait à des futurs parents la naissance d'enfants non désirés ; aujourd'hui, on veut continuer à interdire à des parents la naissance d'enfants désirés au prétexte que la procréation devrait rester pour l'éternité le fruit de la rencontre d'un homme et d'une femme.

C'est la raison pour laquelle, après avoir ouvert le mariage et l'adoption aux couples de même sexe, il nous reviendra, je l'espère très prochainement, d'ouvrir l'assistance médicale à la procréation à toutes les femmes.

Mes chers collègues, c'est parce qu'une majorité d'entre nous a reçu mandat de nos concitoyens de ne plus conserver dans notre droit des discriminations d'un autre temps ; c'est parce que nous considérons, comme Irène Théry, que « le mariage est une institution vivante et qu'une institution vivante ne se défend pas de façon négative et apeurée, comme une citadelle assiégée » ; c'est parce que nous sommes des citoyens européens, parce qu'il ne saurait y avoir d'exception française et que sept pays de l'Union, si semblables au nôtre, nous ont déjà montré l'exemple, que nous disons à cette tribune notre fierté, mais également notre émotion, de faire franchir à la France, avec ce beau projet de loi républicain, laïque et universaliste, une nouvelle étape décisive sur le long chemin de l'égalité des droits. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, GDR et écologiste.)

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Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, notre assemblée débute l'examen d'un projet de loi qui, comme tout sujet de société, transcende les clivages politiques. C'est la raison pour laquelle je tiens à remercier le groupe UMP et son président Christian Jacob de laisser la liberté de vote à ses membres. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Cette liberté de vote à l'UMP, nous en bénéficierons notamment avec toi, cher Benoist Apparu. Je déplore en revanche que le groupe socialiste n'ait pas jugé opportun de faire de même. (« Eh oui ! » sur de nombreux bancs du groupe UMP),…

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…tout comme je déplore, madame la garde des sceaux, que vous relanciez la question de la gestation pour autrui sans même attendre le projet de loi sur la famille annoncé pour le printemps. Même si les situations de ces enfants doivent être prises en compte, je vous demande donc à mon tour solennellement de retirer cette circulaire (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP) car le débat qui nous occupe aujourd'hui exige sérénité et apaisement. Les choses doivent être claires : la gestation pour autrui est interdite en France, pour les couples homosexuels comme pour les couples hétérosexuels. (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC.)

Mes chers collègues, revenons donc à l'ouverture du mariage et de l'adoption aux couples de même sexe, seul objet du projet de loi. Notre République, ce bien commun et précieux, n'a cessé d'étendre les libertés et les droits de ses enfants pour mieux les protéger et les émanciper. De grands progrès ont jalonné son histoire : abolition de l'esclavage, droit de vote des femmes, dépénalisation de l'homosexualité, légalisation de l'IVG, création du PACS et bien d'autres encore. En ce sens, ouvrir le mariage civil aux couples de même sexe, c'est ouvrir un nouveau territoire de liberté, c'est donner la liberté aux couples homosexuels de se marier ou de ne pas se marier, c'est accorder cette liberté de choix à tous les couples sans distinctions.

Ouvrir le mariage aux couples de même sexe, c'est aussi une nouvelle étape vers la reconnaissance pleine et entière de l'égalité entre homosexuels et hétérosexuels. Valeur universelle, valeur cardinale de notre république, l'égalité, cet idéal démocratique, sortira renforcée par le vote de ce projet de loi et, avec elle, c'est toute la République qui n'en sera que plus forte !

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En mairie, une célébration civile permettra à deux femmes ou à deux hommes de sceller leur amour devant leurs familles, leurs proches et surtout, peut-être plus encore, devant la République. Ce sera une reconnaissance tout autant sociale que symbolique, une avancée capitale en termes d'égalité.

Qui plus est, ce texte ouvrira aux couples homosexuels l'accès à un contrat assorti de droits et de devoirs, leur assurant une protection plus forte et de plus grandes responsabilités entre membres solidaires du couple, sans que cela modifie le contrat liant les couples hétérosexuels.

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Répétons-le : rien ne changera pour les couples hétérosexuels ! Rien ne changera en termes juridiques car, bien évidemment, les mariages continueront toujours de leur accorder les mêmes droits. Rien ne changera non plus quant à la conception même du mariage, car ce n'est pas au droit civil de dire le sens symbolique du mariage : de nombreux couples pourront toujours considérer le mariage, leur mariage, comme une alliance pour la vie entre un homme et une femme, dont le but premier est la procréation.

Reste que d'autres conceptions du mariage coexistent dans notre république laïque, que le divorce est légal, qu'un enfant sur deux naît hors mariage et que des milliers de couples se marient sans vouloir ou pouvoir avoir des enfants. « Pourquoi alors ne pas créer une alliance civile pour les couples de même sexe ? », me demanderont mes collègues UMP. « Justement au nom du même principe d'égalité ! », leur répondrai-je. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.) Ouvrir les mêmes droits pour tous les couples tout en créant deux unions différentes serait déroger au principe d'égalité. La République n'a pas vocation à créer des communautés mais à rassembler tous les citoyens sous les mêmes couleurs.

Plusieurs députés du groupe SRC. Très bien !

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Qu'est-ce qui pourrait donc justifier qu'on utilise des mots différents pour décrire la même chose ? Je peux comprendre la difficulté de certains de nos concitoyens à associer le mot « mariage » à l'union en mairie de deux hommes ou de deux femmes. Mais je tiens à rappeler, mes chers collègues, que le mariage civil n'est pas intangible. Il a en effet connu de nombreuses évolutions durant son histoire. Hier strictement religieux, aujourd'hui également républicain et laïque, il est une construction historique et sociale, et les évolutions qu'il a connues ont contribué à l'avancée des droits dans notre société. Jusqu'en 1965 par exemple, les femmes ne pouvaient pas travailler sans l'accord de leur mari. L'évolution du mariage civil a donc permis l'amélioration des droits des femmes. Pourquoi ne pourrait-il en être de même pour les homosexuels aujourd'hui ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

J'ajoute qu'il n'y a pas eu déstructuration de la société dans les pays qui ont ouvert, depuis des années, le mariage et l'adoption aux couples de même sexe, et ils sont nombreux : Danemark, Norvège, Suède, Pays-Bas, Belgique, Espagne, Argentine, Canada, Afrique du Sud et de nombreux États aux États-Unis.

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Il n'y a pas eu non plus déstructuration de la famille car les valeurs portées par l'institution du mariage, comme l'engagement et la solidarité, sont par essence des valeurs familiales. Ce n'est en réalité pas moins de famille mais plus de famille que nous propose ce texte. C'est la raison pour laquelle, de l'autre côté de la Manche, David Cameron et les conservateurs anglais, la droite anglaise, préparent et vont voter une législation similaire !

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Chers collègues UMP, nous qui sommes tout particulièrement attachés à la famille, moi tout comme vous, nous devrions nous réjouir que davantage de personnes revendiquent les valeurs familiales.

En fait, si l'ouverture du mariage pour les personnes de même sexe semble largement acceptée, ce qui semble faire obstacle dans les consciences à l'idée même de cette union, c'est surtout la possibilité accordée aux couples homosexuels d'adopter des enfants. Je peux comprendre, là aussi, que cela soit difficile à concevoir, même si l'adoption par les célibataires homosexuels est d'ores et déjà autorisée. Pourtant c'est une réalité : il existe aujourd'hui, dans notre pays, des dizaines de milliers de familles homoparentales. Il ne s'agit donc pas de créer de nouvelles formes de familles ni de les ériger en modèle, mais de donner à ces familles les mêmes droits et les mêmes protections qu'aux autres. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Lors d'un décès, cela conduira, par exemple, au versement d'une pension de réversion au conjoint survivant. De même, l'ouverture de l'adoption permettra de mieux protéger les enfants qui grandissent dans les familles homoparentales car ils vivent aujourd'hui dans une précarité juridique. C'est une réalité, mes chers collègues ! Ces dizaines de milliers d'enfants, qui sont tout autant que les autres les enfants de la République, doivent avoir les mêmes protections que les autres. Une telle évolution évitera notamment d'ajouter à la douleur du décès d'un parent la douleur de l'arrachement à l'autre, le conjoint survivant n'ayant actuellement pas d'existence juridique à l'égard des enfants qu'il a élevés et aimés. Loin de porter atteinte aux droits de l'enfant, j'affirme au contraire que ce texte les renforce.

