Intervention de Brigitte Bourguignon

Réunion du 25 mars 2015 à 9h30
Commission des affaires culturelles et de l'éducation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBrigitte Bourguignon :

Monsieur Karaquillo, permettez-moi de vous remercier pour la présentation simple et claire de votre rapport, et de saluer la présence à vos côtés des sportifs Astrid Guyart et Éric Carrière, que je qualifierai de grands témoins s'ils en sont d'accord.

Le groupe socialiste, républicain et citoyen au nom duquel je m'exprime est particulièrement intéressé par ce rapport. Enfin un travail concret autour du statut social du sportif ! Il conviendra de le traduire de manière législative, peut-être sous la forme d'une proposition de loi. Ce sujet pourrait et pourra nous rassembler, quels que soient les bancs sur lesquels nous siégeons.

Je souhaite souligner l'importance du travail réalisé à travers le nombre impressionnant d'auditions que vous avez menées et la collégialité de votre réflexion. Il est temps, en France, de se préoccuper de la situation, de l'avenir, de la sécurité juridique, des jeunes qui s'investissent totalement dans leur sport au point d'en faire leur carrière et d'y sacrifier souvent leur avenir. On sait en faire nos étendards, notre fierté nationale lorsque la performance est là, mais on ne se préoccupe pas souvent de savoir quels sont leurs moyens d'existence.

Avant toute chose, il faut essayer d'occulter l'image « zlatanesque » du sportif, que ce soit en termes d'exemplarité ou de gains astronomiques qu'il représente. Ce n'est pas de ce type de situation dont nous nous préoccupons ce matin.

Il faut aussi admettre la notion de « métier », quand un jeune occupe la majeure partie de son temps, voire la totalité, à son entraînement et aux compétitions, et qu'il sacrifie pour cela tout le reste de sa carrière, au-delà de la passion qui l'anime.

Votre rapport s'articule autour de deux situations essentielles, celle du statut du sportif de haut niveau et celle du statut du sportif professionnel avec la nature du contrat de travail qui le lie à son employeur, et autour de deux sujets centraux, la protection et la sécurité des sportifs. Il convient de définir les contours de chacun de ces deux statuts, et vous nous éclairez à cet égard.

Concernant les sportifs de haut niveau, je salue d'abord vos préconisations concernant la formation, pendant leur carrière et surtout après. Vous réaffirmez la nécessité du double projet car s'il existe déjà en théorie, il reste rare dans la réalité. Soyons réalistes : les obstacles sont nombreux du fait des emplois du temps, du fait parfois de l'entourage encadrant qui étouffe, préoccupé surtout par la performance. Parfois, c'est le sportif lui-même qui refuse de se projeter dans l'avenir, dans l'après-carrière, synonyme de mort sociale pour lui – vous l'évoquez d'ailleurs dans votre rapport. Or le double projet est bien la clé du suivi et de l'après.

Quelles sont les pistes possibles de formations pour un sportif tout au long de sa carrière ? La validation effective des acquis de l'expérience me paraît essentielle car elle peut lui permettre d'accéder à l'enseignement supérieur. Explorez-vous la piste de l'apprentissage, et est-elle compatible ? Quel est le regard des entreprises sur ces propositions ?

Je note aussi vos préconisations en ce qui concerne la sécurité et la protection de ces jeunes. Celles relatives à une couverture sociale, et notamment la mise en place d'une couverture sociale des accidents du travail, sont essentielles et attendues du monde sportif. Elles justifieraient à elles seules une proposition de loi.

Enfin, il y a trop de dégâts, trop de vies gâchées, trop de jeunes laissés pour compte à l'issue de leur parcours, quelle qu'en soit la durée.

Il en va de même pour les sportifs professionnels dont vous clarifiez les situations très variées et dont la précarité échappe le plus souvent au grand public. Vous proposez un contrat de travail spécifique à la place des contrats dit d'usage, qui relèverait du code du sport. Pensez-vous – et je m'adresse au professeur de droit que vous êtes – que notre droit du travail pourra l'intégrer ? Qu'en pensent les partenaires sociaux ? Sommes-nous, avec les contrats dits d'usage, dès aujourd'hui et selon la jurisprudence récemment exprimée, un peu hors la loi ?

Comment mieux protéger les mineurs dans ce monde professionnel ? On pense inévitablement au football car on a pu voir des situations humainement intolérables.

Enfin, si nous pensons aux droits du sportif, quel que soit son statut, il faut insister aussi sur la notion de devoirs. Avant toute prise en charge plus large et effective du sportif, comme ce rapport le préconise, on pourrait imaginer une charte éthique en préalable, avec un engagement réciproque des parties. Qu'en pensez- vous ?

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