Séance en hémicycle du 24 novembre 2016 à 9h30

Résumé de la séance

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La séance

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La séance est ouverte à neuf heures trente.

Debut de section - PermalienPhoto issue du site de l'Assemblée nationale ou de Wikipedia

L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Philippe Vigier visant à garantir un accès aux soins égal sur l’ensemble du territoire (nos 4119, 4223).

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La parole est à M. Philippe Vigier, rapporteur de la commission des affaires sociales.

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Monsieur le président, madame la ministre des affaires sociales et de la santé, madame la présidente de la commission des affaires sociales, mes chers collègues, s’il est un sujet important, suscitant un intérêt partagé sur tous les bancs de cet hémicycle, c’est bien celui de l’accès aux soins. D’ailleurs, chacun me l’accordera, il s’invite très souvent dans le débat, tout au long de l’année.

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Ce fut encore le cas il y a quelques semaines, lors de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017 : Mme Annie Le Houerou, par exemple, constatant comme tout un chacun que, au fil des ans, l’écart se creuse entre des zones sous-dotées et des zones surdotées en professionnels de santé, a proposé un dispositif de conventionnement sélectif des médecins libéraux dans ces dernières.

Au-delà de la représentation parlementaire, le Conseil national de l’Ordre des médecins affirmait, dans son livre blanc de janvier 2016 intitulé Pour l’avenir de la santé : « la présence des médecins sur le territoire est très inégalement répartie. Les incitations conventionnelles mises en place par l’assurance maladie obligatoire n’ont pas été suffisantes pour faire réellement bouger les lignes ». C’est un paradoxe, mes chers collègues, puisque les médecins n’ont jamais été aussi nombreux en France – plus de 285 000 au 1er janvier 2016.

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L’UFC-Que choisir s’est également demandée si l’accès aux soins s’était amélioré ou s’il avait régressé. Les résultats sont implacables : l’accès aux soins s’est altéré pour un quart de la population. Et le problème se pose sur tous les territoires, pas seulement les territoires ruraux : il y a encore quelques jours, Paris était cité comme une ville dans laquelle les médecins généralistes venaient à manquer.

Depuis de nombreuses années, madame la ministre, les gouvernements successifs ont essayé de mettre en place des dispositions. L’État, rappelons-le, a d’abord exonéré d’impôt sur le revenu les médecins s’installant dans les zones de redynamisation urbaine et les zones de revitalisation rurale. Il a également prévu une exonération d’impôt sur le revenu au titre de la participation à la permanence des soins, ainsi qu’une possibilité d’exonération de taxe professionnelle et une garantie de revenus pour les praticiens territoriaux de médecine générale, mesure censée être l’alpha et l’oméga pour tout régler. L’État, vous le voyez, a donc essayé d’agir.

Les collectivités territoriales ne sont pas en reste. Elles financent les maisons de santé pluridisciplinaires, dans lesquelles les régions sont engagées, avec les contrats de plan, de même que les intercommunalités. Des contrats régionaux d’exercice sanitaire sont signés. Des indemnités de logement et de déplacement ainsi que des bourses d’études sont versées par certains départements et régions pour aider les étudiants à s’orienter vers la profession de médecin. Bref, beaucoup a été fait, mais avec une évaluation très faible, aucune mesure n’ayant réellement fait la preuve de sa pertinence.

La Sécurité sociale n’a pas été en reste. Pour mémoire, elle a majoré de 20 % les honoraires des médecins généralistes libéraux exerçant en groupe dans les zones déficitaires identifiées. Elle a également mis en place une option démographie, puis, fin 2014, une option santé solidarité territoriale, dispositif auquel n’ont souscrit que vingt-huit adhérents. En outre, elle a financé des contrats d’engagement de service public.

On voit donc que les dispositifs de l’État, des collectivités et de la Sécurité sociale se sont amoncelés au fil du temps sans résultat, pire, avec une aggravation de la situation.

En parallèle, des régulations ont été instituées pour d’autres professions – infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, orthophonistes, dentistes, biologistes – ; nul ne pourra dire le contraire, et je rappelle à mes collègues du groupe Les Républicains qu’ils les ont cautionnées.

La situation va-t-elle s’améliorer ?

Non, au contraire, elle va s’aggraver, en raison, d’abord, du vieillissement de la population médicale, chacun le sait.

Par ailleurs, malgré le grand nombre de médecins, la diminution du temps médical disponible est un fait confirmé, car les conditions de vie ont changé, les 35 heures sont passées par là….

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…et les femmes sont plus nombreuses dans la profession – ce qui est un bien. Au final, la médecine de 2016 n’est plus celle d’il y a trente ou quarante ans.

Et puis, il y a toutes les tâches administratives, qui réduisent naturellement le temps médical des professionnels.

De plus, on observe une préférence très fortement marquée pour le salariat : neuf médecins sur dix préfèrent travailler dans une structure publique ou parapublique plutôt que s’installer dans le privé. Pire, les praticiens mettent souvent huit à neuf ans à s’installer définitivement après la fin de leurs études : l’âge moyen d’installation atteint trente-sept ans.

Enfin, madame la ministre, vous le savez, les besoins de soins augmentent en raison du vieillissement de la population et des nouvelles thérapeutiques.

Les facteurs d’aggravation sont donc nombreux.

Second paradoxe, de multiples initiatives ont été prises sur tous les bancs. Marc Bernier, dans un rapport, évoquait les difficultés d’installation. Avec Jean-Marc Ayrault et les autres membres du groupe socialiste, madame la ministre, vous avez cosigné, en 2011, une proposition de loi pour l’instauration d’un bouclier rural au service des territoires d’avenir, dans lequel vous invitiez à « revoir sans tabou le dogme de la liberté d’installation ». Il conviendrait au moins de procéder à une régulation, et mon rôle est, modestement, de faire avancer ce sujet.

Quant au projet socialiste de 2012, il y était écrit : « nous demanderons aux jeunes médecins libéraux d’exercer en début de carrière dans les zones qui manquent de praticiens ». François Hollande lui-même, alors candidat à la présidentielle, dans le vingtième de ses soixante engagements, avait promis : « Je sécuriserai l’accès aux soins de tous les Français. »

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Je pose la question aujourd’hui : la sécurité d’accès aux soins est-elle meilleure en 2016 qu’elle ne l’était en 2012 ? La réponse est implacable : le sénateur centriste Hervé Maurey a expliqué dans son rapport que, malgré toutes les annonces, le changement n’avait pas eu lieu.

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Il a insisté sur le fait qu’il est pratiquement impossible de réaliser des évaluations et que celles disponibles sont si fragmentaires qu’elles ne peuvent être prises en compte.

Avec cette proposition de loi, madame la ministre, je viens simplement vous dire que la situation est grave.

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Je sais que vous avez également essayé d’apporter votre contribution, j’y reviendrai.

Je ne viens pas avec ce texte en disant que tout est à prendre ou à laisser. Pour autant, il ne serait pas sérieux que l’on m’explique, comme en commission, que tous les articles devaient disparaître, que rien ne sera fait et que l’on va attendre. Ma logique n’est pas de considérer tout ce projet de loi comme formidable, mais essayons intelligemment de construire et d’avancer ensemble !

J’entends les aspirations des internes, dont j’ai rencontré les représentants. J’entends leurs inquiétudes et leurs messages sur la liberté d’installation et la volonté d’une formation toujours plus poussée.

Je remercie au passage Mme la présidente de la commission des affaires sociales, qui, en commission, a noté ma ténacité, puisque que je présente cette proposition de loi pour la troisième fois. Une fois de plus, je le redis, mes chers collègues : sur de tels sujets, essayons de construire ensemble ! Il n’y a pas une solution de gauche et une solution de droite, mais une seule solution.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe de l’Union des démocrates et indépendants

Excellent !

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Chacun connaît les mesures que nous proposons.

Il convient d’abord de renforcer le critère de démographie médicale dans la détermination du numerus clausus. Celui-ci, créé en 1971 et qui a augmenté, si l’on considère les chiffres de 2000, « a fait la preuve de son inefficacité », d’après le livre blanc du Conseil national de l’Ordre des médecins. Vous répondrez qu’il a augmenté, madame la ministre ; c’est vrai, notamment dans la région Centre-Val de Loire, qui nous est commune.

Par ailleurs, je propose que la durée des stages de troisième année d’internat passe à douze mois et qu’ils soient effectués dans les zones sous-dotées – arrêtons d’employer l’expression « déserts médicaux » –, c’est-à-dire sur presque tout le territoire national, en dehors des zones surdotées, où l’on constate une hyperconcentration. Ces stages doivent durer non pas six mois mais une année, durée nécessaire pour la greffe puisse prendre.

Nous proposons également de régionaliser l’internat, comme il y a quelques années. Le système fonctionnerait tellement mieux si les étudiants avaient le choix de passer trois concours, ce qui leur permettrait d’opter pour la région dans laquelle ils souhaitent se former. Une donnée est intéressante : 80 % des étudiants restent dans la région où ils se sont formés. Que l’on ne dise pas que le choix s’en trouverait limité, car les épreuves classantes nationales pour l’internat ne laissent pas de liberté de choix.

Ma proposition de loi prévoit aussi de permettre aux internes qui n’ont pas terminé leur thèse de pratiquer la médecine en tant que collaborateurs. Sur ce point, madame la ministre, je tiens à vous rentre hommage. Il y a quelques semaines, je suis venu vous voir pour vous dire qu’il fallait traiter ce sujet. Le 25 octobre dernier, lors de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, vous nous avez indiqué que vous tiendrez compte de nos remarques et que vous prendrez des décisions allant dans ce sens. Pour que nous fassions aboutir la co-construction, je préférerais cependant donner force de loi à cette disposition. Elle est importante car elle permettra à des internes, déjà médecins mais « non thésés », d’exercer la médecine, dans des conditions salariales identiques à celles de tous les médecins.

La dernière des mesures proposées fait un peu polémique : il s’agit, à partir de 2020, de demander aux médecins d’exercer durant trois ans dans la région où ils ont été formés. Ils pourront être accueillis dans les maisons de santé pluridisciplinaires, qui maillent le territoire ; ainsi, ils n’auront aucun frais d’installation à débourser. Je fais un pari : ils se plairont dans la ville qu’ils auront choisie et ils disposeront d’un choix très large pour s’installer par la suite. Dans ma magnifique région du Centre-Val de Loire, que je vous invite à découvrir, ces jeunes médecins pourront s’installer partout en dehors de Tours. Demander trois ans à des médecins ne constituera pas une privation absolue, d’autant, comme je vous l’ai expliqué tout à l’heure, qu’ils ne s’installent pas définitivement avant l’âge de trente-sept ans. En clair, le nomadisme, actuellement propre aux périodes de remplacement, se verrait remplacer par une sédentarité pendant trois ans.

Je dirai un dernier mot à propos de la télémédecine, monsieur le président. J’avais également défendu, la dernière fois, la formidable avancée que cela représente, en soulignant que cela ne suffira pas car il faut maintenir un lien entre le patient et le malade.

Les mesures prises par les gouvernements successifs, ces dernières années, ayant été insuffisantes, je souhaiterais que nous puissions, dans le calme, la sérénité et la détermination, essayer d’avancer ensemble ce matin, sur ce sujet auquel pensent un grand nombre de nos compatriotes, tant l’accès aux soins s’est dégradé dans notre pays.

Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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La parole est à Mme la ministre des affaires sociales et de la santé.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Monsieur le président, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur de la commission des affaires sociales, mesdames et messieurs les députés, le débat sur l’accès aux soins est d’intérêt général, car il s’agit d’une préoccupation majeure pour nos concitoyens, partout sur le territoire, y compris dans les villes. C’est réfléchir à l’avenir de nos territoires et à la pérennité de notre protection sociale – mais je ne m’immiscerai pas dans le débat qui semble émerger actuellement compte tenu de la primaire de la droite.

Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Je n’engage pas cette discussion, je dis seulement que la question de l’accès aux soins est un vrai débat. Garantir l’accès aux soins de tous, c’est évidemment une très grande ambition de la République sociale.

L’histoire de la France a permis d’éviter que des barrières financières ou géographiques n’empêchent certains de nos concitoyens, suivant leur origine sociale ou leur lieu d’habitation, de se soigner. Une telle ambition implique des exigences fortes, au premier rang desquelles se trouve la lucidité.

Être lucide, c’est regarder la réalité en face, sans rien mettre sous le tapis, sans détourner le regard, sans tabou, je le dis clairement. Il y a, chez beaucoup de nos concitoyens, des inquiétudes, évidemment légitimes : on se demande si le médecin de famille vieillissant aura un successeur, si l’on trouvera un nouveau médecin traitant lorsque l’on changera de lieu de résidence, si l’on obtiendra un rendez-vous chez un spécialiste dans un délai rapide. Ces questions se posent à beaucoup de Français – ou, du moins, ceux-ci imaginent qu’elles se posent.

Vous l’avez dit, monsieur le rapporteur, ces inquiétudes ne datent pas d’hier. Elles sont le fruit d’années durant lesquelles les pouvoirs publics n’ont pas vu que s’engageaient des transformations de fond de notre système de santé et de notre société, obligeant à inventer, à cesser de se reposer sur les solutions du passé.

La situation que nous connaissons, les inquiétudes qui existent sont aussi la conséquence d’un creux démographique lié aux départs en retraite des médecins de la génération du baby-boom, alors que ceux qui les remplacent sont moins nombreux, en raison du malthusianisme du numerus clausus – au demeurant, ce débat ne concerne pas que les médecins, puisque des générations très peuplées partent aujourd’hui à la retraite.

Cependant, être lucide, ce n’est pas s’arrêter aux inquiétudes ; c’est aussi reconnaître l’espoir formidable que constitue la jeune génération de professionnels de santé. Contrairement à ce que prétendent les fatalistes, il apparaît que la médecine générale n’est pas condamnée à la disparition. L’an dernier, à l’issue des épreuves classantes nationales, le premier étudiant à choisir la médecine générale était classé vingt-quatrième sur 8 124 ; c’est historique.

Cette jeune génération fait aussi mentir les clichés, les stéréotypes, qui voudraient que les médecins n’aient d’yeux que pour les grandes villes ou pour la Côte d’Azur : les trois quarts des internes en médecine générale déclarent vouloir s’installer en milieu rural ou semi-rural. Les médecins ne sont pas le problème mais la solution, cette jeune génération en est une belle illustration. À ceux qui déclarent vouloir s’installer en milieu rural ou semi-rural, il convient d’apporter les réponses qui leur permettront de passer du stade de la déclaration d’intention, de l’expression d’une envie ou d’une volonté, au stade de l’action et de la mise en oeuvre de leur projet.

À l’exigence de lucidité que je viens d’évoquer s’en ajoute une autre : celle de l’efficacité. S’agissant du sujet qui nous réunit ce matin, je veux dire qu’il n’y a aucune mauvaise volonté, ni d’un côté ni de l’autre. Toutes et tous, nous sommes élus de la République ; pour certains d’entre nous – peut-être la majorité, ce matin –, nous sommes les élus de territoires ruraux ou semi-ruraux directement concernés. Nous savons que l’enjeu est trop important pour souffrir une quelconque caricature. Et vous ne m’entendrez jamais rejeter par principe une proposition : il y a toujours plusieurs chemins possibles ;…

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

…ceux qui prétendent qu’il n’existe qu’une réponse ou qu’une solution se trompent, dans ce domaine comme dans d’autres.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Il y a toujours plusieurs chemins possibles, qu’il s’agit d’examiner, d’explorer, d’évaluer. Notre responsabilité, c’est de définir le plus efficace d’entre eux pour arriver à bon port.

Le Gouvernement poursuit une ambition claire et assumée : inciter les jeunes médecins à s’installer dans les territoires sous-dotés. Plus que d’un choix, il s’agit d’une conviction : pour améliorer la présence médicale sur le territoire, non, tout n’avait pas été essayé.

La grande erreur commise par les gouvernements précédents, c’est, je le répète, de n’avoir pas perçu l’évolution des attentes des médecins, à mesure que la société française se transformait. La médecine, comme toutes les professions, s’est féminisée, et les femmes médecins attendaient – elles les ont maintenant obtenues – les mêmes protections sociales, les mêmes garanties que les autres femmes. Pour s’installer sur des territoires ruraux, elles ont demandé que leur soient apportées des réponses en matière de protection sociale. Le modèle du médecin exerçant seul, isolé dans son cabinet, vingt-quatre heures sur vingt-quatre et sept jours sur sept – nous l’avons tous à l’esprit, c’était le médecin de notre enfance et encore de notre jeunesse –, ce modèle a vécu. Il y a désormais un besoin de synergie, de partage, d’échange, pour mieux accompagner les patients atteints de pathologies chroniques et mieux répondre aux attentes des malades.

L’ambition du pacte territoire santé, dont j’ai présenté la première version dès 2012, est de prendre cette réalité à bras-le-corps et d’y répondre, en utilisant une méthode : l’innovation, notamment s’agissant de l’organisation. Avec ce pacte, nous avons dessiné un cadre pour encourager l’installation des jeunes médecins sur les territoires sous-dotés, et les premiers résultats sont déjà visibles.

Afin de permettre aux praticiens de travailler en équipe, nous avons favorisé le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles. Ces structures sont désormais soutenues financièrement – je dis bien les structures, et non les professionnels qui y exercent –, en fonction du nombre de professionnels qui y travaillent, à hauteur de 50 000 euros par an en moyenne, ce qui permet de financer, par exemple, du secrétariat. Ces maisons maillent peu à peu le territoire : elles seront passées de 150 en 2012 à 1 200 en 2017.

En outre, 1 800 étudiants en médecine ont souscrit un contrat d’engagement de service public : il s’agit, vous le savez, d’une bourse octroyée en échange d’un engagement à exercer sur un territoire sous-doté, pendant au moins quelques années. Concrètement, 1 800 jeunes médecins s’installeront donc prochainement sur ces territoires.

Par ailleurs, 650 jeunes médecins ont déjà signé un contrat de praticien territorial de médecine générale : en contrepartie de leur installation, ils bénéficient de nouvelles garanties, en particulier d’une protection sociale améliorée.

Le numerus clausus a été relevé dans plusieurs régions, ciblées en fonction de leurs besoins particuliers.

Pour inciter les jeunes médecins à s’installer, il fallait aussi revoir en profondeur leur formation, afin de la rendre mieux adaptée, plus professionnalisante. Nous avons donc augmenté le nombre de maîtres de stage universitaires recrutés parmi les professionnels de santé de terrain.

Et puis – cela semble évident, mais c’était une nécessité –, il fallait faire connaître ces dispositifs, car les jeunes médecins ne savaient pas spontanément ce qui était mis à leur disposition. C’est la raison pour laquelle ont été désignés des référents à l’installation, présents dans chaque région : un nom et un numéro de téléphone pour répondre aux questions que se posent les jeunes et les accompagner dans leurs démarches.

Depuis 2012, nous menons – je mène – cette politique volontariste. Il ne s’agit évidemment pas de prétendre, et je ne le prétendrai pas, qu’elle a d’ores et déjà remédié à toutes les situations de tensions sur le territoire ou levé toutes les inquiétudes. Il s’agit simplement de constater que cette politique donne des résultats, qu’elle commence à porter ses fruits, que la donne est en train de changer. J’aurai très prochainement l’occasion d’en présenter un bilan complet et territorialisé.

Faut-il pour autant exclure de nouvelles mesures ? La réponse est évidemment non.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Tout ce qui vient concourir à l’installation des professionnels doit être encouragé.

Les mesures que vous proposez dans ce texte sont-elles les bonnes, sont-elles adaptées ?

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Je ne le crois pas.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

J’en viens ainsi au texte que nous examinons ce matin, à votre initiative, monsieur le rapporteur, et à celle de votre groupe. Il propose une direction diamétralement opposée à celle que je viens d’évoquer : la coercition à l’installation.

Je le disais tout à l’heure, il n’y a pas de tabou, pas de débat interdit. Les propositions ne doivent être examinées qu’à l’aune de leur efficacité, rien d’autre. C’est bien l’inefficacité des mesures prévues par ce texte qui me conduit à en demander le rejet.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Les mesures coercitives que vous proposez, en particulier le conventionnement sélectif et l’exercice obligatoire de trois ans en zone sous-dense, sont-elles efficaces ? Je constate – vous me pardonnerez cette incursion, qui n’est pas anecdotique, sur le terrain du débat électoral présidentiel – qu’aucun des candidats de l’actuelle opposition à l’élection présidentielle ne les propose.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Il s’agirait, je le souligne, d’un changement majeur d’organisation du système de santé, et même de système.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Je n’ai pas peur par principe des changements d’organisation ou de système, mais je crois qu’il faut les présenter comme tels et les soumettre au débat – électoral, en particulier –, afin que les Français, les patients, les médecins et les étudiants en médecine, futurs praticiens, sachent exactement ce qu’il en est.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Ces mesures seront-elles ou non défendues au cours de la campagne pour l’élection présidentielle, en particulier par les candidats que vous soutenez ? En faites-vous un critère de choix pour votre positionnement dans cette campagne ?

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Ces questions sont légitimes, d’autant plus que l’on peut s’interroger sur le résultat prévisible des mesures que vous proposez.