Certains avancent que le droit à l'enfant va prévaloir sur le droit de l'enfant. Ce sont bien évidemment les droits de l'enfant qui en priorité doivent nous guider, et, dans ce texte, ils ne sont pas menacés. Dire le contraire, c'est affirmer que les homosexuels ne seraient pas capables d'être de bons parents. Un couple de même sexe serait-il moins apte à élever un enfant, et à en faire un adulte responsable et épanoui ? Ma réponse est non, clairement non, pas moins ni plus qu'un autre couple.

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Ce qui compte véritablement pour l'enfant, n'est-ce pas l'amour qu'on lui porte et qui lui donne la force d'affronter les difficultés du monde ?

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N'est-ce pas la transmission de valeurs qui lui permet de se repérer dans la société ? Enfin, n'est-ce pas la culture, qui lui offre un mode d'être au monde ?

J'entends aussi que I'altérité est un élément essentiel de construction psychologique de l'enfant. C'est vrai, mais elle existe aussi dans une famille homoparentale : d'une part, I'altérité sexuelle est présente dans de nombreux référents du ou des milieux socio-familiaux dans lequels l'enfant grandit ; d'autre part, I'altérité n'est pas seulement liée à la différence des sexes, elle est la différence entre soi et les autres. L'altérité ne se réduit donc pas au sexe mais n'en est qu'une composante parmi d'autres. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

Mes chers collègues, j'ai conscience que c'est un sujet complexe qui touche aux convictions profondes de chacun,…

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…qui touche à l'intime, qui touche aussi pour certains au spirituel, aux croyances. Je sais qu'il est parfois difficile de s'imaginer des réalités différentes de celles que nous connaissons habituellement.

Mais enfin, nous parlons d'amour.

Quand on assiste, comme moi qui suis maire de Coulommiers, à l'union de deux personnes qui s'aiment, on mesure la force de cette célébration. Y a-t-il moment plus heureux qu'un mariage ? Au nom de quoi peut-on priver deux personnes de ce moment unique ?

Nous parlons aussi de fraternité.

Ce texte ne propose pas moins de famille mais plus de famille : des familles seulement plus diverses, plus confiantes en elles-mêmes car enfin reconnues et respectées. Les homosexuels et les familles homoparentales n'attendent ni privilèges, ni statut d'exception ; ils souhaitent seulement être des citoyens comme les autres, des citoyens à part entière. Ce n'est pas une revendication, mes chers collègues, mais l'accomplissement d'une promesse républicaine, celle selon laquelle « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits ». Ces droits nouveaux que nous ouvrons aujourd'hui sont le signe d'une république confiante en l'avenir, d'une république fière et riche de ses valeurs, d'une république rassemblée et plus fraternelle.

Quelle société veut-on demain ? Une société plus forte car plus soucieuse d'égalité ; une société plus forte car en paix avec ses diversités et sa diversité. Nous y sommes précisément, mes chers collègues UMP, avec ce texte historique.

C'est pourquoi je le voterai. (De nombreux députés du groupe SRC, du groupe écologiste et du groupe GDR se lèvent et applaudissent longuement.)

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Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le ministre, il est des moments plus solennels que les autres. Le débat d'aujourd'hui fait partie de ces rares heures de la vie parlementaire où l'hémicycle concentre l'attention du pays en débattant d'une question de société.

Certes, madame la garde des sceaux, le sujet était mal engagé du fait de la confusion née de la volonté, un temps exprimée par le groupe socialiste, d'ajouter au texte, par simple voie d'amendement, la question si délicate de la PMA. Tout serait sans doute plus simple si la majorité avait engagé cette discussion sur des bases plus claires et plus pédagogiques.

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Tout serait plus simple, madame la garde des sceaux, si des circulaires intempestives ne venaient pas jeter le trouble sur nos débats. Comme pour la suppression de la peine de mort ou encore pour l'avortement, ces sujets sont évidemment graves et délicats parce qu'ils touchent à la vie, à l'intime. Un peu de méthode n'aurait pas nui à l'exercice.

Plusieurs réflexions, mes chers collègues, guident ma prise de position.

Premier élément de réflexion : à l'heure où l'homosexualité reste dans de très nombreux pays un délit, parfois encore puni de la peine de mort, nous, la France des droits de l'homme, avons le devoir impérieux de défendre la liberté d'être, cette liberté si longtemps vilipendée sous les coups de boutoir des extrémistes de tous horizons. Nos décisions sur ce texte, ne nous trompons pas, dépasseront nos frontières ; nous sommes regardés, écoutés et attendus comme l'a toujours été la France lorsqu'il s'est agi de faire progresser les droits de l'homme et les libertés.

Militant du parti radical, et de ce fait viscéralement attaché à la laïcité, je rejette évidemment la confusion que certains veulent créer entre le mariage religieux et le mariage civil. Oui, il existe bien deux mariages, l'un d'essence morale et l'autre d'essence civile. Si tel n'était pas le cas, pourquoi le divorce interdit par les grandes religions serait-il autorisé par le code civil ? Le premier se cale sur les prescriptions des religions, le second s'est toujours adapté, depuis Napoléon, aux évolutions de la société. C'est une nouvelle étape d'adaptation qui est devant nous, elle s'inscrit d'ailleurs dans un mouvement mondial, et refuser celui-ci ne ferait que retarder l'échéance !

Le choix offert par ce texte est également celui d'une main tendue, une main ouverte pour répondre et tenter d'apaiser tant et tant de souffrances dissimulées depuis des lustres derrière le sombre rideau de l'homophobie. N'oublions jamais que l'homophobie tue ! Prenons garde, à cet égard, à nos propos, à nos attitudes, à nos postures, à nos provocations. Derrière le théâtre de la vie politique et de ses figures imposées, n'oublions pas dans nos débats qu'il s'agit ici de la vie et de l'avenir d'hommes, de femmes et d'enfants de notre pays. Je le dis à mes amis de l'opposition : les partisans de ce texte ne sont pas des dévoyés inconscients qui ne chercheraient qu'à détruire l'organisation sociale de notre pays. Mais je le dis aussi à la majorité : les opposants à cette loi ne sont pas non plus des homophobes enragés qui seraient sourds aux réalités de la société. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP et sur les bancs du groupe UDI.) Pour redonner de la respectabilité au débat politique, respectons-nous ! Respectons nos différences et prenons garde, oui prenons garde, de ne pas raviver par un mot, une phrase, la haine de l'autre, la chasse aux différences et son cortège de violences si promptes à renaître dans ces périodes de crise et d'angoisse.

Je veux aussi vous parler de ces 50 000 enfants qui vivent dans des familles dites homoparentales. On peut refuser de voir cette réalité, on peut raisonner en pure statistique pour la minimiser. Mais comment, sous prétexte que l'on désapprouverait le choix de vie des parents, refuser à ces 50 000 enfants la protection de la République ? C'est bien ce que nous propose ce texte.

N'oublions pas que les droits des enfants, auxquels nous sommes tous très attachés, passent d'abord et avant tout par les droits des parents. Oui, le mariage offre à ces enfants une vraie protection que nous n'avons pas le droit de leur refuser.

Je partage aussi mon engagement avec le Premier ministre britannique, le conservateur David Cameron, qui a pris des positions très courageuses sur ce sujet. Comme lui, je pense que faire couple, fonder une famille, être protégé par le code civil, c'est un bouclier particulièrement précieux dans une société en crise.

Si l'on est persuadé que le mariage n'est pas un simple contrat, si l'on croit au mariage comme institution, alors pourquoi chercher à tout prix à en limiter la portée et la protection ? Ce texte permettra de donner à l'institution du mariage plus de force et de puissance. C'est ce qu'il faut avoir à l'esprit.

Regardons ce qui s'est passé en dehors de nos frontières, par exemple en Espagne. Sept ans après, la société espagnole, si proche de la nôtre, n'est ni déstructurée ni renversée. Pourquoi en irait-il différemment en France ?

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N'ayons pas peur d'offrir plus de protection à celles et ceux qui en ont si cruellement manqué.

Parce que le mandat qui nous est donné par nos électeurs n'est pas un mandat impératif, parce que l'honneur d'un parlementaire est d'agir en conscience et non pas en fonction des pressions, fussent-elles celles d'une partie de ses électeurs, parce que l'UDI m'offre – et je veux en remercier ici mes collègues – cette précieuse liberté de choix, oui, en mon âme et conscience j'approuverai ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC, écologiste et GDR.)

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Monsieur le président, madame la garde des sceaux, madame la ministre, monsieur le ministre, chers collègues, on se plaît beaucoup ici à répéter notre devise républicaine mais on oublie parfois que la réalité de ces trois mots n'est pas forcément la même pour tout le monde.

La route vers l'égalité notamment a toujours été longue et c'est pour cela que je suis heureux de défendre devant vous ce projet de loi qui y participe.

