Intervention de Pouria Amirshahi

Réunion du 14 mai 2013 à 21h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPouria Amirshahi :

Je suis tout prêt, madame la ministre, à travailler à des amendements de précision susceptibles de « muscler » le dispositif. Cela dit, hormis le mien, ces amendements ne me convainquent pas. L'article 2, je l'ai dit, ne me convient pas. Mais si d'aventure il était adopté, je m'efforcerai que l'on évite ce que je crains.

Vous avez raison de distinguer la question de l'enseignement des langues en France et celle de l'attractivité de notre enseignement supérieur pour les étudiants étrangers.

Il est exact que la France n'est pas bonne en matière d'apprentissage des langues et que nous devons offrir à notre jeunesse, de l'école primaire à l'enseignement supérieur, la possibilité d'apprendre les grandes langues du monde : l'anglais, bien sûr, mais aussi l'arabe, le chinois et l'espagnol. Ce point fait consensus depuis très longtemps. Or les ministres de l'éducation nationale se succèdent et nous en sommes toujours au même point !

Pour éviter la discrimination entre grandes écoles et universités dont parlait le rapporteur, il faut travailler en amont à ce que les futurs étudiants des universités maîtrisent bien les langues. Aujourd'hui, la plupart des étudiants qui suivent les filières bilingues des grandes écoles sont déjà bilingues à l'entrée. Contrairement aux étudiants qui n'ont pas bénéficié des enseignements nécessaires, ils ne connaissent pas l'insécurité linguistique.

Faire venir des enseignants qui exerceront en anglais représente un coût. Cet argent ne serait-il pas mieux employé à envoyer nos étudiants en immersion à l'étranger avec de vraies bourses, dans le cadre du programme européen Erasmus ? L'immersion, on le sait, est le meilleur moyen d'apprendre une langue.

Par ailleurs, je suis moi aussi convaincu de la nécessité d'attirer les étudiants des pays émergents non francophones. Mais, je le maintiens, nous progressons dans ce domaine. Et c'est parce que j'ai confiance dans notre langue et dans notre capacité à la faire rayonner que je considère cet article 2 comme un signe de fébrilité. Nous devons être des avocats plus enthousiastes de notre propre langue !

Enfin, il me semble que les perspectives d'évolution de la francophonie telles qu'avancées par la ministre sont erronées. Il n'est nullement garanti qu'il y ait, en 2050, 900 millions de francophones dans le monde. Aujourd'hui déjà, nous comptabilisons 11 millions de francophones au Mali alors qu'en réalité il n'y en a que 1 million. Le Niger comprend de même 1 million de francophones là où nous en comptons 15 millions. Ce n'est certes pas un recul, mais c'est le fruit d'une longue histoire. Si nous voulons nous donner les moyens de faire cet espace francophone de 900 millions de personnes, il faut reformuler notre ambition. Là n'est pas l'objet du projet de loi, j'en conviens, mais puisque le débat est posé en ces termes, je me devais de rétablir la vérité. L'expansion que vous évoquez est possible, mais il est aussi possible que tout s'effondre en deux générations.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion