Intervention de Pascal Deguilhem

Réunion du 28 septembre 2016 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Deguilhem, rapporteur :

Nous examinons en effet ce projet de loi en procédure accélérée. Nous avons été, de prime abord, quelque peu étonnés que ce texte ait été renvoyé à la commission des Affaires culturelles et de l'Éducation alors qu'il se propose de ratifier une ordonnance dont les dispositions portent essentiellement sur les secteurs agricole, financier et funéraire, ou sur les débits de boisson. Toutefois, on le comprend mieux quand on s'aperçoit que l'ordonnance comporte également plusieurs mesures relatives aux agents artistiques ou aux manifestations sportives.

De caractère essentiellement technique, le projet de loi comporte trois articles, corrige deux malfaçons de l'ordonnance et offre l'occasion à notre commission d'apporter sa contribution à l'oeuvre de simplification entreprise depuis 2012.

L'article 10 de la loi du 20 décembre 2014 avait habilité le Gouvernement à prendre par ordonnance « toute mesure relevant du domaine de la loi aux fins de supprimer ou de simplifier les régimes d'autorisation préalable et de déclaration auxquels sont soumis les entreprises et les professionnels dans le cadre de l'exercice de leur activité, de remplacer certains de ces régimes d'autorisation préalable par des régimes déclaratifs et de définir, dans ce cadre, des possibilités d'opposition de l'administration, des modalités de contrôle a posteriori et des sanctions éventuelles, tout en préservant les exigences de garantie des libertés individuelles, des droits fondamentaux et de la santé publique, ainsi que de protection des personnes et des données à caractère personnel ».

Ce lourd travail de suppression ou de simplification des régimes d'autorisation, voire de remplacement de ces derniers par des régimes déclaratifs, a été entrepris dans la volonté de consacrer le principe, énoncé par le Président de la République en mai 2013, selon lequel le silence de l'administration vaut son accord. Il s'agit d'une rupture, puisque le silence de l'administration valait traditionnellement rejet.

M. Hugues Fourage, qui avait rapporté le projet de loi habilitant le Gouvernement à simplifier les relations entre l'administration et les citoyens, rappelait que ce changement constituait une révolution administrative. Les services de l'État ont ainsi mené des recherches approfondies qui ont abouti à modifier de nombreux régimes d'autorisation. Selon notre collègue, cette évolution ne s'apparentait pas à une dérégulation, notre société nécessitant la présence de normes claires et comprises par tous. Mais les régimes d'autorisation avaient fini par former un ensemble bien trop complexe et opaque qu'il fallait revisiter. On a donc procédé à des allégements de contraintes, comme la réduction des délais de procédure administrative et le remplacement de régimes d'autorisation par des régimes déclaratifs.

Aujourd'hui, à travers la ratification de l'ordonnance du 17 décembre 2015 portant simplification de certains régimes d'autorisation préalable et de déclaration des entreprises et des professionnels, c'est cet immense travail d'amélioration des relations entre le public et l'administration qu'il nous est proposé de conforter.

L'article 1er du présent projet de loi a donc pour objet de ratifier cette ordonnance qui contient des mesures touchant un large spectre d'activités professionnelles. Le texte met notamment fin à l'obligation de déclaration auprès de l'autorité administrative de toute compétition, rencontre, démonstration ou manifestation publique de quelque nature que ce soit, dans une discipline sportive, lorsqu'elle n'est pas organisée ou autorisée par une fédération sportive agréée. L'autorité administrative compétente conservera néanmoins la possibilité d'interdire la tenue d'une manifestation sportive lorsqu'elle présente des risques d'atteinte à la dignité, à l'intégrité physique ou à la santé des participants.

