Intervention de Philippe Folliot

Séance en hémicycle du 24 novembre 2016 à 15h00
Statut de l'île de clipperton — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPhilippe Folliot, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République :

Je voudrais aussi indiquer, madame la secrétaire d’État, qu’aucun gouvernement ne s’était occupé du devenir de cette île comme le gouvernement actuel s’en occupe – il est vrai que nous avons été quelques-uns à y contribuer, ne serait-ce que par nos déplacements et nos prises de position. Mais un certain nombre de choses ont été faites, et cela mérite d’être souligné. À l’occasion d’une audition par la commission de la défense, il y a quelques années, le chef d’état-major de la marine de l’époque nous avait expliqué que, même si le contrat d’objectifs prévoyait une visite par an sur l’île, vu les moyens qui lui étaient octroyés, la marine ne ferait qu’une visite tous les trois ans. On ne peut pas prétendre assurer de manière efficace et pérenne la souveraineté sur un territoire en ne faisant qu’une visite tous les trois ans ! J’ai toutefois en mémoire l’émouvante cérémonie à laquelle j’avais assisté quand je m’étais rendu sur place ; nous avions hissé les couleurs, chanté La Marseillaise, ce fut un moment émotionnellement fort et intense.

Vous avez bien fait, madame la secrétaire d’État, de rappeler l’importance de la mission accomplie par mon compatriote tarnais Jean-Louis Étienne en 2005. La couverture médiatique dont a bénéficié cette mission a permis une meilleure connaissance de l’île, la vulgarisation des enjeux et des informations.

Vous avez insisté sur les questions scientifiques. L’étude de la connectivité entre milieu terrestre et milieu marin soulève en effet des enjeux tout à fait intéressants, de même que l’étude de la lutte entre les espèces, puisqu’il y eut successivement sur l’île la civilisation du cochon, puis, quand les cochons eurent été tués, celle du crabe et, maintenant, celle du rat, qui est en train de prendre le dessus sur le crabe.

Vous avez fait plusieurs observations relatives au changement de nom. En réalité, il s’agit, non pas de changer le nom de l’île, mais d’accoler « La Passion » à « Clipperton ». Nous sommes tous ici conscients que nous ne pouvons pas prendre une décision qui entraînerait une modification constitutionnelle : on ne va pas réunir le Parlement à Versailles simplement pour changer le nom de l’île de Clipperton ! Cela étant, pour la petite histoire, Clipperton était un flibustier anglais aux moeurs à bien des égards violentes. Imagine-t-on les Britanniques donner le nom d’un pirate français à une de leurs îles ?

Il est essentiel d’avoir à l’esprit les enjeux scientifiques internationaux du statut de l’île. Les nombreuses personnes présentes au colloque organisé à l’Assemblée le 15 octobre 2015 et, au-delà, tous les scientifiques que j’ai rencontrés à l’occasion de la préparation de mon rapport l’ont souligné : il s’agit d’un enjeu scientifique majeur. À un moment où un autre, il faudra que nous y répondions.

Quel contraste saisissant avec la politique de la Chine dans les îles Spratley et, plus particulièrement, sur l’îlot de Fiery Cross ! Cet îlot, qui était totalement inhabité, a été bétonné et aménagé ; les Chinois y ont développé une stratégie de long terme, visant à le transformer en île, ce qui n’est pas anodin par rapport à l’application de la convention de Montego Bay, puisque la différence fondamentale entre un îlot et île, c’est qu’un îlot n’engendre pas de zone économique exclusive, contrairement à une île. On voit aujourd’hui la Chine, presque fière et sûre d’elle-même, transformer des îlots en îles, en vue d’accroître sa zone économique exclusive et son domaine maritime, alors que nous, nous prenons le risque, à terme – parce que, même si la souveraineté française sur les deux kilomètres carrés de terres immergées n’est pas actuellement remise en cause…

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