Intervention de Charles de Courson

Séance en hémicycle du 18 décembre 2012 à 21h30
Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCharles de Courson :

Bien sûr, mon cher collègue ! Vous ferez certainement 0,9 % alors que toute l'Europe connaît une chute de son taux de croissance. La France fera peut-être cela toute seule dans son coin ?

Pour les années suivantes, vous prévoyez 2 %. Or, je me tue à le répéter, personne n'y croit. Aucun des éléments structurels n'explique une telle remontée des taux. La Commission européenne elle-même, qui ne me semble pas pouvoir être soupçonnée d'être partisane, prévoit 1,1 %.

En résumé, ma première critique porte sur l'irréalisme complet des hypothèses macroéconomiques retenues. À cet égard, la vraie question est d'ailleurs la suivante : que va-t-il se passer dès lors que la croissance sera beaucoup plus faible que celle que vous prévoyez ? C'est très simple : vous serez condamnés à des efforts supplémentaires de réduction des dépenses et vous serez tentés de continuer à augmenter les recettes. Ce faisant, vous conduirez le budget droit dans le mur.

Ma deuxième critique porte sur la présentation que vous faites de votre stratégie budgétaire. Vous dites qu'il y a trois tiers : 10 milliards d'économies, 10 milliards d'augmentation de la pression fiscale – uniquement sur les riches – et 10 milliards de hausse de la fiscalité sur les grandes entreprises. Tout cela, nous vous l'avons dit et redit, ne tient pas. Ce n'est même pas cohérent avec ce qu'il y a dans le projet de loi de programmation pour 2013, puisque l'augmentation de la pression fiscale y est de 28 milliards – ce sont vos documents eux-mêmes qui le disent.

Quant à la réduction des dépenses, il n'y en a pratiquement pas, puisque les quelques économies que vous faites servent simplement à maintenir la part des dépenses publiques dans le produit intérieur brut. Il n'y a donc aucun effort de réduction en 2013. Les années suivantes, comme par miracle, grâce à une croissance à 2 %, vous vous tiendrez, selon vous, mécaniquement vos prévisions. Tout cela, encore une fois, est parfaitement surréaliste.

Ma troisième critique porte sur le constat selon lequel l'essentiel – plus de 90 % – de la réduction du déficit en 2013 est lié à une hausse massive de 28 milliards des prélèvements obligatoires. Or, après, vous ne les faites pas baisser, puisqu'ils stagnent à 46,3 % en 2014, comme en 2013, puis 46,2 %. On aura donc un différentiel de pression fiscale, tant pour les ménages que pour les entreprises, insupportable dans la compétition internationale.

La quatrième critique concerne la politique de gestion de la fonction publique. Vous vous êtes enfin ralliés à la règle selon laquelle la masse salariale de la fonction publique de l'État doit être maintenue en euros courants. Mais, hélas ! vous ne pourrez pas tenir cet objectif si vous ne reprenez pas le mouvement de baisse globale des effectifs. Or vous stabilisez purement et simplement, voire vous l'augmentez légèrement, le nombre de fonctionnaires de l'État – y compris des opérateurs, comme les annexes au projet de loi de finances pour 2013 l'ont démontré. Vous allez donc aboutir à la paupérisation des fonctionnaires, car il est impossible de conserver leur pouvoir d'achat sans réduire les effectifs, à supposer toutefois que l'on tienne une enveloppe stable en euros courants. Dans ce domaine, comme dans beaucoup d'autres, il y a donc une incohérence de votre politique.

Cinquième et, je vous rassure, dernière critique : je me tue à vous dire depuis le débat sur le traité européen que l'article 4 – qui demande aux États, dès qu'ils sont revenus au-dessous du niveau de déficit public autorisé, de réduire leur endettement, quand il dépasse 60 % du PIB, en leur accordant vingt ans pour le faire – est beaucoup plus dur que l'article 3, lequel vise le retour à un quasi-équilibre – 0,5 % de déficit, pour être précis.

En effet, notre dette publique atteindra l'année prochaine 91,3 % du PIB. S'il faut la réduire en vingt ans de 31,3 points, cela fait presque 1,6 point par an. Certes, tout dépend bien entendu du taux de croissance. Mais si vous prenez comme hypothèse 1,1 %, le niveau supportable pour respecter l'article 4 est, non pas un déficit de 0,5 %, mais – selon mes calculs – un excédent de l'ordre de 1 %. Bref, tout cela ne tient pas ; vous ne respecterez pas l'article 4 du traité. Telles sont les cinq critiques fondamentales qui expliquent que le groupe UDI vote contre ce texte.

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