Déposé le 29 novembre 2014 par : M. Caresche, M. Dosière.
I. – Le code général des impôts est ainsi modifié :
1° La section VII du chapitre premier du titre II de la première partie du livre premier est complétée par un H ainsi rédigé :
« H : Déclaration des achats
« Art. 289 E. – Aux fins de se prémunir contre le risque d'être impliqués dans un circuit de fraude à la taxe sur la valeur ajoutée, les assujettis déclarent par voie électronique les achats de biens ou de prestations de services réalisés auprès d'un autre assujetti dans les 24 heures de leur inscription en comptabilité au sens de l'article 286 ou de leur enregistrement dans les contrôles documentés mentionnés au 1° du VII de l'article 289. La déclaration mentionne pour chaque opération, d'une part, le numéro d'identification visé à l'article 286 ter par lequel le vendeur est identifié et, d'autre part, la base d'imposition de la livraison de biens ou de la prestation de services telle que visée au a du 1 de l'article 266 et à l'article 267. » ;
2° Le 2 du B de la section I du chapitre II du livre II est complété par un article 1729 C bis ainsi rédigé :
« Art. 1729 C bis. – Le défaut de production dans le délai prescrit d'une déclaration d'achat mentionnée à l'article 289 E entraîne l'application d'une amende égale à 5 % de la différence entre le montant à déclarer et le premier seuil mentionné au I de l'article 302 septies A pour l'application du régime simplifié de liquidation de la taxe sur la valeur ajoutée. L'amende est applicable aussi lorsque la somme des achats à déclarer excède ce seuil pour un même vendeur au terme d'une période de trois mois. L'amende n'est pas applicable si l'achat porte sur des prestations de services, ainsi que sur des biens dont la livraison n'est pas soumise à la taxe sur la valeur ajoutée ou pour laquelle la taxe est due par l'acquéreur, le destinataire ou le preneur en application de l'article 283. L'amende est plafonnée par année à 0,1 % de la somme des achats pour laquelle elle est applicable lorsque l'assujetti a mis en œuvre un dispositif de transmission des informations requises dans des conditions de fiabilité définies par décret en Conseil d'État et elle n'est pas appliquée lorsque par ailleurs il est établi que la taxe mentionnée dans la facture d'achat a été régulièrement versée au Trésor par le fournisseur. » ;
3° Le premier alinéa du 4 de l'article 1788 A est complété par une phrase ainsi rédigée : « Ce taux est ramené à 1 % lorsque l'opération en cause est une acquisition intra communautaire mentionnée au I de l'article 256 bis ou une importation visée au bquater du 5 de l'article 287. » ;
4° Le 3 de l'article 272 et le 4 bis de l'article 283 sont complétés par une phrase ainsi rédigée : « Cette disposition n'est pas applicable si la déclaration des achats prévue à l'article 289 E a été régulièrement déposée. ».
II. – L'article L. 252 B du livre des procédures fiscales est ainsi modifié :
1° Après le I est inséré un I bis ainsi rédigé :
« I bis. – Lorsque le procès-verbal mentionné à l'article L. 80 F fait apparaître les deux faits suivants :
« 1° la taxe sur la valeur ajoutée afférente à une livraison de biens dont le montant excède le seuil visé à l'article 1729 C bisdu code général des impôts est devenue exigible dans les conditions prévues au a du 2 de l'article 269 du code précité sans que soit échue l'obligation déclarative prévue à l'article 287 du même code ;
« 2° le montant obtenu par application des taux prévus aux articles 278 à 281 nonies du même code, selon la nature des opérations, à la base du chiffre d'affaires ou des recettes brutes hors taxes réalisés au titre de chaque période pour laquelle aucune obligation déclarative n'est échue, jusqu'à la date du procès-verbal précité et sous déduction du total de taxe déductible dans les conditions prévues aux articles 271 à 273 septies C du même code, excède le montant de taxe sur la valeur ajoutée compris dans les factures émises durant les douze mois précédant la livraison visée au 1° ;
« et que les circonstances sont susceptibles de menacer le recouvrement de la taxe, le comptable peut dans la limite du premier montant visé au 2° procéder à la saisie à tiers débiteur de la créance dont le redevable est détenteur auprès du destinataire de la livraison à raison de celle-ci. La saisie est notifiée à l'un et à l'autre avec mention des délais et voies de recours. Elle emporte l'effet prévu à l'article L. 523‑1 du code des procédures civiles d'exécution à concurrence des sommes pour lesquelles elle est pratiquée. Le comptable ne peut en demander le paiement avant que soit échue l'obligation déclarative visée au 1°. » ;
2° Au premier alinéa du II, après la référence « I », sont insérés les mots : « ou de la saisie à tiers débiteur mentionnée au I bis » ;
3° Le III est complété par une phrase ainsi rédigée : « Il en va de même pour la saisie à tiers débiteur mentionnée au I bis du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée due au titre de l'échéance visée au 1°. ».