Nous allons tout simplement, au cours de ces prochains jours, permettre à des couples, des familles et des enfants, d'être reconnus pour ce qu'ils sont et ainsi d'être mieux protégés. Cela peut paraître simple, mais cette marche vers l'égalité s'inscrit dans une histoire douloureuse et qui dépasse la seule question du droit.

À ce moment de nos débats, je veux penser à celles et ceux qui nous ont précédés. À Robert Badinter et Gisèle Halimi qui, il n'y a que trente ans, ont permis la dépénalisation de l'homosexualité en rappelant alors, par la voix du garde des sceaux, que le moment était « venu, pour l'Assemblée, d'en finir avec ces discriminations, comme avec toutes les autres qui subsistent encore dans notre société, car elles sont indignes de la France. »

Je pense aussi à celles et ceux qui ont permis, en 1990, il n'y a que vingt ans, de rayer l'homosexualité de la liste des maladies mentales de l'Organisation mondiale de la santé. À celles et ceux qui, autour Patrick Bloche, ont permis à notre société de donner une première protection aux couples de même sexe grâce au vote du PACS.

Je veux aussi et surtout penser à celles et ceux qui attendent ce texte. Ces hommes et ces femmes, appartenant à des générations qui nous ont précédés et qui nous écrivent pour dire, parfois pour la première fois, qu'ils ont connu l'internement psychiatrique à cause de leur homosexualité.

Je pense à ces familles qui existent, à ces enfants qui grandissent entourés de l'amour de leurs parents au sein de couples de même sexe. À ces familles que nous allons sécuriser et protéger en ouvrant l'adoption et en permettant de garantir ce lien parental entre ces enfants et ceux qui les élèvent et qui les aiment. D'ailleurs ce sont ces familles qui nous montrent combien la filiation et la parentalité sont avant tout sociales et humaines. Ces familles s'affranchissent depuis bien longtemps des règles de droit mais nous appellent à les reconnaître par la loi, sans qu'une hiérarchie de valeur soit établie entre elles.

Je pense aussi à ces femmes contraintes – pour encore quelque temps malheureusement – à traverser nos frontières pour aller au bout de leur projet parental. C'est aussi notre responsabilité d'aller vite pour autoriser et encadrer sur notre territoire l'accès à la PMA et ainsi reconnaître et sécuriser chaque étape de la filiation.

Je pense aussi à ces hommes et à ces femmes qui ont peur car, aujourd'hui encore, certains s'autorisent dans la rue, au travail ou à la maison à les considérer comme inférieurs du fait de leur sexualité. Le rôle des institutions est aussi d'envoyer des messages et l'adoption ce texte en est un pour lutter contre l'homophobie.

Je pense aussi à ces parents d'enfants homosexuels, que nous avons rencontrés. Ils nous interpellent et nous disent qu'eux aussi veulent l'égalité et qu'ils n'acceptent plus qu'un de leurs enfants ait moins de droits, soit moins bien considéré dans sa citoyenneté que ses frères et soeurs.

Je pense enfin et bien évidemment aux adolescents qui découvrent leur homosexualité. Ces adolescents sont meurtris par la haine de certains propos et parfois plus encore par la réaction de leurs proches au sein même de leur famille. Nous avons le devoir impératif de veiller sur eux et de les protéger. C'est pour cela qu'il faut mesurer nos propos et penser à celles et ceux qu'ils peuvent blesser.

Ils sont beaucoup trop à en être encore malheureux alors qu'ils ont déjà à affronter les regards en biais, les insultes furtives et l'isolement. Ils le font seuls, sans recours ni choix, et les associations savent mieux que quiconque le désespoir qui peut en naître. L'adoption de ce texte sera aussi pour eux un moyen de vivre mieux, de vivre pleinement leur vie sans que leur différence soit une cause de discrimination mais simplement un élément de leur identité.

À tous ceux-là, je veux dire que nous sommes fiers de voter cette loi, heureux de faire progresser l'égalité et de leur permettre un peu plus de vivre comme ils sont, sans rien avoir à craindre, sans avoir à justifier un choix qui n'en a jamais été un.

Nous votons cette loi avec quelques convictions, renforcées par le travail mené en commission et la qualité du débat permis et organisé par notre rapporteur.

La première conviction, c'est que cette loi n'est qu'une étape supplémentaire vers plus d'égalité et que nous devons encore travailler pour que notre droit épouse totalement la réalité de la société en matière de filiation ou d'exercice de l'autorité parentale.

La seconde conviction, c'est que la société ne nous a pas attendus et qu'elle ne nous attendra pas. Ces couples existent, ces familles existent, ces enfants grandissent. Ce projet de loi ne va rien créer mais il va sécuriser et encadrer pour mieux les protéger.

La troisième conviction, c'est que seule l'égalité des droits permet le droit à l'indifférence pour que ces couples et ces familles n'aient plus à connaître un regard au mieux désapprobateur et au pire de rejet.

Je terminerai par une dernière conviction, née des auditions, des rencontres et des débats. C'est une conviction plus personnelle à l'adresse de celles et ceux qui, ici ou ailleurs dans les médias ou dans la rue, s'opposent parfois violemment à ce texte : si tous les combats politiques sont respectables, celui-ci est déjà perdu. Vous avez déjà perdu car la société a déjà changé et ne nous a pas attendus.

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Vous avez perdu parce que l'égalité finit toujours par l'emporter sur la domination et parce que plus personne n'acceptera d'être discriminé pour ses origines, sa couleur de peau, son sexe ou son orientation sexuelle.

Et surtout vous avez vraiment perdu parce que pas un mot, pas une insulte, pas un soupçon d'intolérance ne pourra abîmer ni même écorner l'amour que se portent ces couples, et encore moins l'amour qu'ils portent à leurs enfants. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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Madame la ministre, mes chers collègues, après la discussion très préoccupante que nous venons d'avoir sur la gestation pour autrui (Exclamations sur de nombreux bancs du groupe SRC)…

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… je voudrais vous livrer quelques réflexions personnelles sur le texte que vous nous soumettez, le remettre en perspective et apporter aussi quelques réponses aux orateurs précédents.

Pour dire, comme beaucoup l'ont fait, les choses avec retenue : les avocats du texte ne sont évidemment pas les fossoyeurs révolutionnaires de la famille, de même que les adversaires du projet ne sont pas les réactionnaires homophobes, bornés ou hypocrites que certains ont décrits.

Madame la garde des sceaux, vous avez parlé d'un changement de civilisation. Ayons donc cela à l'esprit.

Nous avons une double responsabilité : nous héritons notre monde de nos parents et, en même temps, nous l'empruntons à nos enfants. C'est avec la claire conscience de cette double responsabilité que je voudrais revenir sur le fond du débat.

Ce mariage, mes chers collègues, est mal nommé. Toute femme, tout homme, quelles que soient ses orientations sexuelles, peut se marier. En ce sens, le mariage tel qu'il existe est d'ores et déjà un mariage pour tous. Cependant, on ne peut pas se marier avec n'importe qui. On ne peut pas se marier avec sa mère, son père, ses frères ou ses soeurs. (Protestations sur les bancs du groupe SRC.)

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On ne peut pas davantage épouser une femme ou un homme déjà mariés, un mineur, et pas non plus une personne du même sexe.

Cette liste souligne que, contrairement à ce que j'ai entendu dire, le mariage n'est pas un contrat d'ordre privé entre individus libres et égaux ; il obéit à des règles d'ordre public qui expriment la conception que se fait la société d'un intérêt qui précisément transcende les individus. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Ce qui est strictement d'ordre privé, c'est la vie sentimentale et sexuelle d'adultes majeurs et consentants. Cette vie sentimentale et sexuelle n'a pas à exposer des adultes à quelque discrimination que ce soit. Et nous sommes tous d'accord dans cet hémicycle pour dire que la France a heureusement aboli depuis plus de trente ans les mesures discriminatoires ou répressives à l'égard des homosexuels.

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En revanche, la loi peut et doit dire les règles du mariage. C'est ma première observation : non, il ne suffit pas que deux personnes s'aiment pour que le mariage soit un droit.

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Le mariage n'est pas seulement la sanctification juridique d'une union privée, c'est une institution de la société. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Pourquoi la loi se mêle-t-elle du mariage ? Parce que celui-ci ne détermine pas seulement les conditions de l'union entre deux individus, il organise aussi, et j'allais dire surtout, les conditions de la filiation. C'est ma seconde observation.

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Le mariage est l'institution qui permet de fonder en droit la filiation, comme en témoignent par exemple la présomption de paternité ou la remise d'un livret de famille le jour de la cérémonie. Je parle de la filiation biologique ; je reviendrai ensuite sur l'adoption.

