Intervention de Daniel Fasquelle

Réunion du 14 mai 2013 à 17h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDaniel Fasquelle :

Je partage les réserves de nombreux présidents d'universités, étudiants et syndicats d'enseignants à l'égard de ce texte qui me paraît bavard, voire dangereux.

Le projet se paie de grands mots quand plusieurs articles se résument à un catalogue de bonnes intentions, sans portée législative. Il ne traite pas en revanche des conditions de vie des étudiants, alors que la précédente majorité avait attribué aux étudiants un mois de bourse supplémentaire. Quant au programme de construction de logements, il est très insuffisant. Or, l'urgence est là. Le texte ne s'attaque pas non plus de manière concrète à l'échec des étudiants au cours des trois premières années, l'article 17 demeurant bien flou. Si le projet de loi vise à désarticuler les premiers cycles des universités et à baisser le niveau de la licence pour faire reculer l'échec universitaire, il fait fausse route. Il conviendrait plutôt de réformer le système du tutorat ou la semestrialisation.

Le texte passe donc à côté des vrais sujets. Mais il est en outre dangereux, en ce qu'il instaure une centralisation excessive. Le président de l'UNEF a déclaré que « l'instauration d'un cadrage national des diplômes va mettre fin à la liberté d'initiative des universités ». Pensez-vous que cela soit judicieux, alors même que les universités ont besoin d'une plus grande liberté pour adapter leurs formations ou leurs programmes de recherche aux attentes à la fois des étudiants et des acteurs locaux ? Les universitaires sont mieux à même que Paris de décider de l'orientation à donner à leurs formations ou à leurs recherches.

Par ailleurs, en matière de gouvernance, le texte, en prévoyant les communautés d'universités et établissements, crée une vraie « usine à gaz ».

Enfin, renoncer à enseigner dans notre langue au sein de notre université, comme le prévoit l'article 2, représente un très grave abandon de souveraineté intellectuelle et culturelle. Demain, des masters et des laboratoires de recherche ne travailleront plus qu'en anglais. Or, si nous travaillons dans une autre langue que le français dans des disciplines techniques d'innovation, nous ne disposerons bientôt plus des mots nous permettant d'exprimer l'avenir. Les langues commencent de disparaître quand elles ne sont plus capables de formuler le langage technique et qu'elles ne sont plus pratiquées par les élites. La France doit défendre la langue française. Quel message envoyez-vous aux pays francophones et aux étudiants qui apprennent le français de par le monde, si vous autorisez les universités françaises à ne plus enseigner en français ? La Commission des affaires culturelles se doit de défendre la langue et la culture françaises.

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