Intervention de Valérie Fourneyron

Réunion du 24 avril 2013 à 16h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Valérie Fourneyron, ministre des sports, de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative :

Depuis sa nomination, le Gouvernement n'a eu de cesse de se mobiliser en faveur de la jeunesse, priorité du quinquennat : je suis heureuse d'avoir l'occasion d'échanger avec vous sur les avancées et les chantiers en cours. Bien sûr, beaucoup reste à faire ; mais, à l'heure des premiers bilans, nous pouvons, je crois, nous réjouir collectivement du chemin parcouru.

Notre engagement a été formalisé par la feuille de route que s'est fixée le gouvernement le 21 février dernier, et qui vous a été transmise.

En 2013, 82 milliards d'euros – soit une augmentation de 7 % – ont été dédiés aux politiques de la jeunesse. Dans une période où la dépense publique est contrainte – je salue d'ailleurs la réduction en 2012, pour la première fois, des dépenses de l'État –, les ministères ont fait des choix pour dégager plus de moyens pour la jeunesse.

Cette priorité naît de la triste situation faite aujourd'hui aux jeunes. Ils doivent pouvoir vivre dignement, accéder à une formation ou à un emploi, disposer d'un logement et pouvoir se projeter dans un avenir en toute sécurité. Nous créons les conditions pour qu'ils y arrivent. C'est un chantier de longue haleine, car il y a beaucoup à reconstruire.

Le 29 octobre dernier, devant votre Commission, j'avais évoqué les mesures déjà prises, qui constituent un socle important : emplois d'avenir, investissement massif dans l'éducation nationale, limitation des loyers dans les aires urbaines, montée en charge du service civique… Par-delà ces mesures, qui portent déjà leurs fruits, je vous avais parlé de la préparation d'un Comité interministériel de la jeunesse (CIJ). Depuis le mois d'octobre jusqu'au 21 février dernier, et pour la première fois, les services de vingt-quatre ministères ont travaillé ensemble pour donner du corps à ce Comité. Dans le même temps, j'ai rencontré de nombreux acteurs des politiques de la jeunesse, au niveau national comme au niveau local : associations, réseaux de collectivités, services de l'État et jeunes eux-mêmes.

L'ampleur de cette concertation était inédite parce que l'objectif n'avait jamais été aussi ambitieux : conduire une politique nouvelle pour la jeunesse, agir sur le long terme sans se satisfaire d'effets d'annonce.

Ce 21 février, jour où s'est tenu le Comité interministériel de la jeunesse, a illustré notre méthode : un travail collectif de l'État, mais aussi une co-construction avec les jeunes, puisque le Premier ministre et moi-même avons rencontré les membres du Forum français de la jeunesse, les militants politiques, syndicaux, les associations lycéennes…

Le Comité interministériel a permis d'adopter quarante-sept mesures, qui forment une réponse structurelle, solide et cohérente pour tenir la promesse faite par le Président de la République, et qui concerne toute la nation : « faire que les jeunes vivent mieux en 2017 qu'en 2012 ».

C'est autour de quatre axes fondamentaux que nous avons choisi d'organiser cette transformation en profondeur de l'action publique à destination de la jeunesse : favoriser le droit commun pour l'accès aux droits sociaux, plutôt que les dispositifs dérogatoires illisibles ; viser l'autonomie tout en sécurisant les parcours ; lutter contre les inégalités et les discriminations ; encourager la participation des jeunes et la co-construction des politiques publiques.

Les quarante-sept mesures que je citais apportent des réponses concrètes aux attentes exprimées par les jeunes eux-mêmes. Ainsi, la « Garantie jeunes » permettra à terme à 100 000 jeunes de disposer d'un filet de sécurité pour trouver un emploi ou une formation ; la création d'un service public d'information, d'accompagnement et d'orientation répondra aux besoins des jeunes dans toute leur diversité ; la mise en place d'une garantie universelle des loyers et l'optimisation du droit commun faciliteront l'accès des jeunes au logement ; la mobilité européenne et internationale sera accrue et diversifiée ; nous voulons enfin que la France devienne exemplaire en matière de participation des jeunes à la vie publique et aux institutions démocratiques.

Ne cherchez pas ici de mesure spectaculaire ou d'annonce propre à alimenter les polémiques ! Ce que nous voulons mettre en valeur, c'est un travail collectif, et un travail de fond. Nous avons aussi été attentifs à nous adresser à tous les jeunes.

Le gouvernement encourage la création d'entreprises par des jeunes, notamment dans le secteur de l'économie sociale et solidaire, par le micro-crédit, la garantie de la Banque publique d'investissement, et la création d'un centre de ressources dédié.