On m'objectera que nous voyons se multiplier les mariages ou remariages de couples qui ne peuvent pas enfanter parce qu'ils sont trop âgés et, inversement, les naissances hors mariage. Ce sont, à mes yeux, de mauvais arguments.

D'abord parce que la loi ne fixe pas ici le cadre du nécessaire mais celui du possible. Elle ne dit pas que tout couple marié doit enfanter ni que tout enfantement doit se faire dans le cadre du mariage. Elle fixe un lieu central et référent, un cadre général des conditions de possibilité de la filiation à laquelle il est bien sûr possible de faire exception.

Mais mon objection plus fondamentale est d'une autre nature. Que ce soit dans le cadre du mariage ou hors du cadre du mariage, il existe un socle commun du droit français : la filiation est d'abord biologique. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

Dans le mariage ou en dehors, vous ne pouvez déclarer une filiation que si vous êtes effectivement le père ou la mère de l'enfant.

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Preuve a contrario : l'enfant peut engager une procédure de reconnaissance de paternité fondée sur la biologie. Le mariage présente cet avantage principal, par la présomption de paternité, qu'il organise ipso facto la reconnaissance juridique de la filiation biologique.

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Nous sommes là au coeur de la question qui nous est posée. Notre droit de la filiation inscrit l'enfant dans cette loi imprescriptible de l'humanité selon laquelle la différence des générations naît de la différence des sexes.

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Lier l'engendrement et la filiation, ce n'est pas une loi de nature mais, tout au contraire, une loi de culture.

Tout cela est dépassé, nous dit-on. Ce modèle de la famille n'est en rien universel mais judéo-chrétien sur le plan historique et occidental sur le plan géographique. Il y a toutes sortes d'autres modèles, et d'autres sociétés avant les nôtres ont pleinement accepté l'homosexualité.

Bien sûr, il existe de nombreuses modalités de la famille dans l'histoire et dans le monde.

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Bien sûr, il a existé des civilisations presque aussi tolérantes que la nôtre à l'égard de l'homosexualité. Mais elles n'acceptaient pas le mariage entre personnes du même sexe car aucune n'a cherché à nier l'altérité des sexes dans l'origine de la filiation. C'est cela qui est universel.

Prenez l'exemple de la Rome antique, si tolérante à l'homosexualité. Comme le rappelle le grand historien Paul Veyne, on se gardait bien d'y confondre l'ordre des relations sentimentales ou sexuelles et celui des rapports conjugaux.

C'est bien la question posée par le projet de loi. Souhaitons-nous modifier ce principe essentiel du mariage qui lui donne son sens depuis toujours : fonder la filiation sur la différence des sexes ? (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.) C'est ce sujet-là qui est au coeur de tous nos débats.

D'où ma troisième observation qui a trait à l'adoption. J'ai dit tout à l'heure que le principe de base de nos sociétés était la filiation biologique. Il y a bien sûr une exception de taille : l'adoption plénière. Cette exception, si elle distingue absolument la parenté biologique de la parenté juridique, vise à répondre à des cas difficiles, ceux des enfants orphelins ou abandonnés. Elle cherche à réparer l'infortune du destin dans l'intérêt de l'enfant.

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Certes, cette adoption plénière – qui est d'ailleurs une singularité française – efface la filiation biologique mais, jusqu'à l'actuel projet de loi, elle n'effaçait pas le principe d'un engendrement par la différence des sexes. Seuls pouvaient adopter des couples mariés ou des célibataires, de telle sorte que, soit l'on reconstituait l'altérité sexuelle des parents, soit on s'interdisait toute fiction. En aucun cas, on ne créait cette chimère d'un engendrement par deux personnes du même sexe.

Pourquoi faudrait-il bouleverser cet ordre essentiel ?

Parce que des couples homosexuels le demandent et qu'ils ont le droit à l'égalité, nous dit-on. Je rappelle d'abord que cette demande n'est pas le fait de tous les couples homosexuels. Loin de là !

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Et surtout, ce n'est pas une raison suffisante. Assurer l'égalité des droits entre toutes les femmes et tous les hommes, quelles que soient leurs orientations sexuelles, est un impératif que je fais pleinement mien. Parce qu'il est tout simplement celui du progrès de l'humanité.

Trop souvent les personnes homosexuelles sont encore victimes de discriminations injustes ou d'un manque de considération insupportable dans notre société. Mais l'impératif d'égalité ne passe pas nécessairement par la transformation radicale de nos institutions sociales.

Ce n'est pas parce qu'un groupe de la population, si respectable soit-il, demande une réforme juridique radicale qu'elle doit lui être nécessairement accordée.

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Il faut mettre en balance cette modification de la situation de quelques-uns avec l'effet qu'elle produit sur l'ensemble de la société.

En second lieu, une personne homosexuelle peut enfanter et peut adopter. Oui, dira-t-on, mais alors le conjoint n'est pas reconnu comme parent par l'état civil. Mais je veux rappeler qu'il n'y a là rien de discriminatoire. C'est déjà le cas des concubins hétérosexuels en matière d'adoption. C'est celui des beaux-parents hétérosexuels dans les familles recomposées. Notre société accepte donc depuis longtemps de distinguer, le cas échéant, les parents juridiques des personnes qui s'investissent dans l'éducation. Peut-être faut-il faire une place dans notre droit à cette mutation. J'aurais aimé que ce sujet soit abordé dans le cadre de votre projet de loi.

Est-il d'ailleurs besoin de passer par la voie du mariage ? Non. En prenant en considération l'intérêt de l'enfant, il suffirait de mieux reconnaître des droits et surtout des devoirs à ce que certains appellent à juste titre « l'adulte qui compte », un adulte engagé dans l'éducation de l'enfant et qui a développé des liens affectifs forts avec lui.

Je résume mon propos : premièrement, le mariage est l'institution centrale qui organise la filiation ; deuxièmement, qu'elle soit biologique ou adoptive, cette filiation, dans nos sociétés, et dans toutes les sociétés qui nous ont précédés même lorsqu'elles acceptaient parfaitement l'homosexualité, est fondée sur la différence des sexes ; troisièmement, bouleverser cet ordre essentiel pour répondre aux attentes d'une petite partie de la population, sans en avoir pleinement étudié les conséquences à long terme, est extraordinairement aventureux ; quatrièmement, cela l'est d'autant plus que, dans notre société qui doit accepter pleinement le droit des homosexuels à vivre librement leur sexualité, à vivre en couple, à élever leurs enfants, des accommodements raisonnables peuvent régler les situations de fait sans qu'il soit nécessaire d'en passer par une mutation aussi radicale. Voilà les enjeux de ce débat.

S'arracher aux préjugés, marcher vers l'égalité, élever chacun à toujours plus de dignité : qui ne reprendrait à son compte un tel programme ?

Mais nous avons appris aussi, depuis un siècle au moins, à nous méfier d'une conception du progrès qui détruit parfois ce qu'elle prétend protéger. C'est vrai pour la nature, c'est vrai pour la culture, je veux dire pour les institutions.

Et pour conclure, je voudrais parler au nom des générations à venir (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

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Les générations actuelles, c'est déjà bien.

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Elles sont les premières concernées par ce projet. Car le paradoxe est là : sans doute de bonne foi, au nom de l'égalité entre les adultes, le Gouvernement s'apprête à créer une inégalité profonde entre les enfants. Certains se verront reconnaître le droit d'avoir un père et une mère. D'autres se verront privés de ce droit par la loi, jusque dans l'état civil. Cette injustice faite aux enfants, le Président de la République va-t-il l'assumer ? Ou va-t-il continuer de la dissimuler aux Français, en minimisant la question de l'adoption, en reportant au printemps le débat sur la procréation médicalement assistée, en avançant masqué sur la question des mères porteuses, comme le montre la circulaire dont nous avons parlé tout à l'heure ? Je veux le dire ici, cette circulaire est pour nous extrêmement troublante et les réponses qui nous ont été données ne sont en rien satisfaisantes.

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Jusqu'à présent, notre droit reconnaissait que l'absence de père ou de mère était un manque pour l'enfant. Aujourd'hui, la majorité propose d'institutionnaliser a priori cette absence.

Elle prétend affirmer dans notre droit que cette différence fondamentale n'a pas la moindre importance dans l'éducation de l'enfant. Quel paradoxe au moment où nous nous battons pour la parité dans tous les autres domaines !

Oui, garantissons des droits pour les couples de même sexe qui s'engagent dans la durée. Oui, reconnaissons des droits et des devoirs pour « l'adulte qui compte ». Oui, accompagnons les familles pour que les enfants soient protégés en toutes circonstances. Mais de grâce, commençons par défendre l'intérêt de l'enfant avant nos désirs d'adultes. Ne méprisons pas les droits du plus fragile. Ne l'oublions jamais : nous avons d'abord une dette à l'égard des générations à venir (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Monsieur le Président, mesdames les ministres, mes chers collègues, ouvrir le mariage et l'adoption aux couples de même sexe est un engagement de François Hollande. Nous l'avons porté avec lui pendant la campagne présidentielle et après lui, pendant les élections législatives.

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Il s'agit d'un combat de longue date des socialistes. Nous avons déposé une proposition de loi sur ce thème en 2009 et elle a été débattue à l'assemblée en 2011.

Nous n'avons jamais caché nos intentions et nous avons toujours annoncé qu'une fois majoritaires à l'assemblée, le mariage serait ouvert aux couples homosexuels.

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Ces derniers mois, le Gouvernement puis les commissions, ont organisé de nombreuses auditions. C'est là, chers collègues de l'opposition, que le travail de fond s'est effectué. Mais la grande majorité d'entre vous était absente.

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Pourtant, le débat qui nous réunit en ce moment fait partie de ceux qui permettent à la société d'évoluer vers plus d'égalité, plus de tolérance. Comme à chaque fois qu'un cap important s'apprête à être franchi, les forces les plus conservatrices se liguent pour empêcher l'émergence de nouveaux droits. C'est habituel.

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Mais que la majorité d'entre vous ait suivi la ligne du président de l'UMP pour être dans la caricature et l'amalgame aux côtés du Front national (Exclamations sur les bancs du groupe UMP) et des organisations les plus intégristes et les plus rétrogrades…

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..cela restera comme l'une des pages les moins glorieuses de l'histoire de la droite républicaine.

Nous avons bien ici deux conceptions de la politique. Pour nous, le législateur est là pour éclairer les Français, leur expliquer ce qu'il compte inscrire dans la loi et les convaincre. C'est ce qui fait la grandeur du Parlement. Au contraire, vous n'avez cessé de mentir et de faire peur, aussi bien sur le contenu de ce projet de loi que sur ses conséquences pour notre société.

Nous sommes ici pour offrir une véritable égalité à nos concitoyens alors que vous voulez préserver une ségrégation légale. D'ailleurs, qu'est-ce que votre alliance civile, cette alliance civile que vous proposez dans vos amendements, sinon un sous-mariage, réservé aux couples homosexuels ? Ne voulez-vous pas plutôt rappeler à chaque fois qu'il y a d'un côté les couples qui ont droit à la protection et la reconnaissance de la société, et de l'autre, ceux qui sont inférieurs en droit mais qui doivent se justifier, eux, d'être de bons parents ?

C'est d'ailleurs sur ce thème que vous développez votre argument préféré : la défense des enfants. Ah, la défense des enfants ! Vous vous cachez derrière ces quelques mots, mais sans jamais aller au bout de votre idée.

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Passées les précautions de langage, ce que vous essayez d'insinuer dans l'esprit des Français, c'est tout simplement qu'il serait dangereux pour un enfant d'être élevé par un couple homosexuel.

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Vous insultez ainsi les dizaines de milliers de familles qui existent déjà, sans jamais démontrer la justesse de vos attaques. Où sont les preuves que les enfants vont plus mal lorsqu'ils sont élevés par un couple homosexuel ?

Le mieux est encore de les écouter, ce que nous avons fait en commission. Mais en leur refusant cette écoute, vous les méprisez et leur récusez le droit de dire qu'ils sont des enfants comme les autres.

En nous prédisant des catastrophes avec cette loi, vous refusez de voir la France telle qu'elle existe aujourd'hui

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Les homosexuels ne vous ont pas attendu pour fonder une famille. Et que je sache, ces dix dernières années, vous n'avez pas voulu les voir.

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Vos arguments sur les familles sont souvent empreints d'hypocrisie. Vous trouvez tous l'homophobie condamnable, au point d'en faire une circonstance aggravante dans le code pénal. Mais dans le même temps, vous nous expliquez que les moqueries dans les cours d'école envers les enfants élevés dans une famille homoparentale devraient nous dissuader de voter cette loi. Les mêmes quolibets étaient adressés aux enfants de divorcés, il y a vingt ou trente ans, aux enfants de femmes célibataires, il y a quarante ou cinquante ans. A-t-on pour autant interdit le divorce ou rendu obligatoire le mariage avant de concevoir les enfants ? Non, bien au contraire. La garde des sceaux l'a très bien démontré dans son propos liminaire.

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Au fond, ce qui vous dérange, c'est d'accorder les mêmes droits aux couples homosexuels qu'aux couples hétérosexuels.

Le train de l'histoire est en train de passer et une fois de plus vous allez rester à quai (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

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Dans quelque temps, quand les esprits se seront calmés et que, malgré vos craintes, la famille dans toute sa diversité sera toujours là, vous regretterez sans doute vos outrances et vos erreurs. Et ceux d'entre vous qui ont le courage de défendre et de voter cette loi généreuse seront fiers de l'avoir fait, tout comme nous le sommes aujourd'hui. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, « présider la République, c'est refuser que tout procède d'un seul homme, d'un seul raisonnement, d'un seul parti » : voilà les mots du candidat François Hollande, au Bourget, en janvier 2012.

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À l'évidence, ce projet de loi contredit cette proclamation. Il procède de la volonté du Président de la République qui a choisi de passer outre les centaines de milliers de manifestants opposés à ce texte…

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…qui a choisi d'ignorer les inquiétudes exprimées par les représentants des cultes, qui a choisi de négliger l'avis de l'Académie des sciences politiques et morales, qui a choisi de ne pas s'en remettre au référendum. Bref, qui a choisi seul, avec sa majorité, d'imposer un changement profond du droit de la famille et de la filiation.

Hier, le parti socialiste accusait le président Sarkozy d'autoritarisme et il ne ménageait pas son soutien à tous ceux qui battaient le pavé contre le gouvernement. Aujourd'hui, il goûte le pouvoir présidentiel et majoritaire et conteste celui de la rue.

Contrairement à la gauche, je n'ai jamais critiqué les prérogatives du chef de l'État, mais je regrette de les voir utiliser, sans discernement, sur un sujet sensible qui aurait mérité une approche pragmatique et rassembleuse (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.) Le projet gouvernemental devait, nous disait-on, susciter le consensus. Eh bien il n'y a pas de consensus !

Les centaines de milliers de Français qui ont manifesté le 13 janvier n'étaient ni des extrémistes, ni des passéistes, ni des idéologues.

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Est-il nécessaire de préciser qu'on peut être contre le mariage pour tous et combattre l'homophobie, qui est une injure faite à la dignité qui entoure chaque être humain ?(Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Dois-je aussi préciser que l'on peut être favorable à ce projet et respecter les arguments de ceux qui ne le sont pas, et réciproquement.

Mieux vaut le préciser, car le débat actuel a fait resurgir des tensions, parfois détestables. Sur les réseaux sociaux, une violence malsaine gronde. Homophobie d'un côté, anticléricalisme de l'autre, toutes ces dérives qui mutilent notre fraternité sont inquiétantes.

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Je dis au Gouvernement : « Prudence ! ». Je dis au Président de la République qu'il n'agit pas dans un contexte serein. Nous sommes en crise, et, autour de nous, les repères s'effritent. Les risques de rupture existent, et son devoir est d'assurer la concorde de la nation. Il ne doit pas laisser les Français se dresser les uns contre les autres sur des sujets de société qui, précisément, réclament une pédagogie du rassemblement.

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Pourquoi cette question du mariage homosexuel ne fait-elle pas l'objet de plus de précautions ?

On ne peut à fois prétendre que ce texte de loi constitue une réforme de civilisation et agir avec précipitation, sans, au surplus, donner la parole au peuple. Si François Hollande a cru bon d'évoquer devant les maires la liberté de conscience, c'est bien que l'affaire est grave, et, si l'affaire est grave, c'est qu'il y a un problème de fond, qui ne sera pas réglé en quelques semaines au Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

Quel est le problème ? Il est que ce projet de loi remet en cause le cadre juridique et social du mariage, qui structure la société et la filiation depuis des siècles.

On me rétorquera que cette conception du mariage se heurte aux mutations de notre temps.

Je ne suis pas dans un déni de réalité ; je sais qu'il y a des situations de fait que le législateur doit résoudre. Je ne m'érige pas non plus en juge car je ne doute pas des capacités d'affection et d'éducation d'un couple homosexuel, ou d'une femme ou d'un homme seul.

Ce souci d'assumer la réalité sans la juger ne me conduit pourtant pas à accepter le principe d'une égalité totale des droits.

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Les citoyens sont égaux, ce qui n'implique pas que les situations soient, entre couples homosexuels et couples hétérosexuels, totalement égales.

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Beaucoup de choses ont été dites par mes collègues sur ce sujet. Je veux juste, pour ma part, insister et alerter nos concitoyens sur un point que le slogan de l'égalité dissimule : celui du droit à l'enfant.

Si le principe d'égalité est suffisant, aux yeux du Gouvernement, pour justifier de chambouler l'institution du mariage, s'il est suffisant pour relativiser le bien-fondé de l'altérité et élargir le droit à l'adoption, alors il sera rapidement considéré comme suffisant pour accorder aux couples de femmes l'assistance médicale à la procréation.

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Nous touchons ici à une question profonde, car un enfant conçu par ce procédé au sein d'un couple de femmes, ou par une femme seule, pourra-t-il réparer ce double manque, ne pas savoir d'où il vient et ne pas avoir de père qui l'élève ?

Sur l'extension de la PMA, le Président de la République a saisi le Comité consultatif national d'éthique. C'est sage mais bien tardif, et c'est, au demeurant, vain, puisque j'ai cru comprendre que, sur ce sujet, la majorité socialiste était largement prête à franchir le pas dans quelques mois.

Une fois ce pas franchi – au nom de l'égalité toujours ! –, les couples d'hommes ne manqueront pas d'exiger le droit à la gestation pour autrui.

Beaucoup la réclament déjà (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP) et certains n'ont pas hésité à y recourir à l'étranger. Ce jour-là, quel argument le Gouvernement leur opposera-t-il ? (« Aucun ! » sur les bancs du groupe UMP.) Celui de l'inégalité ? Sûrement pas puisqu'il fait de 1'égalité des droits le fil directeur de son projet. Celui de l'interdiction de marchander son corps ? Naturellement, cet argument sera avancé, et je ne fais pas le procès au Gouvernement ou à la majorité de tricher, je dis simplement qu'il sera rapidement démonté par ceux qui vous convaincront que le recours à une mère porteuse est aussi estimable que le recours à la science et à un tiers donneur anonyme.

Ils évoqueront les quelques exemples étrangers où la PMA est ouverte à tous, et certains dénonceront le vide juridique qui entoure leur enfant né ainsi hors de nos frontières.

Sur ce point, madame la ministre, votre circulaire, qui facilite l'acquisition de la nationalité française pour les enfants nés de mère porteuse, est, d'une manière ou d'une autre, une brèche vers la légalisation de la gestation pour autrui. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Les partisans de la GPA s'y engouffreront, et tous ne manqueront pas de reprocher à la France d'être à la traîne du progrès. Que n'a-t-on dit et exigé au nom du progrès, sans se poser la seule question qui vaille : vers quel monde courons-nous et pour quel humanisme ?

Au nom de l'égalité, le Gouvernement ouvre ainsi une boîte de Pandore, et, croyez-moi, il sera difficile de la refermer. Ceux qui me rétorquent que les ruptures fondamentales de la PMA et de la GPA ne sont pas à l'ordre du jour sont les mêmes qui, dans quelque temps, affirmeront que le droit à l'enfant est respectable, car, oui, derrière le mariage pour tous, il y a le droit à l'enfant pour tous et par tous les moyens.

Aujourd'hui, la majorité nous dit qu'il n'en est rien…

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…mais, très bientôt, je ne doute pas que pour légitimer ce nouveau droit les motifs les plus généreux et les plus sincères seront alors employés, dont celui de vouloir avoir un enfant et de l'aimer. Une fois encore, le poids des sentiments imposera sa loi.

À ceux qui pensent que j'anticipe des évolutions qui ne sont pas inscrites dans ce projet,…

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…je veux rappeler qu'en 1999 le PACS nous était présenté comme l'étape législative ultime de l'union entre deux personnes du même sexe. Jamais, nous disait-on, le législateur n'ira ni ne devrait aller plus loin ! Jamais !

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Par délicatesse, je ne citerai pas toutes les phrases prononcées dans cet hémicycle par l'ancienne garde des sceaux, chargée de faire voter le PACS.

Son opposition au mariage homosexuel et à l'adoption était sans ambiguïté et elle concluait son propos avec une formule qui résonne étrangement dans notre hémicycle : « Je n'ignore pas le procès d'intention sur un éventuel « après » de cette proposition qui préparerait des évolutions plus fondamentales de notre droit. Je m'élève avec la plus grande énergie contre de telles insinuations. »

Voilà les mots d'hier, qui nous disaient « jamais ».

Une décennie plus tard, ce qui était formellement refusé est officiellement accepté : le mariage est ouvert aux couples homosexuels avec l'adoption.

Cette course ne s'arrêtera pas en chemin…

Un député du groupe UMP. C'est évident !

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…et il ne faudra pas longtemps pour voir la majorité s'accommoder de la procréation médicalement assistée et de la gestation pour autrui, qui sont les horizons naturels de ce projet de loi.

Il n'est nul besoin de se livrer à un procès d'intention pour envisager ce scénario ; il est seulement la conséquence logique d'une quête effrénée de l'égalité absolue. Avec ce projet de loi, nous entrons donc dans une spirale dont les répercussions risquent d'être lourdes, et il est bien présomptueux de penser que nous pouvons légiférer sans avoir la main qui tremble.

La querelle qui nous divise est d'autant plus regrettable qu'il existe une voie pragmatique pour avancer ensemble, de façon consensuelle.

En disant non au mariage pour tous, l'opposition ne dit pas non à des évolutions juridiques ciblées. Elle ne dit pas non à la reconnaissance que recherchent les couples homosexuels, parce que chacun est libre de vivre sa vie amoureuse sans être défié ni jugé par les autres. (« Très bien » et applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

Nous pourrions travailler à un PACS renouvelé, renforcé de droits nouveaux. Sur la base d'une nouvelle forme d'union civile, il répondrait aux attentes des couples, et il ne bouleverserait pas les cadres du mariage et de la filiation.

Je crois, mes chers collègues, que le Gouvernement n'a pas pesé toutes les incidences juridiques, sociales et éthiques de son projet. Celui-ci divise la France au moment où elle devrait être rassemblée, et il pose les jalons d'une société où le droit et le désir des adultes passeront avant ceux des enfants.

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Les Français qui s'opposent à ce texte de loi ne sont pas entendus. Ils étaient pourtant des centaines de milliers à descendre dans la rue pour défendre leur cause.

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Ils étaient des millions pour les retraites !

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Inutile de les compter ou de les recompter... Ils sont de toute façon très nombreux et ils sont, à leur façon, les porte-parole d'une tradition qui n'a pas fini d'être moderne.

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Aujourd'hui, la responsabilité de l'opposition est de relayer leur voix, parce que cette France que le Gouvernement n'écoute pas doit être respectée, mais notre responsabilité est aussi de parler clair.

La PMA et la GPA sont des lignes rouges. Le flou des réponses du Gouvernement sur ces sujets révèle la faiblesse de ses convictions.

Il est du devoir de l'opposition d'avertir que, si ces lignes rouges étaient franchies, à l'heure de l'alternance – car il y aura alternance –, nous réécririons la loi pour stopper cette dérive, car elle consacrerait une régression de notre conscience humaine. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes UMP et UDI.)

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Monsieur le président, mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mes chers collègues, j'aimerais vous dire mon émotion et ma fierté de défendre cette loi pour l'égalité des droits. J'ai également une pensée pour ces citoyens et citoyennes qui m'ont écrit, qui sont venus me rencontrer et qui attendent, avec espoir, le vote de cette loi, depuis tant d'années.

Depuis toujours, les gays et les lesbiennes ont été maintenus en marge de notre société. Certes, la gauche a fait progresser la lutte contre les discriminations en dépénalisant l'homosexualité en 1982 et en créant le PACS il y a quatorze ans, mais il existe toujours une différence de droits et de devoirs entre citoyens dans le code civil.

Aujourd'hui, en 2013, la gauche propose l'ouverture du mariage aux couples de personnes de même sexe. Après des mois de débats, l'argument avancé par nos opposants est toujours le même. Il s'agirait, au nom d'un ordre naturel, de ne pas déstabiliser une institution séculaire. En ouvrant le mariage aux homosexuels, nous provoquerions le chaos dans notre société. Dans une sorte de déni de la réalité sociale, on nous oppose l'immuabilité d'un vieux modèle familial fondé sur la complémentarité d'une femme et d'un homme.

