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Jean-David Ciot
Question N° 73806 au Ministère de la justice


Question soumise le 10 février 2015

M. Jean-David Ciot interroge Mme la garde des sceaux, ministre de la justice sur la répression des infractions instituées par les articles R. 3512-1 et R. 3512-2 du code de la santé publique. Issues du décret n° 2006-1386 du 15 novembre 2006, fixant les conditions d'application de l'interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif, celles-ci sanctionnent le fait de fumer dans un lieu à usage collectif de contraventions de troisième et de quatrième classe, qui frappent respectivement le fumeur et le responsable des lieux. Particulièrement respectées à leur édiction, ces dispositions semblent de moins en moins suivies à mesure des années. Les conséquences néfastes avérées du tabagisme passif ne devraient pourtant pas permettre de relâcher la vigilance des pouvoirs publics. Il souhaite par conséquent disposer d'un bilan de cette politique après cinq ans, faisant notamment apparaître le nombre de procédures établies et le montant des amendes prononcées chaque année.

Réponse émise le 11 août 2015

La lutte contre le tabagisme, première cause de mortalité évitable en France, constitue depuis plusieurs années une des priorités des pouvoirs publics. La loi du 10 janvier 1991, dite loi EVIN, et son décret d'application du 29 mai 1992 ont permis des avancées significatives dans la lutte contre le tabagisme en prévoyant notamment l'interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif, sauf dans des emplacements expressément réservés aux fumeurs. Par la suite, un nouveau décret d'application de la loi EVIN, du 15 novembre 2006, a réglementé très strictement les emplacements pouvant accueillir des fumeurs et leur signalisation. Les dispositions pénales ont été modifiées en conséquence afin de rendre la lutte contre le tabagisme plus efficace. Ainsi, toute personne fumant dans un lieu dans lequel l'interdiction s'applique est passible d'une contravention de la troisième classe. S'agissant des responsables des lieux, est puni de l'amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe le fait de mettre en place des emplacements non conformes, de ne pas mettre en place la signalisation prévue ou de favoriser sciemment le non-respect de l'interdiction de fumer. Seule cette dernière infraction, qui vise à sanctionner les responsables des lieux qui incitent les usagers à fumer en toute illégalité, ne peut pas faire l'objet d'une amende forfaitaire. Enfin, la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (loi HPST) a marqué la volonté des pouvoirs publics de renforcer l'interdiction de la vente et la consommation du tabac dans tous les lieux fréquentés par des jeunes (écoles, centres de formation, d'accueil, centres sportifs). Cette loi est fondée sur une triple interdiction : l'interdiction de vente de tabac aux mineurs, punie d'une contravention de la 4e classe), l'interdiction des cigarettes aromatisées (délit puni d'une amende de 100 000 euros), et l'interdiction d'implantation de lieux de vente de tabac dans les zones protégées définies par les préfets. Ces évolutions normatives ont été systématiquement accompagnées par des circulaires de politique pénale appelant l'attention des magistrats du parquet sur la nécessité de traiter avec la plus grande fermeté les infractions relevées dans ces domaines, notamment dans le cadre des plans de contrôle établis par les préfets. La politique pénale menée par les parquets est à ce titre particulièrement adaptée au phénomène, au regard notamment des exigences de l'article 8 de la convention cadre de lutte anti-tabac (CCLAT) de l'Organisation mondiale de la santé, ratifiée par la France le 19 octobre 2004, qui insiste sur la nécessité de protection des non-fumeurs contre l'exposition à la fumée du tabac. L'examen des statistiques des condamnations prononcées en matière de lutte contre le tabagisme permet de constater que les contraventions les plus fréquemment sanctionnées sont l'aide ou l'incitation volontaire à la violation de l'interdiction de fumer dans un lieu affecté à un usage collectif (474 infractions relevées en 2014), la violation de l'interdiction de fumer dans un lieu couvert et clos accueillant du public (411 infractions relevées en 2014) et l'absence de signalisation de l'interdiction de fumer dans un lieu affecté à un usage collectif (207 infractions relevées en 2014). Les condamnations prononcées par les tribunaux de police et les juridictions de proximité en matière de violation de l'interdiction de fumer sont en augmentation constante depuis le 1er janvier 2008, date d'entrée en vigueur du décret du 15 novembre 2006. Ainsi, en 2014, 1373 condamnations relatives à la violation de l'interdiction de fumer ont été prononcées (499 par jugements et 744 par ordonnances pénales), contre 1255 en 2013 et 1205 en 2012. S'ajoutent à ces condamnations inscrites au casier judiciaire national les amendes forfaitaires, très fréquemment utilisées en cette matière. Il convient de préciser à ce titre qu'une contravention de la 3e classe donne lieu à l'application d'une amende forfaitaire d'un montant de 68 euros, majorée si non acquittée et pouvant atteindre jusqu'à 450 euros. Les contraventions de la 4e classe donnent lieu à l'application d'une amende forfaitaire de 135 euros, majorée si non acquittée et pouvant atteindre jusqu'à 750 euros. La vigilance des pouvoirs publics ne faiblit pas. Le 19 septembre 2013 a ainsi été présenté le plan gouvernemental de lutte contre la drogue et les conduites addictives, qui définit les orientations stratégiques de l'action du Gouvernement jusqu'en 2017 et démontre sa volonté de s'engager résolument dans la lutte contre les conduites addictives. Enfin, plusieurs mesures du programme national de réduction du tabagisme, annoncées dans le cadre du plan cancer 2014-2019, ont d'ores et déjà été intégrées dans le projet de loi de modernisation du système de santé, voté en première lecture par l'Assemblée nationale le 14 avril 2015.

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