J’en reviens au conventionnement sélectif à l’installation, dont nous avons eu l’occasion de discuter il y a peu, lors de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017. Je l’ai déjà dit et je le répète : je pense que cette mesure est dangereuse. Sa conséquence inéluctable serait en effet la consécration d’une médecine à deux vitesses. Le conventionnement sélectif, cela signifie, très concrètement, qu’un médecin s’installe sur un territoire en fonction de sa seule volonté et que, suivant l’endroit, ses patients sont ou ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale. Contrairement à ce que l’on pourrait imaginer, les professionnels ne sont pas incités à s’installer dans les zones où ses confrères manquent ; on leur dit simplement que, s’ils vont dans une zone de ce type, leurs patients ne seront pas remboursés, ce qui veut dire que certains pourront s’y payer des soins et d’autres ne le pourront pas. Je pense que cela reviendrait à mettre en place une médecine privatisée, non remboursée, concentrée dans les centres-villes, dans les zones où le pouvoir d’achat est élevé. Or, je le dis et je le répète, je ne veux pas engager la France dans cette direction, qui me paraît de funeste augure. Je suis trop attachée à la solidarité nationale, à la Sécurité sociale et à l’assurance maladie pour les remettre en cause ; pour moi, cette position est fondamentale.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Vous proposez une autre mesure : l’obligation, pour les médecins souhaitant exercer une activité libérale, de s’installer pendant au moins trois ans sur un territoire déficitaire. L’honnêteté m’oblige à constater que cette mesure n’est pas du tout de même nature que la précédente ; je ne pense pas qu’elle comporte les mêmes risques pour l’assurance maladie et la Sécurité sociale, car il ne s’agit pas là d’instaurer des dispositifs de remboursement différents. En revanche, je crains qu’elle n’apporte pas de réponse au problème actuel. D’ailleurs, vous proposez sa mise en oeuvre en 2020 – vous reprenez la même date depuis plusieurs années. Cela signifie que, d’ici là, aucune réponse ne sera apportée, c’est un fait. Ensuite, je crains qu’une telle mesure ne s’avère contraire à l’objectif que vous affirmez poursuivre. Cela reviendrait à changer les règles du jeu en cours de match, car l’échéance 2020 est à la fois proche et éloignée ; les étudiants qui seront médecins en 2020 sont déjà avancés dans leur cursus. De surcroît, il est permis de penser que les médecins d’aujourd’hui et de demain s’organiseraient pour échapper à cette contrainte. Je rappelle que 25 % des étudiants en médecine ne s’inscrivent pas à l’Ordre des médecins à l’issue de leurs études ; si cette mesure était adoptée, ils seraient sans doute nombreux à décider de ne pas exercer, à opter pour des spécialités à exercice hospitalier, à partir à l’étranger ou à préférer d’autres modes d’exercice.

Permettez-moi de formuler une autre remarque avec un peu de distance, monsieur le rapporteur, mesdames et messieurs les députés du groupe UDI et du reste de l’opposition. Pendant des mois et des mois, vous m’avez reproché de vouloir sacrifier la médecine libérale ; vous m’avez expliqué, à longueur de débats, que j’avais à l’esprit un modèle presque soviétique, un modèle de « médecine administrative ».

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Et voici que, tout à coup, vous proposez une mesure qui revient purement et simplement à fragiliser la médecine libérale en soutenant la création d’une filière de recrutement vers un exercice salarié. Si tel est votre souhait, le débat mérite d’être posé : estimez-vous que nous devrions mailler le territoire de structures de médecins salariés, tous hospitaliers, déporter la médecine, si j’ose dire, vers les établissements de santé ? C’est un choix dont il nous faut poser les termes ainsi, car nous devons être clairs avec nos concitoyens et avec les futurs médecins, aujourd’hui étudiants.

Est-ce à dire qu’il ne faut plus rien faire, se reposer sur les mesures engagées dans le cadre du pacte de 2012 ? Évidemment non ! Défendre efficacement un égal accès aux soins sur l’ensemble du territoire, c’est marquer une cohérence, refuser les changements de pied et les mesures-spectacles, mais c’est aussi innover en maintenant un cap, tout faire pour donner de la confiance et de la stabilité à nos professionnels de santé. C’est dans cette voie que j’entends poursuivre notre action.

La politique que nous avons engagée doit donc être amplifiée, et le Parlement, bien entendu, y être associé. C’est en ce sens que j’ai proposé à votre assemblée un amendement au PLFSS pour 2017 visant à constituer des équipes de médecins libéraux remplaçants auprès des agences régionales de santé. Ces équipes viendront soutenir les médecins libéraux installés en zone sous-dense. Il s’agit d’une attente forte, exprimée par les jeunes professionnels eux-mêmes.

Nous renforçons aussi, avec la nouvelle convention médicale, le soutien à l’installation des médecins libéraux sur des territoires sous-dotés, dès lors qu’ils maîtrisent leurs tarifs et participent à la permanence des soins ambulatoires.

Par ailleurs, je viens d’adresser aux directeurs généraux des agences régionales de santé et à l’Ordre des médecins une circulaire d’interprétation qui leur permettra d’autoriser des médecins « non thésés » à venir en appui de médecins installés dans des zones sous-denses, conformément à l’engagement que j’avais pris. Il s’agit, très concrètement, de bâtir un statut d’adjoint du médecin, autorisant l’étudiant remplaçant à exercer en même temps que le médecin qu’il remplace.

Enfin, je proposerai des dispositions nécessairement législatives – mais qui ne peuvent trouver place dans un PLFSS, où elles seraient considérées comme des cavaliers législatifs – pour traiter la situation des médecins qui, bien que n’ayant pas soutenu leur thèse dans les temps, souhaitent exercer. Une centaine de médecins pourraient ainsi s’installer immédiatement.

Poursuivre et amplifier notre action, c’est aussi mieux prendre en compte les choix géographiques d’installation. De nouvelles règles de zonage vont être mises en place ; elles doivent permettre non seulement de répondre à la situation des zones déjà sous-dotées, mais aussi de mieux anticiper les zones qui peuvent le devenir ou apparaissent comme tendues.

Dans la même logique d’une meilleure prise en compte des besoins au plus près des territoires, j’ai fait le choix de mieux adapter le numerus clausus. L’année dernière, j’ai été amenée, après des échanges directs avec les acteurs locaux, à le relever dans plusieurs régions. Cette mesure a été retenue par l’ensemble des acteurs comme la principale mesure de la Grande conférence de la santé. Je vous annonce aujourd’hui sa généralisation, avec l’augmentation du numerus clausus de 478 places supplémentaires – vingt-deux facultés seront concernées –,…

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

…soit une augmentation de 11 %.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

Mesdames et messieurs les députés, la démographie médicale est un sujet assurément complexe, exigeant et important, qui nous appelle à examiner la situation en profondeur et de façon structurelle. Nous devons faire en sorte de changer les pratiques et de moderniser le cadre de la médecine de ville. C’est ainsi que nous pourrons offrir des perspectives de long terme à notre système de santé. Telle est l’ambition politique que je poursuis.

Parallèlement au bilan que je présenterai dans les prochaines semaines, une mission parlementaire permettra de faire le point et, le cas échéant, d’aller plus loin.

Pour toutes ces raisons, le Gouvernement ne soutient pas la proposition de loi examinée ce matin,…

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

…tout en restant disponible pour le débat.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et sur de nombreux bancs du groupe Les Républicains.

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Dans la discussion générale, la parole est à M. Francis Vercamer.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi que nous examinons ce matin traite d’un sujet auquel chacun, sur ces bancs, est fortement sensibilisé. La persistance et l’extension de ce qu’il est convenu d’appeler les « déserts médicaux » constituent en effet une préoccupation aiguë pour l’ensemble des élus que nous sommes, quelles que soient nos appartenances partisanes. Il s’agit d’une préoccupation pour nous et d’une faille pour nos territoires, mais surtout d’une angoisse et d’une incompréhension pour nos concitoyens. Les échanges fournis et de qualité que nous avons eus en commission, la semaine dernière, ont témoigné de l’attention soutenue que chacun d’entre nous porte à ce phénomène et de notre volonté d’y apporter une réponse.

C’est sur la nature de celle-ci que nous ne sommes malheureusement pas tombés d’accord. En choisissant d’inscrire, dans le cadre de notre niche parlementaire, la présente proposition de loi, excellemment défendue par notre collègue Philippe Vigier, le groupe UDI a voulu marquer toute l’importance qu’il accorde à ce sujet et être à l’initiative d’un débat que nous jugeons plus que jamais indispensable. Pour la deuxième fois au cours de ce mandat, le rapporteur soumet donc ce texte à la discussion, avec le soutien de notre groupe, persuadé que c’est le renouvellement des débats qui fait avancer les échanges, évoluer les esprits et émerger des solutions novatrices.

La question des déserts médicaux se trouve à la confluence de plusieurs principes dont l’importance mérite d’être rappelée.

La liberté d’installation des professionnels libéraux fait partie de ces principes, et ce n’est pas le moindre, dès lors qu’il est régulièrement désigné comme l’obstacle principal aux tentatives de régulation du législateur. De fait, le code de la Sécurité sociale élève la liberté d’installation des médecins au rang des principes déontologiques fondamentaux qui assurent, « dans l’intérêt des assurés sociaux et de la santé publique, le respect de la liberté d’exercice et de l’indépendance professionnelle et morale des médecins ».

La proposition de loi, mes chers collègues, n’entend nullement remettre en cause cette liberté d’installation : elle vise seulement à en assurer la régulation, à définir les règles dans le cadre duquel elle s’exerce. Une telle régulation, qui existe pour bien d’autres professions de santé, répond avant tout à des considérations d’intérêt général. Il ne s’agit pas de contraindre, de nier la liberté d’installation,…

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…mais d’assurer sa conciliation avec ces autres principes fondamentaux de notre droit que sont l’égalité entre les territoires, l’égalité entre les citoyens et l’égal accès aux soins pour tous nos compatriotes. Car c’est cette égalité d’accès aux soins – et à des soins de qualité, bien entendu – qui est en cause avec la désertification médicale.

En apparence, la situation est paradoxale : avec 285 840 médecins inscrits au tableau de l’Ordre au 1er janvier 2016, dont 215 583 pleinement en activité, le nombre de médecins a rarement été aussi élevé dans notre pays ; il a d’ailleurs augmenté de plus de 140 % depuis 1979. Mais cet effectif global impressionnant cache des disparités démographiques et territoriales qui expliquent la constitution progressive et ininterrompue de déserts médicaux.

Nous constatons d’abord un phénomène de vieillissement de la population médicale, comme le soulignent les éléments fournis par le rapporteur. Les médecins âgés de soixante ans et plus représentent 27,1 % des effectifs, contre 18,6 % pour les médecins âgés de moins de quarante ans. D’autre part, les médecins généralistes sont les plus touchés par l’augmentation du nombre de départs en retraite : entre 2007 et 2025, nos territoires auront perdu un médecin généraliste sur quatre. La combinaison, sur un territoire donné, entre une moyenne d’âge élevée et un nombre insuffisant de médecins généralistes remet en cause tout l’équilibre de l’accès aux soins de premier niveau, tant le généraliste joue un rôle fondamental dans le parcours de soins.

Ainsi, la désertification médicale prend une ampleur accrue au fil des années, aussi bien sur les territoires ruraux que dans les quartiers urbains défavorisés.

Il ne faut pas négliger non plus l’effet d’entraînement que la disparition progressive des médecins généralistes peut avoir sur les autres professions médicales. De par son activité de prescripteur, le médecin généraliste structure autour de lui tout un réseau de professionnels de santé, autrement dit tout une gamme de soins et d’actes permettant la prise en charge du patient. Pharmaciens, infirmiers, kinésithérapeutes, analystes ou radiologues accueillent le patient tout au long d’un parcours dans l’organisation duquel le médecin généraliste joue un rôle déterminant.

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Un territoire sans médecin généraliste se prive donc de cette offre pluraliste.

D’autres facteurs expliquent aussi la réduction du nombre de médecins généralistes.

La limitation du numerus clausus, qui fixe chaque année le nombre de places ouvertes en deuxième année de médecine, en fait partie. Cette limitation, flagrante tout au long des années 90, supposait que la limitation de l’offre de soins suffirait à ralentir la progression des dépenses de santé. Fixé à 8 500 étudiants en 1971, le numerus clausus est tombé à 3 700, avant de remonter, depuis les années 2000, pour s’établir à 7 646 en 2016. Nous supportons les conséquences de ce choix qui fut une erreur collective, commise par les gouvernements de toutes tendances politiques.

Par ailleurs, chacun s’accorde à reconnaître que les conditions mêmes d’exercice de la profession de médecin ont profondément évolué. L’exercice libéral, en cabinet, où le médecin est isolé dans son rapport quotidien avec les patients, est un modèle qui ne répond plus aux attentes de la jeune génération. Les jeunes médecins aspirent en effet à un meilleur équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle ou familiale. Dans ces conditions, l’exercice libéral attire beaucoup moins de médecins à l’issue des études.

Ces facteurs se combinent au développement du salariat des médecins, à la réduction du temps d’exercice médical disponible et à la répartition inégale des praticiens sur le territoire, si bien que l’accès aux soins devient de plus en plus difficile pour les patients. À ce sujet, le rapporteur met en évidence que, entre 2012 et 2016, l’accès géographique aux médecins généralistes s’est dégradé pour plus d’un quart de la population. Les temps d’attente pour obtenir un rendez-vous s’allongent, cependant que 58 % des Français déclarent avoir déjà renoncé à des soins en raison de délais excessifs pour accéder à un spécialiste.

Face à cette situation, vous comprendrez que l’on ne peut pas laisser s’installer des médecins dans des régions ou sur des territoires surdotés. Comment accepter, comme ce fut malheureusement le cas en commission, de voir supprimées une à une toutes les dispositions de la proposition de loi ? Comme si le problème ne méritait pas d’être traité au plus vite, alors que les problématiques liées au vieillissement général de la population, au développement des maladies chroniques et aux enjeux de la coordination du parcours de santé entre médecine de ville et hôpital ne feront que s’accentuer dans les années à venir !

Les mesures incitatives prises pour combler le déficit, voire l’absence de médecins sur certains territoires, pour louables qu’elles soient, ont largement démontré leur insuffisance. En plus d’être coûteuses, elles n’ont pas suffi à engager une dynamique significative de réinstallation dans les zones sous-dotées.

Ainsi, les contrats de praticiens territoriaux de médecine générale, introduits par la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2013, ne concerneraient-ils que 650 jeunes médecins ; le dispositif est donc encore loin d’avoir prouvé son efficacité. Alors même que les collectivités territoriales font preuve d’un volontarisme résolu pour résorber la désertification médicale, au risque d’accroître la concurrence entre les territoires, nous sommes convaincus que les pouvoirs publics doivent passer à une nouvelle étape. C’est le sens de cette proposition de loi.

Ses principales dispositions font débat mais elle a le mérite de prendre le problème à bras-le-corps et d’apporter un certain nombre de solutions inédites.

Elle vise tout d’abord à régionaliser la réponse aux besoins de santé sur les territoires, conformément à une approche constamment défendue par notre groupe, depuis de nombreuses années, sur les questions de santé. Cette approche trouve ici toute sa pertinence avec, d’une part, la prise en compte des spécificités sanitaires des territoires dans la fixation du numerus clausus et, d’autre part, la régionalisation des épreuves classantes nationales.

En instaurant par ailleurs, au cours des études de médecine, un passage obligé en zone sous-dotée, ainsi qu’une obligation d’installation dans ces mêmes zones pendant trois ans à l’issue du cursus de formation, la proposition de loi introduit deux outils enfin efficaces de régulation comme de répartition des médecins sur le territoire.

En proposant des mesures qui trouveraient à s’appliquer d’abord durant le temps de formation puis, pendant une durée limitée, à l’issue de celui-ci, la proposition de loi opère bien la nécessaire conciliation entre liberté d’installation et égalité d’accès aux soins pour tous nos concitoyens.

Ce texte propose également un régime d’autorisation d’installation géré par les agences régionales de santé : ces dernières auraient à se prononcer sur l’installation de chaque médecin, en fonction de critères objectifs de densité médicale.

Enfin, afin d’allonger la durée d’activité des médecins, il encourage le cumul emploi-retraites et favorise le développement de la télémédecine.

Des dispositifs divers sont donc pleinement mobilisés en vue de répondre au défi de la désertification médicale.

La persévérance manifestée par notre collègue Philippe Vigier…

Sourires.

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…dans la défense de ses propositions visant à assurer un égal accès aux soins sur l’ensemble du territoire est à la mesure de l’ampleur des déserts médicaux comme de l’inquiétude que ces derniers suscitent. Y apporter enfin des réponses fortes serait un signe de la volonté politique que nos concitoyens attendent de leurs élus. Le groupe UDI sera au rendez-vous de la volonté et soutiendra évidemment cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi dont nous débattons ce matin, inscrite à l’ordre du jour par nos collègues du groupe UDI, vise à garantir un égal accès aux soins sur l’ensemble du territoire. À n’en pas douter, la désertification médicale est une problématique importante, qui touche beaucoup de nos concitoyens ; nous sommes toutes et tous, ici, concernés.

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Ce texte, qui comprend quinze articles, vise principalement à apporter une réponse à la désertification médicale.

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Toutefois, les moyens auxquels il propose de recourir sont jugés trop coercitifs par une majorité des membres de notre groupe.

Dans votre exposé des motifs, monsieur le rapporteur, vous affirmez qu’« aucune mesure d’ampleur n’a été prise pour lutter contre le drame de la désertification médicale ». Le groupe RRDP ne partage manifestement pas cette assertion ; c’est pourquoi ma collègue Dominique Orliac, lors de l’examen de cette proposition de loi en commission, a exprimé l’opposition majoritaire de notre groupe. Si elle contient des articles qui peuvent sembler intéressants et méritent qu’on s’y arrête quelques instants afin d’en débattre, l’esprit général de cette proposition de loi ne satisfait pas la majorité de notre groupe.

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Ainsi, l’article 1er a pour objet de renforcer les critères de démographie médicale dans la détermination du numerus clausus. Le nombre et la répartition des étudiants autorisés à poursuivre leurs études en médecine au-delà de la première année du premier cycle seraient avant tout déterminés en fonction des évolutions prévisibles de la démographie médicale et des besoins de santé de la population sur l’ensemble du territoire.

L’article 2 prévoit qu’au cours de la troisième année d’internat, tout étudiant en médecine devra effectuer un stage d’une durée minimale de douze mois au sein d’une maison de santé pluridisciplinaire, d’un pôle de santé ou d’un établissement hospitalier situés dans les zones dans lesquelles est constaté un déficit en matière d’offre de soins. Cette disposition vise à sensibiliser davantage les étudiants en médecine à la problématique de la désertification médicale. Il convient de rappeler qu’en zone sous-dense, les maîtres de stage manquent. Par conséquent, la mise en oeuvre de votre article 2 pourrait se heurter à des difficultés d’organisation et, de ce fait, ne pas parvenir à améliorer la répartition sur le territoire des internes et la solidité de cette étape de formation.

En revanche, l’article 4, qui vise à faire bénéficier d’un abaissement de charges sociales les médecins exerçant au-delà de l’âge légal de départ en retraite sur les territoires confrontés à la désertification médicale, nous semble intéressant.

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Il me semble que des dispositions du PLFSS pour 2017 adoptées au Sénat vont dans ce sens.

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L’article 5 vise à autoriser les internes en médecine générale à être collaborateurs, même en l’absence de thèse. Actuellement, seuls les internes ayant obtenu leur doctorat ont le droit d’exercer en tant que collaborateurs. Notre groupe estime qu’il n’est pas forcément pertinent de permettre à des étudiants dépourvus de thèse de devenir collaborateurs. Nous pourrions seulement concevoir cette possibilité pour des étudiants qui ont déjà engagé les travaux relatifs à leur thèse. Je me demande, en outre, si autoriser des étudiants n’ayant pas passé de thèse à être collaborateurs ne pourrait pas conduire de futurs étudiants à décider, en définitive, de ne pas passer de thèse du tout.

L’article 6 prévoit qu’à partir de 2020, pour répondre aux besoins de la population en matière d’accès aux soins, tout médecin devra, à l’issue de sa formation et pour une durée minimum de trois ans, s’installer dans un secteur géographique souffrant d’un nombre insuffisant de médecins. Une majorité des membres de notre groupe ne soutient pas de telles mesures coercitives. Il est important de rappeler que les jeunes médecins, après plus de neuf années d’études, ont un projet de vie et un projet professionnel ; il est tout de même logique qu’après tant d’années d’études, ils puissent choisir l’endroit où ils exerceront.

Si la désertification médicale est une problématique importante, à laquelle il faut évidemment remédier, les mesures gouvernementales engagées depuis 2012 pour la combattre commencent à porter leurs fruits. Lors des discussions sur le PLFSS pour 2017, ma collègue Dominique Orliac a exprimé à plusieurs reprises, au nom du groupe RRDP, son opposition à un amendement visant à étendre aux médecins libéraux un dispositif de régulation à l’installation. Il faut rappeler que le Gouvernement a régulièrement répété qu’en la matière, il préférait la dynamique incitative à la coercition. Il faut, dès lors, amplifier cette dynamique et mettre en place de nouvelles mesures favorisant l’installation et l’exercice professionnel, en particulier les remplacements.

Encore dans le cadre du PLFSS pour 2017, nous venons de voter le financement d’une aide à l’installation de 50 000 euros, négociée dans le cadre de la convention médicale. Cette aide, rappelons-le, sera accordée aux médecins qui s’installeront dans des territoires sous-dotés, en contrepartie d’une maîtrise tarifaire – c’est-à-dire de l’absence de dépassements d’honoraires ou de leur maîtrise – et d’une participation à la permanence des soins ambulatoires.

En outre, toujours lors de l’examen en première lecture du PLFSS pour 2017, nous avons pleinement souscrit à la proposition du Gouvernement de constituer, auprès des agences régionales de santé, des équipes de médecins libéraux remplaçants, qui viendront soutenir les médecins libéraux installés en zone sous-dense.

Madame la ministre, vous avez également annoncé, lors de la présentation de la proposition de loi, que vous alliez signer une circulaire d’interprétation qui permettra à l’Ordre des médecins d’autoriser des médecins n’ayant pas encore présenté leur thèse de venir en appui de médecins installés dans les zones sous-denses. Nous vous en félicitons.

Toutes ces dispositions nous semblent bien plus efficaces que celles de l’article 6.

Les articles 7 à 11 conditionnent respectivement l’exercice de la médecine, de la chirurgie dentaire et des professions de sage-femme, d’infirmier libéral et de masseur-kinésithérapeute à l’octroi d’une autorisation d’installation, délivrée par le représentant de l’État et le directeur général de l’agence régionale de santé – ARS –, selon des critères de démographie médicale. À ce sujet, nous partageons l’avis exprimé en commission par notre collègue Gérard Sebaoun : nous ne pensons pas que soumettre le conventionnement de l’ensemble des professions de santé à une autorisation administrative des ARS constitue une réponse efficace à la désertification médicale.

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Notre groupe ne voit pas d’inconvénient à l’article 12 : il souscrit à l’idée d’un développement du recours à la télémédecine par les établissements de santé, les cabinets médicaux et les maisons de santé tout autant que par les pôles de santé. En effet, la télémédecine permettra de nouvelles avancées dans la prise en charge des patients, ne serait-ce que par l’échange d’images et de radiologies, comme l’a indiqué notre collègue Dominique Orliac lors de l’examen de la proposition de loi en commission.

