Déposé le 23 mai 2014 par : M. Pancher, M. Demilly, M. Favennec, M. Fromantin.
Après l'alinéa 5, insérer les deux alinéas suivants :
« a bis) Le 1° est ainsi modifié :
« « Après le mot : »public« , insérer les mots : »et dans le respect des procédures d'attribution des conventions de délégations de service public définies aux articles L. 2121-1 et L. 2121-4," ».
Adaptation du Code des Transports aux dispositions du règlement 1370/2007 « Obligation de service public »
Concernant l'exploitation des services publics conventionnés équivalents en France à l'exploitation des Trains Express Régionaux (TER) et des Trains d' Equilibre du Territoire (TET), les Etats membres de l'Union européenne ont adopté le 3 décembre 2007 le règlement « Obligation de servicepublic » (OSP), entré en vigueur le 3 décembre 2009, pour permettre aux autorités organisatrices de transports (AOT) de choisir librement le mode d'attribution de leur contrat de service public. Ainsi, plusieurs possibilités sont offertes aux AOT pour l'exploitation de leurs services publics de transport :
- la mise en concurrence prévue à l'article 5 paragraphe 3 du règlement, principe fondateur du règlement OSP ;
- la régie prévue à l'article 5 paragraphe 2 du règlement ;
- le recours à un opérateur interne, prévue à l'article 5 paragraphe 2 plus communément appelé en droit administratif français contrats « in house », contrats de quasi-régie ou encore contrats de prestations intégrées ;
- l'attribution directe prévue aux paragraphes 4 et 5 de l'article 5 du règlement en cas de contrat de faible montant et en cas d'urgence. L'article 5 paragraphe 6 du règlement OSP permet également aux AOT de recourir aux attributions directes dès lors que le droit national ne s'y oppose pas et que les conventions de service public conclues soient limitées à une durée maximale de 10 ans voire 15 ans en cas d'apport d'actifs significatifs nécessaires à l'exploitation par l'entreprise ferroviaire.
La France se doit d'adapter son système ferroviaire à cette nouvelle règlementation qui imposera en 2019 l'ouverture régulée. La réforme ferroviaire est une opportunité à ne pas rater pour les autorités françaises pour adapter la loi française à cette règlementation. Réformer le système ferroviaire français sans prendre en compte sa dimension européenne c'est prendre le risque d'une réforme anachronique.
En conséquence, il est proposé d'introduire en droit français cette liberté de choix des autorités organisatrices de transport dans la logique du règlement OSP et de modifier les dispositions du code des transports relatives aux services d'intérêt national , aux services d'intérêt régional et aux missions de l'opérateur historique pour permettre aux autorités organisatrices de choisir le mode de contractualisation le plus opportun.
Cette introduction des dispositions du règlement OSP en droit français est une exigence européenne qui s'impose à l'Etat français. En effet, en vertu de l'applicabilité directe que l'article 288 du Traité de Fonctionnement de l'Union Européenne (TFUE) confère au règlement, le règlement OSP produit dès son entrée en vigueur ses effets dans l'ordre juridique interne sans qu'il soit besoin d'aucune mesure de transposition en droit français. Le règlement est également d'effet direct, c'est-à-dire qu'il « produit des effets immédiats et est, comme tel, apte à conférer aux particuliers des droits que les juridictions nationales ont l'obligation de protéger . L'effet direct étant à la fois « vertical » (à l'encontre de l'Etat) et « horizontal » (à l'encontre des personnes privées), il en résulte que depuis le 3 décembre 2009, le règlement OSP s'impose à la fois à l'Etat et à toutes personnes publiques ou privées directement ou indirectement concernées par son application.
Néanmoins, l'applicabilité directe du règlement n'exclut cependant pas que les Etats membres aient l'obligation de prendre des mesures destinées à en faciliter l'application, soit sur le fondement du principe de coopération loyale énoncé à l'article 4 paragraphe 3 du traité de l'Union Européenne soit en vertu d'une habilitation expresse telle que prévu à l'article 8 paragraphe 2 du règlement OSP. En conséquence, l'Etat français étant seul compétent pour adapter le cadre juridique de l'organisation des services publics de transport visés par le règlement OSP, il lui revient de modifier le droit national pour le rendre conforme aux prescriptions de droit de l'Union Européenne.
Enfin, l'applicabilité directe du règlement OSP doit s'apprécier en tenant compte du régime de transition qu'il prévoit. En vertu de l'article 8 paragraphe 2 du règlement, ce n'est qu'à partir du 3 décembre 2019 que l'attribution des contrats de services publics de transports devra automatiquement être précédée d'une mise en concurrence ouverte, équitable et conforme au principe de transparence et de non-discrimination sauf exceptions visées auxparagraphes 4, 5 et 6 du règlement OSP. Cependant, cette période de transition ne doit pas s'analyser comme une entrée en vigueur différée. En effet, durant cette période de transition, les Etats membres sont dans l'obligation de prendre « des mesures pour se conformer progressivement à l'article 5 afin d'éviter de graves problèmes structurels concernant notamment les capacités de transports » (article 8 paragraphe 2). Afin de vérifier l'effectivité des mesures prises, les Etats membres doivent fournir à la Commission Européenne un rapport d'avancement faisant état de l'attribution progressive des contrats de service public conformément aux principes de mise en concurrence définis à l'article 5 du règlement OSP. Ce rapport doit permettre à la Commission Européenne de proposer des mesures appropriées adressées aux Etats membres pour l'adaptation de leur droit national.
