Intervention de Sébastien Pietrasanta

Réunion du 23 novembre 2016 à 10h00
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSébastien Pietrasanta :

En juillet dernier, mon collègue Georges Fenech et moi-même avons remis au président de l'Assemblée nationale le rapport de la commission d'enquête relative aux moyens mis en oeuvre par l'État pour lutter contre le terrorisme depuis l'attentat du 7 janvier 2015. Dans le cadre de notre travail, nous avons rencontré un certain nombre de responsables à Bruxelles ainsi qu'au sein d'Europol et d'Eurojust, et nous avons eu le sentiment assez unanime, ainsi que je l'ai écrit dans le rapport, que l'Europe avait certes progressé – au regard de ce que vous nous avez dit, elle va continuer à le faire, notamment grâce aux trois textes en cours de discussion –, mais qu'elle n'avait pas encore atteint le niveau requis en matière de lutte contre le terrorisme. Dans notre rapport, nous avons notamment mis en exergue deux points faibles que vous n'avez pas évoqués.

Il s'agit, premièrement, du SIS. Comme vous le savez, le 14 novembre 2015, quelques heures après les attentats, M. Salah Abdeslam a été contrôlé par la gendarmerie française à Cambrai. Celle-ci a alors consulté le fichier SIS à travers le bureau SIRENE France. Or, outre que le SIS avait été mal renseigné par nos amis et collègues belges, le SIS ne comporte pas de système qui permettrait à un État membre, en cas d'attentat majeur sur son territoire, d'obtenir des renseignements sur la base desquelles il pourrait procéder à des interpellations ou, à tout le moins, à des retenues. Depuis lors, nous avons adopté, en France, la loi du 3 juin 2016, qui permet la retenue pendant plusieurs heures pour vérification. Que pourrait faire l'Europe pour que les États membres renseignent mieux le SIS ? Ne faut-il pas ajouter une « case » au SIS pour qu'il soit opérationnel dans les moments particuliers tels que ceux que la France a connus le 13 novembre 2015 ou que d'autres pays européens ont connus ?

Deuxièmement, lorsque nous nous sommes rendus en Grèce, nous nous sommes rendu compte avec un certain effarement que, plusieurs mois après le début de la crise migratoire et un mois après les attentats du 13 novembre, l'Union européenne avait décidé de n'envoyer qu'un seul agent d'Europol pour aider ses collègues de Frontex à contrôler les migrants. Or on sait qu'un certain nombre de commandos qui ont cherché à toucher la France le 13 novembre et y sont parvenus ou non sont passés par la route des migrants. Tel serait également le cas de M. Abdelhamid Abaaoud. L'Europe a donc eu un certain retard à l'allumage. Pouvez-vous nous dire où nous en sommes en ce qui concerne le concours qu'Europol apporte à Frontex ?

Vous avez indiqué que la directive relative à la lutte contre le terrorisme visait à harmoniser les législations nationales afin de pénaliser les départs en Syrie et en Irak et les retours depuis ces pays. Selon des chiffres qui circulent, 3 000 à 5 000 ressortissants européens qui sont actuellement dans cette zone seraient susceptibles de revenir en Europe. Qu'en est-il ? Quelle est l'action de l'Europe en la matière ?

En dépit de la volonté politique et des progrès indéniables qui ont été accomplis depuis les attentats du 13 novembre 2015 à Paris et du 22 mars 2016 à Bruxelles, nous avons le sentiment que les choses ne vont pas suffisamment vite à l'échelle européenne, que l'Europe n'est pas encore à la hauteur de l'enjeu en matière de lutte contre le terrorisme, alors que cet enjeu est non seulement national, mais européen, que la menace est présente et qu'il est urgent d'agir : ainsi que M. Patrick Calvar, directeur général de la sécurité intérieure, l'a rappelé hier à ses équipes, la France et l'Europe risquent d'être à nouveau particulièrement frappées au cours des semaines ou des mois qui viennent.

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