Intervention de Mathieu Gallet

Réunion du 10 décembre 2014 à 16h00
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Mathieu Gallet, président-directeur général de Radio France :

Vos nombreuses questions prouvent l'attachement de la représentation nationale à cette belle maison qu'est Radio France, attachement qu'ont également manifesté les Français lors de l'incendie du 31 octobre au travers de nombreux messages de soutien.

Pour répondre au président Carrez sur le respect du COM, les engagements de l'État ont été tenus pendant les deux premières années mais sur les trois dernières années de l'exercice, le manque à gagner s'élève à 87,5 millions d'euros. C'est l'une des explications à la situation dans laquelle nous nous trouvons aujourd'hui.

La fragilité de l'entreprise a probablement été sous-estimée. Radio France est beaucoup plus dépendante que France Télévisions des ressources publiques qui représentent 90 % de son budget. En outre, la marge de manoeuvre est très restreinte : la masse salariale représente 60 % des charges ; les charges de diffusion s'élèvent à plus de 70 millions d'euros par an. De surcroît, cette marge de manoeuvre a déjà été absorbée ces dernières années. Aujourd'hui, nous ne sommes plus en mesure d'assumer notre offre avec un budget qui s'est singulièrement atrophié.

Il est très compliqué de piloter une entreprise publique – et une entreprise, quelle qu'elle soit, car Radio France est une entreprise – lorsque le plan d'affaires, en l'occurrence le COM, n'est respecté que pendant deux exercices sur cinq et lorsque les ressources qui vous sont allouées ne sont pas garanties.

Les collaborateurs accordent à la signature du COM une importance inversement proportionnelle au temps que passe la direction à le négocier avec les tutelles : les négociations, qui ont commencé dès la fin du mois de juin, ne sont toujours pas terminées. Alors que cet outil pourrait être très utile pour le pilotage de l'entreprise et pour le contrôle par l'État et la représentation nationale, il s'avère inadéquat si les obligations en termes de moyens qui incombent à l'État ne sont pas respectées, à charge pour l'entreprise d'atteindre les objectifs.

Radio France est la dernière des entreprises de l'audiovisuel public à n'avoir pas substitué un nouvel accord d'entreprise à la convention collective de 1984. Nous allons prolonger la négociation jusqu'à la fin du premier trimestre 2015 puisque des sujets importants – les CDD d'usage et le statut des musiciens – n'ont pas pu être abordés lors des séances programmées jusqu'au 9 décembre. Deux organisations syndicales ont signé le relevé de décisions sur les carrières, le système de rémunération et les emplois.

Les mesures pour revenir à l'équilibre sont structurantes car elles supposent de revoir le périmètre de nos activités, compte tenu des moyens qui nous sont alloués et de notre faible capacité à augmenter nos ressources propres. Pourtant, je souhaite améliorer ces dernières grâce à la diversification des annonceurs, à la location d'espaces, à des concessions, à l'organisation de manifestations payantes, ainsi qu'à des efforts sur la commercialisation des concerts. Jusqu'en 2013, RFI louait des espaces à la Maison de la radio pour un montant de 3,4 millions d'euros par an. Tant que le chantier n'est pas terminé, nous ne pouvons pas compter sur cette ressource.

Le chantier doit également être terminé car il est compliqué à vivre pour les collaborateurs. Faire de la radio tous les jours dans un bâtiment en travaux est particulièrement contraignant.

Il est néanmoins difficile de fixer une date d'achèvement pour le moment. Aujourd'hui, nous sommes dans la phase 4 qui porte sur la réhabilitation des portes F à D de la Maison de la radio. La dernière phase concerne les portes D à B. Une fois ce chantier fini – probablement fin 2017, début 2018, l'incendie ayant un peu ralenti sa progression –, les travaux ne seront pas terminés pour autant : les studios moyens, dans lesquels sont enregistrées notamment les fictions de France Culture ou des émissions en public, doivent être réhabilités. Radio France en a pris l'engagement auprès de la préfecture de police. Resteront ensuite les façades et les toitures.

Ces éléments font partie de la discussion sur le COM. Compte tenu de notre situation financière, sans un soutien de l'État, nous n'avons plus les moyens de financer une partie du chantier. Dans la période qui s'achève, la clé de répartition pour le financement était la suivante : un tiers d'autofinancement par Radio France et deux tiers par l'État au travers d'une dotation spécifique. Aujourd'hui, compte tenu des déficits et de la trésorerie qui va passer en négatif en 2015, nous n'avons plus les moyens d'assumer notre part de financement sans un soutien clair de l'actionnaire.

Le rapport de Martine Martinel l'a souligné, plus le chantier dure, plus il coûte cher en fonctionnement. Le coût final, tel qu'arrêté par le conseil d'administration de Radio France le 24 avril, est estimé à 386 millions d'euros, en euros de 2009, soit avec l'inflation, 430 millions d'euros aujourd'hui. Les coûts de fonctionnement correspondent à la location des bâtiments dans lesquelles les équipes ont été installées provisoirement, aux différents déménagements – certaines équipes ont déjà déménagé trois fois. L'impossibilité de louer certains espaces nous prive, en outre, de recettes.

Tout ceci plaide pour que le chantier se termine le plus vite possible. D'autant que la situation tend les relations sociales. La directrice générale déléguée passe beaucoup de temps en comité d'hygiène et de sécurité. Le chantier ne contribue pas à améliorer le climat social.

Je cède la parole à Catherine Sueur pour revenir sur les causes des surcoûts.

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