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Thierry Lazaro
Question N° 88887 au Ministère de la justice


Question soumise le 22 septembre 2015

M. Thierry Lazaro attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur sur le rapport parlementaire fait au nom de la commission d'enquête sur l'organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe. Ce rapport relève qu'à la date du 9 mars 2015, les services de renseignement avaient recensé un total de 1 432 ressortissants français partis vers les zones de combat syro-irakiennes. Si un tel phénomène n'est pas sans précédent dans notre pays, de tels départs vers des zones de combats ayant déjà eu lieu par le passé, notamment vers la Bosnie, l'Afghanistan, la Somalie ou encore le Mali, son ampleur est, en revanche, inédite. Ce rapport formule des propositions destinées à prévenir la radicalisation, à renforcer la coordination et les prérogatives des services antiterroristes, à contrer le « djihad » médiatique, à tarir le financement du terrorisme, à mieux contrôler les frontières de l'Union européenne et à adapter la réponse pénale et carcérale. Aussi, il souhaite connaître son avis sur la proposition visant à tripler dans un délai rapide les effectifs du bureau du renseignement pénitentiaire : la création d'au moins 100 postes est indispensable.

Réponse émise le 9 mai 2017

La loi du 3 juin 2016 (art.14) a conféré au renseignement pénitentiaire de nouvelles compétences. Elle a autorisé le garde des sceaux à désigner les services de l'administration pénitentiaire qui appartiennent au « deuxième cercle » des services de renseignement au sens de l'article L.811-4 du code de sécurité intérieure (CSI). A ce titre et sous les finalités 4° et 6° du L.811-3 du même CSI - prévention du terrorisme et prévention de la criminalité et de la délinquance organisées-, les personnels du bureau central du renseignement pénitentiaire et des 10 cellules interrégionales du renseignement pénitentiaire sont autorisés à recourir à plusieurs techniques de renseignement définies au titre V du livre VIII. Par la suite, la loi du 28 février 2017 relative à la sécurité publique, a défini une troisième finalité du renseignement pénitentiaire en plus de celles définies au L.811-3 : « la prévention des évasions et le maintien du bon ordre et de la sécurité des établissements pénitentiaires et établissements de santé destinés à accueillir des personnes détenues ». Cette nouvelle finalité, pour le seul besoin de l'administration pénitentiaire, apparaît au nouvel article L.855-1 CSI ainsi qu'au nouvel article 727-1 du code de procédure pénale. Sous cette finalité, les délégués locaux du renseignement pénitentiaire, dans chaque établissement et sous le contrôle du BCRP, sont appelés à mettre en œuvre ou exploiter certaines de ces techniques de renseignement. Les transformations juridiques et techniques du renseignement pénitentiaire nécessitent un accompagnement budgétaire conséquent. Aussi, au titre du PART, la loi de finances initiale 2017 a ouvert 6M€ de crédits dédiés au seul renseignement pénitentiaire. 2M€ sont réservés au développement d'un système d'information ad hoc et 4M€ aux équipements nécessaires pour mettre en œuvre les techniques de renseignement et créer les infrastructures immobilières et mobilières propres à la protection de la donnée.  Par ailleurs, d'ici la fin de l'année, l'échelon central sera passé de 15 à 47 emplois. Néanmoins, il ressort de ces transformations menées simultanément, qu'un phasage des futurs renforts humains est désormais plus nécessaire qu'une augmentation mathématique du nombre des effectifs. D'une part, il convient pour le service d'être qualitativement abondé en cadres spécialisés dans les structures produisant de l'analyse, ce qui est en cours de réalisation, comme indiqué. D'autre part, un renfort doit être rapidement productif : de nouvelles méthodologies, de la formation, des habilitations au secret de la défense nationale, un agrandissement des espaces de travail sont nécessaires pour chaque vague de recrutement, pour une bonne assimilation de la réforme du renseignement pénitentiaire par ses personnels, qui mettront bientôt en œuvre des techniques complexes. Ce temps de montée en compétence serait incompatible avec un afflux trop massif au sein du seul BCRP. Après l'année 2017, les besoins porteront d'ailleurs plus largement sur la professionnalisation des agents dédiés en établissements, et non sur le seul BCRP. La réforme conduite depuis la loi du 3 juin 2016 consiste à donner les orientations politiques mais aussi les moyens juridiques, humains et financiers pour une transformation du réseau actuel en un véritable service de renseignement, intégré au second cercle de la communauté française du renseignement.  Au total des 61 recrutements budgétés en loi de finances initiale, il faut ajouter l'intégration au BCRP de 4 officiers de liaison en provenance de services de renseignements des 1er et deuxième cercles pour fournir une expertise et engager les coopérations opérationnelles directes avec l'ensemble de la communauté. Cette campagne de recrutement dans les CIRP et au BCRP constitue un effort sans précédent pour une professionnalisation du renseignement pénitentiaire, puisqu'il accroît de 73 % le nombre des agents des CIRP et du BCRP, désormais services du deuxième cercle, en privilégiant les cadres spécialisés. Afin de synchroniser la professionnalisation de l'ensemble du réseau du renseignement pénitentiaire, en commençant par les services d'analyse, un vaste plan de formation faisant appel à des opérateurs des services du premier cercle a été arrêté par le garde des sceaux ; il est actuellement déployé par sessions successives.

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