Alors que les syndicats et associations représentatifs des étudiants en médecine, des internes de toutes les spécialités, des chefs de clinique ambulatoires et hospitaliers, des remplaçants et des jeunes médecins installés avaient unanimement dénoncé l’amendement dont j’ai parlé précédemment, qui prévoyait un conventionnement sélectif, on peut se demander quelle serait leur réaction – rappelons qu’ils avaient lancé un préavis de grève – si cette proposition de loi, encore plus coercitive, venait à être votée.

Pour toutes ces raisons, madame la ministre, monsieur le rapporteur, une large majorité de notre groupe ne la soutiendra pas.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe Les Républicains.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la proposition de loi du groupe UDI que nous examinons ce matin traite d’un sujet préoccupant : les déserts médicaux. Elle vise à surmonter la situation et à offrir à tous nos concitoyens, sur l’ensemble du territoire, un égal accès aux soins.

Alors que le nombre de médecins en activité stagne depuis une dizaine d’années et que les besoins en matière de santé ne cessent de croître, il existe désormais des déserts médicaux dans pratiquement tous les départements, sur les territoires ruraux mais aussi dans certains quartiers urbains. La concentration de l’offre médicale sur des territoires déjà bien dotés ne fait qu’aggraver la pénurie. En définitive, près de 2,5 millions de Français sont concernés.

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Cette situation suscite de la part de nos concitoyens, à juste titre, beaucoup d’inquiétude, voire de colère. Nous en parlons depuis plusieurs années déjà et plusieurs mesures ont été prises pour lutter contre ce phénomène de la désertification médicale.

Elles ont été prises à l’initiative de l’État ou, bien souvent, à l’initiative et sur les deniers des collectivités locales : je pense au développement des maisons médicales pluridisciplinaires ou encore aux aides à l’installation des jeunes médecins.

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L’État a multiplié les mesures incitatives, qui prennent la forme d’exonérations d’impôt sur le revenu ou sur les sociétés, de réductions de cotisations sociales ou encore d’aides en prévision de la retraite. Je regrette, sans doute comme vous tous, mes chers collègues, que toutes ces mesures ne soient pas rigoureusement évaluées : comme nous l’avons évoqué en commission, il serait vraiment nécessaire, intéressant et utile pour notre réflexion de mesurer leur impact sur la réduction des déserts médicaux ainsi que de connaître leur coût pour l’État, globalement et par habitant.

Il y a quelques semaines encore, à l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2017, un statut de praticien territorial de médecin remplaçant a été créé, à l’initiative du Gouvernement. Il s’agit d’une bonne mesure, qui peut indiscutablement aider.

Force est de constater, cependant, que tous les dispositifs mis en place au cours des dernières années n’ont pas permis de remédier aux inégalités territoriales en matière d’offres de soins.

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La situation préoccupante dans laquelle nous nous trouvons appelle donc des réponses plus fortes car il relève de notre responsabilité de veiller à ce que tous nos concitoyens puissent avoir accès, en temps et en heure, à des soins de qualité.

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Si le statu quo n’est pas envisageable, nous devons bien avoir à l’esprit que nous payons aujourd’hui les décisions irresponsables prises par le passé et que les mesures prises aujourd’hui ne porteront pleinement leurs fruits que dans plusieurs années, ce qui est extrêmement préoccupant.

Le dogme de la réduction des dépenses publiques qui guide les politiques de santé depuis de nombreuses années est également pour beaucoup dans la situation actuelle. Ainsi, il est essentiel de maintenir des hôpitaux de proximité sur nos territoires car les médecins libéraux, en appui à leur pratique, ont impérativement besoin des plateaux techniques et des compétences spécifiques de ces établissements. Il est évident que la fermeture d’hôpitaux, de maternités et, plus généralement, de lieux de santé de proximité a précipité l’apparition des déserts médicaux.

Il n’existe pas de recette unique pour modifier la situation actuelle car, de même qu’elle est due à la convergence de plusieurs causes, seul un faisceau de solutions peuvent permettre de la surmonter.

Les causes sont multiples. Outre le numerus clausus, trop longtemps insuffisant – j’ai entendu avec intérêt l’annonce par Mme la ministre de son augmentation pour 2017 –, il faut noter le refus des jeunes médecins de se voir éloignés des centres urbains, leur aspiration à exercer de manière différente de leurs aînés, notamment dans un cadre plus collectif, en raison des avancées scientifiques et technologiques, évidemment, mais aussi de leur souhait de privilégier la qualité de leur vie professionnelle et personnelle.

En tout état de cause, il n’est plus acceptable d’arguer du principe de la liberté d’installation des médecins libéraux pour justifier l’inaction politique.

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Personne, apparemment, ne dit d’ailleurs le contraire ; la difficulté surgit quand il faut agir. Tout le monde partage les discours, c’est déjà un point ; maintenant, il faut passer aux actes.

J’ajoute que demander aux médecins de s’installer là où ils le souhaitent sauf dans les lieux où ils sont déjà nombreux, voire trop nombreux, me paraît frappé au coin du bon sens et conforme à l’intérêt des médecins comme des patients. Il faut être raisonnable, serein, sérieux.

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La proposition de loi qui nous est soumise aujourd’hui par Philippe Vigier et son groupe a le mérite de proposer des pistes de travail qui, face au problème grave de la désertification médicale, doivent être explorées.

Les cinq premiers articles du texte, qui tendent à agir avec le levier des études médicales, sont à nos yeux intéressants. Ce sont d’ailleurs des propositions soutenues par le Conseil national de l’Ordre des médecins.

Rappelons que c’est la puissance publique – autrement dit nos concitoyens – qui finance les études de médecine et que c’est la Sécurité sociale qui prend en charge les dépenses médicales. Il est donc légitime et de notre responsabilité d’adopter des dispositions afin de permettre un accès aux soins pour tous sur tout le territoire.

La mise en place d’un internat régional tout comme la prise en compte de l’offre territoriale de soins pour déterminer le niveau du numerus clausus vont dans le bon sens.

Elles permettraient de moduler l’ouverture des postes dans les régions en fonction des besoins – il y en aurait davantage dans celles qui en ont le plus besoin. Nous savons en effet que les étudiants en médecine s’installent majoritairement là où ils ont fait leurs études, parce que c’est là que résident, outre leurs relations amicales, leurs réseaux professionnels, constitués de leurs professeurs, maîtres de stage et collègues d’autres spécialités.

De même, la mise en place d’un stage obligatoire dans une zone sous-dotée, pour les étudiants en médecine après leurs trois premières années de cursus, est une mesure à laquelle nous pouvons souscrire.

L’idée que les internes « non thésés » puissent exercer en tant que collaborateurs nous paraît également recevable.

Nous sommes plus interrogatifs à propos de l’article 6, selon lequel, à partir de 2020, tout médecin devrait, à l’issue de sa formation et pour une durée minimale de trois ans, s’installer dans un secteur géographique souffrant d’un nombre insuffisant de médecins. Sans doute une telle contrainte sur les jeunes médecins serait-elle trop lourde.

Je l’ai dit en commission et je veux le répéter ici, nous considérons que les articles 7 à 11, qui conditionnent l’exercice de diverses professions de santé à une autorisation préalable du directeur de l’agence régionale de santé, renforceraient le pouvoir déjà exorbitant des ARS. Nous souhaiterions en tout état de cause que les décisions soient prises plus collectivement, en lien avec les professionnels de terrain et les usagers, ainsi qu’avec les élus, qui connaissent également la situation.

Pour conclure, il est certain que la gravité du sujet mérite des actes concrets d’ampleur car, je le répète, nous avons la responsabilité de veiller à ce que tout le monde, sur tout le territoire, soit correctement dépisté et traité. D’ailleurs, de ce point de vue, la loi de modernisation de notre système de santé n’a pas été tout à fait à la hauteur des enjeux.

Certaines des mesures contenues dans cette proposition de loi sont intéressantes. D’autres mériteraient que l’on en débatte, dans un esprit constructif. Je regrette que ce ne soit le cas puisque le groupe majoritaire a décidé de déposer des amendements de suppression sur tous les articles sans exception ; ce positionnement n’est pas de nature à nous permettre d’avancer.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, pour la seconde fois de cette législature, la troisième si l’on prend en compte le mandat précédent, nous examinons une proposition de loi déposée par Philippe Vigier sur le même sujet.

Cher Philippe Vigier, si l’on peut saluer votre constance dans les idées, je crains pour vous qu’il ne faille saluer la nôtre dans le rejet de votre proposition…

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Votre texte est quasi identique à celui de 2012. Je suis surpris qu’à quelques mois de la fin de nos mandats, vous reveniez à la charge. Vous qui ne manquez pas de rappeler que l’alternance est proche, pourquoi ne réservez-vous pas vos arguments, votre démonstration, qui était somme toute convaincante, pour la possible future majorité, pour vos amis politiques ? Vous allez invoquer l’urgence mais vous savez vous-même que vos propositions n’auraient d’effet qu’à long terme. Je pense surtout que vous ne croyez pas que le parti Les Républicains, comme il l’a montré lors de la précédente législature, soit convaincu par vos suggestions.

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Peut-être nos collègues démontreront-ils le contraire, nous verrons dans un moment.

Votre constat est pourtant largement partagé sur tous les bancs. Depuis plusieurs décennies, de façon lente mais certaine, les déserts médicaux s’étendent ; nombre de territoires ne sont plus correctement irrigués.

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Certaines spécialités – je pense particulièrement à la gynécologie ou à l’ophtalmologie mais je pourrais en citer d’autres – ne sont pas suffisamment présentes partout sur le territoire, et ces problèmes touchent aussi bien les zones urbaines que rurales, chacun peut d’ailleurs le voir dans sa propre circonscription.

La ministre et tous les députés ici en sont parfaitement conscients. Toutefois, là où nous divergeons, c’est à propos des remèdes à administrer. Vous proposez un changement radical du cadre, à la limite de la nationalisation de la médecine – j’ose le dire, après Mme la ministre. C’est un choix, vous pouvez l’assumer, mais il faudra peut-être le dire plus clairement. Si tel est le cas, ce n’est pas par une proposition de loi qu’il faut agir. Cela appelle un grand débat national, une négociation globale avec tous les professionnels de santé, auxquels seraient associés les Français, tous potentiellement concernés par les problèmes de santé. Ce n’est pas le cas aujourd’hui et nous ne pouvons accepter de vues aussi radicales, à partir du seul exercice législatif de l’examen d’une proposition de loi, aussi légitime soit-il.

Dans quelques mois, les Français auront à se prononcer sur des projets, des programmes ; je ne doute pas que vous saurez convaincre alors le candidat que vous soutiendrez de prendre une position claire, sur un sujet que vous considérez si essentiel. Un peu de patience, monsieur Vigier !

Pour l’heure, même si vous feignez de l’ignorer, le gouvernement en place depuis 2012 agit – vous l’avez rappelé mais vous n’avez pas insisté sur les mesures qui ont été prises, pourtant nombreuses.

Il y a juste un an, Mme la ministre a présenté et mis en oeuvre le pacte territoire santé 2, qui contient des mesures innovantes pour s’adapter aux besoins des médecins et des territoires. Sans entrer dans le détail de ces engagements, ils ont tous vocation à favoriser, par des aides financières ou des améliorations des conditions d’exercice du métier, une implantation réussie sur les territoires qui manquent le plus de médecins.

Ces mesures commencent à produire des effets – je pense aux maisons médicales, qui seront au nombre de 1 000 fin 2017 –, même si, je peux l’entendre, il existe encore de fortes disparités d’un territoire à l’autre. Le gouvernement que nous soutenons a fait ces choix, dans le respect des engagements pris par le Président de la République en 2012.

Je n’entrerai pas dans le détail de vos propositions, monsieur Vigier ; après Mme la ministre, Gérard Sebaoun le fera à son tour dans quelques instants et démontrera avec pertinence pourquoi nous serons amenés à rejeter votre texte, comme ce fut le cas en commission.

Une fois de plus, la représentation nationale s’est penchée sur un vrai sujet, qui intéresse tous nos concitoyens. Des questions comme le numerus clausus, les nouvelles pratiques médicales, plus respectueuses d’une nécessaire qualité de vie des professionnels de santé, l’attractivité de la profession, la télémédecine sont encore à débattre.

Une chose est sûre, c’est l’objectif à atteindre : chaque Français doit pouvoir se faire soigner facilement près de chez lui.

En saluant une fois de plus votre constance, qui confine à l’insistance, je ne voterai pas votre proposition de loi.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, comme je l’ai dit en commission des affaires sociales, nous retrouvons la ténacité et l’engagement de Philippe Vigier, qui relance la question de l’accès aux soins, en faisant le constat de la désertification médicale sur certains territoires dépourvus de généralistes, de spécialistes mais aussi de structures hospitalières.

Si nous sommes tous d’accord sur le constat, démontré dans toutes les études et confirmé de manière très sérieuse par le Conseil national de l’Ordre des médecins, cette proposition de loi montre combien il importe, encore une fois, de défendre la liberté d’installation des médecins libéraux, qu’ils soient généralistes ou spécialistes, car c’est ce que vous voulez remettre en question, monsieur Vigier : vous estimez, comme d’autres collègues, que la solution consiste à contraindre, à réduire cette liberté, voire à la supprimer.

Nous payons aujourd’hui, il faut bien le rappeler, la faiblesse du numerus clausus des années 1995-2000. Oui, c’est un sujet sensible ; ce n’est pas la première fois qu’il est évoqué, mais il l’est souvent sans accepter les conséquences des propositions avancées, qui pourraient être très contre-productives, je vais encore le démontrer aujourd’hui.

Dans votre rapport, monsieur Vigier, vous osez dire qu’il est grand temps de prendre rapidement des mesures fortes pour enrayer la désertification médicale tout en respectant les aspirations des jeunes médecins et en s’appuyant sur elles. C’est une contrevérité, voire une attaque contre tous les représentants des jeunes.

Vous vous référez à vos rencontres avec les syndicats étudiants. Je les ai aussi rencontrés. Que ce soit l’Intersyndicat national des internes, l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale ou le syndicat des jeunes généralistes REAGJIR, ils sont vent debout contre votre proposition de loi. Voici ce qu’a écrit l’Association nationale des étudiants en médecine de France – que je connais très bien –, après vous avoir rencontré à l’Assemblée nationale, il y a une semaine : « Non seulement la proposition de loi évoque une mesure de coercition à l’installation dans son article 6 mais elle suggère en plus une mesure de conventionnement sélectif dans les articles 7 à 11. Ce type de régulation, par la gestion des cabinets et non plus des professionnels, se rapproche beaucoup plus du système anglais, instauré par les NHS, où la régulation se fait par les autorisations de création contre fermeture de cabinets médicaux, et non par les professionnels directement. On connaît bien la dérive du système anglais, où il est impossible d’avoir accès directement à un médecin, sauf à faire appel à des médecins privés, non conventionnés, et donc créant une plus grande inégalité sociale entre les patients. Nos arguments sur le conventionnement sélectif demeurent intacts depuis l’amendement de Mme Le Houerou, il y a quelques semaines, et nous ne pouvons accepter que la mobilité sur le territoire soit soumise au bon vouloir de l’État, ou alors c’est l’étatisation de la médecine libérale française, en clair. »

Monsieur le rapporteur, vous voulez inciter les jeunes médecins à s’installer dans les zones sous-dotées et vous dite qu’il faut être à l’écoute de leurs demandes. Vous savez très bien – c’est un problème majeur – que peu d’entre eux s’installeront en médecine générale ambulatoire chaque année : à leur sortie de l’université, moins de 9 % choisissent la médecine générale. Vous savez aussi très bien qu’ils ne s’installeront jamais avant trente-cinq ans minimum, d’après les études du Conseil national de l’Ordre des médecins. Vous savez également très bien qu’ils ne s’installent pas seuls, mais qu’ils ont déjà un projet de famille. Vous savez encore très bien qu’un médecin qui n’a pas choisi de son plein gré sa zone d’installation est un médecin qui partira, laissant sa patientèle en jachère – les exemples, ici et là, sont frappants. Vous savez enfin très bien que les exemples de l’étranger sont parlants : en Allemagne, où je suis allé, en Autriche, pays dont j’ai étudié la situation, en Belgique et même au Québec, certaines tentatives ont provoqué la fuite des étudiants de la médecine générale. En un mot, les jeunes veulent une installation choisie et non pas une installation subie.

Monsieur le rapporteur, la médecine générale est le parent pauvre de la médecine. Elle subit des relations administratives difficiles, des contraintes multiples dans des territoires que les services publics ont désertés, des tarifs parmi les plus bas d’Europe.

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Nous le savons, et le Conseil national de l’Ordre des médecins l’a confirmé, cela conduit à ce que des milliers d’étudiants choisissent d’autres voies, celles des exercices particuliers – l’industrie ou le salariat, je ne développe pas –, et à ce que 200 à 300 médecins par an optent pour l’exode vers l’étranger.

Vous affirmez de façon appuyée, dans votre proposition de loi, que l’on aura beau mettre en place toutes les mesures incitatives possibles et imaginables, elles resteront insuffisantes. C’est faire fi de ce qui a été engagé depuis des années, par la gauche comme par la droite – dont vous faites partie –, en faveur du développement des maisons de santé et des pôles de santé, au nombre de 800 aujourd’hui et très prisés par les syndicats de jeunes, ainsi que des 1 300 contrats d’engagement de service public. Tout cela n’est certes pas suffisant, et nous le reconnaissons, mais cela demande de la communication et de la persévérance, non des critiques négatives.

Monsieur le rapporteur, il y a quelques mois, le groupe Les Républicains a présenté une proposition de loi dont certaines des dispositions ont reçu l’assentiment des étudiants et du Conseil national de l’Ordre des médecins. Je ne reviens pas dessus car les débats ont déjà eu lieu ici, mais nous souhaitons sanctuariser la médecine libérale – comme d’ailleurs nos candidats à la primaire de la droite et du centre l’annoncent dans leurs programmes respectifs –, incluant la liberté d’installation. Certaines propositions se rapprochent de votre texte : les stages obligatoires pendant au moins un an dans les zones désertifiées ; les centres ambulatoires universitaires, où les jeunes médecins se rendent au contact des seniors ; l’incitation à employer des médecins retraités dans les zones fragiles, évoquée par un collègue tout à l’heure.

Avant de conclure, je veux être un peu provocateur. Monsieur Vigier, dans « libéral », il y a « liberté ».

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Nous estimons donc que la médecine libérale doit rester indépendante, et le médecin libre de son choix d’installation.

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En revanche, si nous voulons organiser l’accessibilité sur tout le territoire, osons créer un service public de santé ambulatoire ! Mais qui en prendra la responsabilité, à moins que cela ne figure dans un programme présidentiel ? Attendons donc quelques mois…

Le groupe Les Républicains, dans sa large majorité, ne cessera de réaffirmer qu’une politique de santé publique ne peut se faire contre les professionnels de santé mais doit se faire avec eux.

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Nous insisterons par conséquent sur les mesures incitatives les plus créatrices, les plus inventives, ainsi que sur la revalorisation de la profession de médecin généraliste.

Si l’inquiétude des élus locaux est légitime,…

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…comme l’ont rappelé mes collègues Jean-Louis Costes, Arnaud Viala ou Pierre Morel-A-L’Huissier, l’arme de la coercition n’a jamais fait ses preuves.

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Empêcher une installation dans une zone sous-dotée ne garantit aucunement que les candidats se résoudront à visser leur plaque dans un désert médical. Ils choisiront le déconventionnement et le secteur 3, ce qui pénalisera l’ensemble de notre pays et de notre protection sociale.

C’est par l’innovation organisationnelle et technologique, avec la télémédecine, par exemple, que vous évoquez dans votre texte, que les solutions devront émerger,…

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…mais non avec l’esprit de clocher de certains, qui imaginent encore que chaque village pourrait accueillir son cabinet médical. C’est le temps passé.

Vous l’avez compris, monsieur Vigier, notre groupe, dans sa large majorité, n’appuiera pas votre texte.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains et sur quelques bancs du groupe Les Républicains.

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Nous sommes réunis ce matin pour étudier votre proposition de loi, monsieur Vigier. Je crois que c’est la troisième fois que vous déposez un texte quasi identique, visant à mettre en place des mesures coercitives pour l’installation de médecins en zones sous-dotées. Vous l’avez d’abord fait sous la précédente mandature puis en 2012. Dans les deux cas, vos propositions de loi avaient été rejetées, alors que ce n’étaient pas les mêmes majorités ; cela montre que, si le débat a lieu régulièrement, vos arguments n’ont pas convaincu, pas plus qu’ils ne nous convainquent ce matin. Je vais vous expliquer pourquoi.

Le candidat à l’élection présidentielle François Hollande s’était clairement engagé à mettre en oeuvre une politique incitative visant à améliorer l’installation des médecins sur le territoire. Vous, madame la ministre, depuis 2012, vous vous êtes attelée à cette tâche avec détermination. Les inégalités dans la répartition des médecins sur le territoire sont une réalité. À titre d’exemple, on dénombre 798 médecins pour 100 000 habitants à Paris, mais 180 pour 100 000 dans l’Eure – et, dans d’autres départements, ils sont encore moins.

Pour y répondre, madame la ministre, vous avez lancé, en 2012, le pacte territoire santé, dont Michel Issindou a précisé qu’il a déjà eu deux volets successifs. Ce pacte vise à encourager l’installation des jeunes médecins en zone rurale. Plusieurs mesures ont été prises à cet effet : le doublement du nombre de contrats d’engagement de service public, pour atteindre 1 700 à l’horizon 2017 ; la création du statut de praticien territorial de médecine ambulatoire ; celle du statut de praticien territorial de médecine générale ; le développement des maisons de santé pluriprofessionnelles, 830 d’entre elles maillant désormais le territoire – leur nombre a plus que triplé depuis 2012 – et des projets supplémentaires étant portés par des professionnels et des collectivités en zones sous-dotées ; enfin, vous l’avez rappelé, l’augmentation du numerus clausus, en concentrant la hausse du nombre de places dans les régions considérées comme prioritaires.

Par ailleurs, plusieurs mesures ont été inscrites dans la négociation conventionnelle, comme l’aide à l’installation de 50 000 euros pour les médecins s’installant dans un désert médical. Des expérimentations ont été menées, je peux en témoigner. Je vous remercie de nouveau, madame la ministre, pour votre disponibilité à examiner des problématiques qui ne sont pas toujours liées à la densité démographique, mais parfois à des pointes saisonnières, auxquelles il faut pouvoir répondre.

Monsieur le rapporteur, s’agissant d’abord de l’exposé des motifs de votre proposition de loi, si nous partageons le constat que notre système de santé est aujourd’hui confronté à un défi démographique et économique, et qu’il doit s’adapter et se moderniser pour permettre à l’ensemble de la population d’accéder à des soins de qualité, je ne peux que regretter que vous n’ayez pas souligné, comme cela aurait été sans doute souhaitable, l’effort accompli sur le numerus clausus, lequel a presque doublé de 1998 à 2008, en passant de près de 3 500 à plus de 7 000.

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Je regrette également que vous n’ayez pas évoqué les différentes mesures qui ont été prises. Certes, comme toute chose, elles sont probablement perfectibles, nous en sommes unanimement conscients, mais il serait illusoire de laisser penser à nos concitoyens qu’une solution miracle pourrait exister.

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Comment revenir, en quelques mois et au moyen de quelques décisions, sur une situation qui trouve malheureusement son origine dans des politiques menées pendant plusieurs dizaines d’années ?

Je ne reprendrai pas l’ensemble des articles.

L’article 1er de la proposition de loi renforce les modalités de fixation du nombre d’étudiants admis à l’issue de la première année. Le nombre de places en deuxième année de médecine, défini par le numerus clausus, a augmenté régulièrement, je le répète, en ciblant uniquement les régions déficitaires en médecins. Procéder à une modification de cette disposition du code de l’éducation n’apporterait pas le changement notable que vous pourriez souhaiter.

Votre article 6 prévoit un certain nombre de dispositions, sur lesquelles je ne reviens pas, puisque vous les avez explicitées. Elles s’orientent vers des obligations et le déconventionnement. Je partage totalement la position exprimée par Mme la ministre tout à l’heure, sur le danger que représentent ces mesures de déconventionnement pour le patient : ce n’est pas parce qu’on interdira à quelqu’un de s’installer dans tel ou tel territoire qu’il ira nécessairement s’installer là où sa présence sera nécessaire – c’est vrai dans tous les domaines, nous le savons bien.

Nous pouvons d’ailleurs nous demander, en tant qu’élus, quelles sont les raisons territoriales pour lesquelles nous rencontrons autant de difficultés. Il ne s’agit pas de stigmatiser telle ou telle profession, mais plutôt de regarder ce qu’il en est en termes de qualité de vie et d’attractivité. En effet, même si nos territoires possèdent beaucoup d’atouts – je suis bien placée pour le savoir –, nous rencontrons aussi un certain nombre de difficultés pour être attractifs, peut-être pas vis-à-vis du professionnel, mais de sa famille, de son conjoint ou de sa conjointe. Tout cela doit être pris en considération.

Nous ne saurions considérer que cette question peut être traitée uniquement à travers le prisme des médecins. Il me semble que nous devons mener une réflexion beaucoup plus globale sur l’ensemble des professions de santé car nous savons bien que les médecins souhaitent aussi pouvoir travailler en réseau.

Vous avez dit tout à l’heure, monsieur Vigier, qu’il fallait savoir remettre en cause le « dogme » de la régulation.

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Vous avez bien employé le mot « dogme », je l’ai noté !

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Soit, je me suis peut-être trompée, mais ce n’est pas le problème. Je voudrais juste souligner un problème de méthode et un problème de fond.

S’agissant de la méthode, plus précisément du véhicule législatif, un sujet aussi important ne saurait être traité dans une simple proposition de loi. Si, un jour, il devait y avoir des mesures coercitives – ce que, personnellement, je ne souhaite pas –, si le débat devait avoir lieu, il devrait se tenir à une échelle beaucoup plus large,…

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Mais bien sûr ! Comme cela a été le cas avec les infirmières, les kinésithérapeutes, les dentistes ou les biologistes !

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…en particulier avec l’ensemble des professionnels, mais certainement pas au détour d’un véhicule législatif qui ne permet pas, me semble-t-il, d’avoir ce large débat.

Je veux signaler une autre incohérence dans la méthode. Comme d’autres rapporteurs de la loi de modernisation de notre système de santé, j’ai eu à donner un avis sur de très nombreux amendements, venant de tous les groupes de l’opposition, nous demandant de réaffirmer la liberté d’installation des médecins. Il a fallu y répondre et rassurer les députés, parce que ces amendements laissaient supposer que le Gouvernement et la majorité auraient voulu remettre en cause la liberté d’installation.

D’autres que moi ont souligné ces incohérences de méthode ; elles m’amènent à penser qu’il serait inopportun de donner une suite favorable au texte que vous nous proposez.

Je me réjouis, madame la ministre, que vous ayez fait, ce matin encore, des annonces qui nous montrent votre détermination à avancer sur ce sujet. La mission parlementaire…

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…devrait nous permettre, me semble-t-il, d’élargir le champ, comme je le souhaite, d’intégrer des problématiques sensibles pour les professionnels, notamment la question, à laquelle je suis très attentive, des trajets dans les territoires les plus difficiles d’accès, comme les fonds de vallées, les zones de montagne et les zones rurales, ou encore celles de leur qualité de vie et de la composition de leurs revenus.

Nous avons la possibilité de nous appuyer sur des expériences tentées sur les territoires. Comme l’a très bien souligné Mme Fraysse, il n’y a pas de solution unique ; je crois plutôt aux solutions territoriales, qui pourront nous servir de points d’appui et de réseaux pour nourrir la réflexion de l’ensemble des professionnels et des élus.

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Notre groupe appellera évidemment à rejeter cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, comme l’a excellemment dit tout à l’heure Jean-Pierre Door, soutenu notamment par nos collègues du groupe Les Républicains Pierre Morange et Gilles Lurton, il faut préserver la liberté d’installation des médecins libéraux. Pour notre groupe, il s’agit d’un droit essentiel, et nous sommes évidemment très défavorables à la proposition de loi de M. Philippe Vigier.

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Les médecins connaissent le blues de l’installation : ils s’installent en libéraux de plus en plus tard et beaucoup choisissent même de ne jamais le faire. Comme chacun le sait, ils sont mal rémunérés ; vous allez faire l’effort, madame la ministre, de porter le prix de la consultation de 23 à 25 euros, mais la rémunération des médecins reste extrêmement faible, insuffisante au regard des contraintes qu’ils subissent. C’est un métier difficile, que les jeunes étudiants ont décidé d’embrasser, au terme d’études longues, difficiles et techniques, un métier où les conditions de travail ne sont pas faciles. Revenir sur la liberté d’installation provoquerait sûrement une désaffection des étudiants. En outre, les mesures proposées seraient particulièrement inefficaces, j’y reviendrai dans quelques instants.

Ce n’est pas la première tentative de revenir sur la liberté d’installation des médecins. Lors du débat sur le dernier PLFSS, notre collègue socialiste Annie Le Houerou avait déjà essayé de la restreindre. Cette initiative fut immédiatement suivie d’un préavis de grève nationale de la part des jeunes étudiants. Mme la ministre, vous vous êtes évidemment opposée à cette mesure et l’avez fait savoir ; nous vous en remercions et vous en félicitons.

La proposition de loi de Philippe Vigier, qui cherche à revenir sur la liberté d’installation des médecins libéraux, est extrêmement dangereuse ; nous nous y opposons résolument.

Et ce texte va encore plus loin, puisqu’il conditionnerait l’exercice non seulement de la médecine, mais aussi de la chirurgie dentaire ainsi que des métiers de sage-femme, d’infirmier et de masseur-kinésithérapeute à une autorisation de l’agence régionale de santé. Cette étatisation nous apparaît totalement inacceptable. En cas de création de cabinets non autorisés, les professionnels de santé récalcitrants seraient tout simplement déconventionnés. Pour nous, Les Républicains, c’est inadmissible.

Nous n’avons jamais cessé d’affirmer qu’une politique de santé publique devait être menée non contre, mais avec les professionnels de santé, et nous avons toujours soutenu la préservation de la liberté d’installation. Tous les candidats à la primaire de la droite se sont toujours exprimés en ce sens ; il n’y a, madame la ministre, aucune ambiguïté. Au demeurant, nous sommes également tous opposés à l’étatisation que constituerait la création du tiers payant.

Bien sûr, les syndicats se sont mobilisés sur la question, car ils savent tous qu’il faut préserver la médecine libérale. L’ISNAR-IMG, l’Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale, indique ainsi : « Cette mesure coercitive porte directement atteinte à la liberté d’installation » et « est injuste, inefficace et dangereuse ».

Protestations sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Ces étudiants, déjà engagés dans leur cursus universitaire, ont fait leur choix sans prévoir cette restriction ; leur réaction est évidemment négative. Le syndicat des jeunes généralistes REAGJIR, cité par Jean-Pierre Door tout à l’heure, rappelle que les pays ayant tenté d’appliquer ce type de mesures – la Belgique, l’Allemagne ou le Québec – ont constaté la fuite des étudiants en médecine et de médecins formés. L’effet est donc très négatif.

Le groupe Les Républicains estime qu’il faut avoir une vision plus globale et proposer, au contraire, des mesures incitatives, afin de permettre l’installation durable de médecins dans les zones en souffrance. Sous la précédente majorité, sous la conduite du Premier ministre François Fillon, nous avions commencé à mettre en place certaines mesures, qui commencent à porter leurs fruits.

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Nous avons accru le numerus clausus – et Mme Touraine a poursuivi l’action en ce sens –, pour permettre à plus d’étudiants d’être formés ; les résultats ne se feront sentir que dans quelques années, mais il fallait agir puissamment. Nous avions également répondu à la demande des jeunes générations de médecins, qui ne souhaitent plus pratiquer leur métier de manière isolée mais plébiscitent l’exercice collectif. La loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires avait créé les contrats d’engagement de service public : des étudiants s’engagent à exercer dans une zone déficitaire en contrepartie du paiement d’une allocation pendant leurs études ; ce dispositif monte encore en charge puisque le nombre de contrats d’engagement de service public est passé d’environ 300 en 2011 à 430 en 2012.

Nous devons continuer à promouvoir et à amplifier des solutions innovantes. Parmi celles-ci, je retiens une des propositions pour l’avenir de notre système de santé formulées par Bernard Accoyer : l’équipement des zones à faible densité médicale en appareils de télémédecine, domaine en plein développement dans lequel la France a du retard.

Toutes ces mesures doivent contribuer à rendre l’exercice libéral plus attractif, pour attirer les jeunes et les inciter à s’installer dans des zones sous-dotées. C’est la raison pour laquelle le groupe Les Républicains s’oppose à la présente proposition de loi. Pour nous, il faut sauver la liberté d’installation des médecins libéraux.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Monsieur le rapporteur, je vous remercie d’avoir mis à l’ordre du jour cette proposition de loi sur un sujet ô combien essentiel : l’accès aux soins pour tous. Vous faites le constat de l’accroissement des inégalités, alors qu’il n’y a jamais eu autant de médecins. L’Aquitaine est une région sous-médicalisée par rapport à la moyenne nationale : Bergerac a perdu la moitié de ses médecins généralistes en quelques années. Je partage les vives préoccupations des Français à ce sujet et, comme vous, je m’interroge sur l’efficacité réelle des mesures incitatives prises ces dernières années.

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Cette proposition de loi est conséquente – quinze articles – et j’en salue l’orientation globale. Vouloir que les médecins s’installent sur tout le territoire, c’est bien ; les amener concrètement à s’installer, c’est mieux.

J’ai invité un médecin de campagne à venir témoigner à l’une de mes traditionnelles réunions publiques appelées « lundis de la députée », à Monsaguel, en mars dernier. Parlant de son expérience, il a évoqué les évolutions du métier de médecin, les convictions qui l’ont animé, ses rêves de succession, devenus cauchemars, et ses analyses pour permettre le maintien du service public de santé sur tout le territoire national. Je souhaite vous lire quelques lignes de sa conclusion : « Il nous faut valoriser la médecine générale, réadapter la rémunération des médecins et leur protection sociale, former leurs successeurs, ne pas alourdir les contraintes administratives qui détournent le médecin de son coeur de métier, soigner. »

Certes, des mesures positives ont été mises en place par le ministère de la santé, à travers le pacte territoire santé et dans des lois que nous avons votées. Cependant, les effets concrets ne sont pas toujours bien visibles ; peut-être n’avons-nous pas assez de recul.

Parmi ces mesures, je tiens à en saluer trois.

D’abord, la proposition de garantie financière minimum : par la signature d’un contrat, un revenu mensuel brut est garanti à tout médecin s’installant en zone peu dense ; ce salaire garanti par l’État conforte les jeunes praticiens dans le choix de la médecine libérale, profession indépendante peu protégée des accidents de la vie, et dans laquelle les horaires peuvent exploser. Les chiffres le montrent : deux tiers des signataires ont moins de trente-cinq ans, trois quarts sont installés en zone rurale. En effet, les jeunes praticiens de santé, médecins et infirmiers, comparent les contraintes horaires, les responsabilités, les revenus réels, et préfèrent souvent pratiquer la médecine hospitalière salariée plutôt que la médecine indépendante.

Par ailleurs, un congé maternité a été instauré pour les femmes médecins. C’est d’autant plus important que 80 % des nouveaux diplômés sont des femmes. Le métier de médecin évolue dans le même sens que la société : aujourd’hui, les jeunes – hommes et femmes, ruraux et urbains – ne veulent plus vivre uniquement à travers leur métier.

Autre mesure que je salue : l’accompagnement à la construction des maisons de santé.

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Je serais curieuse de vous entendre, madame la ministre, sur le bilan de ces structures. Plus de 600 maisons de santé ont été ouvertes depuis 2012. Elles répondent au besoin de mutualisation des charges fixes et de travail en équipe, au sein d’un lieu pluridisciplinaire. Il y a eu des échecs ; quelle analyse en est faite ?

Le maillage médical ne s’arrête pas aux médecins généralistes. Au-delà des mesures attractives en leur faveur, il faut assurer la présence de spécialistes. Ces derniers font cruellement défaut dans certaines zones et même dans les hôpitaux. Le risque de désert médical hospitalier peut entraîner celui de désert médical dit « de ville ». Pour remplacer des médecins généralistes et spécialistes, le numerus clausus, même accru, ne suffit pas pour répondre aux besoins d’une population rurale croissante et vieillissante. C’est pourquoi je soutiens les propositions formulées dans ce texte.

Ma région est un pays de prédilection pour les retraités, qui, au-delà des problèmes de santé, cumulent aussi des besoins sociaux pour lesquels les médecins de campagne assurent sinon la coordination, du moins un vrai relais de terrain. Les milieux ruraux présentent aussi un attrait pour les jeunes actifs, mais encore faut-il nous laisser la possibilité de le leur montrer. Je suis convaincue que les internes et diplômés, en stage, en formation ou en premier exercice, qui viendraient s’installer en Dordogne, y resteraient. C’est pourquoi je suis favorable aux articles 2 et 6, qui prévoient un stage obligatoire et un exercice de trois années dans les zones sous-dotées.

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Nous devons nous diriger vers un service public de la médecine. La France, sixième puissance économique mondiale, ne serait-elle pas en mesure d’assurer à tous l’égal accès à la possibilité d’être soigné rapidement et à proximité de sa résidence ?

Enfin, je me permets d’aborder un sujet oublié : la prévention. Les citoyens, de plus en plus nombreux à requérir des soins réguliers et parfois lourds,…

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…réclament des politiques préventives d’envergure, qui permettraient de réduire considérablement les dépenses publiques et contribueraient au bien-être de la nation.

Je souhaite conclure en évoquant la télémédecine, une piste d’avenir à condition que, derrière la machine, il reste des êtres humains, et que l’on assure le déploiement du numérique partout.

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Telles sont les questions qui restent à résoudre en matière d’égal accès à la santé sur tous les territoires. L’attente des citoyens est immense et nous devrons apporter de vraies réponses.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, nous examinons ce matin une proposition de loi du groupe UDI visant à garantir un accès aux soins égal sur l’ensemble du territoire. Bien évidemment, la question de l’accès aux soins, et donc de l’installation des médecins, est importante pour nos compatriotes.

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Notre assemblée a d’ailleurs déjà eu l’occasion, à plusieurs reprises, d’évoquer ce sujet. Le dernier débat en date remonte aux discussions du PLFSS : notre collègue Annie Le Houerou a proposé, par voie d’amendement, le déconventionnement.

Par ailleurs, la présente proposition de loi a déjà été discutée et rejetée le 22 novembre 2012, ainsi que sous la précédente législature.

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Cela étant dit, la question mérite d’être de nouveau abordée.

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Notre responsabilité est de lutter contre les inégalités, de plus en plus criantes, dans l’accès aux soins ; mais là n’est pas la question. La précédente majorité avait engagé une politique durable de lutte contre la désertification médicale, en mettant en place des dispositifs incitatifs. Comme l’a rappelé ma collègue Isabelle Le Callennec lors de l’examen du texte en commission des affaires sociales, des progrès ont été observés, avec la création de maisons de santé pluriprofessionnelles, l’augmentation du numerus clausus, les contrats d’engagement de service public, le soutien aux remplacements et l’engagement des élus locaux.

Pourtant, force est de constater que la désertification médicale continue et qu’il reste encore du chemin à parcourir en matière d’accès aux soins sur le territoire.

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C’est pourquoi l’initiative du groupe UDI est à saluer. Néanmoins, les solutions retenues dans ce texte pour lutter contre les inégalités d’accès aux soins ne me semblent, hélas, pas satisfaisantes. En effet, comme mesure phare, il est prévu de revenir sur la liberté d’installation des médecins libéraux. Des dispositifs coercitifs seraient créés afin d’obliger les jeunes médecins souhaitant s’installer à le faire, pendant leurs trois premières années d’exercice, en zone sous-dotée, sous peine de pénalité financière.

Mes chers collègues, comme l’a noté Dominique Tian, une politique de santé publique menée contre, et non avec les professionnels de santé, ne pourra qu’aboutir à un échec. Ce n’est pas en nous attaquant aux professionnels de santé, ce n’est pas en limitant leur liberté d’installation que nous résoudrons le problème. Déjà, l’on ne peut que regretter que la majorité actuelle ait pris des mesures entravant l’exercice libéral.

Le tiers payant généralisé vient en effet se surajouter à toutes les formalités, toute la paperasse que dénoncent les médecins en permanence, et qui empiète de plus en plus sur leur temps médical. Il aurait fallu, au contraire, rendre ce métier plus attractif, pour attirer les jeunes et les inciter à s’installer.

Le 16 juin dernier, dans le cadre d’une niche parlementaire, le groupe Les Républicains avait inscrit à l’ordre du jour une proposition de loi pour l’avenir de notre système de soins. À cette occasion, mes collègues Jean-Pierre Door et Arnaud Robinet avaient présenté des axes d’amélioration de notre système de santé, notamment pour lutter contre la désertification médicale.

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Malheureusement, cette proposition de loi a été écartée d’un revers de main par le Gouvernement, ce qui est à mon avis profondément regrettable.

Mes chers collègues, arrêtons d’accabler les professionnels de santé, de les enfermer dans des carcans. Vous l’aurez compris, malgré toute la sympathie que j’ai pour l’auteur de cette proposition de loi, je voterai contre, car elle ne me semble pas apporter de véritable solution à ce problème.

Applaudissements sur les bancs du groupe Les Républicains.

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Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, la médecine est un métier qui implique un fort engagement et de lourdes responsabilités : nous en conviendrons tous. À l’occasion de l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, nous avons reçu comme vous-même, monsieur Vigier, les jeunes médecins auxquels s’adresse votre proposition de loi.

Ils sont pleinement conscients de leur responsabilité. Nous leur avons posé la question : que diriez-vous si, un jour, un Français mourait, faute d’avoir été secouru par un médecin, car il résidait dans une zone sous-dotée ?

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Ils veulent absolument contribuer eux-mêmes à répondre à cette interrogation, à cette inquiétude ; ils ne veulent pas que la réponse leur soit dictée, qu’elle leur soit imposée, même en partie.

Je m’interroge également sur le moment que vous avez choisi pour présenter cette proposition de loi. Mme la ministre a signé avec les médecins une convention dont l’élaboration a pris du temps, pour laquelle beaucoup de concertation a été nécessaire. Cette proposition de loi, présentée immédiatement après, décrédibilise un peu les échanges qui ont eu lieu pour préparer ladite convention. Cette manière de procéder n’est pas la bonne, surtout vis-à-vis des médecins.

Un deuxième élément m’a sauté aux yeux – il a déjà été souligné ici. Des bruits disent qu’une alternance est possible. Or vous ne paraissez guère confiants quant au poids de votre groupe au sein de cette hypothétique majorité à venir. Vous semblez douter de votre capacité à faire passer ce type de mesures. Pourquoi présenter ce texte maintenant, alors que nous sommes à la fin du quinquennat ? Pourquoi ne pas attendre un éventuel changement de majorité ? Plusieurs orateurs ont déjà relevé ce point.

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Je m’interroge plus particulièrement sur l’article de votre proposition de loi qui vise à instaurer une « nomination » – j’emploie volontairement ce terme – pendant trois ans dans un territoire sous-doté.

Je dis régulièrement qu’il n’y a pas de médecine libérale, car la médecine est tout entière financée par l’argent public.

Exclamations sur certains bancs du groupe Les Républicains.

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C’est faux ! Et la liberté d’installation, alors ?

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C’est cela qu’ils veulent : une médecine d’État !

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Les médecins en sont pleinement conscients – c’est d’ailleurs leur honneur. C’est l’honneur de notre pays, monsieur Vigier, de financer un tel système de santé.

Ils ne veulent pas pour autant être considérés comme des fonctionnaires. Vous savez certainement, car vous êtes très proche du corps médical, que les médecins, quand ils ont une clientèle, quand ils suivent des patients, ne veulent pas changer sans cesse le lieu de leur exercice. Ils ne veulent pas être soumis à un régime analogue à celui des préfets, qui sont nommés dans des endroits différents tous les dix-huit mois. De fait, une telle pratique me choquerait profondément.

Enfin, et c’est un autre point important, votre proposition de loi ne tient pas compte de la différence entre les spécialités, par exemple entre la médecine générale et la chirurgie cardiaque. Pourrons-nous envoyer un chirurgien spécialisé dans la chirurgie cardiaque pendant trois ans dans un secteur sous-doté ? À cette question, ainsi formulée, on ne peut que répondre non. Il faut apprécier la réalité des zones sous-dotées selon les spécialités qui sont en cause. Je m’interroge donc sur les problèmes que pose le caractère général de votre proposition de loi.

Voilà pourquoi, monsieur Vigier, dans un esprit de responsabilité, je ne voterai pas votre proposition de loi.

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Comment expliquer qu’en 2016, 6 millions de Français vivent dans des déserts médicaux, alors qu’il n’y a jamais eu autant de médecins – 285 000 ?

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Voilà plus de vingt ans que l’on ressasse la problématique des déserts médicaux, que l’on accumule des mesures incitatives. Pourtant, la situation ne fait qu’empirer. Nous sommes confrontés à un problème sanitaire grave, à une profonde fracture territoriale. Nous allons droit dans le mur !

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Nous devons garantir à nos concitoyens, partout sur le territoire national, le droit d’accéder à un médecin dans des conditions raisonnables, à la fois en distance et en temps. Je rappelle qu’aux termes du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel renvoie le préambule de notre Constitution, la nation garantit à tous la protection de la santé. Il s’agit d’une question d’égalité entre les citoyens ; or ce principe est gravement mis en péril par une fracture sanitaire sans précédent.

J’y suis confronté au premier chef dans mon département, la Lozère. Les chiffres y sont alarmants : moins de sept médecins pour 16 000 habitants, avec une baisse de 19 % entre 2007 et 2016. Ajoutons à cela de nombreux départs à la retraite de médecins d’ici à 2019, notamment dans le nord du département, sans que la relève soit assurée.

Nous devons constater l’échec des dispositifs incitatifs mis en place jusqu’ici. Il s’agit d’abord des exonérations fiscales et sociales au titre d’une installation dans les ZFU, les zones franches urbaines, et dans les ZRR, les zones de revitalisation rurales : un médecin qui s’installe dans ces zones ne paye pas d’impôt pendant huit ans. Il s’agit ensuite de la majoration de 20 % des honoraires des médecins généralistes libéraux exerçant en groupe dans les zones déficitaires, des contrats d’engagement de service public – qui représentent tout de même 1 200 euros par mois pour des étudiants en médecine –, des aides de l’État aux collectivités territoriales afin de financer des structures participant à la permanence des soins et à favoriser l’installation et le maintien des médecins en zone déficitaire – les fameuses maisons de santé pluridisciplinaires, qui coûtent quand même de 1 à 2 millions d’euros, payés par l’État.

On pourrait citer encore bien d’autres mesures : les indemnités kilométriques, les bourses aux étudiants, le financement de leur logement, les aides des départements, des régions, des communes et des EPCI – les établissements publics de coopération intercommunale –, notamment par des exonérations de taxes foncières et de taxe d’habitation, sans compter la nouvelle aide à l’installation de l’assurance maladie – 50 000 euros pour chaque médecin.

C’est une véritable gabegie, une débauche d’argent public, et cela afin d’aider à s’installer des médecins qui gagneront tout de même plus de 10 000 euros par mois ! Il faut mettre en rapport le coût de cet impressionnant arsenal avec son efficacité. Il serait intéressant de le mesurer, d’autant plus que le Gouvernement n’a jamais voulu répondre aux questions écrites que je lui ai adressées à ce sujet.

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Nous voyons clairement les limites des politiques incitatives. La liberté totale d’installation a abouti à une mauvaise répartition spatiale des médecins : certaines zones sont surmédicalisées, tandis que d’autres sont sous-médicalisées. Dans ces dernières, généralement rurales et périurbaines, l’on a le plus grand mal à se soigner. Si vous venez en Lozère du vendredi soir au lundi matin, je ne vous conseille pas de faire un accident vasculaire cérébral. Il y a non-assistance à personne en danger !

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Nous avons tenté la méthode douce : les résultats ne sont pas probants. Nous ne devons donc pas avoir peur d’envisager des mesures structurelles – je ne parle pas, cependant, de mesures coercitives. Il faut simplement du courage. Comme je le disais déjà en 2009, dans certains endroits, il vaut mieux être une vache qu’un homme : les premières ont plus facilement accès au vétérinaire que les seconds au médecin !

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Depuis longtemps j’avance des propositions ; j’ai notamment déposé une proposition de loi en 2010 à ce sujet. Notre collègue Philippe Vigier, lui aussi, se bat depuis longtemps pour établir une réelle égalité territoriale en matière d’accès aux soins. Je le remercie de mener avec tant de détermination ce combat ô combien important.

Il nous propose aujourd’hui plusieurs mesures concrètes pour répondre à l’évolution de l’exercice de la profession médicale, marqué par une préférence plus forte pour le salariat – il y a même des communes, à présent, qui salarient les médecins –, un accroissement des charges administratives, une diminution du temps médical disponible et une modification profonde des mentalités des jeunes médecins, lesquels sont marqués par les 35 heures.

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Il s’agit d’augmenter le numerus clausus, en tenant compte de la démographie médicale, d’obliger les internes à effectuer leur troisième année d’internat dans un établissement situé dans une zone à faible densité médicale, et de régionaliser les épreuves d’internat afin d’adapter le numerus clausus aux besoins de chaque région.

Debut de section - Permalien
Plusieurs députés du groupe Union des démocrates et indépendants

Excellent !

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Il s’agit ensuite de prendre des mesures visant spécifiquement les jeunes médecins, pour imposer à ceux qui font le choix de la carrière libérale d’exercer, les trois premières années, dans une zone sous-dotée. On me dit que ces chers étudiants se sentiront violés dans leur conscience. Il suffirait de leur expliquer, à leur entrée en faculté de médecine, qu’à la fin de leurs études, leur liberté d’installation sera limitée par certaines interdictions. Il relève de votre responsabilité, madame la ministre, de leur expliquer les impératifs de l’aménagement du territoire.

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Il s’agit enfin d’impliquer davantage les agences régionales de santé dans l’installation des médecins. Je parle d’expérience : dans ma commune de Lozère, le médecin est parti, et tout le monde s’en fiche, que ce soit la préfecture, l’agence régionale de santé ou le Conseil de l’ordre. Dans ce genre de situation, vous êtes seul au monde ; il y a même des cabinets privés qui vous demandent 30 000 euros afin de faire venir un médecin étranger, qui s’installe un mois avant de repartir.

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Je tiens par ailleurs à rappeler que des dispositifs régulant l’installation dans certaines professions médicales existent déjà. Je connais les réticences qu’éprouvent certains de mes collègues, y compris au sein de mon groupe politique, à l’idée d’encadrer la liberté d’installation des médecins, mais ce n’est pas une profession comme les autres.

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Il faut vraiment conclure, monsieur Morel-A-L’Huissier.

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Je conclus. Il faut le faire, parce que la santé est un enjeu public majeur, parce que l’accès aux soins est un droit pour tous, parce que la Sécurité sociale assure les revenus des médecins. Être médecin, c’est donc accepter de porter sur ses épaules de très lourdes responsabilités, et accepter de se mettre au service d’un système de santé global en assumant ses contraintes. C’est pourquoi je voterai avec plaisir pour cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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La discussion générale est close.

La parole est à M. le rapporteur, pour répondre aux orateurs.

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J’essaierai de répondre de façon synthétique aux orateurs. Il est dommage que Mme Laclais soit partie ; j’aurais voulu lui dire qu’elle n’a pas bien écouté mon propos liminaire. M. Issindou a dit la même chose qu’elle, et Mme la ministre aussi y a fait référence. Je leur réponds que l’examen de cette proposition de loi n’est pas lié à l’élection présidentielle qui aura lieu dans quelques mois.

L’ordre du jour de cette journée est réservé à l’initiative du groupe de l’Union des démocrates et indépendants. C’est un droit que nous confère le règlement de l’Assemblée nationale, mais nous n’avons pas dix journées de ce type par an. Nous avions déjà choisi de déposer une proposition comparable en 2012. Entre-temps, d’autres textes ont été inscrits dans le cadre des niches de notre groupe, car certaines propositions de mes collègues méritaient naturellement d’être étudiées. N’essayez donc pas de m’attirer sur ce terrain.

Il est vraiment dommage que Mme Laclais ne soit plus là. Elle m’a reproché de m’attaquer au dogme de la liberté d’installation. Mais ce n’est pas moi qui ai parlé de « dogme » : c’est Jean-Marc Ayrault, en 2011, lorsqu’il était président du groupe socialiste. Cette expression figure dans l’exposé des motifs d’une proposition de loi qu’il avait déposée avec – devinez qui ? – Marisol Touraine. N’essayez donc pas de m’attirer sur ce terrain, car vous n’y êtes pas à votre avantage.

Je précise que nos propositions n’engagent aucun des candidats à la primaire de la droite et du centre. Sur de tels sujets, les caricatures ne mènent nulle part et elles sont d’autant moins acceptables qu’elles ne sont pas fondées.

J’ai bien écouté les différents intervenants : ils ont tous considéré le problème sous le seul angle de la liberté d’installation,…

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…qui est pour eux un véritable dogme. Je ne me souviens pas avoir entendu Jean-Pierre Door et Dominique Tian s’opposer de manière aussi volontaire aux mesures de régulation qui ont été décidées pour les masseurs-kinésithérapeutes, pour les infirmières, pour les chirurgiens-dentistes, et aux pouvoirs donnés aux agences régionales de santé sur les biologistes. Pourquoi y aurait-il deux types de professionnels de santé libéraux : d’un côté ceux qui peuvent faire tout comme ils veulent, partout, et d’un autre côté, les autres ? Ce raisonnement ne tient pas une seconde, mes chers collègues.

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Je vous le dis avec beaucoup de respect : je suis moi-même, comme vous le savez, un professionnel de santé libéral, je sais ce que c’est. Vous ne pouvez pas accepter la régulation pour certaines professions, et la refuser à d’autres : cela ne tient pas une seule seconde, ce n’est pas cohérent, et vous savez très bien que j’ai raison en disant cela.

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Vous ne pouvez pas nier que les caisses d’assurance maladie donnent des émoluments spécifiques à certains médecins, comme les radiologues, pour qu’ils restent dans des territoires sous-dotés, car c’est la vérité. De grâce, restez-en à la réalité !

J’ai exposé dans mon intervention liminaire mes propositions, et il est dommage que seule la fameuse liberté d’installation ait été ciblée. En ce qui concerne la date retenue pour l’entrée en vigueur de la réforme – vous en avez parlé vous-même, madame la ministre –, je n’ai pas modifié celle qui était proposée dans les versions antérieures de ce texte, à savoir 2020. J’aurais pu inscrire dans ma proposition de loi l’année 2023, mais je n’ai pas changé la date parce que j’ai pris acte du fait que les mesures qui avaient été lancées par la précédente majorité et que les dispositifs que vous avez vous-même mis en place sont, à mes yeux, insuffisants.

À cet égard, j’invite les uns et les autres à relire le rapport du sénateur Hervé Maurey. Il y explique que non seulement les outils dont on dispose sont insuffisants mais que l’efficacité n’est pas au rendez-vous : je donne acte à tous ceux qui viennent de s’exprimer qu’ils ont unanimement reconnu que l’accès aux soins était moins bon en 2016 qu’en 2012. Je crois que nous sommes tous en phase sur ce sujet. Mais pas un mot sur l’internat régional : personne d’entre vous ne l’a évoqué ; et pas un mot non plus sur l’adaptation du numerus clausus aux spécificités régionales.

Quant aux douze mois de stage que je propose, les étudiants eux-mêmes demandent à sortir de la faculté et il est dommage qu’on ne leur en offre pas la possibilité. Je ne vous dis pas, mes chers collègues, que l’ensemble de mes propositions est à prendre ou à laisser, mais au moins certaines d’entre elles auraient pu être retenues. Or pas une seule ne l’a été en commission, et on va avoir dans quelques instants une motion de rejet préalable, ce qui veut dire : « Circulez, il n’y a rien à voir. » Quelle image on donne !

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J’ai reconnu que la ministre avait accepté ma proposition que les médecins n’ayant pas encore achevé leur thèse puissent s’installer, mais si je voulais qu’elle soit inscrite dans ce texte, c’était pour lui donner force de loi, là où il est seulement prévu que cette possibilité soit du domaine réglementaire. Cela dit, je vous remercie une fois de plus, madame la ministre, d’avoir entendu cette proposition car elle était attendue par des jeunes médecins et c’est un sujet important.

Certains invoquent les maisons de santé pluriprofessionnelles. Vous tombez très bien, mes chers collègues : il y en a une dans ma circonscription, et j’ai oeuvré pour organiser les professionnels en réseau. Mais ouvrons les yeux : il ne s’agit que de gérer la pénurie.

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S’agissant de la revalorisation des actes de médecine, quand aura-t-elle lieu ? Cela fait si longtemps que la question n’a pas été tranchée que l’on est obligé de contourner le problème en mettant en place des dispositifs de rémunération complémentaire.

Par ailleurs, il n’est pas vrai, mes chers collègues, que l’internat national classant permette de s’installer où l’on veut : en fonction de son classement, on va à tel endroit ou à tel autre. C’est la vérité et nul ne peut prétendre le contraire !

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Qu’on ne me parle pas de coercition alors qu’elle découle déjà du concours, Jean-Pierre Door. On n’a pas la spécialité que l’on souhaite dans la ville recherchée si le classement que l’on a obtenu ne le permet pas. Voilà la vérité !

« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Vous voyez bien, mes chers collègues, que vos arguments sont fragiles et incohérents, et qu’ils ne tiennent pas une seconde si on les analyse un peu en profondeur.

Enfin, pourquoi serait-il si dramatique de demander aux jeunes médecins de s’installer dans des zones sous-dotées ? Ne doit-on pas quelques années de service à l’État à la sortie de Polytechnique ? N’est-ce pas aussi le cas à la sortie de l’École normale supérieure, après avoir reçu 20 000 euros par an pour suivre son cursus, madame Delaunay ?

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Les médecins ne sont pas fonctionnaires, eux !

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Ne demande-t-on pas aux infirmières formées dans certains endroits de s’engager à y rester pendant trois ou cinq ans ?

Cette proposition de loi est rejetée en bloc, même la télémédecine, qui a été balayée quasiment d’un revers de main alors que dans le département d’Indre-et-Loire, par exemple, madame la ministre, la maison de santé pluridisciplinaire de Richelieu permet de faire des électrocardiogrammes à distance, en liaison avec l’hôpital de Tours. Et bien d’autres belles expériences comme celle-ci sont menées ailleurs. Mes chers collègues, balayer ce texte d’un revers de main, sans même s’arrêter une seconde,…

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…alors que je suis devant vous avec quasiment tout le groupe UDI, habité par la volonté que nous essayons d’avancer ensemble, c’est prendre la responsabilité de considérer que seuls les uns ont toujours raison et les autres toujours tort. Pourtant, j’ai bien entendu Mme la ministre dire qu’il n’y a pas de chemin qu’on ne puisse emprunter. Vous avez aussi dit qu’on n’a pas tout essayé, et je suis d’accord avec vous. C’est pourquoi modestement, avec humilité, j’ai essayé de tracer quelques chemins.

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Je suis prêt à laisser de côté le problème de l’installation car on ne peut pas uniquement se focaliser sur une mesure, monsieur Tian, quand il n’y en a pas moins de six. Ce n’est pas vous, esprit rationnel, qui pouvez le croire.

Mes chers collègues, je pense à celles et à ceux qui nous regardent, aux étudiants que j’ai rencontrés et avec lesquels on a eu un débat…

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…constructif. J’ai entendu leur message, leur volonté en termes de formation. Je sais qu’ils veulent disposer d’une liberté de parcours.

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Ils sont avant tout au service de la République !

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Mais c’est la médecine libérale elle-même qui est menacée.

Un dernier mot, et personne ici ne pourra me dire le contraire : chacun sait à quel point les services des urgences souffrent actuellement d’encombrements terribles. Ils ne peuvent plus faire face, faute de généralistes disponibles. Il y a vingt-cinq ans, quand je me suis installé, il y avait tous les soirs des généralistes de garde : maintenant, la nuit, ne reste que le service mobile d’urgence et de réanimation.

Vifs applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires sociales.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’accès au système de santé fait partie pour moi des fonctions régaliennes de l’État. Mais on voit bien comment les choses se passent : d’un côté, le service public doit être assuré et, de l’autre, certains médecins disent : « Nous avons la liberté d’installation. Incitez-nous à aller dans tel territoire, sinon nous ne le ferons pas. »

Madame la ministre, je ne vous prends pas en traître, vous connaissez ma position. Pendant la campagne de François Hollande, le débat a été tranché : on a choisi de continuer l’incitation. Mon ton est grave parce que je crois que des territoires vont encore se désertifier malgré les mesures incitatives.

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Or elles sont payées par nos concitoyens, lesquels assument d’ores et déjà la rémunération de tous les professionnels de santé à travers les cotisations sociales, l’adhésion aux complémentaires, ou encore le reste à charge non remboursé. Ce n’est pas aujourd’hui qu’il faut changer le système, c’est trop tard : la présidentielle aura lieu dans six mois et on verra alors. Mais, de toute façon, l’opinion publique se retournera un jour,…

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…je le dis avec gravité aux médecins qui nous regardent, parce que nos concitoyens financent ce système. Ce jour-là, les gens vous diront : « Vous, les politiques, de droite ou de gauche, donnez-moi accès à un médecin ! » Il ne s’agit pas d’avoir partout un médecin à côté de chez soi mais au moins que la durée du trajet soit raisonnable et que les médecins concernés soient de nouveau obligés de faire des gardes. Je le dis parce que, le lendemain de la discussion de l’amendement de Mme Le Houerou, j’ai reçu de nombreux mails de médecins hospitaliers mais aussi libéraux dans lesquels ils estimaient que j’avais raison. Dans son mail, un médecin d’un tout petit hôpital de proximité m’écrivait : « L’espace d’attente de mon hôpital est devenu une salle d’attente de généraliste parce que la population n’a plus de médecins ! »

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Nous avons donc choisi de continuer l’incitation. Dont acte. Nous ne serons peut-être même plus députés, les uns et les autres, quand le système sera forcé de changer, mais soyez certains que cela arrivera un jour. Et je dirai alors devant ma télé : « Bravo ! Nous aurions dû le faire avant. »

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Je le répète : ce que je dis sur les médecins concerne aussi les autres professionnels de santé. Quand je reçois les différentes corporations, des psychothérapeutes aux ergothérapeutes, soit tous les représentants des autres professions mentionnées dans le code de la santé publique, je constate qu’à force d’aider les médecins – la décision politique en ayant été prise, et je la soutiens puisque c’est ainsi –, on est en train de créer un clivage énorme et de faire monter le mécontentement des autres professionnels de santé, leur activité dépendant en grande partie des prescriptions médicales, ce qui signifie que, mécaniquement, là où disparaîtront les médecins disparaîtront aussi les autres professionnels de santé.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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J’ai reçu de M. Bruno Le Roux et des membres du groupe socialiste, écologiste et républicain une motion de rejet préalable…

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…déposée en application de l’article 91, alinéa 10, du règlement.

La parole est à M. Gérard Sebaoun.

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Il faut de l’abnégation ou de l’inconscience pour défendre cette motion de rejet !

Sourires.

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Monsieur le président, madame la ministre, madame la présidente de la commission des affaires sociales, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, permettez à un orateur quelque peu attaqué par les virus qui traînent en ce moment de répondre aux brillants orateurs qui viennent de s’exprimer.

Sourires.

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Garantir un accès aux soins égal sur l’ensemble du territoire, tel est l’objet de votre proposition de loi, monsieur le rapporteur. Chaque député ici présent et nombre d’autres peuvent en partager l’objectif, mais le chemin que vous empruntez est contre-productif. Le 1° de l’article 1er ne changerait rien à l’article L. 631-1 du code de l’éducation, lequel prend déjà en compte les besoins de la population pour fixer le nombre d’étudiants admis en deuxième année ; quant à l’alinéa suivant, il est satisfait par la rédaction actuelle du 2° du I du même article et, par ailleurs, curieusement placé dans une phrase qui vise l’égalité des chances entre les candidats – et non entre les territoires.

Je n’entrerai pas dans une bataille de chiffres et je ne rappellerai pas l’ensemble des mesures qui ont été prises depuis 2012 pour améliorer la situation. Je me bornerai à commenter les articles de votre proposition de loi.

Je peux partager avec vous et la présidente de la commission le questionnement démocratique de certains de nos concitoyens, qui ont le sentiment de cotiser pour un service essentiel qu’ils peinent à obtenir. D’ailleurs, l’usage médiatique de l’expression « désert médical » ne sert pas leur cause puisqu’il freine encore plus toute volonté d’y poser ses valises, voire d’y faire sa vie, pour un professionnel de santé dont les exigences rejoignent aujourd’hui celles de la population.

Cette réalité touche des territoires ruraux mais aussi des territoires urbains ou périurbains dans lesquels existe une suractivité contrainte de médecins souvent vieillissants ou bien lorsqu’il faut plus de vingt minutes pour se rendre chez son généraliste, ou encore lorsque le territoire est marqué par un vieillissement important de la population. J’y adjoins volontiers une question sensible, celle du délai raisonnable pour obtenir l’accès à un médecin – en dehors de l’urgence, bien sûr.

Je ne sais pas comment répondre à cette question, mais la poser nous oblige à prendre en compte deux exigences : la délégation de tâches, qui devra prospérer, ainsi que le développement de la télémédecine. Votre article 12 est consacré à cette dernière, mais sa rédaction ne change rien à l’affaire : la télémédecine est déjà bien définie à l’article L. 6316-1 du code de la santé publique et les articles réglementaires s’y rapportant existent. L’expérimentation inscrite à l’article 36 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2014 dans neuf régions pilotes a pris, il est vrai, du retard, mais le PLFSS pour 2017 va la prolonger d’un an en simplifiant les procédures, en l’étendant à tout le territoire et en prévoyant son financement. Je connais l’intérêt pour les patients et le retour sur investissement pour la Sécurité sociale du suivi des insuffisants cardiaques – un exemple parmi d’autres. Vous avez donc devant vous un partisan convaincu de la télémédecine bien conduite.

J’en viens à la question de la démographie médicale, question qui oscille toujours entre la critique du manque et la crainte de la pléthore. L’analyse démographique ne saurait être cantonnée à une seule donnée numérique globale, et les chiffres montrent que nous ne sommes pas moins bien pourvus en nombre de médecins, apparemment en tout cas, que nos voisins des pays développés de l’OCDE.