En conclusion, l'objectif du règlement OSP est clair : il s'agit d'engager les Etats membres à se mobiliser dès le 3 décembre 2009 en vue de se conformer progressivement aux dispositions du règlement. Autrement dit, l'Etat français ne saurait attendre le 2 décembre 2019, veille de l'expiration de la période de transition, pour se conformer aux obligations de l'article 5. Le règlement OSP pose une obligation pour les Etats membres de généraliser progressivement le recours à la concurrence pour l'attribution des contrats de service public dans tous les cas où ce recours est obligatoire.
Les bénéfices de l'ouverture à la concurrence du marché des transports ferroviaires conventionnés de voyageurs
Pour une concurrence régulée
Il est proposé au travers de l'article L2121-1 modifié relatif aux services d'intérêt national et L2121-4 modifié relatif aux services d'intérêt régional de promouvoir une ouverture à la concurrence régulée par la passation d'appels d'offres compétitifs respectant les principes d'équité , de transparence et de non-discrimination prévue par l'article 5 paragraphe 3 du règlement OSP et par l'article 38 de la loidu 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques,dite loi «Sapin" qui vient encadrer la passation des délégations de service public.
La délégation de service public suppose que le risque économique pèse bien sur le délégataire du service public et sa rémunération est « substantiellement assurée par les résultats de l'exploitation ". Ainsi, la délégation de service public permet un contrôle financier poussé du service par le délégant en amont de la procédure, tout en incitant les entreprises à l'innovation et à mieux maîtriser les coûts d'exploitation. Les autorités organisatrices trouvent cette procédure bien adaptée au secteur des transports publics urbains car elle allie égalité d'accès au service public et libre choix de l'autorité organisatrice. Par ailleurs, la délégation de service public est suffisamment souple pour permettre une définition et une adaptation du contrat par rapport aux besoins et orientations stratégiques de l'autorité organisatrice.
La délégation de service public, soutenue aussi par le Groupement des autorités responsables de transport (GART), est appréciée des élus des autorités organisatrices. Depuis la loi Sapin de 1993, la délégation de service public est devenue le mode de gestion privilégié des autorités organisatrice de transport urbain : en 2012, 82 % des AOTU ont fait le choix de déléguer la gestion de leur service de transport collectif dans le cadre d'une DSP.
C'est cette concurrence, organisée et régulée qui a permis à trois groupes français Keolis, filiale de la SNCF, Transdev et RATP de figurer parmi les cinq entreprises mondiales leaders en transports urbains. Face à ce succès, il est proposé de préparer et d'ouvrir à une concurrence régulée le marché ferroviaire de transport de voyageurs afin d'assurer la compétitivité du rail français. La concurrence régulée permet à chaque opérateur intéressé de proposer des innovations de service dans ses réponses aux appels d'offres.
Les objectifs de l'ouverture à la concurrence
Développer la part modale du transport ferroviaireet contribuer à la transition énergétique en France
La mise en concurrence permet de susciter l'innovation dans les services proposés et d'accorder une plus grande attention aux voyageurs, tout en préservant les ressources de la planète pour les générations futures.
L'exemple allemand de l'ouverture à la concurrence des services régionaux illustre clairement la réalisation de cet objectif. De 2002 à 2012, le nombre de trains.km en transport ferroviaire régional a augmenté de 7 %, tandis que le nombre de voyageurs.km augmentait de 30 %. Il y a donc de plus en plus de voyageurs dans les trains régionaux, car les services mis en place le sont de façon plus efficace avec une qualité de service avérée. Dans ce transport de proximité, de nombreux opérateurs privés dont Abellio, Netinera, Keolis et Transdev (Veolia Verkehr) sont depuis longtemps très actifs. Leur part de marché s'élève désormais à 25 % et ils ont pu assurer en 2012 près de la moitié (48%) des volumes trains-kilomètres mis en appel d'offre par les landers. L'ouverture à la concurrence a également permis à l'opérateur historique de multiplier lui aussi ses efforts de qualité. Le trafic de DB Regio a augmenté de 46% entre 1994 et 2012.
Concernant le fret, son déclin en France a commencé bien avant son ouverture à la concurrence en 2006 et les entreprises privées de fret ferroviaire ont, depuis leur arrivé sur le marché, permis de maintenir sur les rails des trafics qui seraient partis à la route, de diversifier l'offre (développement des opérateurs ferroviaires de proximité, du transport combiné, du trafic international…) et de réorienter l'offre vers le client en lui apportant écoute, réactivité etadaptabilité. En 2012, le trafic de fret ferroviaire a baissé de 4,8 % mais le fret routier a lui diminué de 5,6 %. Cela veut dire que la baisse liée à la conjoncture économique est moins forte pour le fret ferroviaire que pour le routier.
Maîtriser les coûts de fonctionnement du système ferroviaire, objectif affiché de la réforme ferroviaire.
En 10 ans, les contributions publiques aux TER français ont augmenté de 47 %. A la même période en Allemagne, avec une croissance du trafic à peu près comparable, ils ont baissé de 20 %. En Grande-Bretagne, les contributions publiques sont passées de 1,4 milliard à 800 millions de livres entre 2002 et 2012. La baisse des coûts permettra aux collectivités, soit de faire des économies, soit, comme cela a été le cas en Allemagne, d'investir dans de nouveaux services. L'ouverture du marché à la concurrence et la régionalisation des transports publics, en Allemagne, a également permis la réouverture d'un nombre important de lignes.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.