Pour la première fois, ce CIJ dote également l'État d'un tableau de bord pour suivre les évolutions de façon transparente et mesurer d'année en année l'efficacité de nos politiques publiques en faveur de la jeunesse. Ainsi, chaque année, nous pourrons corriger, améliorer, partager. Il y aura désormais un rapport annuel, un Comité interministériel annuel – il n'y en avait eu qu'un seul dans les dix dernières années – et un discours annuel du Premier ministre devant le Parlement pour dresser le bilan de l'action menée et tracer les perspectives de l'année à venir.

Deux mois se sont écoulés depuis ce 21 février : si tous les acteurs de jeunesse ont salué cette nouvelle page qui s'écrivait, ils nous ont dit aussi leur impatience d'en voir les résultats. Nous avons donc accéléré la mise en place des études et des concertations nécessaires. Ainsi, pour mettre en place la « Garantie jeunes », se déroule en ce moment un groupe de travail associant tous les acteurs concernés : services de l'État, missions locales, collectivités locales, associations, organisations de jeunes, professionnels de l'action sociale et jeunes suivis par les missions locales. C'est une co-construction réelle et très concrète. Le dispositif sera expérimenté dès le mois de septembre dans dix territoires.

Nous sommes tous ici, je crois, persuadés de l'intérêt d'une expérience internationale pour les jeunes. La priorité donnée à la mobilité passe, elle aussi, par une mobilisation collective importante pour que le futur programme « Erasmus pour tous » soit bien construit et suffisamment bien doté : davantage de jeunes doivent pouvoir vivre une expérience de mobilité, dans le cadre de leurs études ou tout simplement de leurs projets individuels. C'est ce que nous nous efforçons d'obtenir au Conseil européen. Nous travaillons également à la construction du comité de pilotage national, pour favoriser l'accès de tous à l'information et rendre lisible l'offre de mobilité – elle ne l'est pas aujourd'hui, les jeunes nous l'ont dit. Un Comité permanent des opérateurs de ce secteur – Erasmus, Agence Europe-Éducation-Formation France (2E2F), Agence française du Programme européen jeunesse en action (PEJA), Office franco-québécois de la jeunesse, Office franco-allemand de la jeunesse, collectivités locales… – se réunira donc en juin prochain pour travailler sur cet aspect.

Plusieurs inspections générales travaillent en ce moment sur les scenarii possibles pour la mise en place d'une allocation d'étude et de formation sous condition de ressources, mesure largement attendue par les acteurs de jeunesse.

Nous allons expérimenter dans six régions, à la rentrée, le nouveau service public de l'orientation. D'autres chantiers sont en cours : lutte contre le décrochage scolaire, rationalisation des dispositifs d'information, accès aux loisirs éducatifs, valorisation des expériences associatives et de l'engagement, lutte contre les discriminations, emplois francs…

En parallèle, a débuté la déclinaison de ce travail interministériel sur le territoire. J'ai demandé à tous les préfets de région d'organiser des Comités d'administration régionale sur la jeunesse. J'ai présidé le premier d'entre eux, en Auvergne, le 22 mars ; de nombreux autres suivront. Ils permettront à tous les services de l'État de se retrouver et de travailler de manière suivie, cohérente et transversale.

Enfin, la création d'une Délégation interministérielle à la jeunesse et la réforme des opérateurs sont en cours : nous pourrons ainsi continuer de piloter ces politiques, puisque la plupart des actions dont je vous parle ne dépendent pas, vous le savez, de mon ministère. Cette démarche d'organisation interne s'inscrit dans le cadre de la modernisation de l'action publique – il ne s'agit pas, cette fois, d'une réforme de contrition mais de partir de nos ambitions pour organiser, décloisonner, perfectionner.

Vous le voyez, les choses avancent – toujours trop lentement au regard de la situation des jeunes, évidemment, mais elles avancent.

Dans cette même période, mon ministère a également été au premier plan dans la concertation sur la refondation de l'école, en affirmant une conception ouverte de l'éducation, ouverte sur les temps non scolaires car l'avant, l'entre et l'après classe sont aussi longs que le temps passé dans la classe. En matière d'accès aux loisirs éducatifs, aux sports, ou aux pratiques artistiques, il faut d'ailleurs admettre que les inégalités entre enfants sont plus fortes en dehors de l'école qu'à l'école.

C'est la raison pour laquelle la réforme des rythmes éducatifs doit favoriser une meilleure prise en charge publique dans le cadre périscolaire pour permettre une plus grande participation des enfants à ces activités diversifiées : pour la première fois, le périscolaire n'est plus regardé comme un simple prolongement du temps scolaire mais bien comme un complément. Le projet de loi de refondation de l'école jette cette passerelle indispensable au bien-être des enfants entre l'éducation formelle et non formelle. C'est bien là tout le sens des projets éducatifs territoriaux (PEDT), dont nous avons co-rédigé la circulaire de mise en oeuvre : cette réforme est une occasion extraordinaire pour soutenir l'éducation populaire en aidant les associations qui ont souvent la responsabilité des activités périscolaires.