Vous proposez, à l’alinéa 2 de l’article 7 l’institution d’une autorisation administrative délivrée par les agences régionales de santé en vous référant, pour interdire les créations ou transferts de cabinets libéraux, à une densité maximale de médecins pour 100 000 habitants. Si ce seuil est communément utilisé dans les statistiques, il serait ici complètement inopérant, pour ne pas dire baroque. En effet, si l’on vous suivait, il faudrait additionner dans chaque région les spécialistes de médecine générale de premier recours, dont nous avons tant besoin, avec les autres spécialistes médicaux, les médecins du travail par exemple, ou encore les chirurgiens de toutes spécialités. Je ne suis pas sûr que nous améliorerions ainsi la situation de la région Centre et pas davantage celle de l’Île-de-France. L’exemple le plus caricatural serait la ville de Paris : comptant le plus de spécialistes au mètre carré – lesquels exercent très majoritairement en secteur 2 –, elle serait probablement pénalisée par cet article alors qu’elle manque par ailleurs de médecins généralistes et que ce phénomène ne va cesser de s’accroître.

Non, monsieur le rapporteur – et vous le savez parfaitement –, il n’existe pas de jeu de vases communicants entre les zones sur-denses et les zones sous-denses. La contrainte peut même s’avérer très contre-productive en éloignant durablement les jeunes médecins de l’exercice libéral.

Vous voulez infliger la même obligation à d’autres professionnels de santé exerçant en libéral : les chirurgiens-dentistes à l’article 8, les sages-femmes à l’article 9, les infirmiers à l’article 10, les masseurs-kinésithérapeutes à l’article 11 ; autant de professionnels qui n’ont rien demandé et qui s’opposent tous à votre texte – la plupart de leurs représentants me l’ont écrit.

Je veux aborder plus longuement la situation des médecins car elle est toujours mise en avant par nos concitoyens et les médias, à juste titre puisque leur présence détermine très souvent l’implantation d’autres professionnels de santé dans les territoires sous-dotés.

Il n’a échappé cependant à personne que la formation médicale dure entre neuf et onze ans, et que leur activité court sur trente à quarante ans, voire plus. C’est dire si les projections sur le long terme sont difficiles, et si toute décision doit être pesée à l’aune de cette réalité. Aucun modèle ne saurait nous assurer la présence de médecins généralistes ou d’autres spécialités pendant des dizaines d’années, dans tel ou tel territoire, à moins de les y assigner autoritairement.

C’est le sens de votre article 6 qui entend, et je veux le souligner, pour les seuls médecins qui choisiraient l’installation libérale, instaurer dès 2020 l’obligation de s’installer pendant trois ans en zone sous-dense.

Je ne vous opposerai pas, comme je l’ai fait en commission, monsieur le rapporteur, la liberté d’installation,…

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…pilier de la charte de la médecine libérale depuis 1927 – charte qui, à mon avis, mériterait d’être actualisée, mais il appartiendra aux médecins libéraux de le dire. Je pense notamment au paiement à l’acte, qu’il faudra bien équilibrer avec la capitation si l’on veut promouvoir la prévention.

Je crois tout simplement, au vu des réactions unanimes des syndicats de jeunes médecins et d’internes que j’ai interrogés, que cette mesure contraignante risquerait de les détourner définitivement de l’exercice libéral. Par ailleurs, et nous avons eu ces échanges en commission, si les internes, indispensables à la bonne marche de nos hôpitaux, sont en effet rémunérés, rappelons qu’un externe de sixième année, lui aussi fort utile, touche une indemnité mensuelle de 279 euros et 52 euros par garde depuis le 1er septembre 2016. On doit pouvoir trouver mieux comme privilégiés à l’âge de 24 ou 25 ans.

Je crois vraiment qu’à la fin de leur cursus les internes auront rendu à la société l’investissement financier consenti pour leur formation.

À ce propos, monsieur le rapporteur, je vous remercie de m’avoir donné l’occasion de remonter le temps et de relire l’histoire fort instructive de l’internat. Les concours de l’externat et de l’internat des hôpitaux de Paris, nés sous le Consulat, en 1802, ont perduré jusqu’à notre époque, quasiment dans leur forme originelle – et très élitiste –, précisément jusqu’aux événements de 1968, qui ont permis de supprimer l’externat, ce qui était régulièrement demandé depuis le début du XIXe siècle. Si les décrets de 1969 et 1970 ont instauré le statut d’étudiant hospitalier, le mot « externe » est resté dans le langage commun.

L’externat devenait enfin obligatoire et accessible à tous les étudiants pendant leur deuxième cycle, ce qui n’alla pas sans réticences dans les services où le mandarinat était roi et il fallut beaucoup de courage pour faire une place à des étudiants ignorés lorsqu’ils n’étaient pas nommés au concours.

Cette démocratisation de la médecine à partir de 1968 a vu le nombre de nouveaux inscrits en première année du premier cycle des études médicales – la PCEM1 – augmenter jusqu’à 40 000 en 1976-1977, redoublants compris. L’instauration du numerus clausus dès 1971, basé sur les capacités de formation des centres hospitaliers universitaires, et non sur les besoins en médecins, était censée réguler ces flux en fixant le nombre de places disponibles en seconde année d’études médicales et odontologiques. En 1977, ce système sera appliqué à la maïeutique, et en 1980 à la pharmacie. Après avoir pointé à environ 8 000 jusqu’à la fin des années 1970 pour les étudiants médecins, le numerus clausus diminua brutalement pour atteindre son plus bas niveau historique en 1993 – 3 500 –, avant de remonter trop lentement jusqu’à 7 500 en 2012 et 7 633 en 2015. La ministre vient de nous annoncer fort heureusement une hausse de 478 places, qui sont les bienvenues.

On mesure pleinement les conséquences de ce yo-yo sur la situation actuelle. Si la hausse du numerus clausus visait à rééquilibrer la démographie dans la perspective des nombreux départs des médecins issus des promotions des années 1970, ce système a aujourd’hui montré ses limites.

Lorsque l’on se penche sur l’évolution du nombre de médecins généralistes, on constate que, dans les années 1990, le nombre de ceux qui s’installaient en médecine libérale était plutôt constant, oscillant entre 2 100 et 2 600. Ensuite, le numerus clausus aidant, le nombre d’installations a malheureusement décru régulièrement pour stagner aux environs de 1 000 par an entre 2004 et 2006.

Notre système de formation aura mis plus de trente ans à se réformer, à se moderniser, à se démocratiser, en passant par bien des péripéties, telle la création des certificats d’études spéciales dans les années 1970, pour former des spécialistes dans des disciplines carencées à l’époque comme l’ORL, l’ophtalmologie, la radiologie ou la gynéco-obstétrique, bientôt supprimés avec la réforme de 1982 qui instaurait l’internat obligatoire de spécialité.

Cette réforme de 1982, bienvenue, présentait pourtant un défaut originel majeur car l’étudiant qui se destinait à la médecine générale ne passait pas par l’internat, et celui qui échouait aux concours devenait généraliste par défaut. Une fois encore, la médecine générale était laissée pour compte. Cette sélection des généralistes par l’échec était délétère et elle fut analysée quinze ans plus tard dans un rapport des professeurs Jean-François Mattei et Jean-Claude Etienne qui proposèrent enfin l’internat obligatoire pour tous et une épreuve nationale classante à l’issue de laquelle chaque candidat choisirait sa filière de troisième cycle. Cette idée fut mise en oeuvre par le gouvernement Jospin dans la loi de modernisation sociale du 17 janvier 2002.

Pour la première fois, dans l’arrêté du 22 septembre 2004, la médecine générale figurait enfin comme une spécialité au même titre que les autres disciplines.

S’agissant de la médecine générale, le troisième cycle est constitué d’une formation théorique et pratique pendant trois ans : trois semestres en service hospitalier agréé, un semestre en cabinet de médecine générale auprès d’un maître de stage, un semestre libre et un semestre lié au projet professionnel de l’interne. C’est dire, monsieur le rapporteur, que votre article 2 est satisfait par ces dispositions. Reconnaissez d’ailleurs que votre proposition n’aurait pas grand sens pour un apprenti chirurgien en troisième année, qui ne saurait trouver dans une zone sous-dense les stages nécessaires à sa formation.

Concernant l’intérêt de l’exercice en ville organisé sous forme pluriprofessionnelle, nous pouvons nous retrouver. On parle d’un millier de maisons pluridisciplinaires ouvertes fin 2016. C’est une bonne nouvelle.

Une évaluation réalisée par l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé – l’IRDES – entre 2009 et 2014 met en évidence une logique d’implantation majoritaire des maisons de santé dans des espaces à dominante rurale fragiles en termes d’accès à l’offre de soins et dans les espaces à dominante urbaine.

L’Observatoire national de la démographie des professions de santé atteste qu’environ 63 % des primo-inscrits à l’Ordre s’installent dans la région de leur diplôme. C’est, hélas, 40 % dans la région Centre, mais d’autres secteurs connaissent également des carences. J’ai cherché, en m’appuyant sur les chiffres disponibles, l’intérêt de revenir à l’internat régional. Je n’ai pas trouvé de données convaincantes. Les épreuves nationales classantes, malgré certains défauts, ont permis à l’ensemble des étudiants de troisième cycle de mieux visualiser les postes d’internes disponibles. Ils ont augmenté entre 2004 et 2016 de 45 % en médecine générale – 35 % en Île-de-France, et 45 % à Tours.

J’aborderai plus rapidement les articles suivants.

À l’article 4, vous prônez l’abaissement des charges sociales pour les médecins retraités cumulant emploi et retraite dans les zones sous-denses. Au 1er janvier 2016, sur un effectif total de 10 878 médecins en situation de cumul, 62 % ont moins de 70 ans. Plus de huit sur dix sont des hommes et 45 % sont des médecins généralistes. Leur nombre a été multiplié par dix en dix ans et l’augmentation est continue, selon les chiffres de la Caisse autonome de retraite des médecins de France.

Le plafond de revenus maximum est fixé à un montant raisonnable, autour de 50 200 euros, soit 1,3 fois le plafond de la Sécurité sociale. Ils sont 3 281 en Île-de-France et 323 en région Centre, soit plus de 8 % de médecins retraités encore en activité dans ces deux régions.

Je ne vois aucun inconvénient à ce que ces revenus soient soumis à des cotisations sociales.

Quant à l’article 13, il me semble étonnant de vouloir juger de l’impact et de l’efficacité des modifications importantes que vous proposez par un comité ad hoc d’ici à deux ans, alors que le temps long – et même extrêmement long – domine très largement la situation que vous avez soulevée.

Monsieur le rapporteur, vous le savez, nous payons aujourd’hui – et probablement pour encore quelques années – des erreurs dont nous ne sommes pas responsables. Nous partageons le diagnostic, mais pas l’ordonnance que vous réécrivez à l’identique, ou à peu près, depuis cinq ans. Ayons de la constance avant tout nouveau bouleversement. C’est pourquoi, chers collègues, je vous demanderai d’adopter cette motion de rejet préalable.

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Sur le vote de la motion de rejet préalable, je suis saisi par le groupe de l’Union des démocrates et indépendants d’une demande de scrutin public.

Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

La parole est à Mme la ministre.

Debut de section - Permalien
Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé

J’ai écouté attentivement les débats de la discussion générale ainsi que la présentation par M. Sebaoun de la motion de rejet préalable. Bien évidemment, le Gouvernement appelle à voter cette motion. Je ne reprends pas les arguments que j’ai détaillés dans mon intervention liminaire. Je me contentant de deux ou trois observations extrêmement concises.

Tout d’abord, je ne vous laisserai pas dire, monsieur le rapporteur, que la situation est pire en 2016 qu’elle ne l’était en 2012. Nous ne sommes pas au bout du chemin, je l’ai reconnu, des fragilités demeurent, des tensions persistent, ce qui justifie de poursuivre une politique résolue. Mais des situations de pénurie ont pris fin, l’accès aux urgences en moins de trente minutes s’est généralisé – ou en tout cas il est devenu la règle dans la très grande majorité des cas – et si nous devons poursuivre nos efforts, il n’en demeure pas moins que nous avons obtenu des résultats.

Par ailleurs, vous avez prétendu, monsieur le rapporteur, que vous proposiez ce qui a été imposé à d’autres professions de santé. Non ! Ce n’est pas encore le cas pour les infirmières et les dentistes. Quant aux kinésithérapeutes, ils ont souhaité, demandé et conclu des accords pour que des régulations soient introduites, conformément à ce qu’ils estimaient être leur intérêt, pour éviter des concentrations de ces professionnels dans certains territoires. La situation est donc totalement différente. À ma connaissance, les médecins ne demandent pas l’introduction de telles mesures de régulation.

Nous devons poursuivre le travail engagé. Je ne crois pas que vos propositions soient efficaces. J’ai été sensible à l’argumentation de M. Sebaoun, que je remercie pour sa très grande précision, et j’appelle à voter sa motion de procédure.

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C’est nier le Parlement que de lui refuser le droit de traiter des grands sujets de société et de ne pas même lui permettre de débattre d’un problème pour lequel tout le même s’accorde sur le diagnostic.

Je remercie M. Sebaoun dont la contribution prouve sa volonté d’approfondir le sujet. Je l’ai d’ailleurs senti assez frustré de ne pouvoir discuter, article par article, de ma proposition.

Sourires.

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En refusant ainsi de débattre sur le fond, nous allons donner de nous une image détestable.

Par ailleurs, je n’ai jamais dit que ma proposition était à prendre ou à laisser. C’est au contraire le rôle du Parlement que de modifier, amender un texte pour l’améliorer. Malheureusement, nous ne nous offrons même pas cette possibilité. C’est une nouvelle erreur.

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Enfin, vous prétendez en somme, madame la ministre, que « ça va mieux ». Je reconnais que l’on entend beaucoup cette petite phrase ces derniers temps, mais pardonnez-moi de vous détromper. Je vous invite à lire le rapport d’UFC-Que choisir : on y apprend que l’accès aux médecins a diminué de 30 % depuis 2012. Mon département d’Eure-et-Loir ne compte plus que 82 médecins pour 1 000 habitants. La situation s’est-elle donc améliorée ? Pas du tout, elle s’est nettement dégradée.

Vous évoquez l’accès aux urgences mais, que je sache, les urgences relèvent non pas de la médecine libérale, mais de la médecine publique. Or elles sont toujours plus encombrées.

Mais je ne voudrais pas être trop long. Sachez seulement, mes chers collègues, que ce sujet reviendra. Je remercie d’ailleurs Catherine Lemorton de l’avoir dit avec ses mots. Nous sommes tous en situation de responsabilité. Et si jamais une alternance politique se produit l’année prochaine, je vous prédis une chose : il n’y aura pas de mots assez durs, assez forts, pour dénoncer l’impuissance publique face à la désertification médicale.

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Cela étant, le prononcé fait foi et tout ce qui a été dit ce matin sera conservé dans les archives de notre Parlement. Aussi, nous pourrons remettre chacun en face de ses responsabilités.

J’ai voulu, modestement, essayer d’avancer. Je terminerai, madame la ministre, en me référant à l’un de vos propos que je veux bien reprendre à mon compte : moi, j’ai fait confiance à la jeunesse, aux hommes et aux femmes qui veulent embrasser la carrière médicale. Il faut en effet les écouter. Vous le faites, je m’y emploie aussi, tout comme d’autres ici.

Reste cependant une chose : la médecine libérale – nul ne pourra le contester quand neuf médecins sur dix ne s’installent plus en milieu libéral après leur formation – est extrêmement fragilisée dans notre pays. Il faut donc accompagner cette mutation, être attentif aux souhaits des médecins et à leurs évolutions. Il y va, me semble-t-il, de la protection que nous devons à nos concitoyens.

Vraiment, je regrette qu’il faille en arriver à une motion de rejet, car cela signifie que l’on ne veut pas entrer dans le débat, ce qui est la négation même du Parlement.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Nous en venons aux explications de vote sur la motion de rejet préalable.

La parole est à M. Francis Vercamer, pour le groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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La fougue et la passion de notre rapporteur n’ont d’égal que le désastre sanitaire que connaissent nos territoires. Dans les territoires ruraux en effet, les médecins partent en retraite et les déserts médicaux s’accroissent ; dans les quartiers en difficulté, il faut aller aux urgences pour pouvoir se faire soigner ; et ce scandale sanitaire s’amplifie d’année en année.

Bien sûr, on peut fermer les yeux, on peut considérer que ce problème peut être remis à demain. Mais le problème existe depuis tant d’années !

Comme le rapporteur le faisait remarquer, notre société vit dans un paradoxe assez extraordinaire : on ne veut pas prendre de dispositions concernant le prescripteur, mais toutes les professions paramédicales ou pharmaceutiques qui dépendent de ce prescripteur sont soumises à des obligations de s’installer dans les territoires où il n’y a plus de médecins. On les renvoie à des métiers qui disparaissent, on les cantonne dans des territoires où, malheureusement, il n’y a plus de prescripteur pour leur donner l’activité à laquelle elles aspirent.

Pour ma part, madame la ministre, je considère que cette proposition de loi est une avancée. Certes, il n’était pas obligatoire de retenir tous les articles : je peux comprendre que des collègues, au sein du groupe Les Républicain notamment, ne soient pas d’accord avec certaines dispositions. Mais de là à déposer une motion de rejet préalable dont l’adoption ne nous permettrait même pas d’analyser les différents articles ! Je pense en particulier à l’article relatif au développement de la télémédecine, qui représente un progrès pour l’accès aux soins, ou encore aux mesures relatives au cumul emploi-retraite, qui permettraient au moins aux médecins de poursuivre leur activité dans les territoires où il n’y a plus personne pour les remplacer. Il y a là une aberration, et le groupe socialiste en portera la lourde responsabilité lors de la prochaine législature.

Bien entendu, le groupe UDI votera contre cette motion de rejet préalable.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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La parole est à Mme Bernadette Laclais, pour le groupe socialiste, écologiste et républicain.

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Quelques mots à l’appui de la motion de procédure défendue par Gérard Sebaoun. Je ne reviendrai pas sur les raisons invoquées par notre collègue et par d’autres intervenants. Pour ma part, j’ai du mal à entendre dire que le Parlement serait bafoué. Nous avons longuement débattu de toutes ces questions à l’occasion de l’examen de la loi de modernisation de notre système de santé. Celle-ci a fait l’objet de trois lectures dans cette assemblée et d’un grand nombre d’amendements. Ces longs débats étaient légitimes.

Ils étaient aussi, me semble-t-il, respectueux, comme nous sommes capables d’en avoir. Je ne crois pas, monsieur le rapporteur, que l’on soit obligé de s’invectiver ou de se mettre mutuellement en cause. Je suis ici, vous le voyez bien, et je travaille depuis très longtemps, comme vous, sur ces questions dans mon territoire et dans les zones de montagne.

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Je suis toute disposée à vous montrer les expérimentations que nous avons menées.

De plus, nous parlons chaque année, lors de la discussion du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, de la télémédecine, de la question de la retraite des médecins, etc. Nous n’avons pas besoin d’un nouveau véhicule législatif pour tout cela. Et nous n’avons pas non plus besoin, à mon sens, d’un véhicule législatif comportant des mesures coercitives à quelques semaines d’un débat qui s’ouvrira, j’en suis persuadée, sur ces questions et au cours duquel chacun défendra ses points de vue.

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C’est ici que la loi se fait, tout de même ! Et puis vous voudriez tout arrêter pendant un an, sous prétexte qu’il y a des élections ?

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Ce débat doit se tenir avec les acteurs concernés. Il ne peut intervenir au détour d’une proposition de loi qui ne permet pas de le placer au niveau où il doit se tenir.

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Pourquoi donc ? Il est honteux de dire cela !

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Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à suivre la recommandation de Gérard Sebaoun et à adopter la motion de rejet préalable.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.

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La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe Les Républicains.

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Je serai bref, car nous nous rejoignons avec Philippe Vigier sur beaucoup de points dans le domaine de la santé, et il le sait. Cependant, en me citant dans son intervention, il a dit tout et son contraire.

Je veux donc rappeler que la plupart des articles de cette proposition de loi se superposent intégralement à ceux que nous avons défendus en juin dernier dans notre propre proposition de loi, présentée au nom du groupe Les Républicains. Presque tous, à vrai dire : le numerus clausus, l’internat régional, les stages, la télémédecine…

Par contre, l’article 6 et les suivants ne sont pas compatibles, je le dis et je le répète en tant que porte-parole de mon groupe sur ce texte, avec le programme et les propositions du groupe Les Républicains dans sa très grande majorité. Pour notre part, nous sanctuarisons la liberté d’installation pour la médecine libérale, qu’elle soit généraliste ou spécialiste. C’est d’ailleurs la position que je défendrai dans quarante-huit heures, madame la ministre, devant le congrès national de l’ISNI, l’Intersyndicat national des internes, à Poitiers, où l’on m’a demandé de venir. Il y aura donc des débats au sein de ce congrès des étudiants internes.

C’est pour cette seule raison que nous ne pourrons voter le texte proposé par nos amis de l’UDI. J’ai tout particulièrement apprécié la description calme et posée de notre collègue Sebaoun, qui effectuait d’ailleurs les mêmes constats. Étant, je le répète, à 100 % contre cet article 6, nous voterons sa motion de rejet préalable.

Applaudissements sur quelques bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain. – Exclamations sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

Il est procédé au scrutin.

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Voici le résultat du scrutin :

Nombre de votants: 56 Nombre de suffrages exprimés: 56 Majorité absolue: 29 Pour l’adoption: 42 contre: 14 (La motion de rejet préalable est adoptée.)

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L’Assemblée ayant adopté la motion de rejet préalable, la proposition de loi est rejetée. Il n’y aura pas lieu de procéder au vote solennel décidé par la conférence des présidents.

La séance, suspendue à douze heures cinq, est reprise à douze heures dix.

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L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi, adoptée par le Sénat, relative à l’élection des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française et à la modernisation du code général des collectivités territoriales applicable aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics (nos 3905, 4220).

Debut de section - Permalien
Ericka Bareigts, ministre des outre-mer

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, madame la rapporteure, mesdames et messieurs les députés, nous examinons aujourd’hui la proposition de loi relative à l’élection des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française et à la modernisation du code général des collectivités territoriales applicable aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics.

Avant d’évoquer la substance de ce texte, présenté par la sénatrice Lana Tetuanui, dont l’important travail mérite d’être salué, nous voulons souligner le processus de dialogue et d’écoute réciproque qui a permis cette proposition de loi.

Écoute et dialogue entre le Gouvernement et les parlementaires polynésiens d’abord. En effet, vous le savez, ce gouvernement a écouté les parlementaires polynésiens, estimant qu’il était préférable de laisser le temps à la concertation locale d’aboutir. C’est ce que nous avons fait. Voilà un exemple emblématique, je crois, d’une politique publique éclairée.

Écoute et dialogue, ensuite, entre les partenaires polynésiens eux-mêmes. En effet, le Syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française – SPCPF –, qui réunit quarante-six communes sur les quarante-huit que compte le territoire, a mené plusieurs réunions de travail entre mars et septembre 2015. En octobre, le résultat de cette concertation a été présenté au haut-commissaire, au gouvernement de la Polynésie française, aux représentants de l’Assemblée de la Polynésie française et aux parlementaires. Ce processus a abouti aux propositions formulées par la sénatrice Lana Tetuanui.

On le voit, sur la forme, cette proposition de loi est une illustration de la volonté de co-construction et de concertation qui est chère à ce gouvernement. En l’espèce, cette concertation était d’autant plus nécessaire que le texte qui nous est soumis aujourd’hui a trait à la spécificité du territoire polynésien que sont les communes associées.

Sur ce sujet plus que sur tout autre, il nous a paru essentiel de parvenir à une approche commune, partagée et consensuelle. C’est aujourd’hui le cas et nous pouvons en être fiers. Ce travail a d’ailleurs été salué par les sénateurs, qui ont adopté le texte en première lecture.

Venons-en maintenant au fond du texte.

La configuration du territoire polynésien, vous le savez, est unique, comme nous le rappelle constamment Maina Sage. La Polynésie française est située à 18 000 kilomètres de la métropole. Constituée de 118 îles, réparties en cinq archipels, elle couvre une superficie émergée de 3 600 kilomètres carrés, dispersée sur plus de 4 millions de kilomètres carrés, ce qui équivaut à la superficie de l’Europe.

L’organisation de la vie publique et citoyenne y est nécessairement singulière et les règles qui trouvent à s’appliquer dans l’Hexagone doivent souvent être adaptées. C’est l’un des souhaits de ce gouvernement que d’écouter les territoires d’outre-mer et de se conformer aux réalités locales pour parvenir à des dispositifs aussi adéquats que possible.

La Polynésie connaît depuis longtemps une organisation particulière au sein de notre République. Les communes n’ont été créées qu’en 1971 en Polynésie française et, sur les 48 que compte le territoire, 30 sont composées de 98 communes associées.

Ces communes associées correspondent à un lieu géographique, un atoll de l’archipel des Tuamotu par exemple. Elles constituent une section électorale de plein droit. À leur tête, les maires délégués sont apparentés à d’authentiques tavana, c’est-à-dire les maires des communes de droit commun. Ils disposent en pratique d’un véritable magistère et remplissent les fonctions d’officier d’état civil et de police judiciaire.

Les Polynésiens sont très attachés, nous le savons, à ce dispositif qui permet de consolider la démocratie de proximité par-delà les difficultés de communication et de transport liées aux contraintes géographiques et à la configuration particulière du territoire.

Jusqu’au renouvellement général des conseils municipaux de mars 2014, les conseillers municipaux des communes composées de communes associées étaient tous élus au scrutin majoritaire plurinominal. Or, depuis l’entrée en vigueur, en 2013 et 2014, de modifications législatives, un nouveau mode de scrutin a été introduit, non sans donner lieu à des difficultés et à des frustrations, notamment dans les communes associées où le maire délégué n’était pas issu de la liste arrivée en tête dans la section, ce qui constituait en effet un problème pour notre démocratie locale.

Pour pallier ces difficultés, la proposition de loi qui vous est soumise propose de modifier le mode de scrutin dans les communes associées de Polynésie française. Voici, rapidement, les grands traits de cette réforme.

Dans les communes concernées, le nombre de sièges à pourvoir sera réparti, au sein des communes associées, proportionnellement à leur population. Toutes les communes de plus de 1 000 habitants, même celles composées de communes associées comptant moins de 1 000 habitants, seront soumises à un scrutin fondé sur la représentation proportionnelle.

L’élection se déroulera sur le fondement d’une liste unique qui comportera nécessairement un ou des représentants des communes associées afin de favoriser l’appropriation, dans les programmes, des enjeux propres à ces dernières.

Il est en outre prévu d’attribuer une prime majoritaire à la liste arrivée en tête au niveau communal, cette prime étant répartie dans chaque commune associée. Il s’agit de faire en sorte, ce qui est tout à fait légitime, que chaque commune associée dispose d’au moins un élu.

Par ailleurs, la proposition de loi prévoit que la liste ayant gagné dans une commune associée puisse disposer d’au moins un élu.

Ce nouveau régime électoral, qui respecte également la parité, permettra au maire délégué d’être issu de la liste arrivée en tête dans la commune associée, même si cette liste ne l’a pas emporté au niveau communal, ce qui renforcera les majorités au niveau communal tout en permettant l’émergence d’une opposition structurée.

Ce dispositif soutiendra ainsi la démocratie locale, dans le respect des singularités des communes associées de Polynésie française. Nous y sommes favorables.

La seconde partie de cette proposition de loi contient divers ajustements susceptibles de faciliter le fonctionnement des communes de Polynésie française. Les principales avancées envisagées sont les suivantes.

Il est proposé, tout d’abord, de donner la possibilité aux communes de la Polynésie française de créer des sociétés publiques locales afin de faciliter leurs commandes publiques, ce qui n’était pas permis jusqu’à présent. Nous ne voyons aucun obstacle à ce que cette possibilité soit désormais étendue à la Polynésie française.

Est ensuite envisagée la possibilité, pour les conseils municipaux des communes composées de communes associées, de se tenir par téléconférence, et, pour le maire, celle de disposer d’une délégation plus large en matière de marchés publics. Ces simplifications ne rencontrent, bien entendu, aucune opposition de notre part.

Enfin, des avancées en matière de formation des élus ont été adoptées au Sénat grâce à des amendements d’origine parlementaire. Nous ne voyons naturellement aucun obstacle à ce que ces droits soient étendus.

Mesdames et messieurs les députés, la proposition de loi que nous examinons aujourd’hui représente une avancée pour la démocratie locale en Polynésie française, dans le respect des spécificités liées à ce territoire. En outre, elle permet de moderniser le droit des collectivités locales dans un sens tout à fait positif.

Au Sénat, 312 voix se sont exprimées en faveur de ce texte, sur 342 votants. Ce résultat significatif atteste l’important soutien dont bénéficie cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe socialiste, écologiste et républicain.

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La parole est à Mme Maina Sage, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission, mes chers collègues, nous sommes amenés à examiner aujourd’hui une proposition de loi déposée par Mme Lana Tetuanui, sénatrice de la Polynésie française.

Cette proposition de loi arrive à point nommé, et dans un contexte particulier, puisque notre collectivité d’outre-mer entame un virage que l’on peut qualifier d’historique. Elle laisse derrière elle une période pénible de dix années d’instabilité politique. Ces événements ont plongé le pays dans un marasme économique sans précédent, accentué par la crise de 2008. Résultat, la Polynésie française a perdu près de dix points de PIB en dix ans.

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Il est important de le rappeler. Nous revenons de loin.

Une réforme du mode électoral survenue en 2011 a également permis de ramener une certaine stabilité politique en 2013 au niveau de la collectivité territoriale. La Polynésie a ainsi retrouvé des couleurs. Je tiens d’ailleurs à saluer les efforts engagés localement par le gouvernement de la collectivité, qui vont dans le bon sens.

Il est bon de rappeler – j’ai eu l’occasion de détailler la situation en commission – que la Polynésie, qui bénéficie de l’autonomie pour quasiment tous les domaines de compétence, dont l’économie et la fiscalité, a su mettre en oeuvre un vrai plan de redressement et d’assainissement de ses comptes. Nous avons ainsi augmenté, dès notre arrivée en 2013, la pression fiscale de près de dix points. Tout le monde a été mis à contribution pour « sauver » notre collectivité et aujourd’hui nous récoltons les fruits de nos efforts. En trois ans, la commande publique a plus que doublé et nous l’avons réorientée en engageant des investissements dans les secteurs prioritaires que constituent le logement social et le tourisme.

Ces choix de gestion ont permis de regagner la confiance des bailleurs de fonds, des banques et bien entendu de l’État, avec qui le dialogue avait été quasiment rompu. À ce titre, je salue à nouveau le gouvernement actuel, qui a su mettre de côté nos différences politiques pour contribuer à ce rattrapage, au bénéfice de tous les polynésiens, et j’y associe également la majorité au Parlement.

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Les particularités géographiques de la Polynésie font des communes un relais essentiel de cette confiance auprès de nos 270 000 habitants. Comme vient de le rappeler Mme la ministre, la Polynésie française est une collectivité unique dans la République. Unique par sa géographie, car c’est une collectivité dont la superficie maritime a la taille de l’Europe, qui compte 118 îles et un faible bassin de population – moins de 300 000 habitants, répartis dans plus de 70 îles. Au total, ce sont 118 îles que nous devons gérer, avec un coeur hypertrophié – Tahiti et les îles du Vent ainsi que les îles Sous-le-Vent – et 30 % de la population répartis dans des îles très éloignées.

Vous comprenez, avec une telle configuration, combien il est difficile de gérer cette collectivité. Il est donc pour nous tout aussi important de garantir la stabilité politique à l’échelon local. Le défi est de taille puisque cette collectivité comporte 48 communes de plein exercice, dont 30 sont divisées en 98 communes associées. Les cas de figure sont très variés.

On trouve le cas de plusieurs communes situées dans une même île, le cas de communes formées de plusieurs îles, celui de communes composées de communes associées au sein d’un même lagon, plusieurs petites îles étant regroupées autour d’une île principale. Voilà la panoplie des situations que nous connaissons et qui méritent des textes adaptés.

Face à cette particularité géographique, le mode de scrutin introduit par la loi du 17 mai 2013 relative à l’élection des conseillers départementaux, des conseillers municipaux et des conseillers communautaires, et modifiant le calendrier électoral a rencontré des difficultés d’application dans notre territoire. Il a suscité des tensions dans certaines communes lors des dernières élections municipales. Il accordait en effet toute latitude au maire pour choisir le maire délégué de la commune associée, y compris au sein de la minorité politique des conseillers locaux. La légitimité des maires délégués ainsi élus en a été fortement affaiblie et la stabilité politique des conseils municipaux ébranlée.

En juin 2015, l’État a proposé, dans le projet de loi de modernisation du droit des outre-mer, un dispositif revenant sur le mode de scrutin. Toutefois, à la demande des parlementaires, d’abord des sénateurs puis de notre assemblée, ces dispositions ont été supprimées afin de permettre une large consultation des acteurs de terrain et de dégager une solution à même de ramener la stabilité politique au sein des communes concernées, et cela de façon plus consensuelle et apaisée.

Issue de cette consultation approfondie, la proposition de loi déposée au Sénat par Mme Lana Tetuanui est un fondement essentiel de stabilité politique pour les prochaines élections communales en Polynésie française.

Elle reprend notamment les travaux du SPCPF et regroupe des mesures pragmatiques qui prennent en compte les singularités de la Polynésie. Ces mesures reposent, d’une part, sur l’amélioration par les élus polynésiens des conditions de représentation de leurs concitoyens et, d’autre part, sur la modernisation de l’action publique locale.

La proposition de loi a été adoptée par le Sénat le 30 juin dernier. J’en profite pour saluer le travail réalisé par le rapporteur, Mathieu Darnaud. Le texte n’a pas connu de changement majeur, à l’exception de deux ajouts – j’y reviendrai à la fin de mon intervention. Elle a pu être inscrite rapidement à l’ordre du jour de notre assemblée dans le cadre d’une séance réservée au groupe de l’Union des démocrates et indépendants – je remercie mes collègues qui ont soutenu son inscription à l’ordre du jour.

Nous sommes ainsi en mesure d’effectuer cette réforme majeure pour nos collectivités locales et de remplacer, à l’article 1er de la proposition de loi, l’ancien régime électoral par un mode de scrutin plus respectueux des votes exprimés dans les territoires tout en garantissant la possibilité de constituer des majorités stables. Ce dispositif entrera en vigueur dès 2020 pour être applicable aux prochaines élections municipales.

D’autres mesures pragmatiques sont également prévues en ce qui concerne les modalités d’élection des maires délégués et le traitement indemnitaire – à coût constant, je le rappelle.

Par ailleurs, afin de tenir compte de l’éloignement géographique entre certaines communes associées et leur chef-lieu, et des conséquences en termes de coût et de durée des déplacements entre communes, trois mesures spécifiques sont prévues.

D’abord, le recours à la visioconférence pour réunir le conseil municipal est prévu à l’article 4. Il s’agit d’une mesure dite « pilote », qui pourrait être observée de près pour envisager une application plus étendue dans l’Hexagone pour les territoires les plus isolés.

Ensuite, le texte prévoit la possibilité pour les EPCI comportant des communes membres dispersées sur plusieurs îles de fixer leur siège en dehors de leur territoire. Cette mesure a fait l’objet de débats en commission mais, lorsqu’on se projette dans la réalité de nos territoires, on la comprend aisément. Quand on vit en Polynésie, passer d’un lieu à un autre revient parfois à devoir effectuer un Bordeaux-Venise en passant par Oslo. Dans ces conditions, il est plus facile pour deux personnes, l’une venant de Bordeaux, l’autre de Venise, de se retrouver à Oslo. La comparaison permet de comprendre les distances que nous avons à gérer. De manière pragmatique, il est souvent plus facile pour les représentants de ces communes de se retrouver dans le hub de la Polynésie française que représente la capitale, Papeete, située sur l’île de Tahiti.

Telle est l’objet de cette modification. Les petites communes associées ont intérêt à avoir un siège à Papeete, qui offre tout le confort des infrastructures locales. On oublie souvent qu’il existe de grandes disparités, en termes d’équipement, entre les sites isolés.

En troisième lieu, enfin, l’article 10 propose la prise en charge des frais de déplacement de certains élus intercommunaux, mesure qui va dans le sens de ce que j’avais défendu, l’an dernier, lors du débat sur le texte relatif à la formation des élus.

En ce qui concerne l’action publique, deux mesures principales peuvent être rappelées.

Les communes polynésiennes pourront désormais créer des sociétés publiques locales, ou SPL, ce qui n’était pas encore le cas, mais aussi clarifier la passation des marchés publics et l’harmoniser avec le droit local.

L’article 8 comporte, pour sa part, des dispositions relatives aux cimetières et aux opérations funéraires, qui prennent en compte les traditions locales et adaptent l’obligation de disposer de sites cinéraires.

Enfin, deux mesures supplémentaires ont été ajoutées par le sénateur Mathieu Darnaud, aux articles 10 bis et 13. Il s’agit de l’application aux élus communaux polynésiens du dispositif du droit individuel à la formation – ce qui constitue une avancée majeure – et de l’extension à la Polynésie de dispositions relatives au régime indemnitaire des élus de certains syndicats de communes.

Mes chers collègues, voilà un beau travail. Je salue la sénatrice Lana Tetuanui, ainsi que tous ceux qui ont oeuvré à la réussite de la proposition de loi. Je remercie la majorité comme l’opposition de leur écoute et du travail constructif que nous avons réalisé, qui nous permettra, j’en suis sûre, d’adopter le texte dans les mêmes conditions qu’en commission des lois, c’est-à-dire à l’unanimité.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants, du groupe socialiste, écologiste et républicain et du groupe radical, républicain, démocrate et progressiste.

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Dans la discussion générale, la parole est à M. Thierry Mariani.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, la présente proposition portée à notre connaissance, qui émane du Sénat, tend à répondre à un objectif simple : mieux prendre en compte les particularités géographiques et institutionnelles de la Polynésie française, pour renforcer sa gouvernance et faciliter la conduite de la politique locale.

Fruit d’un large consensus, comme l’a rappelé Mme Sage, elle a vocation à répondre aux attentes des élus locaux, qui subissent des contraintes très importantes liées aux caractéristiques même du territoire. S’agissant du fonctionnement des collectivités polynésiennes, l’impact des multiples phénomènes de l’insularité est majeur, et nécessitait donc des mesures correctrices de la part du législateur.

Constituée de 118 îles, d’un espace maritime grand comme l’Europe et de 48 communes, dont 30 constituées de communes associées, la Polynésie française fait face à de nombreux problèmes de gouvernance liés à sa géographie. S’ajoute à cela un très fort éloignement de la métropole et l’éclatement territorial de certaines communes associées, parfois composées de trois atolls ou situées sur des atolls très éloignés.

Madame la rapporteure, croyez bien que, député d’une circonscription gigantesque, qui va de l’Inde à la Nouvelle-Zélande,…

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…je comprends parfaitement les contraintes propres à votre territoire. Je sais ce que c’est de représenter des citoyens disséminés sur une étendue extrêmement vaste, aux confins de notre Hexagone, et s’étendant sur plusieurs fuseaux horaires. Je comprends donc votre problème et ne peux que vous témoigner toute ma solidarité.

Les difficultés dont nous parlons tiennent en premier lieu à des facteurs très concrets, notamment à des impossibilités matérielles pour les maires de se déplacer, donc de répondre aux besoins immédiats de leur population. Par cette proposition de loi, nous avons redonné du poids aux maires dont le rôle, nous le savons tous, est absolument central pour nos compatriotes.

Dans une logique décentralisatrice, nous devons également mettre tout en oeuvre pour favoriser un exercice efficace de la démocratie locale.

À cette fin, le texte vise aussi à corriger le mode de scrutin imposé à ces collectivités en 2014, en marquant l’introduction de la proportionnelle dans les communes dont toutes les communes associées comportaient 1 000 habitants au moins. En effet, le mode de scrutin adopté a pu se révéler inadapté : il a renforcé l’incapacité des élus à fédérer politiquement chacune des sections électorales, et a participé à un affaiblissement significatif de la légitimité politique des maires et des maires délégués.

Vous l’aurez compris, il est urgent d’apporter des réponses concrètes aux problèmes soulevés, et surtout des réponses adaptées à la diversité, à la particularité des territoires visés.

Pour y parvenir, la proposition nous invite à adopter deux volets complémentaires.

Le premier est consacré à la mise en oeuvre d’un nouveau mode de scrutin municipal, dont l’objectif est de réadapter le système de commune avec communes associées pour lui permettre de mieux fonctionner, notamment en donnant aux élus une plus grande légitimité électorale et une assise politique plus large.

Le second volet modifie le code général des collectivités territoriales applicable aux communes polynésiennes et introduit un certain nombre de nouvelles dispositions législatives. Il dote les communes de structures leur permettant de les accompagner dans leurs nouvelles compétences en matière d’urbanisme et d’exploitation des services publics. Il étend les compétences du maire en matière de marchés publics. Enfin, il prévoit de nombreux aménagements pour faciliter la mobilité géographique des élus, en rendant notamment possible les réunions du conseil municipal des communes associées par téléconférence.

Voici donc une proposition de loi solide, efficace et consensuelle, qui comporte, à notre avis, des avancées majeures portées par l’élan et le soutien de l’ensemble des communes concernées. Elle a été approuvée unanimement par les membres du Syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française, rassemblant 46 des 48 communes du territoire polynésien. Elle est le relais de la volonté commune de tous les élus locaux et des cadres communaux, dans l’esprit d’une meilleure gouvernance de leurs circonscriptions, de mieux servir leurs concitoyens. Sa force est d’apporter d’une manière juste et équilibrée des solutions adaptées aux attentes locales, chacune étant précisément ajustée à son objet.

C’est pourquoi nous considérons en l’état qu’elle est un signe positif envoyé à l’exercice de la démocratie à l’échelon local, et témoigne de l’attention et de la solidarité de notre République envers ses territoires ultramarins et ses territoires les plus éloignés. Les députés de mon groupe la voteront conforme.

Vous me permettrez d’associer à mon intervention Daniel Gibbes, qui ne peut être parmi nous, mais qui a travaillé sur ce texte – vous le savez, madame la rapporteure –, et qui le soutient.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, chers collègues, nous sommes réunis pour examiner la proposition de loi, adoptée par le Sénat le 30 juin 2016, relative à l’élection des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française et à la modernisation du code général des collectivités territoriales applicable aux communes de Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics.

Déposé devant le Sénat le 4 mai 2016 par notre collègue Lana Tetuanui, sénatrice UDI-UC de la Polynésie française, après avoir recueilli l’avis positif du gouvernement et du président de la Polynésie française, ce texte est issu de travaux du Syndicat pour la promotion des communes de Polynésie française, qui ont duré près de sept mois.

Comme l’a rappelé notre collègue rapporteure Maina Sage, la Polynésie française est un territoire isolé et éclaté, composé de 118 îles – dont 76 habitées – et réparties sur une surface grande comme l’Europe, bénéficiant de ressources naturelles importantes et d’une activité touristique riche.

À cette discontinuité territoriale s’ajoute une discontinuité administrative car, sur les 48 communes de la Polynésie française, 30 ont des communes associées, et certaines communes sont composées de plusieurs atolls.

Les attentes des électeurs et des élus polynésiens, en termes de stabilité électorale et territoriale, sont donc fortes. Ce texte vise à répondre à leurs préoccupations, d’une part en modifiant le mode de scrutin des conseillers municipaux dans les communes associées de la Polynésie française, d’autre part en modernisant les dispositions du code général des collectivités territoriales applicables aux communes de la Polynésie française, à leurs groupements et à leurs établissements publics.

Ainsi, l’article 1er modifie l’article L. 438 du code électoral en instaurant un nouveau mode de scrutin pour l’élection des conseillers municipaux en Polynésie française. Cette réforme s’inspirant de celle survenue en métropole ne s’appliquerait qu’aux communes dont la population est égale ou supérieure à 1 000 habitants. En revanche, la population de chaque commune associée ne serait plus prise en compte pour déterminer le mode de scrutin applicable.

Le mode de scrutin reposerait sur un scrutin à deux tours. Un second tour serait organisé si aucune liste n’a remporté la majorité absolue des suffrages exprimés dès le premier tour. Comme pour les autres communes d’au moins 1 000 habitants, le panachage serait interdit. La liste arrivée en tête obtiendrait une prime majoritaire représentant la moitié des sièges, l’autre moitié étant répartie à la représentation proportionnelle entre les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés. En cas d’égalité des voix, l’élection serait acquise au bénéfice de l’âge.

Toutefois, des adaptations doivent être faites en raison de l’existence d’un grand nombre de communes associées en Polynésie française. Le texte prévoit donc une répartition des sièges en plusieurs temps, le bulletin de vote comportant les candidats présentés par section électorale. Par ce bulletin, l’électeur voterait en faveur d’une liste afin de lui permettre de remporter la prime majoritaire au niveau communal et des sièges au niveau de la section.

