Intervention de Christophe Caresche

Réunion du 22 juin 2016 à 16h15
Commission des affaires européennes

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaChristophe Caresche, co-rapporteur :

En premier lieu, la deuxième partie du Semestre européen est l'occasion pour la Commission européenne d'apprécier les progrès réalisés dans la mise en oeuvre des recommandations des cycles précédents. Pour l'année 2016, la Commission européenne relève que les progrès se sont maintenus à un niveau similaire à celui de 2015. La mise en oeuvre effective des recommandations par les États membres demeure, par conséquent, perfectible. Dans cette perspective, la volonté de la Commission européenne de réduire le nombre de recommandations adressées aux États membres et d'en affiner le contenu est une initiative que nous saluons tout particulièrement. Cette année, les États membres ne peuvent donc pas être destinataires de plus de cinq recommandations. Dans son appréciation des progrès réalisés, la Commission européenne prend également en considération les objectifs de la stratégie Europe 2020. Au regard des informations disponibles à ce jour, la Commission européenne souligne que si les situations nationales s'améliorent globalement, les objectifs relatifs à l'emploi, à la recherche & développement et à l'exclusion et la pauvreté risquent de ne pas être atteints à horizon 2020.

En second lieu, le rendez-vous de printemps est également l'occasion pour la Commission européenne de présenter les résultats des bilans approfondis réalisés pour les 18 États membres qu'elle avait identifiés, en novembre 2015, comme étant susceptibles de présenter des déséquilibres macroéconomiques. Début avril 2016, la Commission européenne constatait que les déséquilibres macroéconomiques se réduisaient de manière générale, en zone euro comme au sein de l'Union européenne. Les États membres présentant toutefois des situations économiques encore très hétérogènes, la Commission européenne insiste sur la nécessité de procéder, aux plans national comme européen, aux rééquilibrages requis, afin de renforcer la capacité de résilience de chacune des économies de l'Union européenne.

Pour six États membres (Royaume-Uni, Autriche, Belgique, Estonie, Hongrie, Roumanie), la Commission européenne a conclu qu'il n'existait pas de déséquilibre, au sens de la procédure pour déséquilibres macroéconomiques (PDM). Sept États membres présentent, en revanche, des déséquilibres (Irlande, Slovénie, Espagne, Finlande, Allemagne, Pays-Bas et Suède) et six (Croatie, Chypre, France, Portugal, Bulgarie, Italie) des déséquilibres excessifs.

En troisième lieu, les recommandations proposées par la Commission européenne ont été examinées lors du conseil ECOFIN du 17 juin 2016 et doivent désormais être approuvées par les chefs d'État et de gouvernement lors du Conseil européen des 28 et 29 juin 2016 pour être finalement formellement adoptées par le Conseil au mois de juillet 2016.

Les recommandations pays par pays sont formulées par la Commission européenne après que cette dernière a rendu publiques ses prévisions de croissance dites « de printemps » et son analyse de l'environnement économique global dans lequel s'inscriront les réformes à effectuer. De manière générale, la Commission européenne constate, dans ses prévisions de croissance de printemps, une amélioration globale de la situation économique en Europe mais insiste sur la nécessité de recentrer rapidement la croissance européenne sur ses propres moteurs et, plus particulièrement, sur le dynamisme de la demande intérieure. Les incertitudes croissantes de l'environnement économique international et le caractère encore lent et fragile de la reprise constituent ainsi une injonction à accélérer les réformes structurelles dans chacun des États membres.

Cette année, la formulation des recommandations spécifiques pays par pays se fonde sur « triangle vertueux » que constituent les priorités de politique économique pour 2016, à savoir : la conduite de politiques budgétaires responsables, la relance de l'investissement et la mise en oeuvre de réformes structurelles. De manière générale, la Commission européenne invite ainsi les États membres à prendre des mesures pour améliorer la productivité, en réformant l'environnement légal et réglementaire dans lequel opèrent les entreprises (en particulier en France) et en renforçant notamment les liens entre les universités, la recherche et l'innovation au sein des entreprises ; réformer le marché du travail, en réduisant la fiscalité pesant sur le travail (notamment en France), limitant les phénomènes de dualisation du marché du travail, en investissant davantage dans le capital humain et en modernisant les systèmes de protection sociale.

