Intervention de Olivier Véran

Réunion du 23 juillet 2014 à 11h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivier Véran :

Je salue votre engagement au service du public et de l'intérêt général dont témoigne votre parcours ainsi que la déclaration publique d'intérêts – entièrement vierge – que vous nous avez communiquée.

J'aimerais votre avis d'expert ayant travaillé au sein de l'organisme payeur des dépenses de santé, la CNAMTS, sur la capacité de l'ANSM à répondre à l'une de ses missions premières, qui consiste à « offrir un accès équitable à l'innovation pour tous les patients ».

Nos établissements de santé ont parfois du mal à s'équiper en matériel innovant, car le marché souffre, d'une part, de la faiblesse de la commande publique et, d'autre part, du parcours du combattant auquel s'apparentent les procédures de mise sur le marché. Nous nous réjouissons certes que la future loi sur la santé prévoie d'améliorer sensiblement les choses, mais le risque n'est-il pas désormais que ce soit l'accès aux médicaments les plus innovants qui devienne un luxe ? Le prix exorbitant de certains médicaments anticancéreux ou, tout dernièrement d'un remarquable médicament contre l'hépatite C sont au coeur des débats. Demain, ce sera au tour des nouveaux anticorps monoclonaux ou des nouvelles chimiothérapies.

Au-delà du coût, se pose la question du modèle économique par lequel les grands laboratoires remplaceront un système fondé sur la vente de médicaments-phares, diffusés par millions de boîtes. Les plus optimistes tablaient sur le développement d'une médecine personnalisée et prédictive. Est-ce cela qui se profile ?

Certains laboratoires semblent s'orienter vers un modèle économique qui fait fi des coûts de recherche et développement et des coûts de production pour ne retenir comme paramètre que l'efficacité d'une molécule, ce qui revient à vendre non pas tant la molécule elle-même que l'utilisation qui peut en être faite. Selon cette logique poussée à l'extrême, rien n'empêcherait le détenteur du brevet d'une molécule de la remettre sur le marché à un prix dix ou cent fois supérieur au prix originel, dès lors qu'il a été prouvé qu'elle répondait à de nouveaux usages thérapeutiques. Est-il encore temps, dans ces conditions, de reprendre la main ? Certes c'est aux niveaux européen et mondial qu'il faut agir, mais comment concilier à l'avenir l'exigence d'un accès aux meilleurs traitements avec la nécessaire réduction des dépenses de santé ?

Ma seconde question porte sur notre défaut d'autosuffisance. Quelques pays producteurs ont le monopole des matières premières indispensables à la fabrication des médicaments, ce qui rend la France et l'Europe particulièrement vulnérables. Qu'en est-il réellement ?

Les médicaments contrefaits qui affluent en Europe, si l'on en croit le nombre de saisies en douane, doivent-ils nous faire craindre une invasion du marché français ? La vente sur internet constitue-t-elle un risque supplémentaire ? À l'inverse, le monopole pharmaceutique est-il un gage de sécurité dans l'approvisionnement et la distribution ?

Enfin, êtes-vous favorable à un transfert de la cosmétovigilance à l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES), si d'aventure cette dernière se dotait de capacités de contrôle ?

Dans un tout autre domaine, l'ANSM dispose-t-elle désormais de moyens pour contrôler l'origine éthique des médicaments dérivés du sang commercialisés en France ? Le label éthique instauré par la loi dite DADU santé (diverses dispositions d'adaptation au droit de l'Union européenne dans le domaine de la santé) est-il réservé aux seuls médicaments produits à partir du sang de donneurs bénévoles ?

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