Intervention de Georges Fenech

Réunion du 8 décembre 2016 à 9h00
Commission d'enquête sur les conditions d'octroi d'une autorisation d'émettre à la chaîne numéro 23 et de sa vente

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaGeorges Fenech :

Je remercie le président et le rapporteur pour la qualité du travail accompli. Il n'était pas évident de rassembler autant d'éléments en six mois.

Vous avez estimé, monsieur le président, que le rapporteur avait mené une enquête à charge. Permettez-moi d'apporter une nuance à ce sujet : pour ma part, je ne lui fais pas de procès d'intention et je lui fais crédit d'une totale honnêteté intellectuelle.

Cela dit, ce rapport aura un impact dont nous ne mesurons peut-être pas encore l'importance aujourd'hui. Lorsqu'il sera rendu public, dans cinq jours, qui pourra encore croire à l'indépendance du CSA et à la qualité de son travail ? Le rapport aura, à mon avis, un effet dévastateur pour l'ensemble du monde audiovisuel. Toutefois, l'importance des conséquences ne doit pas nous empêcher de mettre le doigt sur un certain nombre de questions soulevées dans le rapport.

En réalité, rien ne va. Le CSA fonctionne mal, et ses procédures elles-mêmes sont en cause : faut-il un collège unique ou des collèges spécifiques ? Selon le rapporteur, le CSA est presque de connivence avec le pouvoir exécutif, du moins en est-il trop proche. La question des règles de déontologie se pose de manière extrêmement forte. Le CSA est même incapable de motiver correctement ses décisions : lorsqu'il a invoqué le motif de la fraude pour retirer l'autorisation d'émettre à la chaîne Numéro 23, il aurait dû se douter, apparemment, que le Conseil d'État annulerait cette décision. On en vient à se demander à qui on a affaire !

Si l'on admet que la sévérité du rapport à l'égard de l'institution est totalement fondée, quelles conséquences devons-nous en tirer ? Pour ma part, je trouve qu'il y a une disproportion entre le constat accablant qui est fait et les propositions qui sont formulées in fine. Après la publication d'un tel rapport, nous n'allons pas pouvoir continuer avec le CSA tel qu'il est comme si de rien n'était. Or, passez-moi l'expression, la montagne va accoucher d'une souris : la réponse essentielle apportée dans ce rapport est que tout va se régler par un contrôle parlementaire. À qui fera-t-on croire qu'un contrôle parlementaire constituera la garantie totale et absolue d'un fonctionnement idéal du CSA à l'avenir ? Rappelons que le Parlement est, qu'on le veuille ou non, un organe politique, soumis aux alternances. Je crains que l'on ne porte le fer contre une institution – la présidence antérieure et la présidence actuelle étant visées l'une et l'autre – sans apporter les réponses nécessaires par nos propositions.

En réalité, nous devons nous poser la question suivante : faut-il un nouveau CSA ? Faut-il légiférer à nouveau ? Je reviens à l'idée que j'avais soumise lorsque nous avons auditionné le président Schrameck, qui avait paru assez convaincu de son bien-fondé : compte tenu de la suspicion généralisée d'influences et d'intérêts divers, ne faudrait-il pas que les membres du CSA prêtent serment, à l'image des membres du Conseil d'État ou des magistrats ? À cette occasion, ils s'engageraient à respecter leurs obligations déontologiques, la violation de celles-ci étant passible de sanctions – sachant qu'il serait toujours possible de rechercher l'existence d'une infraction pénale. Une telle cérémonie de prestation de serment conférerait une solennité supplémentaire à la fonction et permettrait de rappeler ces obligations.

Je suis très inquiet, car la presse va bien évidemment s'emparer de ce rapport. Il soulève de vraies questions et met en lumière certaines pratiques, tout en les jugeant peut-être sévèrement. Mais pouvons-nous nous contenter des neuf propositions qu'il contient ? Pour ma part, je ne suis pas certain qu'elles apportent une véritable réponse – or telle est notre responsabilité – à tous les dysfonctionnements et défaillances, voire davantage, qui ont été révélés dans ce rapport.

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