Intervention de Serge Kancel

Réunion du 15 janvier 2014 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Serge Kancel, inspecteur général des affaires culturelles :

S'agissant de l'emploi dans l'économie de la culture, nous avons travaillé dans deux directions. Nous avons tout d'abord chiffré l'ensemble des emplois dans les entreprises culturelles, que ces emplois soient culturels ou non culturels (administratifs, techniques, etc), soit 670 000 emplois en 2010. Le plus gros bataillon est celui du spectacle vivant – quelque 148 000 emplois –, ce qui ne saurait nous étonner. En effet, la loi de Baumol, édictée dans les années 60, a établi la fatalité d'une masse salariale très lourde dans le spectacle vivant, la même représentation nécessitant chaque soir les mêmes moyens, ce qui interdit de réaliser des économies d'échelle. Quant à l'audiovisuel, il tourne autour de 49 000 personnels. Les intermittents du spectacle appartiennent à ces deux secteurs, qui représentent donc quelque 200 000 emplois.

Nous avons ensuite chiffré, en nous fondant sur le recensement, les emplois dits culturels dans toutes les entreprises en France, quel que soit leur secteur d'activités : 870 000 personnes exercent une profession culturelle dans l'ensemble de l'économie.

Il ne saurait toutefois être question d'additionner ces deux chiffres – 670 000 + 870 000 –, puisqu'il existe des emplois culturels dans les entreprises culturelles. Si on additionnait le nombre de ceux-ci à celui des emplois culturels dans les entreprises non culturelles, on aboutirait à 1 million environ. Toutefois, les sources des données étant très différentes, une telle addition n'aurait pas grand sens.

L'ensemble des interventions de l'État dans le domaine de la culture, quelle que soit leur nature – aides et subventions, apports en fonds propres à des opérateurs, dispositions fiscales –, s'élève à 13,9 milliards d'euros. Sur ce montant, 9,3 milliards ont été considérés par la mission comme des interventions ayant un impact sur l'économie de la culture, c'est-à-dire sur le tissu économique des entreprises du secteur. Il faut noter que l'audiovisuel capte à lui seul quelque 5 milliards de ces 9,3 milliards, devant le patrimoine – 1 milliard – et la presse – près de 850 millions. Nous avons distingué pour chacun de ces secteurs les aides et subventions, les opérateurs d'État – bibliothèques nationales, théâtres nationaux, services d'archives notamment – et les dépenses de l'État – l'État est lui-même acheteur sur le marché, par exemple lorsqu'il finance la restauration des monuments historiques dont il a la charge.

Nous avons également identifié trois grands groupes de secteurs culturels en fonction de la place qu'y occupent les interventions publiques, en confrontant le montant de l'action publique de l'État au montant de la production de chacun de ces secteurs, ce qui nous permet d'y mesurer l'impact de la dépense publique.

L'audiovisuel et l'accès aux savoirs et à la culture sont deux secteurs massivement investis par une dépense publique structurante : ils représentent 30 % du montant de l'intervention publique rapportée au montant de la production. Pour quatre secteurs – le patrimoine, la presse, le spectacle vivant et le cinéma –, la dépense publique ne représente que 5 % à 8 % de la production ; on ne saurait donc prétendre que ces quatre secteurs sont structurés par la dépense publique. Enfin, quatre secteurs vivent dans une quasi-abstention de la dépense publique : quand elle existe, elle demeure à la marge. Ce sont les arts visuels, les industries de l'image et du son, l'architecture et le livre. Toutefois, si les subventions du Centre national du livre sont quantitativement très faibles quand on les compare au chiffre d'affaires de l'édition, elles sont qualitativement déterminantes pour assurer la publication d'ouvrages exigeants notamment de poésie ou de sociologie.

La moyenne de la part de la valeur ajoutée dans la production s'élève à 44,5 %. On sait que les secteurs à plus forte valeur ajoutée sont les secteurs de service, tandis que les secteurs à faible valeur ajoutée sont l'industrie : il n'est donc pas étonnant que la culture, qui appartient aux deux secteurs, se situe au milieu. Le spectacle vivant ou l'architecture ont une forte valeur ajoutée, tandis que la valeur ajoutée du livre ou de l'audiovisuel, qui sont des secteurs industriels avec une lourde consommation intermédiaire, est moindre.

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