Amendement N° CL174 (Adopté)

Représentation des français établis hors de france

Déposé le 10 juin 2013 par : Mme Schmid, M. Marsaud, M. Mariani, M. Quentin, M. Darmanin, M. Douillet.

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Substituer aux mots :

«  le Haut Conseil »

les mots :

«  l'Assemblée ».

Exposé sommaire :

Cet amendement vise à démontrer l'inconstitutionnalité de la transformation de l'Assemblée des Français de l'étranger (AFE) en Haut Conseil des Français de l'étranger.

Le texte adopté par la Commission des Lois de l'Assemblée nationale propose de substituer à la dénomination de l'Assemblée des Français de l'étranger celle de Haut-Conseil des Français de l'étranger. Il propose également de supprimer la distinction des séries A et B pour l'élection de cette assemblée.

Ce changement n'est pas une simple substitution technique. Il porte atteinte à plusieurs dispositions de lois organiques qui, non seulement mentionnent expressément l'Assemblée des Français de l'étranger mais encore lui confèrent des attributions précises relevant de la loi organique. Le changement opéré par la commission des Lois de l'Assemblée nationale empiète donc sur les dispositions de deux lois organiques. Il est ainsi contraire à la Constitution.

Deux lois organiques font référence à l'Assemblée des Français de l'étranger, comportant pas moins de cinq références à cette assemblée. Il s'agit :

1°) de l'art. 3, § I de la loi n° 62‑1292 du 6 novembre 1962 relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel comporte deux références à l'Assemblée des Français de l'étranger :

2°) de l'art. 6 (3ème alinéa, 2°) de la loi organique n° 76‑97 du 31 janvier 1976 relative aux listes électorales consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du Président de la république. Cet article comporte pas moins de trois références à l'AFE :

Or, le projet de loi ordinaire relatif à la représentation des Français de l'étranger, en remplaçant l'Assemblée des Français de l'étranger mentionnée cinq fois par ces lois organiques, est contraire à la Constitution. En effet, il est de jurisprudence constante que le législateur ordinaire ne peut empiéter sur les compétences du législateur organique (Conseil constitutionnel, Décision n° 84‑177 DC du 30 août 1984, (Journal officiel du 4 septembre 1984, p. 2803 - Recueil, p. 66). Le Conseil constitutionnel a jugé qu'une disposition qui revêt un caractère organique adoptée sous forme et selon la procédure prévue pour les lois ordinaires l'a été selon une procédure non conforme à la Constitution. Elle est déclarée contraire à la Constitution (99‑409 DC, 15 mars 1999, Journal officiel du 21 mars 1999, p. 4238, cons. 2, Rec. p. 63). Tel est le cas en l'espèce puisque le projet de loi ordinaire a pour effet de remplacer par une loi ordinaire une instance prévue cinq fois par des lois organiques.

L'inconstitutionnalité est d'autant plus flagrante que la transformation de l'AFE en Haut-conseil, transformation radicale puisqu'il serait élu au suffrage indirect, pourrait avoir pour effet direct de supprimer la possibilité pour les élus des Français de l'étranger autres que les parlementaires de présenter les candidats à la présidence de la Républiqque. Or, l'article 3, I, de la loi du 6 novembre 1962 ne permet, en effet, en principe, qu'à des élus au suffrage universel direct, de présenter des candidatures à la présidence de la République[1]. La qualité d'élus du suffrage universel direct des membres de l'AFE a, en effet, été spécifiquement prise en compte, par le législateur organique pour leur permettre d'être présentateurs. Cette considération de l'élection des membres du Conseil supérieur des Français de l'étranger (devenu l'Assemblée de ces Français) au suffrage universel direct, a été essentielle dans leur admission comme présentateurs aux élections à la Présidence de la République. Tant le rapporteur de la commission des Lois du Sénat[2] que le Gouvernement[3] se sont exprimés en ce sens, précisant ainsi l'intention du législateur organique. La transformation de l'AFE en haut-conseil, élu de surcroît au suffrage indirect, serait donc gravement contraire aux dispositions organiques qui régissent cette matière.

On pourrait alléguer qu'un projet de loi organique tendant à procéder au remplacement des références à l'Assemblée des Français de l'étranger sera déposé ultérieurement et qu'il ne s'agit que d'une question technique qui sera réglée ultérieurement. Là encore, cet argument est irrecevable parce que contraire à la jurisprudence constitutionnelle. Le Conseil constitutionnel a, en effet, jugé que des dispositions de loi ordinaire qui ont pour objet de faire une application anticipée de règles organiques, ayant pour effet de modifier une loi organique, ne peuvent trouver place dans une loi ordinaire. Elles sont déclarées contraires à la Constitution (2002‑460 DC, 22 août 2002, Journal officiel du 30 août 2002, p. 14411, cons. 22 à 24, Rec. p. 198).

[1] Les présidents des organes délibérants des communautés urbaines, des communautés d'agglomération et les présidents des communautés de communes n'ont, en effet, ces qualités que parce qu'ils sont préalablement élus du suffrage universel direct.

[2] M. Charles de Cuttoli, rapporteur de la Commission des Lois du Sénat a, en effet, déclaré : « Le Conseil supérieur des Français de l'étranger est, depuis, les lois du 7 juin 1982 et du 18 mai 1983, élu au suffrage universel direct dans des centres de vote à l'étranger établis dans les ambassades et dans les consulats, et les électeurs sont tous les Français, sans exception, résidant dans le ressort de ceux-ci. A l'instar des parrains potentiels des candidats à la présidence de la République, les membres élus du conseil supérieur des Français de l'étranger bénéficient donc de la légitimité du suffrage universel : par là même disparaît l'obstacle fondamental à leur assimilation aux autres titulaires du droit de présentation ». (Sénat, séance du 19 mai 1987, p. 1054).

[3] M. Charles Pasqua, ministre de l'intérieur, s'est exprimé dans le même sens, comparant, du point de vue de l'élection, les membres du CSFE aux élus régionaux : « Le fait que, d'une part, les conseils régionaux soient désormais devenus des collectivités territoriales et que leurs membres soient élus au suffrage universel et que, d'autre part, les représentants des Français établis hors de France au conseil supérieur des Français de l'étranger soient également élus au suffrage universel rend tout à fait logique que ces élus puissent, désormais, être appelés à leur tour à parrainer les candidatures à la présidence de la République ». (Sénat, séance du 19 mai 1987, p. 1055).

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