Déposé le 30 janvier 2015 par : M. Alauzet, Mme Bonneton, M. Roumegas, Mme Abeille, Mme Allain, Mme Attard, Mme Auroi, M. Baupin, M. Cavard, M. Coronado, M. de Rugy, Mme Duflot, M. François-Michel Lambert, M. Mamère, Mme Massonneau, M. Molac, Mme Pompili, Mme Sas.
Le titre V de la première partie du livre Ier du code général des impôts est complété par un chapitre II ainsi rédigé :
« Chapitre II
« Déclaration de certaines prestations de conseil afin de lutter contre l'évasion fiscale et de prévenir les abus de droit
« Art. 1378 decies. I. – Dans le but de lutter contre l'évasion fiscale et de prévenir les abus de droit tels qu'ils sont définis par l'article L. 64 du livre des procédures fiscales, les personnes domiciliées ou établies en France dont l'activité professionnelle consiste en tout ou partie à fournir des prestations de conseil à des personnes exploitant une entreprise en France au sens du I de l'article 209 du présent code sont soumises à une obligation de déclaration dans les conditions définies au présent article.
« Doivent être déclarées à l'administration les prestations de conseil dont la mise en œuvre :
« 1° Implique une entité : personne morale, organisme, fiducie ou institution comparable, établie ou constituée soit dans un État ou territoire non coopératif au sens de l'article 238‑0-A, soit dans un État ou territoire dans lequel elle est soumise à un régime fiscal privilégié au sens de l'article 238 A ;
« 2° A pour effet de faire naître ou de modifier dans leur sens ou leur montant un ou plusieurs des flux suivants, entre la personne exploitant une entreprise en France et l'entité mentionnée au 1° :
« a) les redevances de concessions de produits de la propriété industrielle définis à l'article 39 terdecies ;
« b) les produits des participations au sens de l'article 145 ;
« c) les intérêts afférents aux sommes laissées ou mises à disposition ;
« 3° Et laisse espérer à la personne exploitant une entreprise en France une réduction d'au moins 1 million d'euros du montant d'impôt sur les bénéfices dont elle aurait été redevable sans cette mise en œuvre.
« La déclaration intervient dans les trente jours suivant la fourniture des prestations de conseil.
« Les personnes soumises à l'obligation de déclaration sont tenues de garantir l'anonymat des personnes exploitant une entreprise en France mentionnées au premier alinéa.
« II. – Les dispositions du I s'appliquent à titre expérimental, pour une durée de deux ans à compter du 1er janvier 2016.
« III. – Les modalités d'application du présent article sont fixées par décret en Conseil d'État. ». ».
Cet amendement a pour objet d'instaurer une obligation de déclaration de certaines opérations à la charge des conseils d'entreprise. Ce procédé permettant la meilleure information de l'administration fiscale a notamment été préconisé dans de nombreux rapports parlementaires (Migaud 2009, Bocquet 2011, Muet 2013). Par ailleurs ce type de déclarations est déjà effectif dans 8 pays : UK, Canada (depuis 1989, renforcé en 2013), États-Unis (depuis 1984), Irlande, Portugal, Afrique du Sud, Israël, Corée du Sud.
La déclaration d'opérations d'optimisation fiscale agressive est l'objectif de l'action n°12 du programme BEPS de l'OCDE. L'objectif de notre amendement est que l'administration n'ait plus à investir des ressources importantes pour découvrir où pourraient se situer les montages menant à l'évasion fiscale.
Il s'agit de demander aux cabinets de conseil qui commercialisent des prestations de conseil en matière de fiscalité, de transmettre à l'administration fiscale les schémas commercialisés, dès que ces derniers permettent une économie d'impôt sur les bénéfices d'au moins 1 million d'euros, et qui concernent des transactions entre l'entreprise bénéficiaire et une entité située dans un État non coopératif ou à fiscalité privilégiée.
Mais sa logique n'est pas répressive ; il s'agit d'informer l'administration, en garantissant l'anonymat des entreprises bénéficiaires des prestations de conseil. Devraient être déclarées, en détails, les prestations de conseil dont la fourniture est censée permettre à l'entreprise qui en bénéficie une économie d'impôt sur les bénéfices d'au moins 1 million d'euros, et dont la mise en œuvre repose sur la création ou la modification de certains flux (redevances, dividendes, intérêts) entre l'entreprise bénéficiaire et une entité située dans un État non coopératif ou à fiscalité privilégiée.
Disposer de ces informations permettra à l'administration fiscale de détecter les cas où ces pratiques donnent lieu à évasion fiscale : elle pourra dans certains cas procéder à son évaluation ou sa résolution en permettant des contrôles efficaces fondés sur les risques. C'est donc un système gagnant/gagnant pour les entreprises que nous proposons : nous voulons diminuer le nombre des contrôles fiscaux de routine et accroître la culture de discipline fiscale.
Ces informations pourraient permettre à l'administration fiscale d'avoir une vision plus claire de certaines stratégies de réorganisation d'entreprise et plus généralement de montages transnationaux qui peuvent parfois confiner à l'évasion fiscale.
C'est d'ailleurs dans cet objectif de lutte contre l'évasion fiscale, que le Conseil constitutionnel reconnaît comme partie intégrante de l'objectif à valeur constitutionnelle de lutte contre la fraude fiscale, que s'inscrit cet amendement.
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