Intervention de Marietta Karamanli

Réunion du 18 octobre 2016 à 17h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMarietta Karamanli, co-rapporteure :

Ce principe a également présidé à notre analyse des autres aspects du paquet législatif. C'est pourquoi nous ne pouvons que saluer les efforts de la Commission pour réduire le « value gap », ou fossé de valeur, qui existe, dans la nouvelle chaîne de valeur culturelle, entre acteurs de la filière, notamment entre créateurs et diffuseurs et distributeurs notamment. Il convient en particulier que les créateurs soient rémunérés à hauteur de la valeur que confère aux distributeurs leur exploitation. Les plateformes, en particulier, doivent contribuer, non seulement à adapter la rémunération proposée aux ayants droit si les oeuvres connaissent un plus grand succès qu'attendu, via des avenants aux contrats, mais plus largement, les nouveaux géants de l'internet doivent comprendre qu'ils sont désormais une responsabilité partagée en ce qui concerne la création et son financement. Pour la préserver, nous estimons que :

– un droit voisin, tel qu'il est instauré pour les éditeurs de presse, est le bienvenu, même s'il ne doit pas être imposé au mépris de solutions contractuelles qui fonctionnent actuellement dans les États membres ;

– il serait pertinent d'aller plus loin qu'un unique considérant dans une directive, tel qu'il est exposé actuellement. En particulier, nous continuons de soutenir fermement l'idée de revoir le régime de responsabilité des hébergeurs, qui date de la directive « commerce électronique » de 2000, d'une façon plus restrictive. Nous ne pouvons plus tolérer que des plateformes qui organisent, valorisent et hiérarchisent leurs contenus soient encore considérées comme de simples hébergeurs passifs.

Mais, surtout, la préservation de la création dans toute sa diversité implique que soit laissé intact ce qui en constitue le fondement, à savoir le principe de territorialité. C'est à ce titre que nous souhaitons affirmer notre opposition forte à l'application du principe du pays d'origine aux services en ligne, sur le modèle de la directive « câble et satellite ». Outre le risque que cette application recèle pour le respect des libertés contractuelles, son extension indifférenciée pourrait être lourde de menaces et d'effets pour le modèle de financement de la culture tel que nous le pratiquons en France. À l'heure où les grands acteurs traditionnels, privés et publics, peinent à assurer le financement pérenne d'une scène culturelle et audiovisuelle variée, il serait fort malvenu d'amputer encore un peu plus leurs revenus. Si nous voulons préserver les oeuvres, dans leur diversité, et continuer à soutenir la culture européenne, des concerts de hautbois à Vienne jusqu'aux courts-métrages exposés dans votre circonscription, madame la présidente, assurons-nous du respect de la territorialité des droits !

Il nous semble non seulement possible mais aussi indispensable de concilier la nécessaire liberté d'accès aux oeuvres avec les droits des auteurs.

Voilà pourquoi nous vous proposons d'adopter la résolution européenne qui vous est soumise, afin que le chemin que semble vouloir emprunter la Commission, globalement conforme à nos attentes, malgré ce dernier point particulièrement inquiétant, dessine une voie équilibrée, préservant les droits des créateurs mais aussi propice à la circulation des oeuvres.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion