Déposé le 19 juin 2014 par : M. Ménard, Mme Le Dissez, Mme Alaux, M. Letchimy, Mme Berthelot, M. Bies, M. Bouillon, M. Lesage, Mme Lignières-Cassou, M. Sauvan, M. Bardy, Mme Beaubatie, M. Bricout, Mme Buis, M. Burroni, Mme Errante, M. Cottel, M. Plisson, Mme Reynaud, Mme Tallard, Mme Françoise Dubois, M. Alexis Bachelay, les membres du groupe socialiste républicain citoyen.
Après le troisième alinéa de l'article L. 2131-2 du Code général de la propriété des personnes publiques, sont inséré quatre alinéas ainsi rédigés :
« L'autorité administrative peut, par décision motivée prise après avis du ou des conseils municipaux intéressés et au vu du résultat d'une enquête publique effectuée comme en matière d'expropriation :
« a) Modifier le tracé ou les caractéristiques de la servitude, afin, d'une part, d'assurer, compte tenu notamment de la présence d'obstacles de toute nature, la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage d'un cours d'eau ou d'un lac domanial , d'autre part, de tenir compte des chemins ou règles locales préexistants ; le tracé modifié peut grever exceptionnellement des propriétés non riveraines du domaine public fluvial ;
« b) A titre exceptionnel, la suspendre.
« Sauf dans le cas où l'institution de la servitude est le seul moyen d'assurer la continuité du cheminement des piétons ou leur libre accès au rivage d'un cours d'eau ou d'un lac domanial, la servitude instituée aux alinéas 1 et 2 ci-dessus ne peut grever les terrains situés à moins de quinze mètres des bâtiments à usage d'habitation édifiés avant le 1er janvier 2007, ni grever des terrains attenants à des maisons d'habitation et clos de murs au 1er janvier 2007. »
En l'état actuel du droit, l'ouverture aux piétons de la servitude de marchepied le long du domaine public fluvial instaurée par la loi sur l'eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 se heurte à de nombreuses difficultés dans son application, conduisant à des conflits récurrents entre propriétaires riverains et piétons, regroupés ou non au sein d'associations de randonneurs.
En effet, de part et d'autre, une confusion existe entre le sentier du littoral créé explicitement pour le cheminement continu des piétons et l'extension aux piétons de l'usage de la servitude de service que constituait la servitude de marchepied le long des cours d'eau domaniaux. De fait, la servitude de trois mètres le long du littoral a été, dès sa création par la loi de 1976, exclusivement destinée à assurer le passage des piétons. La loi a en outre été très explicite sur l'objet de cette servitude en donnant la possibilité à l'autorité administrative d'en modifier le tracé afin d'assurer la continuité du cheminement des piétons ou exceptionnellement de la suspendre. Le but de la loi instaurant la servitude du littoral était bien le cheminement le plus continu possible des piétons le long du littoral, y compris en haut de falaises et y compris, si besoin, à moins de quinze mètres des bâtiments à usage d'habitation, s'il s'agit du seul moyen d'assurer cette continuité. Cette loi a véritablement prévu l'obligation de mise en place d'un sentier du littoral. Elle a par ailleurs prévu sa mise en application par décret en Conseil d'État précisant les cas d'exception et les procédures, avec enquête publique, de modification du tracé. En 2006, la loi sur l'eau et les milieux aquatiques n'a fait, quant à elle, qu'ouvrir aux piétons l'usage d'une servitude dont l'objet initial était l'accès à la berge par les services gestionnaires chargés de l'entretien du domaine public fluvial. Cet usage avait été ouvert aux pêcheurs par la loi sur la pêche de 1984. À aucun moment cependant la loi n'exprime une obligation de cheminement continu comme elle le fait pour le littoral, ni ne précise à qui revient la charge de faire assurer cette obligation en toute sécurité (signalisation, balisage, travaux de sécurisation, etc.). La loi sur la servitude de marchepied ne prévoit pas le principe même d'exception d'application à la règle établie, qui permettrait, par exemple, la modification du tracé ou la suspension de la servitude comme c'est le cas pour le sentier littoral. Elle n'instaure pas de distance minimale à respecter par rapport aux bâtiments d'habitation. Or, dans la réalité, ces questions se posent et l'appréciation des solutions envisageables est rendue difficile par le silence de la loi.
Aussi cet amendement a pour objet de pallier ce silence en précisant les règles et principes s'appliquant à la servitude de marchepied afin de rendre ce droit pleinement effectif pour les piétons.
2 commentaires :
Le 26/06/2014 à 07:17, adresp a dit :
Sauf si le mur de clôture sur l'emprise de la servitude a été construit avant l'Ordonnance royale sur les eaux et forêts du 12 aout 1669 (voir CE 13 février 2002, Commune de Médan), les terrains attenants à des habitations et clos de murs avant 2007 sont des parcelles en infraction puisque la construction de murs sur l'emprise de la servitude constituent depuis longtemps une contravention de grande voirie ... dont la démolition était systématiquement ordonnées par les juridictions administratives.
Il serait donc pour le moins choquant de soudainement gratifier ces parcelles en leur procurant un privilège spécial d'échapper à l'obligation de respecter la servitude .. alors que les propriétaires loyaux qui respectaient la loi se verraient au contraire contraint à respecter la servitude !! C'est un peu le monde à l'envers ? C'est même franchement ...euh ... immoral .. !
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Le 26/06/2014 à 08:56, adresp a dit :
Les personnes qui sont propriétaires d'une parcelle grévée de cette servitude le sont généralement en connaissance de cause puisque la servitude existe depuis près de 350 ans (ordonnance royale de aout 1669)... !
S'ils ont établi leur maison d'habitation à moins de 15 mètres de l'assiette de cette servitude, c'est donc en connaissance de cause également !…
La servitude figure généralement dans les documents d'urbanisme et dans les actes notariés.
La loi de 2006 a certes étendu l'usage de la servitude aux piétons mais sans modifier le principe de son assiette.
Décider subitement en 2014 que la servitude ne s'appliquera plus à ces parcelles au motif que l'habitation est située à moins de 15 mètres signifie donc un grave recul par rapport au droit existant tant pour les piétons que pour les pêcheurs et les usagers de la voie navigables.
En zones urbaines et péri-urbaines, il est fréquent qu'une habitation existe à moins de 15+3,35 de la crête de berge.
La mesure proposée revient donc à condamner la servitude dans ces zones, alors que celles-ci devraient au contraire en bénéficier s'agissant de lieux de tourisme et de promenades privilégiés.
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