Intervention de Christian Ursulet

Réunion du 17 décembre 2014 à 17h00
Délégation aux outre-mer

Christian Ursulet, directeur général de l'ARS de Martinique :

Cuba a fait un effort important de formation des professionnels et dispose de la plus grande maternité du monde où sont réalisés cent vingt accouchements par jour ; c'est très impressionnant !

La loi pourrait, à moindre coût, améliorer certaines situations. Tout d'abord, le budget des ARS : nous sommes dans le droit commun, mais nous ne faisons pas le même travail, et nous manquons donc de moyens pour aider la France à occuper sa place dans nos régions. Il ne faut pas sous-estimer l'impact des urgences, de la veille et de la sécurité sanitaires sur nos budgets. C'est de ma propre initiative que j'ai créé un service de coopération, avec des projets interétatiques, en finançant les déplacements.

Si, pour les dotations du FIR et la péréquation, nous sommes logés à la même enseigne que tout le monde, la situation est déséquilibrée : comment assurer la permanence des soins et améliorer la prévention alors que nous sommes très en retard en termes de démographie médicale ? Vous avez raison de dire que la situation de Saint-Pierre ou de Sainte-Marie est comparable à celle de la Haute-Loire, où j'ai d'ailleurs ouvert la première maison de santé à Craponne-sur-Arzon. La différence est que, dans une région métropolitaine, vous pouvez aller dans une autre ville, alors que, sur une île, vous êtes enfermé, et que, là où il y a des moyens, ceux-ci sont déjà déficitaires. Les patients viennent attendre dès quatre heures du matin, nous les dissuadons de se déplacer. Je ne parle pas de Sainte-Marie qui est privilégiée en comparaison de Macouba, Grand'rivière ou Ajoupa-Bouillon. Il faudrait quelques moyens supplémentaires, des enveloppes particulières pour aller plus vite dans la constitution du FIR, un droit de tirage pour les DOM. Nous ne voulons pas refaire des maisons de retraite de soixante ou quatre-vingts places qui mettent sept ans à sortir de terre ; nous voulons aller plus vite.

Les indicateurs qui servent à fixer les dotations pour les permanences de soins sont, eux aussi, les mêmes pour tout le monde. Sauf que d'aucuns disposent déjà de structures existantes, comme certains de mes collègues du Limousin. Je n'ai pas une grande connaissance de la situation en Guyane ou en Guadeloupe, mais je ne vois pas, en Guadeloupe, de maisons médicales de garde, de centres de santé ou de maisons de santé pluridisciplinaires. En Martinique, où règne un retard sanitaire extraordinaire, le nombre de ces institutions était de zéro en 2010 ! Dans ces conditions, si l'on m'affecte simplement des moyens « standard », je ne rattraperai jamais le retard. Pour atteindre l'égalité, il nous faut un traitement inégalitaire. Nous avons besoin d'aller plus vite parce que nous venons de plus loin, et de bâtir des indicateurs permettant de rattraper le retard.

En ce qui concerne le recours à des médecins étrangers, il existe pour le moins quelques nuances avec la Guadeloupe et surtout avec la Guyane, où la situation est encore pire. En Martinique, pour la gastroentérologie, il n'y a pas de spécialistes ou presque ; pour la pneumatologie, les spécialistes sont très rares ; pour la pédiatrie, c'est le même constat. Il aurait fallu trois services d'urgences ; il manque dix-sept praticiens hospitaliers à temps plein pour les faire fonctionner selon les normes ; nous avons donc rassemblé les moyens sur deux centres : Fort-de-France et Trinité. Pour les anesthésistes, la situation est la même. Il suffirait d'assouplir très légèrement la réglementation sur cette question des médecins étrangers afin de ne pas choquer les ordres qui veillent sur leur pré carré. Au demeurant, aucun médecin ne veut faire de gardes chez nous et j'ai dû en réquisitionner trente-cinq après un an de débat ! J'ai d'ailleurs enregistré vingt-trois inscriptions depuis.

Certes, la réglementation se veut protectrice afin d'empêcher que n'importe qui vienne exercer, mais ce verrouillage est excessif et artificiel. Il fallait deux ans d'exercice en métropole plus deux mois après le 1er septembre 2009 !

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