Intervention de Pedro Ortún Silván

Réunion du 18 mai 2016 à 9h30
Commission des affaires européennes

Pedro Ortún Silván, conseiller spécial à la Direction générale Entreprises de la Commission européenne sur les questions de responsabilité sociétale des entreprises :

Nous sommes pleinement impliqués, monsieur Romano, en faveur de l'application rapide de la directive sur la publication d'informations financières, étant entendu que la balle est désormais dans le camp des États membres qui doivent la transposer dans les délais. Suite à une consultation publique qui s'est achevée voici un mois, la Commission prépare un guide d'application à cet effet, mais il appartient aussi aux États membres de sensibiliser davantage les entreprises qui n'ont pas encore commencé à modifier leurs processus internes. Si elle est correctement appliquée dans les six mille entreprises visées, cette directive donnera un nouvel élan au processus de RSE, car elle prévoit non seulement que ces entreprises produiront un rapport, mais surtout qu'elles se doteront pour ce faire d'un processus interne de vigilance et d'identification des risques ainsi que des mesures visant à les atténuer, en y associant les actionnaires, les syndicats et les populations affectées par leurs activités. Ce serait un grand pas en avant vers l'adoption d'autres mesures relatives au devoir de diligence, telles que celles qui figurent dans la loi récemment adoptée en France, qui concerne les très grandes entreprises. La priorité de l'ensemble des acteurs privés et publics est donc d'appliquer cette directive dans les meilleurs délais et avec efficacité, car elle aura une incidence sur les processus en vigueur non seulement dans les entreprises concernées mais aussi dans l'ensemble des entreprises de leurs chaînes d'approvisionnement, y compris les PME.

La politique fiscale européenne, monsieur Labbé, a toujours été très complexe. Elle est pour partie soumise à l'approbation unanime du Conseil. On peut espérer que l'adoption de la dernière directive relative à la publication d'informations pays par pays sera moins ardue, mais il faudra tout de même qu'un nombre suffisant d'États membres accepte de l'appliquer au plus vite – de ce point de vue, les commissaires Moscovici et Hill ont déjà obtenu plusieurs engagements.

S'agissant du plan d'action actualisé, Lord Cromwell, il reste encore un long chemin à parcourir. Nous allons commencer par faciliter la mise en place de l'ensemble du paquet législatif déjà prévu, soit qu'il ait déjà été adopté par la Commission, le Conseil et le Parlement, soit qu'il soit encore en cours de trilogue ou en début d'examen au Parlement – pour ce qui concerne le paquet fiscal, en particulier. Ensuite, nous pourrons envisager d'autres mesures facultatives et si nécessaire, monsieur Teeven, des mesures d'ordre réglementaire. Le débat concernant la portée des mesures à prendre pour permettre aux victimes dont les droits ont été bafoués d'obtenir réparation est très ouvert au sein de la Commission et des États membres, dont les positions divergent encore. Plusieurs instruments existants comme les points de contact nationaux pour les Principes directeurs de l'OCDE à l'intention des entreprises multinationales devraient, si leurs moyens et leurs pouvoirs sont renforcés, jouer un rôle croissant et s'ouvrir aux plaignants, mais leur fonctionnement encore très inégal dépend beaucoup des ressources qui leur sont allouées, sans parler des États membres qui ne se sont pas encore dotés de cet outil.

En somme, le plan d'action actualisé consistera à renforcer la mise en oeuvre des dispositifs en vigueur tout en ouvrant des pistes de réflexion concernant d'éventuelles mesures non contraignantes – nous soutiendrons par exemple la conclusion de partenariats public-privé en matière de gestion responsable des chaînes d'approvisionnement dans des pays en voie de développement. D'autre part, quelques mesures sectorielles ont déjà été prises dans les secteurs pharmaceutiques, textile, de l'huile de palme ou encore des minerais.

Je conclurai en évoquant les mesures destinées à promouvoir la demande de pratiques responsables. Les investisseurs, de ce point de vue, doivent mieux jouer leur rôle. Les pouvoirs publics doivent intégrer au plus vite les clauses environnementales et sociales dans leurs procédures de passation de marchés. Rappelons que la directive sur les marchés publics n'est pas encore transposée dans plus de vingt États membres ! Commençons donc par mettre en oeuvre les dispositions déjà adoptées, avant d'envisager l'adoption de mesures supplémentaires telles que celle que je viens d'évoquer, même si la question de l'extraterritorialité et la révision des règlements « Bruxelles I » et « Rome II » présente une grande complexité juridique, et si le consensus n'existe pas encore entre les États membres, en dépit de la pression exercée par le Parlement.

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