Au préalable, les sièges seraient répartis entre les différentes sections, proportionnellement à la population municipale de chaque commune associée en appliquant la règle de la plus forte moyenne.

Enfin, pour permettre une répartition de tous les territoires, un siège serait garanti à chaque section.

Par ailleurs, l’article 2 insère un article L. 1864-1 dans le code général des collectivités territoriales, afin de permettre aux communes polynésiennes et à leurs groupements de créer des sociétés publiques locales pour l’exercice de certaines de leurs compétences.

En raison de la discontinuité territoriale et des difficultés de liaison entre les différentes îles, l’article 4 tend, quant à lui, à modifier les conditions justifiant, pour le maire d’une commune composée de plusieurs communes associées dispersées sur plusieurs îles, le recours à la téléconférence pour les réunions du conseil municipal.

Afin d’obvier à des circonstances exceptionnelles rendant impossible une réunion du conseil municipal en urgence, le maire pourrait recourir à la téléconférence pour les réunions du conseil municipal, lorsque le déplacement de certains membres du conseil serait rendu matériellement impossible, en raison notamment des systèmes de rotation des bateaux ou des avions, ou qu’il aurait un coût disproportionné pour les finances de la commune, du fait de la location de moyens de locomotion aériens ou maritimes. Il est d’ailleurs prévu de permettre à un maire délégué d’une commune associée ayant une délégation de la part du maire de bénéficier d’une indemnité de fonction plus favorable que celle de maire délégué et celle d’adjoint au maire.

Le texte prévoit également une extension de la délégation du conseil municipal aux maires des communes de la Polynésie française en matière de marchés publics et prévoit une adaptation du code des marchés publics en Polynésie française.

Une faculté est ouverte, pour un établissement public de coopération intercommunale, de fixer son siège en dehors de son périmètre lorsqu’il est constitué de communes elles-mêmes dispersées sur plusieurs îles. Et il est prévu, en raison des distances et des contraintes d’isolement des îles, une prise en charge des frais de déplacement des élus communautaires, qu’ils perçoivent ou non des indemnités de fonction.

De plus, le texte modernise certaines dispositions relatives aux cimetières et aux opérations funéraires, et en abroge d’autres en matière de partage des biens à vocation pastorale ou forestière.

Par ailleurs, le Sénat a introduit un article prévoyant l’application, pour les élus de Polynésie française, des dispositions relatives au droit individuel à la formation et aux conditions d’exercice des mandats des membres des syndicats de communes et des syndicats mixtes.

Enfin, nous ne pouvons que nous satisfaire, madame la rapporteure, que cette réforme soit proposée à euros constants.

Ainsi, et parce qu’il nous paraît important que l’ensemble des dispositions prévues dans ce texte puissent être mises en oeuvre dès le prochain renouvellement général des conseils municipaux, le groupe radical, républicain, démocrate et progressiste votera conforme le texte que nous examinons aujourd’hui.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, chers collègues, les communes constituent un échelon de proximité essentiel pour mener des politiques publiques indispensables aux populations. C’est particulièrement vrai en Polynésie, où la géographie impose que soit maintenue une telle proximité entre élus et citoyens. On constate cependant que les communes polynésiennes sont des collectivités encore trop faibles, pour des raisons historiques, financières, juridiques et matérielles. Cette faiblesse des communes contraste avec les exigences de plus en plus lourdes que notre droit fait peser sur elles. Aussi, le regroupement des moyens et des compétences des communes dans un cadre intercommunal plus accompli constitue-t-il la voie de l’avenir.

Les communes sont des collectivités territoriales récentes en Polynésie française. Elles ont toutes été créées en 1971, à l’exception de Papeete, fondée en 1890, d’Uturoa, fondée en 1945 et de Faa’a et Pirae, créées en 1965. On compte aujourd’hui 48 communes en Polynésie, dont les populations sont très diverses. La commune la plus peuplée est Faa’a, qui abritait très précisément, à la date du dernier recensement, 30 094 habitants ; la moins peuplée est Pukapuka, dans les Tuamotu, qui compte 167 habitants.

À l’exception de Tahiti, les communes polynésiennes connaissent donc des populations peu nombreuses. Hormis le cas particulier de cette dernière, qui est confrontée à des problématiques urbaines ignorées des autres îles, celles-ci doivent faire face à des questions et difficultés communes : isolement géographique, faiblesse de l’activité économique, qui permet difficilement de retenir les plus jeunes, accès à l’éducation et à la formation, accès aux soins, accès à l’eau potable, à l’énergie et à l’assainissement, faiblesse des moyens financiers et dépendance vis-à-vis de l’État et du Pays, enfin, manque de personnels qualifiés pour mener des projets structurants.

Le fait communal présente en Polynésie une spécificité qui est constituée par les communes associées. On y compte, vous l’avez dit, madame la rapporteure, 98 communes associées, avec des cas de figure très variés : dans certains cas, on trouve plusieurs communes dans une seule île – par exemple à Tahiti ou à Raiatea – ; dans d’autres cas, une commune est formée de plusieurs îles, comme Gambier ; dans d’autre cas enfin, plusieurs îles constituent une seule commune, mais avec des communes associées, comme Rangiroa avec Makatea, Mataiva et Tikehau. La présence d’un si grand nombre de communes associées s’explique naturellement par le caractère insulaire du territoire et par la grande dispersion des îles, sur une superficie, tout le monde l’a rappelé, équivalente à celle de l’Europe. L’association permet de fédérer les îles entre elles, tout en conservant une forme d’autonomie et une identité pour certaines parties de la commune principale très éloignée de l’île-centre.

Cette forme d’association a conduit à des tensions lors des dernières élections municipales en raison du mode de scrutin applicable en la matière. De fait, après les élections municipales de 2014, on s’est aperçu que certains maires délégués de communes associées n’étaient pas choisis au sein de la liste pourtant arrivée en tête dans la section électorale correspondant à la commune associée. Ce cas de figure a donc créé des tensions lorsque l’orientation politique des majorités qui se sont exprimées au sein de la commune principale et de la commune associée a divergé. La présente proposition de loi résout cette question en réformant, pour les élections municipales futures, le mode de scrutin applicable dans les communes de plus de 1 000 habitants. Il s’agira d’un scrutin de liste à deux tours, si nécessaire, qui permet de maintenir la parité hommes-femmes, ce qui est important, et de dégager une majorité, tout en préservant – un peu trop faiblement, d’ailleurs, à mon sens – la présence d’une opposition.

Désormais, la circonscription électorale sera la commune dans son ensemble et les sièges seront répartis entre les communes associées selon un processus exposé avec beaucoup de détails dans le rapport de notre excellente collègue Maina Sage. Il en résulte que le maire délégué de la commune associée sera désormais choisi au sein de la liste majoritaire. En outre, la proposition de loi introduit de nouvelles dispositions, au demeurant facultatives, permettant d’améliorer l’indemnité des maires délégués, sans modifier l’enveloppe globale, ce qui impliquera une diminution des autres indemnités. Ce texte n’a donc aucun impact financier supplémentaire, et je salue la sagesse et responsabilité dont ont fait preuve les auteurs de cette proposition de loi. Sous le règne de Gaston Flosse, la modération financière n’était pas de mise, et ce changement d’attitude mérite d’être souligné.

Sourires.

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Enfin, la présente proposition de loi adapte le droit des collectivités à la géographie polynésienne, en prévoyant l’organisation de visioconférences pour les réunions du conseil municipal, lorsque les communes associées sont dispersées sur plusieurs îles. Aujourd’hui, les liaisons maritimes et aériennes rendent difficiles et coûteuses de telles réunions. Mais la téléconférence dépend elle-même d’un réseau internet à haut débit qui n’existe pas partout, et qu’il conviendra de développer en réunissant les moyens financiers de l’État et de la Polynésie.

Tels sont les aspects essentiels de cette proposition de loi, qui a été élaborée par les deux sénateurs polynésiens, avec l’appui très marqué de notre collègue Maina Sage, et en concertation avec le Syndicat pour la promotion des communes de la Polynésie, que nous avons eu l’occasion de rencontrer, monsieur le président de la commission des lois, lors du séjour de ses représentants en métropole. Ce processus d’élaboration explique que cette proposition de loi ait été adoptée à l’unanimité au Sénat, et qu’elle recueille d’ailleurs l’accord du groupe socialiste, écologiste et républicain, qui la votera conforme.

Ce texte est également l’occasion de souligner les efforts conjugués des gouvernements français et polynésien pour permettre aux communes de jouer pleinement leur rôle dans le développement économique de la Polynésie. En premier lieu, le contrat de projets 2015-2020 entre la Polynésie et l’État comporte désormais une convention particulière, qui associe les communes pour un montant total d’investissement de 100 millions d’euros, l’État et le Pays assurant 90 % du financement, et la part communale étant comprise entre 5 % et 15 % du montant des opérations.

En second lieu, il convient de relever que, conformément à l’engagement pris à Papeete par le Président de la République, lors de son déplacement en février dernier, auquel il avait bien voulu m’associer, la dotation globale d’autonomie est revenue à son montant initial de 90,6 millions, en augmentation de 12,5 % par rapport à 2016. Cette dotation étant libre d’emploi, elle permettra à la Polynésie de soutenir l’investissement public. En outre, la dotation territoriale pour l’investissement des communes atteindra, elle, 9,1 millions en 2017, ce qui permettra d’augmenter les ressources du Fonds intercommunal de péréquation.

Fortes de ces ressources supplémentaires, les communes de Polynésie, en particulier les plus importantes, pourront intensifier leurs dépenses d’investissement, encore trop modestes. Je n’ignore pas qu’elles disposent de ressources financières faibles mais, comme le rappelle régulièrement la Cour des comptes, leur capacité d’investissement est handicapée par l’importance des dépenses de personnel, qui est elle-même liée, d’ailleurs, à la surrémunération des fonctionnaires locaux.

Je rappelle que cette surrémunération résulte d’une décision autonome de la seule Polynésie. Elle ne se justifie pas, comme pour les fonctionnaires d’État par le dépaysement, les inconvénients liés au changement de résidence. On ne manquera pas, naturellement, de m’opposer – puisque je parle des fonctionnaires locaux – le coût élevé de la vie, mais on s’aperçoit que la majoration des traitements est trois fois supérieure à la majoration du coût de la vie. Il serait peut-être souhaitable de ramener le niveau de la surrémunération, à tout le moins, à celui de la majoration du coût de la vie, ce qui permettrait aux communes de disposer de ressources supplémentaires pour investir.

J’ajoute que, grâce à l’action très efficace de l’Autorité de la concurrence, dont la Polynésie est fort heureusement dotée – quand cette Autorité tarde à se mettre en place en Nouvelle-Calédonie –, le coût de la vie ne manque pas de diminuer, comme on l’a déjà constaté s’agissant du prix du riz. Il était nécessaire de s’attaquer enfin à cette absence de concurrence, qui caractérisait l’économie polynésienne et bloquait son développement. Tel n’est plus le cas, et il faut s’en féliciter. Dans ces conditions, le groupe socialiste, écologiste et républicain votera ce texte.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure – chère Maina –, mes chers collègues, cette proposition de loi, au même titre que celle présentée par Philippe Folliot concernant l’île de Clipperton, qui sera examinée tout à l’heure, constitue une occasion d’évoquer la situation des outre-mer – de telles occasions sont trop rares dans cet hémicycle –, et de la Polynésie en particulier, avec ses réalités, ses singularités, ses atouts autant que ses handicaps.

Le groupe UDI ne peut que se réjouir de ce type d’initiative. Nous nous félicitons de l’accueil consensuel qui a été réservé à ce texte, tant au Sénat qu’au sein de notre commission des lois. Il nous appartenait d’inscrire cette proposition de loi à l’ordre du jour afin de mener la navette parlementaire à son terme, grâce au travail de nos collègues parlementaires Lana Tetuanui et Maina Sage.

Tout d’abord, on ne saurait aborder l’examen de cette proposition de loi sans avoir à l’esprit les réalités géographiques et institutionnelles, si particulières mais encore méconnues, de ce territoire situé à plus de 15 000 kilomètres d’ici. Notre collègue et rapporteure Maina Sage l’a rappelé, la Polynésie française est une terre isolée dont les archipels couvrent une superficie émergée de 3 600 kilomètres carrés, soit la moitié de la superficie de la Corse. Ces archipels s’étendent sur une surface équivalente à l’Europe : 118 îles disséminées sur une surface de plus de 4 millions de kilomètres carrés. Cela a indéniablement des conséquences sur la conduite des politiques locales.

Cette spécificité est aussi institutionnelle. La collectivité polynésienne est administrée par une assemblée, élue au suffrage universel direct, et ne compte qu’une seule catégorie de collectivités territoriales : les communes. Parmi les 48 communes existantes, une trentaine est constituée de communes associées. Les communes constituent l’échelon le plus proche des populations. C’est particulièrement vrai en Polynésie française, où la géographie impose que soit maintenue une telle proximité entre élus et citoyens.

Néanmoins, leurs caractéristiques géographiques et institutionnelles peuvent entraver le bon exercice des politiques locales, peuvent rendre plus complexe l’organisation des conseils municipaux et le fonctionnement de certains services publics locaux.

Un tel contexte justifie donc la nécessité d’adapter en Polynésie française le droit applicable aux communes.

En premier lieu, ce texte prévoit de réformer l’élection des conseillers municipaux et des maires dans les communes comptant des communes associées. Le mode de scrutin en Polynésie française est insatisfaisant pour la gestion municipale : il ne permet pas de dégager de majorité stable. Il a même pu favoriser des unions de circonstances aboutissant à l’élection de maires délégués qui représentent la majorité municipale tout en étant minoritaires au niveau de la commune associée.

La modification du mode électoral garantira ainsi la légitimité du nouveau maire. Ce dernier doit pouvoir s’appuyer sur une majorité, tout au long de sa mandature, et ce, dans l’esprit d’une bonne gouvernance et d’une meilleure gestion des politiques de développement à l’échelon communal.

Cette réforme permettra également d’asseoir la légitimité des maires délégués issus du résultat des urnes, en particulier celle des membres de la liste ayant gagné l’élection dans chaque commune associée ; elle permettra donc, en d’autres termes, de respecter la volonté de la population locale. Elle donnera ainsi aux maires délégués plus de compétences dans l’exercice de leur mandat sur leur propre territoire, avec une délégation de pouvoir que le maire pourra leur octroyer le cas échéant.

De surcroît, ces élus seront rétribués comme il se doit. Aujourd’hui, le barème de l’indemnité étant corrélé à la population de la commune associée, le maire délégué peut percevoir une indemnité inférieure à celle qui est versée aux adjoints. L’article 6 propose donc de remédier à cette anomalie en instaurant un nouveau régime d’indemnisation du maire délégué. Le conseil municipal pourra en outre fixer, pour le maire délégué qui en fait la demande, une indemnité de fonction inférieure à celle qui résulterait de l’application du barème.

En second lieu, cette proposition de loi prévoit des adaptations aux règles d’organisation et de fonctionnement des communes. Les distances entre les différentes communes représentent pour les élus des difficultés importantes dans la gestion quotidienne de leur territoire. Certaines de ces communes associées peuvent être éloignées de 110 à 430 kilomètres de leur chef-lieu communal. Cette proposition de loi propose donc de prendre en compte la géographie particulière de ces territoires, notamment au travers des conditions de recours à la téléconférence pour les réunions des communes associées.

En effet, grâce à l’article 4, les conditions permettant au maire d’une commune composée de plusieurs communes associées dispersées sur plusieurs îles de recourir à la téléconférence pour réunir le conseil municipal seraient modifiées. Déjà prévu par le code général des collectivités territoriales, l’usage de la téléconférence est exclu pour les délibérations les plus importantes, comme l’élection du maire ou l’adoption du budget primitif. La proposition de loi permet donc de supprimer la condition de l’urgence et d’élargir l’impossibilité de déplacement d’une partie des membres du conseil municipal à la difficulté matérielle de les réunir en un même lieu.

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Selon cette même logique, la disposition que prévoit l’article 9 est de bon sens. Réunir l’organe délibérant d’un EPCI dans un centre urbain bien desservi, comme Papeete, plutôt que dans le périmètre de l’établissement lui-même, épargnera bien des kilomètres aux élus communautaires. Seront en outre améliorées les conditions de prise en charge des frais de déplacement de ces mêmes élus. Il suffit d’écouter les témoignages de maires pour comprendre l’utilité de tels dispositifs. Les dessertes aériennes peuvent rendre plus aisé un déplacement vers un point extérieur du territoire communal ou intercommunal que les déplacements à l’intérieur de ces périmètres. Certains maires se voient ainsi contraints de passer par Tahiti pour rejoindre un atoll au sein de leur commune, ce qui allonge considérablement leur parcours. Plusieurs communes associées ne sont reliées que par des liaisons maritimes, ce qui peut parfois rendre les trajets considérablement longs.

Une autre avancée apportée par ce texte est la faculté pour les communes polynésiennes et leurs groupements de créer des sociétés publiques locales. Alors que les autres catégories d’entreprises publiques locales ont été progressivement rendues applicables en Polynésie française, ce dernier outil doit y être étendu en raison de ses avantages.

Nous saluons également les mesures qui répondent aux demandes des élus locaux de Polynésie française : l’harmonisation des règles de délégation au maire des décisions en matière de marchés publics ou encore l’extension pour ces élus du droit individuel à la formation.

Mes chers collègues, toutes ces dispositions on ne peut plus consensuelles représentent des avancées importantes non seulement pour les élus de Polynésie, mais aussi pour le fonctionnement de nos communes et de nos institutions. Nous avons bien conscience qu’il reste encore beaucoup à faire pour assurer une meilleure adaptation du droit aux spécificités de ce territoire.

Ainsi que notre collègue et excellente rapporteure Maina Sage l’a indiqué,…

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…des dispositions devront être mises en oeuvre en matière de dématérialisation de la transmission des listes électorales. L’actualisation du code des marchés publics devra être achevée. Des réflexions devront également être menées en ce qui concerne l’application aux communes polynésiennes du code général des collectivités territoriales, qui demeure une source de difficultés permanentes pour les élus concernés.

Mes chers collègues, vous l’aurez compris, le groupe de l’Union des démocrates et indépendants votera avec enthousiasme et conviction en faveur de cette proposition de loi.

Applaudissements sur les bancs du groupe de l’Union des démocrates et indépendants.

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Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le président de la commission des lois, madame la rapporteure, mes chers collègues, la loi devrait avoir un principe fondamental : l’intelligibilité. En France, en effet, nul n’est censé ignorer la loi. Toutefois, les spécialistes eux-mêmes ne la connaissent pas.

À cet égard, le code général des collectivités territoriales demeure un continent étrange, inaccessible aux profanes, incompréhensible pour de nombreux élus, chronophage pour les services et franchement lassant pour ceux qui voudraient que nous passions du jacobinisme et du centralisme à un régime de libertés locales et territoriales.

Personne ne doute un instant, tous les orateurs précédents l’ont souligné, que les habitants et les élus de Polynésie partagent cette volonté. D’abord, la belle authenticité de leur culture mérite en effet mieux que les diktats d’une énarchie si éloignée de la réalité des îliens. Ensuite, le législateur est confronté à une réalité qui lui est insupportable : la nature. Et la nature a ceci de particulier qu’elle se moque absolument des textes de loi et des idéologies. Autant dire qu’elle n’a que peu d’intérêt à s’adapter aux contingences des EPCI. Est-il vraiment nécessaire d’en passer par votre article 10, qui prête à sourire, pour forcer la mise en oeuvre par un haut-commissaire d’intercommunalités qui soit seraient représentées par des habitants de grandes villes, soit couvriraient l’ensemble d’un archipel ? N’est-il pas frappant que les singularités insulaires varient ; en coutumes, en problématiques, en familles, en aspirations ? Pourquoi en venir à financer des trajets dispendieux au motif qu’il faudrait absolument que le modèle de gestion des collectivités métropolitaines s’appliquât par-delà les océans ?

Chers collègues, la plus grande France, c’est la nation. Et la nation est une famille de familles, renforcée, générée par les corps sociaux exerçant leurs libertés. Elle n’est certainement pas une construction administrative semblable à celles qui provoquent les sueurs d’un étudiant passant ses concours de droit public.

Je suis premier vice-président de la CCPRO, la Communauté de communes des pays de Rhône et Ouvèze, une intercommunalité qui a longtemps dû se battre contre les carnivores partisans et les lenteurs étatiques. À force de batailles légales, elle est parvenue à se concentrer sur son bassin de vie légitime au lieu de servir les querelles internes des partis mastodontes. Entre nos villes, les déplacements, les organisations, la gestion des agendas et la volonté de se rapprocher réellement des populations président déjà à quelques complexités d’agenda et de localisation des services.

Vous tentez de gommer ces complexités sur votre territoire au moyen des dispositions portant sur les communes associées : « le maire peut décider que la réunion du conseil municipal se tienne par téléconférence, dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État. Le quorum est alors apprécié en fonction de la présence des conseillers municipaux dans les différents lieux de réunion. Les votes ne peuvent avoir lieu qu’au scrutin public. » Je pense que c’est une bonne décision, qui permet de faire avancer les choses. Je dois néanmoins vous confier, chers collègues, que le scrutin secret par téléconférence m’a paru pour le moins baroque.

En somme, que dévoile ce texte ? Que nous sommes tous prisonniers d’une conception très intrusive de l’État dans les réalités locales, une conception oublieuse du fait que l’homme n’est maître et possesseur de la nature que pour organiser l’harmonie sociale, et certainement pas pour fabriquer des sociétés, des institutions, des communes associées, lesquelles, bien que nous ayons naturellement tendance à les créer, ne conviennent visiblement en rien aux réalités locales.

Nonobstant ces quelques remarques – il fallait bien que quelqu’un vous en fît –, je voterai très volontiers cette proposition de loi, comme je l’ai fait en commission, avec le même enthousiasme.

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J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

Les articles 1er, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9, 10, 10 bis, 11, 12 et 13 sont successivement adoptés.

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Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

La proposition de loi est adoptée.

Applaudissements sur tous les bancs.

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Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :

Discussion de la proposition de loi visant à assurer le respect du principe de liberté du commerce et de l’industrie dans les contrats des groupements d’intérêt économique ;

Discussion de la proposition de loi visant à donner un statut à l’île de Clipperton.

La séance est levée.

La séance est levée à treize heures dix.

La Directrice du service du compte rendu de la séance

de l’Assemblée nationale

Catherine Joly