Intervention de Benoist Apparu

Réunion du 28 septembre 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBenoist Apparu, rapporteur :

La réussite étudiante constituait l'un des deux principaux objectifs poursuivis par la loi. Le constat de départ, connu de tous, est que l'ensemble des premiers cycles de l'enseignement supérieur français connaît un taux de réussite à peu près similaire à celui des grands pays occidentaux, mais qu'il y a un atypisme de l'université, avec un taux d'échec en licence très largement supérieur à celui constaté dans les grands pays de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

L'une des explications de ce phénomène est l'échec particulièrement grave et douloureux des bacheliers professionnels à l'université puisque seulement 3 % d'entre eux obtiennent leur licence en trois ans. Le principal problème que nous rencontrons est donc celui de la gestion de l'orientation et des flux d'étudiants entrant dans l'enseignement supérieur français.

Globalement, ceux qui réussissent très bien dans la voie générale choisissent plutôt les grandes écoles, leur second choix s'orientant vers les filières courtes, notamment les instituts universitaires de technologie (IUT) ou, éventuellement, vers les licences universitaires. Le résultat est que des étudiants provenant, soit de la voie professionnelle, soit de la voie technologique, ne trouvent pas de place dans leurs débouchés naturels que sont les IUT ou les sections de technicien supérieur (STS), et se retrouvent en premier cycle universitaire général sans posséder le bagage nécessaire pour réussir leur licence.

Sur la base de ce constat pertinent, la loi ESR a proposé une réponse tout aussi pertinente : les fameux quotas applicables aux bacheliers techniques et professionnels en IUT et en STS. À ce stade, nous pensons que ce dispositif a été bien reçu, bien qu'il soit trop tôt pour en apprécier les résultats, et qu'il va dans la bonne direction. L'exercice connaît peut-être une limite, car l'application de la loi a subi le choc d'un afflux nouveau d'étudiants, tant à l'université que dans l'ensemble du système de l'enseignement supérieur. De ce fait, la loi peine à donner sa pleine mesure, le taux d'ouverture de places en IUT et BTS ne compensant pas ce flux d'arrivées dans l'enseignement supérieur.

Le Gouvernement en a pris pour partie la mesure de ce problème en proposant de créer de nouvelles places, notamment en STS. Là encore, la mise en oeuvre est longue, mais à la lumière des auditions, nous pensons que les choix retenus par la loi « Fioraso » vont dans la bonne direction.

Les auditions ont ouvert en revanche deux nouvelles problématiques.

La première est celle de la question de la sélection en master. Le système français est en décalage avec le système mondial, principalement organisé autour du parcours licence-master-doctorat (LMD) en « 3-5-8 ». Ce système n'est pas du tout appliqué en France où nous connaissons des sorties « professionnalisantes » à 2, 3, 4, 5 et 8 ans.

Il nous faudra bien un jour nous aligner sur le format en cours dans les autres pays du monde. C'est pourquoi la question de la sélection en master 1 (M1) ou master 2 (M2) trouve toute sa place. Le Gouvernement a récemment adopté un certain nombre de mesures concernant la validation juridique de la sélection à l'entrée du master 2. Beaucoup de questions se sont fait jour à ce sujet à l'occasion des auditions que nous avons tenues. Faut-il rabaisser cette sélection au niveau du master I ? Il semble que le secrétaire d'État à l'enseignement supérieur soit très ouvert sur ce sujet, quand bien même j'ai cru comprendre qu'une légère divergence d'appréciation existait avec sa ministre de tutelle.

Cette question devra bien être tranchée et, à titre personnel, je suis favorable à la sélection dès l'entrée du master 1 afin d'être en cohérence avec le système mondial.

La seconde problématique porte sur l'apparition d'un objet universitaire relativement peu connu jusqu'alors, mais qui semble se développer très rapidement : le bachelor. Ce diplôme est apparu en France il y a maintenant trois ans, il consiste en une formation de niveau bac +3. Il trouve son origine dans la réforme de l'apprentissage, qui a généré une perte d'étudiants dans beaucoup de grandes écoles, que ces dernières ont cherché à compenser à ouvrant des bachelors.

Cet objet, quelque peu particulier, car non reconnu, librement délivré par les grandes écoles dont Polytechniques ou l'École des arts et métiers vient, là encore, heurter le système 3-5-8 en créant un nouveau diplôme. Il nous faudra bien trouver une voie pour généraliser ce type de dispositif, peut-être sous un autre intitulé.

En tout état de cause, il faut revenir à l'idée, déjà exprimée il y a quelques années, d'une licence professionnelle qui devienne de fait l'outil principal d'insertion professionnelle des étudiants. Elle pourrait ainsi utilement compléter, comme c'est déjà le cas, les DUT et BTS en les généralisant et en y agrégeant le bachelor. De l'autre côté, demeurerait une licence plus générale destinée à la poursuite d'études jusqu'à bac +5. Nous devrons probablement, à un moment ou un autre, nous arrêter à ce modèle.

Voilà ce que je souhaitais dire sur la réussite étudiante, notre collègue Sandrine Doucet va maintenant évoquer la gouvernance de l'enseignement supérieur et de la recherche. Ensuite, comme il se doit pour un député de l'opposition, je réinterviendrai en conclusion pour faire connaître mes désaccords…

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