III. – Les présentes dispositions sont applicables aux opérations réalisées à compter du 1er juillet 2015, à l'exception des 2 et 4° du I pour lesquels cette date est fixée au 1er janvier 2016.
Les modifications au code général des impôts (CGI) proposées se placent dans le prolongement du plan d'action annoncé le 22 mai 2014 par le Gouvernement pour développer un « contrôle citoyen » reposant sur une relation de confiance avec les entreprises. Elles constituent un dispositif d'ensemble visant à la fois à rendre impossible les montages de fraude à la TVA connus sous le terme de « carrousel » et à apporter aux redevables une meilleure sécurité juridique tout en allégeant les procédures applicables à l'importation.
Le dispositif décrit au I repose sur la mise en œuvre (dans le respect de l'article 273 de la directive TVA) d'une déclaration en temps réel des achats réalisés par les assujettis à la TVA. Limitée à la mention du montant de l'opération et du numéro d'enregistrement du fournisseur, cette formalité serait ouverte à tous les opérateurs, mais ne serait de fait rendue obligatoire que pour les achats d'un montant important (les pénalités ne s'appliquant qu'au-delà du seuil de 783.000 €) si bien qu'elle ne concernerait que quelques dizaines de milliers d'entreprises.
Reçues par la direction nationale des enquêtes fiscales, ces informations immédiatement recoupées avec la base de données des assujettis tenue par ce service permettraient à l'administration d'identifier immédiatement les fournisseurs dont le profil (chiffre d'affaires, immobilisations, effectifs) n'est pas cohérent avec le montant de la livraison en cause et qui sont susceptibles de disparaître soudainement en éludant la TVA facturée. Aussitôt alerté, le service local serait dès lors aussitôt en mesure par l'exercice du simple droit d'enquête prévu au livre des procédures fiscales de s'assurer sur place de la nature de la transaction, et pour le cas où un doute existerait sur le reversement de la taxe d'amener le comptable des impôts à prendre les mesures conservatoires appropriées telles qu'elles ont précisées au IV. Ainsi serait radicalement dissuadée toute possibilité d'action des acteurs de l'escroquerie à la TVA que l'on désigne sous le terme de « taxi ».
En contrepartie, le dépôt de cette déclaration des achats serait reconnu comme répondant aux « précautions raisonnables » que la jurisprudence demande aux assujettis de prendre pour éviter d'être impliqués dans un montage frauduleux en sorte que leur soit assurée la sécurité juridique du droit à déduction. Au II, il est donc proposé sous cette condition d'écarter a priori toute présomption de complicité objective de l'acheteur envers son vendeur telle qu'elle a été introduite aux articles 272 et 283 du CGI.
En outre, tout risque étant désormais maîtrisé de montage carrouséliste sur les livraisons subséquentes aux achats réalisés tant par acquisition intracommunautaire qu'hors de l'Union, il n'y aurait plus d'obstacle à aligner le traitement fiscal des importations sur celui appliqué depuis 1993 aux échanges dans l'Union. Aussi, il est proposé au III d'autoriser tous les assujettis soumis au régime normal d'imposition à la TVA qui le souhaitent à acquitter la taxe due à l'importation non plus auprès des services de la douane, mais avec le dépôt de leur déclaration mensuelle auprès de la DGFiP en sorte de leur éviter les charges administratives et de trésorerie induites par la procédure existante.
Pour les (grandes) entreprises concernées par la nouvelle obligation déclarative, la charge de gestion sera nulle puisque la collecte et la transmission des données s'intègrera entièrement dans le traitement dématérialisé de leurs opérations comptables. Pour leur laisser le délai nécessaire à l'initialisation du module informatique requis, il est proposé au V d'étaler l'entrée en vigueur du dispositif entre juillet 2015 et janvier 2016. Du côté de l'administration, les moyens informatiques nécessaires sont déjà disponibles pour l'essentiel. Moyennant une adaptation organisationnelle et des circuits de transmission interne, ce sont dès lors au moins 5 Mds€ (selon les évaluations a minima de la fraude avancées par les ministres) de recettes supplémentaires qui seraient récupérées en rythme annuel.
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