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Valérie Boyer
Question N° 63582 au Ministère de la justice


Question soumise le 9 septembre 2014

Mme Valérie Boyer interroge Mme la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes sur la position du Gouvernement concernant le recours à la gestation pour autrui (GPA) en France et à l'étranger. En France, la GPA est interdite car considérée comme une adoption illégale, au regard des principes de la dignité de la personne et de non-patrimonialité du corps humain. D'ailleurs, l'article 16-7 du code civil dispose que « toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d'autrui est nulle ». Pourtant, la circulaire du ministère de la justice du 25 janvier 2013 dite « circulaire Taubira » constitue une porte d'entrée à l'acceptation de la GPA en permettant la délivrance d'un certificat de nationalité française pour les enfants nés à l'étranger de mère porteuse et de père français. Outre le fait qu'il est complétement paradoxal de légaliser un acte commis à l'étranger mais prohibé en France, le risque principal est de voir se développer un tourisme procréatif. Elle a ainsi cosigné une proposition de loi visant à renforcer les sanctions à l'encontre des agences qui organisent ce trafic d'être humain et punir les personnes qui ont recours à cette pratique illicite. Il serait intéressant de demander au comité consultatif national d'éthique de s'exprimer sur ce sujet fondamental à l'heure où l'Allemagne, par exemple, a clairement pris position en ne reconnaissant ni la GPA, ni la parentalité acquise par GPA à l'étranger. Le flou juridique qui entoure la GPA en France conduit les différentes juridictions à se prononcer au cas par cas, ce qui menace la stabilité du dispositif. Ainsi, le 26 juin 2014, la Cour européenne des droits de l'Homme condamnait la France car la Cour de cassation s'était opposée à ce que les filiations issues de conventions organisées aux États-unis soient transcrites sur l'état civil français. Au-delà du cadre de la légalité, la protection et l'inaliénabilité de la personne humaine sont essentiellement remises en cause, révélant une grave inflexion déontologique. Les contrats de « mères porteuses » font de la femme et de l'enfant des objets de commerce. De plus, le rôle de la gestatrice complique encore le schéma déjà chaotique de la famille, soulevant des problèmes d'ordre éthique notamment au sujet de la dignité des femmes et de la négation du lien avec l'enfant qu'elles ont porté. Elle lui demande donc de rendre compte des orientations de la France au sujet de la GPA, du fait de l'incompatibilité entre la prohibition de la maternité pour autrui sur le sol français et l'incitation à la retranscription de naissances par GPA à travers la circulaire du 25 janvier 2013.

Réponse émise le 23 août 2016

Les décisions de la Cour européenne des droits de l'homme condamnant la France ne remettent aucunement en cause le principe de la prohibition de la gestation pour autrui, actuellement consacré aux articles 16-7 et 16-9 du code civil. Elles marquent la recherche d'un équilibre entre le principe d'ordre public de prohibition de telles conventions, qui demeure, et auquel le Gouvernement français est particulièrement attaché, et la nécessaire protection qu'il convient de garantir à l'enfant au nom de son intérêt supérieur au sens de l'article 3 paragraphe 1, de la Convention de New York du 26 janvier 1990, relative aux droits de l'enfant, et du droit au respect de sa vie privée au sens de l'article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elles confirment ainsi la nécessité impérieuse de distinguer le sort des enfants de celui de leurs parents ayant eu recours à un contrat illicite et par là même de leur garantir, sur le territoire national, le droit au respect de leur identité, dont la filiation et la nationalité française constituent des aspects essentiels.  Tel est également le sens des dernières décisions rendues par l'Assemblée Plénière de la Cour de cassation le 3 juillet 2015 par lesquelles celle-ci a estimé que l'existence d'un faisceau de preuves de nature à caractériser l'existence d'un processus frauduleux, comportant une convention de gestation pour le compte d'autrui, ne fait pas obstacle à la transcription de l'acte de naissance des enfants concernés, dès lors qu'il n'a pas été constaté que l'acte était irrégulier, falsifié ou que les faits qui y sont déclarés ne correspondent pas à la réalité. Ces évolutions jurisprudentielles n'altèrent pas la volonté du Gouvernement de garantir le maintien du principe de la prohibition d'ordre public de la gestion pour autrui. A cet égard, le Gouvernement veille au respect de la politique pénale mise en place contre toutes les atteintes à l'ordre public, qui visent, à la fois, la lutte contre toute forme de trafic d'enfants s'apparentant à l'exploitation d'autrui et la poursuite des intermédiaires proposant des activités interdites en France.

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