Intervention de Jean-Patrick Gille

Réunion du 9 mars 2016 à 9h00
Commission des affaires sociales

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Patrick Gille, rapporteur :

Le grand public a l'impression que les dispositifs de formation professionnelle sont une pure gabegie. Ce n'est pas notre sujet aujourd'hui, mais je tenais à pointer ce décalage.

L'avant-projet de loi visant à instituer de nouvelles protections pour les entreprises et les actifs, porté par Mme Myriam El Khomri, répond à un certain nombre de besoins d'évolutions du cadre juridique de la formation professionnelle. Ce texte comporte des dispositions relatives à la formation professionnelle : à travers la création du compte personnel d'activité (CPA), il étend le dispositif du compte personnel de formation (CPF) à la fois aux indépendants et aux fonctionnaires. L'avant-projet de loi comporte aussi des mesures sur l'extension du travail des apprentis mineurs.

Pour répondre aux interrogations relatives au financement de la formation professionnelle, la question de savoir si la mutualisation est en baisse se pose. A priori, ce semble être le cas. La mutualisation obligatoire baisse puisque l'on a réduit les crédits qui lui sont dédiés. Toutefois, nous ne disposons pas d'étude exhaustive sur la mutualisation volontaire. Il semblerait néanmoins que les branches – notamment celles du monde associatif – aient reconduit leurs accords.

Toutefois, l'enjeu est moins de savoir si la mutualisation est en baisse que de savoir si le financement global de la formation décline. Sur ce point, nous ne disposons pas d'informations et il sera difficile d'en avoir puisqu'il n'existe plus de système statistique dans la mesure où la loi a octroyé une plus grande marge de liberté aux entreprises. Il faudra donc du temps pour déterminer si ce financement diminue. Il est probable que ce soit le cas sur la première année, d'où l'intérêt qu'il y aurait à encourager l'investissement dans la formation professionnelle, notamment grâce à des incitations fiscales. Si l'on veut que les particuliers investissent dans leur formation en complément de l'abondement de leur compte, ne faudrait-il pas imaginer un dispositif de déduction fiscale ?

Sur la question du paritarisme, l'instance paritaire qu'est le Comité interprofessionnel pour l'emploi et la formation (COPANEF) est montée en puissance. Or, la gouvernance de la formation professionnelle, qui associe l'État et les régions aux partenaires sociaux, est plutôt quadripartite. On commence à observer une certaine tension entre les partenaires sociaux qui, à travers le COPANEF, veulent garder la mainmise sur la formation professionnelle, et l'accroissement du rôle de l'État et des régions. Si le compte personnel de formation (CPF) devient universel et concerne donc 40 millions d'actifs, est-il normal que les partenaires sociaux, dont la gestion concerne 16 millions d'actifs, gèrent l'ensemble ? Cette question rejoint celle de la gouvernance de la protection sociale. Ce sera aux parlementaires de trancher cette question.

En matière de conseil en évolution professionnelle, on constate aujourd'hui que cinq opérateurs travaillent chacun de leur côté. Il faut qu'une culture commune émerge dans un souci d'efficacité. Aujourd'hui, chaque opérateur met en place ses propres formations. Les « gros » opérateurs comme Pôle Emploi semblent considérer qu'ils fournissaient déjà un conseil en évolution professionnelle, mais j'estime qu'il faut mieux formaliser ce travail. Je rappelle en outre que le dispositif a été mis en place sans crédits complémentaires. Sans doute faut-il y consacrer une partie du milliard d'euros qu'il est envisagé d'investir dans le cadre du plan de 500 000 formations prioritaires pour les demandeurs d'emploi annoncé, car la réussite de ce plan dépendra en partie de l'amélioration de la qualité de l'accompagnement.

Pour ce qui concerne le CPF, sa mise en oeuvre passe par l'élaboration de listes qualifiantes et certifiantes. Un travail complexe et considérable a été conduit sur ces listes mais, au final, seules quelques formations sont éligibles au CPF : les formations numériques et linguistiques constituent l'essentiel des 12 000 formations repérées.

Un travail remarquable a été mené par les partenaires sociaux sur le socle de compétences, à travers le dispositif du nouveau certificat professionnel CléA. Je signale par ailleurs que la validation des acquis de l'expérience (VAE) a été rendue éligible au CPF. Je note en outre que l'avant-projet de loi porté par Mme Myriam El Khomri prévoit de rendre éligibles au CPF les actions de formation permettant de bénéficier de prestations de bilan de compétences, pour l'heure censées relever du conseil en évolution professionnelle, ainsi que les actions de formation dispensées aux créateurs ou repreneurs d'entreprises.

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