Toutefois, la suppression des dispositions prévoyant cette obligation de déclaration a, par contrecoup, retiré à l'Agence française de lutte contre le dopage (AFLD) la compétence qu'elle tenait de l'ordonnance du 30 septembre 2015 relative aux mesures législatives nécessaires au respect des principes du code mondial antidopage, pour diligenter des contrôles pendant les manifestations sportives soumises à une procédure de déclaration prévue par le code du sport. Si l'on s'en tenait au texte de l'ordonnance du 17 décembre 2015, l'AFLD ne pourrait plus effectuer de contrôles pendant les manifestations sportives qui ne sont pas organisées ou autorisées par une fédération sportive agréée. Je vous laisse imaginer les conséquences désastreuses que cela pourrait avoir sur la santé des sportifs participant à ces manifestations.

C'est la raison pour laquelle l'article 2 du projet de loi propose de corriger cette malfaçon en redonnant à l'AFLD la possibilité de réaliser des contrôles pendant les manifestations sportives qui ne sont pas organisées par une fédération agréée ou autorisées par une fédération délégataire, dès lors qu'elles donnent lieu à une remise de prix en argent ou en nature.

En complément du rétablissement de ce pouvoir de contrôle des sportifs de l'AFLD, l'article 2 élargit le panel de sanctions dont dispose l'AFLD : à l'encontre des sportifs, tout d'abord, qui auraient détenu ou utilisé – ou tenté de le faire –, sans raison médicale dûment justifiée, une ou plusieurs substances ou méthodes interdites, mais également contre les personnes qui ont prescrit, administré, acquis, fabriqué ou cédé des produits dopants.

Il s'agit de permettre à l'AFLD d'interdire, sur le fondement des recommandations de l'Agence mondiale antidopage (AMA), aux sportifs précités de participer aux compétitions donnant lieu à une remise de prix en argent ou en nature – quand bien même elles ne seraient pas autorisées par une fédération délégataire ou organisées par une fédération agréée – et aux personnes autres que ces sportifs de participer à l'organisation ou au déroulement de ces manifestations.

En somme, l'article 2 propose de mettre en place un dispositif cohérent visant à éviter que ne se développent, en dehors du cadre des fédérations, des manifestations sportives qui ne feraient pas l'objet de contrôles antidopage ainsi que des comportements répréhensibles non sanctionnés.

Enfin, l'article 3 corrige lui aussi une malfaçon de l'ordonnance, qui concerne le domaine financier. Avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance, l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR) – produit de la fusion de l'instance de contrôle bancaire et de celle de contrôle des assurances – était « saisie pour avis de toute proposition de nomination ou de renouvellement du mandat des commissaires aux comptes des organismes soumis à son contrôle » ; par ailleurs, elle pouvait, lorsque la situation le justifiait, procéder à la désignation d'un commissaire aux comptes supplémentaire dans les organismes des secteurs bancaire et assurantiel.

Les modifications apportées par l'ordonnance du 17 décembre 2015 au code monétaire et financier ont conduit, en raison de l'omission d'une référence, à limiter la possibilité pour l'ACPR de désigner un commissaire aux comptes supplémentaire aux seuls organismes soumis à son contrôle qui relèvent du secteur de la banque, des services de paiement et des services d'investissement. L'ACPR a par conséquent perdu la faculté qu'elle avait jusqu'alors de désigner, lorsque la situation le justifiait, un commissaire aux comptes supplémentaire dans les organismes du secteur de l'assurance, alors même que le maintien de cette faculté était la contrepartie nécessaire à la suppression de la procédure d'avis préalable.

L'article 3 rectifie cette erreur. Je vous proposerai un amendement opérant des corrections d'ordre purement rédactionnel et légistique visant à adapter les modifications apportées au code monétaire et financier en Nouvelle-Calédonie, en Polynésie française et dans les îles Wallis-et-Futuna.

J'ai également repris un amendement déposé avec quelques collègues à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à l'égalité et à la citoyenneté, qui avait été adopté par l'Assemblée nationale, mais qui a depuis été supprimé par le Sénat pour des raisons qui ne tenaient pas au fond du sujet. Il apportera plus d'épaisseur et de cohérence à ce projet de loi.

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