Déposé le 1er décembre 2014 par : M. Caresche.
I. – L'article 575 A du code général des impôts est ainsi modifié :
1° La deuxième ligne du tableau du deuxième alinéa est ainsi rédigée :
«
Cigarettes64,712,5
» ;
2° Au troisième alinéa, le montant : « 210 € » est remplacé par le montant : « 212 € ».
II – Les 1° et 2° du I s'appliquent à compter du 6 janvier 2015.
Chaque année, le tabac tue 73 000 personnes en France.
Ce chiffre est d'autant plus inquiétant que la France est un des pays qui comptent le plus grand nombre de jeunes fumeurs à travers le monde, devant la Grèce, le Portugal ou la Pologne.
Selon le Comité National Contre le Tabagisme (CNCT), 26,3 % des jeunes Français de 15 ans sont des fumeurs réguliers et cette proportion monte à près de 40 % chez les 16‑25 ans.
Comme le soulignait le Haut Conseil de la santé publique dans son avis précité de janvier 2012, « ce sont les plus jeunes qui présentent la plus grande sensibilité aux variations de prix » des cigarettes.
Dans le droit fil des mesures du Plan anti-tabac présentées le 25 septembre dernier, une augmentation des prix des cigarettes est indispensable.
Or, contrairement aux idées reçues, le prix des cigarettes est libre en France et ce sont les fabricants qui en décident, quatre fois par an. La fiscalité est avant tout un instrument de contrainte à la hausse des prix.
L'évolution relative des parts spécifiques et proportionnelles de la fiscalité du tabac constitue une variable clé pour les fabricants, toute modification de leur répartition ayant une influence sur le poids relatif de la fiscalité sur les différents segments du marché.
Depuis 2010, les Gouvernements successifs ont fait le choix de prendre des mesures qui de fait ont privilégié et augmenté la marge de l'acteur dominant, détenant 75 % du segment « haut de gamme » qui ont la préférence des jeunes et représentent « les consommateurs réguliers potentiels de demain » comme le clame le groupe.
Pour que l'augmentation soit pleinement efficace en termes de santé publique, elle doit être uniforme et toucher l'ensemble des segments du marché des cigarettes, tant les produits « entrée de gamme » que les produits dits « haut de gamme », plus chers.
Le présent amendement vise donc à agir à la fois :
(i) Sur le prix d'accès au tabac, c'est-à-dire sur le prix des produits « entrée de gamme », en augmentant le minimum de perception pour les cigarettes. Le minimum de perception passe ainsi de 210 à 212 euros pour 1000 unités.
En effet, le mécanisme du minimum de perception a pour objectif l'application d'une fiscalité minimale en deçà d'un certain niveau de prix de vente au public. Ce faisant, il constitue une incitation forte pour les fabricants à ne pas vendre en dessous d'un prix de déclenchement. L'effet du relèvement du seuil de déclenchement du minimum de perception sur le prix d'accès au tabac contribue donc à éviter toute baisse du prix d'accès au tabac et contraint les fabricants à augmenter leurs prix.
(ii) Sur le prix des produits « haut de gamme » en augmentant le taux proportionnel de 49,7 % à 52,2 %.
Le taux proportionnel étant égal à la différence entre le taux normal, aujourd'hui à 64,7 %, et le taux spécifique, aujourd'hui à 15 %, l'amendement propose de baisser le taux spécifique de 15 % à 12,5 % entrainant automatiquement une augmentation du taux proportionnel de 49,7 % à 52,2 %.
Si le prix est un facteur déterminant d'accès au tabac, les produits « haut de gamme », qui investissent le plus dans le marketing et leur image, sont parmi les plus attractifs, notamment aux yeux des jeunes. Ainsi, les deux marques de cigarettes les plus chères du marché, détenues par l'acteur dominant, représentent plus d'1/3 des cigarettes achetées par les nouveaux fumeurs en France.
Dans cette optique, une augmentation de la part proportionnelle permettrait de contraindre les fabricants de cigarettes « haut de gamme », qui sont à la fois les plus vendues et les moins taxées, à augmenter leurs prix. En effet, le taux proportionnel, qui s'applique sur les prix, impacte plus fortement les produits dont les prix sont élevés.
Le rapport du Sénat n°399 relatif à la fiscalité et la santé publique est particulièrement explicite en relevant que « toute augmentation de la part spécifique applicable aux cigarettes renforce l'avantage relatif donné aux produits situés dans la partie haute du marché. La taxation relative des produits premium baisse à mesure que la part spécifique augmente, entrainant par conséquent une hausse de la marge des fabricants situés sur le segment ».
En deux ans, le taux proportionnel est passé de 54,6 % à 49,7 %, soit une baisse de près de 5 points. Cette baisse a permis aux fabricants de produits « haut de gamme » de limiter les hausses de prix et a accru les distorsions de concurrence entre les fabricants en consolidant les
marges du leader du marché par rapport à ses concurrents.
Au final, cet amendement, en augmentant les taxes touchant à la fois les cigarettes « entrée de gamme » et les cigarettes « haut de gamme », amènera l'ensemble des fabricants à augmenter leur prix sans créer de distorsion de concurrence. Seule cette solution permettra de mener une véritable politique de lutte contre le tabagisme.
Enfin, cet amendement a pour effet de dégager 15 millions d'euros de recettes supplémentaires pour l'État qui pourraient contribuer à couvrir le coût des dégâts sanitaires et sociaux engendrés par le tabagisme en France aujourd'hui
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