Le projet éducatif territorial est élaboré à l'initiative des communes ou des EPCI. Il prend la forme d'un engagement contractuel entre ces collectivités, les services de l'État et les autres partenaires, monde associatif et caisses d'allocations familiales notamment. Les activités éducatives qu'il propose peuvent s'articuler avec les parcours d'éducation artistique et culturelle, de même qu'avec les projets conçus sur le temps extrascolaire, notamment en matière d'offre d'activités physiques et sportives.

La question de l'accès aux loisirs tout au long de l'année, notamment pour les adolescents, se pose également. Nous partageons d'ailleurs cette préoccupation avec vous, puisque vous avez créé une mission d'information sur l'accessibilité des jeunes aux séjours collectifs et de loisirs. Des initiatives devront être prises à l'issue de ces travaux, comme à l'issue de ceux du Haut conseil à la famille sur la diversité de l'offre et les disparités territoriales d'accès aux services collectifs d'accueil et de loisirs des enfants et des adolescents.

En matière de soutien à la vie associative, l'action de mon ministère s'inscrit dans une dimension inter-ministérielle forte et dans la volonté de concertation avec les acteurs associatifs, et plus particulièrement avec leurs coordinations représentatives, notamment la Conférence permanente des coordinations associatives (CPCA), et les collectivités territoriales.

Des engagements forts ont été pris et commencent à être mis en oeuvre. Ainsi, je souhaite encourager l'engagement bénévole avec la mise en place d'un congé d'engagement bénévole pour les actifs. Un travail est en cours pour étudier les conditions d'un élargissement du congé de représentation qui permettrait aux bénévoles actifs de disposer d'un crédit de temps pour l'exercice de leurs responsabilités associatives. Le Haut conseil de la vie associative a émis un avis ; le travail est en cours avec les partenaires sociaux et le ministère du travail.

J'ai également souhaité instaurer un dialogue continu et une relation de confiance avec le mouvement associatif. J'ai donc confié au début de l'année 2013 au préfet Jean-Pierre Duport et au sénateur Claude Dilain une mission de pilotage de la rédaction d'une nouvelle charte d'engagements réciproques entre l'État, les associations et les collectivités territoriales. Cette nouvelle charte s'inscrira dans la continuité de celle qui avait été élaborée lors du centenaire de la loi de 1901. Mais, aujourd'hui, les collectivités territoriales sont associées aux travaux car elles sont devenues des interlocuteurs incontournables des associations sur les territoires.

La charte devrait être signée par le Premier ministre et l'ensemble des parties prenantes – dont des regroupements de collectivités territoriales : l'Association des maires de France (AMF), l'Association des régions de France (ARF), l'Assemblée des départements de France (ADF), l'Association des maires de grandes villes de France (AMGVF) et le Réseau des collectivités territoriales pour une économie solidaire (RCTES) – au cours du deuxième semestre 2013. Elle actualisera les principes partagés par la puissance publique et le secteur associatif en 2001 et proposera des mécanismes de mise en oeuvre et d'évaluation pour les faire vivre. Des déclinaisons opérationnelles au plan sectoriel et territorial sont également prévues.

Le soutien de mon ministère aux acteurs associatifs passe aussi par un travail important sur la sécurisation des modalités de financement public des associations. La mise en oeuvre de logiques de mise en concurrence et l'impact de la réglementation européenne sur les aides d'État et sur la commande publique ont considérablement fragilisé les conditions du partenariat entre les associations et les collectivités publiques. Mon ministère a donc mis en place, à la fin de l'année 2012, avec le ministère délégué à l'économie sociale et solidaire, une concertation avec l'ensemble des acteurs, afin de répondre au besoin de sécurité juridique des collectivités qui nouent des partenariats avec les acteurs associatifs, tout en reconnaissant l'initiative associative et en la légitimant, par le renforcement de l'assise juridique de la subvention.

Une partie de ce chantier prendra place dans le projet de loi sur l'économie sociale et solidaire qui sera présenté en conseil des ministres dans le courant du mois de juillet, avec en particulier une disposition législative visant à donner une définition légale de la subvention, afin de donner à celle-ci l'assise juridique forte qui lui fait défaut aujourd'hui.

Voilà résumées les actions que j'ai conduites depuis un peu moins d'une année dans le domaine de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative. La situation de notre jeunesse appelait des actions fortes, et le gouvernement a agi fortement. Cette action est menée avec les parlementaires, mais aussi avec toutes celles et tous ceux qui agissent dans le champ de la jeunesse, de l'éducation populaire et de la vie associative. Je crois à l'intelligence collective et au travail en commun. C'est la raison pour laquelle j'aime à dire que mon bureau est ouvert à toutes celles et à tous ceux qui souhaitent participer à l'élaboration d'une politique ambitieuse et cohérente.

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