Intervention de Sauveur Gandolfi-Scheit

Séance en hémicycle du 12 juin 2013 à 21h30
Débat sur la politique maritime de la france

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaSauveur Gandolfi-Scheit :

Monsieur le ministre, vous avez exposé en conseil des ministres les principes de la nouvelle politique maritime intégrée et, entre autres, souhaité développer l'économie maritime dans toutes ses dimensions. Je voudrais attirer votre attention sur deux points.

D'abord, en ma qualité de député de la Haute-Corse, je ne puis éviter de rappeler que la Corse ne dispose pas, en termes de transport maritime, d'un véritable service minimum garanti qui s'exerce dans les mêmes conditions qu'un service minimum terrestre. Oui, monsieur le ministre, la politique maritime concerne également le transport des passagers, le fret ainsi que le développement du tourisme, qui est un secteur très important de notre économie. Régulièrement, et plus particulièrement à l'approche de la saison estivale ou d'événements importants – le tour de France cycliste par exemple – la Corse est prise en otage. Les grèves ou menaces de grèves mettent à genoux des secteurs entiers de l'économie insulaire. Notre économie ne supporte plus cette situation qui perdure depuis des décennies.

Deuxième point : monsieur le ministre, dans le cadre de votre souhait de maintenir la flottille de pêche, nous ne devons pas oublier la situation des pêcheurs artisanaux pratiquant la petite pêche qui se voient appliquer des dispositions européennes totalement inadaptées à leur métier. Ces pêcheurs, dont le nombre se réduit comme peau de chagrin, sont la vitrine de nos ports de pêches. Ils ne disposent pas de gros moyens de prise et sont les principaux gardiens de la ressource en zone côtière. Dans le cadre d'une politique maritime intégrée, les instances européennes doivent ouvrir les yeux et se rendre compte que ces petits métiers existent et qu'ils ne mettent pas en péril la ressource. Il est de notre devoir de protéger cette corporation bien spécifique avant qu'elle ne soit totalement décimée. Elle fait partie de notre patrimoine.

Monsieur le ministre, je ne pouvais m'empêcher d'attirer votre attention sur ces deux points.

Par ailleurs, la France dispose, de par sa surface maritime, d'une position privilégiée sur la scène internationale. Les mers et les océans sont une source de richesse et d'opportunités économiques nouvelles, mais ils sont également le lieu de menaces nouvelles et d'une compétition acharnée entre des États aux capacités d'action en pleine croissance.

Cela implique que la France soit capable d'affirmer sa souveraineté. Les tensions juridiques et militaires générées par la volonté de certains États d'étendre ou de contester les limites de leurs eaux territoriales ou de leurs zones économiques exclusives témoignent de l'importance stratégique et économique des espaces maritimes.

L'économie française est aujourd'hui totalement dépendante de ces flux maritimes. L'essentiel de nos approvisionnements en énergies fossiles, matières premières et produits finis qui transitent par voie maritime est exposé aux blocus, à la piraterie, aux actions terroristes et au trafic de drogue. L'exploitation des gisements offshore, les approches maritimes et les infrastructures critiques – ports industriels et terminaux pétroliers – doivent faire l'objet d'une surveillance permanente de la marine nationale. La maritimisation implique une concentration d'intérêts stratégiques. Cette réalité se traduit par un accroissement continu des missions de la marine, alors que ses moyens capacitaires sont tout juste constants.

Le maritime est un enjeu économique majeur pour la France. Avec 1 500 milliards d'euros et un deuxième rang mondial, ce secteur assure en Europe deux millions d'emplois directs. L'économie maritime sera l'un des moteurs de la réindustrialisation et de la création d'emplois qualifiés. Aux côtés de secteurs innovants en plein développement, le naval de défense, budget d'investissement public par excellence, est au coeur de cette croissance bleue.

La mer est devenue le terrain de la compétition économique internationale : en témoigne la lutte pour l'accès aux ressources halieutiques et aux ressources minières des fonds marins.

Les océans sont un grenier énergétique, pharmaceutique, cosmétique et alimentaire. Ces opportunités et ces potentiels de développement représentent par ailleurs de véritables gisements d'emplois et d'activités économiques. C'est un autre enjeu de première importance, compte tenu des missions assurées par l'IFREMER, l'Institut de recherche pour le développement et le CNRS.

La politique maritime, c'est aussi la protection de l'environnement. Il faut faire de la préservation de l'environnement un atout du développement et y associer la gestion durable de notre planète.

La politique maritime de la France doit donc être volontariste : c'est une politique nécessaire et rentable en termes de retour sur investissement.

Monsieur le ministre, la prochaine loi de programmation militaire indiquera le niveau de l'effort que la France est disposée à fournir pour garantir ce volet fondamental de sa souveraineté et de sa sécurité. Dites-nous si la France est préparée à relever ces défis et à éviter ainsi un décrochage stratégique, vis-à-vis notamment des grands pays émergents.

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