Intervention de Christophe Bouillon

Réunion du 22 juillet 2014 à 15h00
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Bouillon :

Au nom du groupe SRC, je me réjouis de vous recevoir, madame, car il est toujours précieux pour le législateur, en particulier pour les membres de notre Commission, de bénéficier d'avis juridiques extérieurs qui viennent compléter notre approche politique. Le HCB joue un rôle primordial dans notre démocratie à une époque où les biotechnologies soulèvent nombre de questions. En la matière, il importe que les avis soient les plus larges possibles, sans verser dans une trop fréquente caricature ni alimenter des polémiques parfois virulentes sur ces sujets. Cela requiert une bonne méthodologie et une grande transparence.

La présidence du CEES vous qualifie pour assumer celle du HCB, vos travaux universitaires vous seront précieux pour mener à bien votre mission ; je le dis d'emblée, mon groupe est tout à fait favorable à votre nomination.

Permettez-moi toutefois de vous poser trois questions, certain d'avance que vos réponses ne « doucheront » pas notre enthousiasme. (Sourires)

S'agissant tout d'abord de la nouvelle législation communautaire relative aux OGM, adoptée par le Conseil européen et bientôt discutée par le Parlement européen, l'on ne peut que se réjouir de l'introduction de nouveaux motifs invocables par les États membres pour interdire la culture d'OGM sur leur territoire national – considérations socio-économiques, liées à l'aménagement du territoire ou encore à la politique environnementale et agricole. Nous saluons l'intense effort fourni par les différents ministres de l'écologie pour défendre la position française tout au long des négociations.

Toutefois, des interrogations subsistent. En cas d'interdiction, si un industriel souhaitant mettre en culture une variété d'OGM autorisée par la Commission européenne forme un recours, l'État membre devra négocier avec lui sous la houlette de la Commission. Certains experts redoutent également que de nouvelles procédures visant à lever les interdictions ne soient engagées devant l'Organisation mondiale du commerce (OMC), notamment par les États-Unis. Enfin, le traité de libre-échange transatlantique laisse craindre une déréglementation de nos politiques agricoles nationales et continentales et l'introduction de mécanismes de règlement des différends devant des tribunaux privés, qui n'ont pas été définitivement écartés lors des négociations.

Tout cela fait redouter une forme de frilosité, de timidité ou de laisser-faire de l'Union européenne à propos des OGM. Dans ce contexte, pensez-vous que la France aura les moyens de défendre sa position, celle de nos concitoyens très sensibles à cette question ? Peut-on espérer au contraire que la possibilité de mettre en avant ces nouveaux motifs assure une meilleure protection contre les OGM et donne davantage de poids aux avis du CEES ?

Ensuite, le principe de précaution, inscrit dans la Constitution depuis plusieurs années, est depuis quelque temps remis en cause par des chefs d'entreprise, mais aussi par des parlementaires. Des propositions de loi venues de l'Assemblée nationale comme du Sénat tendent ainsi à en atténuer les effets, d'aucuns n'hésitant pas à invoquer un principe d'inaction ; le rapport Gallois lui-même mettait en cause une « interprétation extensive » du principe de précaution. Rappelons également le rapport Tourtelier sur le même sujet. Qu'en pensez-vous ? Comment comptez-vous défendre ce principe, si telle est du moins votre intention ?

S'agissant enfin des risques toxicologiques auxquels les OGM peuvent exposer l'homme, le HCB s'est exprimé à plusieurs reprises, notamment par votre voix, pour critiquer le manque de transparence des études produites par les industriels comme par les scientifiques, par exemple lors de la table ronde organisée à l'Assemblée sur l'étude Séralini. Les nouvelles études, notamment celles diligentées par la Commission européenne, vous paraissent-elles présenter les garanties nécessaires, du point de vue de la méthode comme de la transparence ?

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