Cette objection n'est pas nouvelle. Comme nous le rappelle si justement Elisabeth Roudinesco, « il existe un tréfonds de panique chez quelques-uns depuis la fin du dix-neuvième siècle,…

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…au moment où se sont accélérées les transformations de la famille. Divorce, travail des femmes, avortement, à chaque fois, c'est la même panique. »

Dans une société en marche, l'être humain s'affranchit des anciens modèles. L'accession au mariage et à l'adoption pour les couples de personnes de même sexe n'est nullement un renoncement aux valeurs qui fondent notre société. Elle est, au contraire, un grand pas vers l'égalité des droits entre les citoyens. Et c'est pour cette raison que nous refusons la proposition de certains, à droite, de créer un contrat d'union civile.

Ce sont les mêmes qui pourfendaient le PACS hier et qui nous proposent aujourd'hui un sous-mariage, réservé aux homosexuels.

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Depuis plusieurs mois maintenant, nous entendons chaque jour dans les médias les propos des opposants au mariage pour les couples de même sexe. Au-delà du débat légitime et des questionnements, certains ont laissé libre cours à leur homophobie. Et je n'évoquerai pas, ici, les insultes et les propos outranciers que nous avons tous reçus sur nos boîtes mail et dans de nombreux courriers.

J'ai rencontré de nombreux gays et lesbiennes. Ils m'ont confié leur parcours de vie. Ils m'ont dit qu'ils n'avaient plus ressenti cette détestation, cette négation de leur identité depuis leur adolescence.

Je pense ainsi à ces enfances passées à raser les murs de l'école, pour éviter les insultes, pour éviter ceux qui les répétaient jour après jour, mois après mois, année après année.

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Ils nous disent : « Depuis quelques semaines, chaque fois que j'entends certains détracteurs du mariage pour tous, leur mauvaise foi, leurs arguments homophobes, parfois sans qu'ils en aient conscience, chaque fois que je les entends, j'ai mal. C'est comme une entaille, comme une blessure qu'on creuse. Chaque fois que je les entends, j'ai six ans dans la cour de l'école et j'ai mal. »

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Devenus adultes, ils ont eu la force de dépasser tout cela, de construire, d'assumer ce qu'ils sont, d'aimer et d'être aimés, de faire famille et d'avoir des enfants. L'heure est venue, pour le législateur, de reconnaître ces couples et ces familles.

L'heure est venue, mes chers collègues, de sortir ces familles et leurs enfants de l'insécurité juridique.

L'heure est venue, mes chers collègues, enfin, de reconnaître tout simplement qu'ils sont des citoyens à part entière et de dire aux gays et aux lesbiennes :vous pouvez être fiers de ce que vous êtes, soyez fiers de votre combat pour l'égalité des droits.

Oui, vraiment, chers collègues, il est plus que temps de nous rassembler pour mettre fin à cette discrimination.

Pour conclure, madame la garde des sceaux, madame la ministre, je vous rappellerai les paroles qu'a prononcées, à cette tribune, un jeune député, alors qu'il était rapporteur de la loi de séparation des Églises et de l'État en 1905. Aristide Briand déclarait alors : « le projet que nous proposons n'est pas une oeuvre de passion, mais de justice ». Madame la garde des sceaux, madame la ministre, votre loi s'inscrit dans cette grande lignée qui fait honneur à notre République. Soyez assurées que nous serons à vos côtés pour voter cette loi juste qui reconnaît et protège toutes les familles. (Applaudissements sur les bancs du groupe SRC.)

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Monsieur le président de l'Assemblée nationale, monsieur le président de la commission, mesdames les ministres, mesdames et messieurs les députés, chers collègues, il ne s'agit pas ici d'être moderne ou ancien, progressiste ou réactionnaire. Il s'agit de répondre concrètement aux aspirations de couples de même sexe, sans nier l'attachement de nombreux Français à l'institution du mariage comme union d'un homme et d'une femme dans le but de fonder une famille. Il s'agit d'y répondre sans dogmatisme, sans hypocrisie, sans idéologie.

Deux sujets sont imbriqués dans ce texte : l'union d'abord, la place des enfants ensuite. Maire d'une ville, comme nombre d'entre vous, je célèbre des mariages, je rencontre les futurs époux et je partage leur projet de vie. Élue locale, je rencontre aussi des couples homosexuels qui me parlent avec la même détermination de leur volonté de s'investir dans un projet commun, et de le voir reconnu par la République. Cette aspiration est légitime : nous devons aux couples de même sexe la pleine reconnaissance de leur union.

Le PACS fut une première réponse. Il a offert aux couples de même sexe un cadre de vie commune, des droits et l'obligation de soutien entre contractants. Nous avons voulu, au cours de la précédente législature, le renforcer. Pour cela, nous avons étendu les droits des pacsés, en les rapprochant des droits des couples mariés. Cela s'est traduit en 2007 par la suppression des droits de transmission lors du décès d'un des deux partenaires d'un PACS. En 2008, la loi de modernisation de l'économie a ouvert la possibilité de transmettre son entreprise entre partenaires d'un PACS. En 2010 et en 2011, c'est la possibilité de régler les différends non plus devant le juge administratif mais devant le juge aux affaires familial qui a été ouverte, ainsi que celle de signer son PACS non plus au greffe du tribunal, mais chez le notaire.

Personne ne demande aujourd'hui de revenir sur ce contrat, mais beaucoup le jugent insuffisant. Sa célébration ne serait pas assez solennelle, et il aurait un caractère trop strictement patrimonial, alors même que l'on attend des engagements extra-patrimoniaux. C'est le sens de la proposition d'alliance civile que j'ai présentée avec Daniel Fasquelle, Axel Poniatowski et de nombreux autres collègues.

L'alliance civile donne aux couples de même sexe les mêmes droits que le mariage, sans l'adoption. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SRC.)

Plusieurs députés du groupe SRC. Discrimination !

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C'est la reconnaissance publique et solennelle, à la mairie, de leur union. Ce n'est pas seulement un contrat comme le PACS, mais une institution républicaine, non pas en dessous du mariage, comme le PACS, mais à côté du mariage. L'alliance civile confère les mêmes droits, la même reconnaissance de l'union, mais sans bousculer les conditions de la filiation. Je crois encore que cette proposition peut rassembler. Elle rassemble déjà 125 députés.

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Certains d'entre eux ont annoncé qu'ils voteraient votre texte, d'autres qu'ils ne le voteraient pas, mais tous considèrent qu'une autre réponse existe.

J'affirme donc clairement être favorable à l'union des couples de même sexe. Parlons des enfants, à présent. En l'état actuel du code civil, étendre le droit au mariage aux couples homosexuels sans autre aménagement entraînerait automatiquement la reconnaissance d'un droit à l'adoption conjointe, à l'adoption plénière. Dès lors qu'il lie union, parentalité et filiation, ce projet de loi dépasse la seule question d'une meilleure reconnaissance de l'union homosexuelle.

Ce projet de loi aurait mérité, mes chers collègues, que l'on recherche le consensus, comme nous l'avons fait à propos d'un autre sujet de société, avec la loi Leonetti. Il aurait mérité un large débat avec les Français : je regrette que le Gouvernement et la majorité n'aient pas choisi de l'organiser sérieusement.

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Qu'est-ce que cela veut dire, organiser un débat ?

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Du coup, ce débat s'est installé de fait, dans la douleur, augmentant les tensions et renforçant les clivages. Il a divisé une société en attente d'apaisement.

Beaucoup de questions auraient pu être posées, comme celles de l'accompagnement des recompositions familiales, de la sécurisation des parcours de vie de plus en plus complexes des enfants, et du statut des beaux-parents. Surtout, comment répondre au besoin de connaissance de ses origines ? Je m'attarderai un instant sur ce point. Pour beaucoup d'entre nous, en effet, la réponse à la question de savoir d'où l'on vient est évidente. Nous savons qui sont notre père et notre mère. Mais l'expérience des enfants nés sous X, ou issus d'une fécondation in vitro, en quête de leurs origines, doit nous instruire. Nous sommes déjà confrontés à leurs interrogations, à leurs inquiétudes, à leurs souffrances. Je connais, comme vous, de ces adolescents ou de ces adultes qui ressentent comme une plaie ouverte, quel que soit par ailleurs l'amour qu'ils ont reçu de leur famille, la recherche de leurs origines. Le législateur est régulièrement sollicité sur la levée de l'anonymat.

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La procréation médicalement assistée pour les couples de même sexe et la gestation pour autrui nous entraînent toujours plus loin sur cette voie. Ces techniques sont pourtant inscrites en filigrane dans ce projet de loi, et même imprimées noir sur blanc, dans la circulaire que vous avez signée la semaine dernière. Elles sont, je le crois, la suite logique de ce texte.