Il convient de relever que les récentes améliorations de la situation économique de Chypre, de l'Irlande et de la Slovénie, ont conduit la Commission européenne à proposer que ces trois pays relèvent, à partir de 2016, du volet préventif du Pacte de stabilité et de croissance (PSC). Cette décision entérine leur sortie du champ de la procédure concernant les déficits excessifs (PDE). Par ailleurs, la Commission européenne propose d'accorder à l'Espagne et au Portugal un délai supplémentaire d'un an pour corriger leurs déficits excessifs. L'Espagne devrait ainsi être en mesure de respecter ses engagements européens d'ici 2017 et le Portugal d'ici 2016. La situation des deux pays fera l'objet d'un nouvel examen au mois de juillet, avant l'adoption formelle des recommandations par le Conseil.

Dans son bilan approfondi, la Commission européenne identifie, en France, deux déséquilibres macroéconomiques principaux. La dette publique élevée et croissante et le faible redressement de la compétitivité et de la productivité fragilisent la situation économique du pays et constituent, selon la Commission européenne, les enjeux principaux que la France doit relever, dans un contexte par ailleurs marqué par la nécessité de rétablir, d'ici 2017, la soutenabilité et la viabilité des finances publiques.

Relevant toujours du volet correctif du Pacte de stabilité et de croissance, la France réaffirme, dans son programme de stabilité pour 2016, l'engagement du Gouvernement de corriger le déficit excessif du pays d'ici 2017, conformément à la recommandation du Conseil du 10 mars 2015.

Cette année, la Commission européenne adresse à la France cinq recommandations de politique économique dont la plupart ne constituent pas de nouveauté et font l'objet de préconisations constantes de la Commission européenne.

La première recommandation concerne la nécessité de rétablir l'équilibre des finances publiques. Nous considérons qu'il est indispensable que la France honore ses engagements en matière budgétaire et mette tout en oeuvre pour rétablir un déficit public inférieur à 3 % du PIB en 2017.

La deuxième recommandation concerne l'amélioration de la situation de l'emploi. Il convient de noter que la Commission européenne prend acte et salue les récentes mesures mises en oeuvre pour réduire le coût du travail et améliorer les marges bénéficiaires des entreprises. Elle invite toutefois le gouvernement à pérenniser les réductions du coût du travail et à veiller à ce que les évolutions du salaire minimum soient compatibles avec la création d'emplois et la compétitivité. La dualité du marché du travail doit également faire l'objet de réformes ambitieuses notamment orientées vers les populations les plus jeunes et les moins qualifiées.

La deuxième recommandation concerne l'amélioration des performances en matière d'éducation et de formation. Les insuffisances relevées dans le système d'apprentissage ainsi que, de manière générale, dans l'offre de formation pour les chômeurs, les travailleurs peu qualifiés et les salariés des petites et moyennes entreprises nécessitent, selon la Commission européenne, des réformes substantielles, en sus de la réforme en cours de la formation professionnelle.

La Commission européenne incite ainsi la France à renforcer les liens entre le secteur de l'éduction et le marché du travail, notamment par une réforme du système d'apprentissage et de la formation professionnelle qui mette l'accent sur les personnes peu qualifiées et recommande qu'une réforme du système d'assurance-chômage soit entreprise, avant la fin de l'année 2016, pour en rétablir la viabilité budgétaire et encourager le retour au travail.

La quatrième recommandation concerne l'amélioration de l'environnement des entreprises et l'élimination des obstacles à l'activité dans le secteur des services. La France présente, selon la Commission européenne, un positionnement moyen en Europe du point de vue de l'environnement des entreprises en raison, notamment, de contraintes réglementaires fortes. La Commission européenne salue la poursuite du programme de simplification entrepris par la France mais souligne son inégale mise en oeuvre.

Les performances, jugées insuffisantes, de la France en matière d'innovation sont une nouvelle fois pointées, en dépit de la générosité de l'aide publique en la matière. La Commission européenne préconise, par conséquent, une simplification des programmes publics d'innovation pour en améliorer l'efficacité.

Enfin, la cinquième recommandation concerne la réforme de la fiscalité. Outre le mouvement global et continu d'augmentation de la charge fiscale, la Commission européenne relève également que la fiscalité française pèse, de manière générale, trop lourdement sur les facteurs de production et relativement peu sur la consommation. La Commission européenne préconise ainsi de réduire les impôts sur la production et le taux nominal de l'impôt sur les sociétés, tout en élargissant la base d'imposition sur la consommation, notamment en ce qui concerne la TVA.

De manière générale, je considère, à titre personnel, que les recommandations adressées à la France ne tiennent pas suffisamment compte de la situation politique française. À titre d'exemple, il semble, en effet, très peu probable que le Gouvernement et la majorité procèdent à une augmentation de la fiscalité – notamment de la TVA - en période pré-électorale.

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