Déposé le 18 novembre 2013 par : Mme Guilbert, M. Capet, M. Frédéric Barbier, Mme Massat, M. Destans, M. Gille, M. Fekl, M. Potier, Mme Got, les membres du groupe socialiste républicain citoyen.
I- Supprimer les alinéas 1 à 9.
II- En conséquence, substituer à l'alinéa 78 les neuf alinéas suivants :
« Art. L. 121‑20‑1. – Le consommateur qui ne souhaite pas faire l'objet de prospection commerciale par voie téléphonique peut gratuitement s'inscrire sur une liste d'opposition au démarchage téléphonique.
« Il est interdit à un professionnel, directement ou par l'intermédiaire d'un tiers agissant pour son compte, de démarcher téléphoniquement un consommateur inscrit sur cette liste, sauf en cas de relations contractuelles préexistantes.
« Lorsqu'un professionnel est amené à recueillir auprès d'un consommateur des données téléphoniques, il l'informe de son droit à s'inscrire sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique. Lorsque ce recueil d'information se fait à l'occasion de la conclusion d'un contrat, le contrat mentionne de manière claire et compréhensible l'existence de ce droit pour le consommateur.
« Est interdite la location ou la vente de fichiers contenant des données téléphoniques et comportant les coordonnées d'un ou plusieurs consommateurs inscrits sur la liste d'opposition au démarchage téléphonique.
« Le ministre chargé de l'économie désigne, par arrêté, l'organisme chargé de la gestion de la liste d'opposition au démarchage téléphonique, après mise en concurrence, pour une durée fixée par voie réglementaire.
« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, détermine les modalités de fonctionnement du mécanisme d'opposition au démarchage téléphonique, les conditions dans lesquelles les entreprises ont accès à une version actualisée de la liste et les modalités du contrôle de l'État sur l'organisme gestionnaire.
« Les interdictions prévues aux deuxième et quatrième alinéas ne s'appliquent pas à la prospection en vue de la fourniture de journaux, de périodiques ou de magazines.
« Le présent article s'applique sans préjudice des articles 38 à 40 de la loi n° 78‑17 du 6 janvier 1978 relative à l'informatique, aux fichiers et aux libertés.
« Art. L. 121‑20‑2. – Les conditions de la prospection directe au moyen d'un automate d'appel, d'un télécopieur ou d'un courrier électronique sont prévues à l'article L. 34‑5 du code des postes et des communications électroniques. »
Lors de l'examen du projet de loi en première lecture, le Sénat a souhaité introduire à l'article 5 du texte, en lieu et place de la mesure qui proposait de créer une liste d'opposition au démarchage téléphonique, une disposition obligeant les opérateurs de télécommunications à recueillir le consentement préalable de chacun de leurs abonnés pour que leurs données personnelles puissent être transmises à des professionnels à des fins de prospection commerciale. Ce dispositif dit d'opt-in me semble inapproprié pour trois raisons.
Tout d'abord, sa mise en œuvre aurait nécessairement des répercussions lourdes sur l'emploi. La filière de la relation-client représente en effet aujourd'hui près de 273 000 emplois en France et aurait généré plus de 20 000 créations d'emplois depuis 2009. Appliquer en matière de démarchage téléphonique un système d'opt-in pourrait durement pénaliser ce secteur économique créateur d'emplois, ce qui serait particulièrement dommageable dans le contexte économique actuel. Certaines projections avancent que la mise en œuvre d'une mesure de ce type mettrait en danger 54 000 TPE/PME et ferait même courir un risque de faillite à 19 000 d'entre elles. Il faut bien avoir conscience qu'un tel dispositif toucherait d'abord les centres d'appels, mais pas seulement. Beaucoup d'entreprises, surtout des TPE/PME, n'externalisent pas leurs opérations de prospection commerciale, elles les réalisent eux-mêmes, étant précisé que cette recherche de nouveaux clients est essentielle au maintien de leur activité.
De plus, est actuellement en négociation à Bruxelles une proposition de règlement sur la protection des données personnelles, qui retient la solution d'unopt-out pour lutter contre le démarchage téléphonique abusif (en reconnaissant au particulier un droit de s'opposer, à tout moment, à l'utilisation, à des fins de prospection commerciale, de ces données personnelles). En fait, ce texte retient une solution similaire au renforcement de la liste PACITEL que proposait la version du projet de loi « consommation » adoptée en première lecture par l'Assemblée nationale. A l'inverse, l'opt-ininscrit désormais dans le projet de loi n'est pas en phase avec cette proposition de texte communautaire et, maintenu en l'état, ferait courir à la France le risque d'un contentieux communautaire.
Enfin et surtout, il n'est pas sûr que ce dispositif de « liste positive » soit efficient pour mieux protéger les consommateurs contre le démarchage téléphonique abusif. En effet, sa mise en œuvre repose exclusivement sur les opérateurs de télécommunications, qui auraient la charge de recueillir le consentement préalable de leurs abonnés à être démarchés par téléphone. Mais aujourd'hui, le marché de la prospection commerciale par téléphone ne dépend plus exclusivement des opérateurs de télécommunications : une bonne partie de ce marché échappe à leur contrôle, car beaucoup d'entreprises s'échangent directement leurs fichiers de prospection entre elles. Le fait pour un consommateur de refuser, auprès de son fournisseur de services téléphoniques, son consentement à être démarché, n'empêchera pas certaines entreprises de s'échanger directement les coordonnées dudit consommateur, sans passer par un quelconque opérateur de télécommunications. Et ces mêmes entreprises pourront continuer à démarcher le consommateur en toute impunité, puisque la mesure inscrite au projet de loi fait peser une obligation, assortie d'une sanction, sur les seuls opérateurs de télécommunications.
La « liste positive » insérée dans le projet de loi à l'issue de la première lecture est donc en décalage avec la réalité actuelle du marché de la prospection commerciale par téléphone, ce qui n'est pas le cas de la liste que le Gouvernement proposait dans la version initiale du texte, opposable à l'ensemble des entreprises se livrant à du démarchage par téléphone. C'est pourquoi le présent amendement propose de supprimer la disposition introduite dans le texte par le Sénat et de rétablir la mesure qui proposait de créer une liste d'opposition au démarchage téléphonique, sur le modèle de la liste PACITEL existante.
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