Le projet de loi sur la famille que vous annoncez nous donnera peut-être l'occasion d'échanger sur le sujet de la quête des origines. On voit combien ce débat complexe aurait dû être mené au préalable, avant la discussion du projet qui nous est présenté aujourd'hui. Car la question n'est pas celle de la capacité des couples homosexuels à élever des enfants. Bien des couples de même sexe élèvent aujourd'hui, de fait, des enfants dans des conditions qui n'ont rien à envier à certains couples hétérosexuels.

Mais le sujet de la protection de l'enfant est plus large, et aurait mérité une réponse plus équilibrée. Je crois personnellement en la réponse allemande, qui ne permet pas l'adoption conjointe par les couples de même sexe, mais qui autorise l'adoption simple d'un enfant biologique par l'autre partenaire, dès lors que l'autre parent biologique accepte de renoncer à son autorité parentale. Cette solution respecte à la fois le besoin de connaissance de ses origines, et la reconnaissance du nouveau lien créé dans le cadre d'une recomposition de la famille. C'est une base de discussion adaptée et protectrice pour l'enfant.

Chers collègues, ce texte part bien, mais finit mal. Il part avec les meilleures intentions du monde : reconnaître, apaiser et régler des situations de souffrance. Il débouche sur des incertitudes identitaires en rapport avec la filiation qui peuvent créer d'autres souffrances. Surtout, le Gouvernement n'a rien fait – au contraire ! – pour apaiser les tensions. Il sème, en fin de compte, les ferments de la division dans la société française.

Mesdames les ministres, mesdames et messieurs les députés, il est encore temps de trouver la voie du rassemblement des Français, d'un rassemblement qui tienne compte de toutes les réalités de notre société. Je proposerai donc, avec d'autres collègues, des amendements en ce sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

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Mesdames les ministres, monsieur le rapporteur, madame la rapporteure pour avis, mesdames et messieurs les présidents, chers collègues, à ce stade de nos débats, il importe de mettre de côté les descriptions caricaturales des conséquences de ce projet de loi. Elles tomberont très vite aux oubliettes ! Revenons à l'essence même de notre réforme : l'égalité et la fraternité.

Mes chers collègues, pourquoi devons-nous légiférer ? Sans doute parce qu'il y a un besoin d'égalité entre les familles. Cette future loi mettra fin à des situations que nous refusons d'ignorer. Des dizaines de milliers d'enfants et de familles n'ont, dans notre République, ni statut ni protection. Elles n'ont pas de protection en cas de décès, ni en cas de séparation. Qui parmi nous accepterait cela pour lui-même et ses proches ? La souffrance de ces familles et des couples, à qui la société reconnaît une place sans que la loi le fasse, nous oblige à mener à bien ce projet. Nous voulons sortir de l'apesanteur juridique en protégeant ces familles sans statut.

Au nom de l'égalité, au nom de nos valeurs, nous voulons le bien-être et la protection des enfants et de leurs parents. Demain, nous permettrons à un enfant de porter le nom de ceux qui l'élèvent et qui l'accompagnent dans la construction de son histoire. Qu'apportons-nous donc de nouveau, de révolutionnaire, à la question du nom et de l'identité ? Rien, sinon la lumière sur cette évidence : c'est un devoir pour nous, pour l'État, de permettre à un enfant de faire de son parent social son parent réel.

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Le législateur l'avait anticipé, en 1972, par l'introduction dans la loi de la filiation par possession d'état. Il n'y a donc ici ni danger, ni révolution, mais simplement la continuité d'une lutte pour la justice et pour l'égalité. C'est un combat pour protéger ceux et celles qui sont aujourd'hui fragilisés.

Mes chers collègues, notre volonté de justice et ce besoin d'égalité seraient, paraît-il, anxiogènes. J'entends, études et recherches à l'appui, qu'un enfant qui serait élevé hors d'un couple hétérosexuel serait en danger. Il s'agit là d'une contrevérité ! Aucune étude ne le prouve, sans qu'une autre étude, aux résultats contraires, ne la contredise. Par exemple, sur quatre études menées au Canada en 2005, utilisant le même questionnaire et mesurant le bien-être des enfants à l'école, l'une en tire la conclusion que davantage de problèmes d'attention existent chez les enfants de mères lesbiennes, tandis que les trois autres, utilisant les mêmes ressources, prétendent le contraire. Le seul danger pour les familles et notre société, le risque premier dont nous devons nous préoccuper, c'est l'ignorance et la stigmatisation, la discrimination et l'inégalité dans l'accès aux droits.

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La possibilité d'entamer une procédure d'adoption, qu'elle soit simple, plénière ou conjointe, fait partie de ce combat pour l'égalité. J'y suis bien évidemment sensible, et je m'oppose à ceux qui prétendent qu'une telle possibilité serait dangereuse. Je m'oppose à ceux qui font semblant d'ignorer le processus long, contrôlé et sécurisé d'une demande d'adoption et qui alimentent les peurs et la division de notre société.

Oui, mes chers collègues, l'égalité ne saurait trouver sa place dans une société divisée. Nous construisons, ici, la fraternité d'aujourd'hui, en pensant que la reconnaissance en droit de chacun dans ses choix de vie est la meilleure garantie de l'épanouissement individuel et de l'épanouissement de la société. Personne n'a l'autorité suffisante pour confisquer une valeur aussi fondamentale que la famille. Personne ne peut prétendre avoir le monopole du coeur.

Nous construisons également la fraternité de demain, parce que la seule certitude, la seule garantie qui s'offre à chaque citoyen de sa naissance à sa mort, c'est que notre République s'engage à ses côtés pour sa protection, sa sécurité et son épanouissement. Si notre République manque à ce devoir, si nous laissons les liens parentaux se construire en dehors du cadre de la loi, alors nous rendrons des parents, des enfants et des familles vulnérables. Nous créerons, en conscience, de l'injustice.

Monsieur le président, mesdames les ministres, mes chers collègues, nous avons une responsabilité : celle de ne pas batailler pour obtenir, demain, la société à laquelle chacun de nous aspire individuellement, mais celle à laquelle chacun de nous aspire collectivement. Par collectivement, j'entends celle que nous avons à définir ensemble. Ce doit être une construction solide pour résister aux égoïsmes et aux passions individuelles. À ce titre, les enfants méritent que la société les protège et les accompagne dans leur construction physique et morale. Cela vaut quelle que soit leur naissance et quels que soient les choix personnels de leurs parents.

Le bon sens, la raison et l'intelligence nous conduisent à cette loi. C'est une loi protectrice, animée par notre aspiration à l'égalité, et nourrie par nos valeurs républicaines. C'est une loi juste, fraternelle et protectrice. Soyons dignes de ce pays, un pays qui a choisi le changement, un pays qui attend le souffle du printemps pour se réinventer, le printemps des droits, comme l'a dit si justement Bruno Le Roux, président du groupe SRC. (Applaudissements sur les bancs des groupes SRC et écologiste.)

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Monsieur Alain Marty, tout à l'heure, vous avez demandé la parole sur le fondement de l'article 58, alinéa 4, du Règlement pour un fait personnel.

Vous avez la parole.

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Je vous remercie, monsieur le président.

Je voudrais revenir sur les questions au Gouvernement de cet après-midi. Le ministre de l'éducation nationale m'a répondu que je servais des intérêts particuliers. Cette accusation est blessante. Elle laisse supposer devant l'opinion que j'ai des motivations peu avouables dans mon attitude politique. C'est mettre en cause mon honnêteté.

Je tiens à rappeler, monsieur le président, la raison pour laquelle j'ai posé cette question. Dans la ville dont je suis maire, j'ai mis en place, en 2001, un aménagement des rythmes scolaires quelque peu comparable à ce qui se fait en Allemagne. Le nombre d'heures d'enseignement dans la semaine a été réduit et l'année scolaire allongée. La collectivité prenait en charge pendant une demi-journée l'ensemble des élèves pour leur permettre, entre autres, des pratiques sportives, un éveil à la culture et à l'environnement et ses techniques. Ces questions m'intéressent donc bien évidemment. Cela avait un coût relativement important.

Le fait de me répondre que j'ai des intérêts particuliers est choquant. Je tiens donc à ce que ce fait personnel soit transmis au ministre de l'éducation nationale. Je lui demande de m'indiquer quels sont ces « intérêts particuliers ». S'il le fait, j'en débattrai avec lui ; s'il ne le fait pas, cela signifiera que le mépris et le mensonge font partie de ses arguments. Si tel était le cas, je trouverais cela peu digne d'un ministre de la République ! (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe UMP.)

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Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures quarante-cinq :

Suite de la discussion du projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe.

La séance est levée.

(La séance est levée à vingt heures quinze.)

Le Directeur du service du compte rendu de la séance de l'Assemblée nationale,

Nicolas Véron