Déposé le 26 janvier 2015 par : M. Caresche.
L'article 58 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques est ainsi rédigé :
« Art. 58 – I. – Les personnes exerçant leurs fonctions au sein d'un service ou département juridique en exécution d'un contrat de travail au sein d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises ou d'une association professionnelle ou syndicale publiques ou privées ayant une finalité économique, sociale ou scientifique situées en France ou l'étranger, peuvent, en toute indépendance, donner des consultations juridiques et établir les actes juridiques nécessaires à l'activité de l'entreprise ou de l'organisme qui les emploie et de toute entreprise du groupe auquel elle appartient. Elles peuvent effectuer toutes les opérations juridiques nécessaires à cette activité.
« II. – Les consultations, avis et correspondances de nature juridique émis par un juriste d'entreprise, ainsi que tous échanges écrits avec un juriste d'entreprise dans l'exercice de ses fonctions ou un avocat, que ceux-ci soient français ou étrangers et qu'ils soient localisés en France ou dans un autre État, ne peuvent être ni saisis par une quelconque autorité judiciaire ou administrative ou organisme de contrôle ni être opposés à l'entreprise ou au groupe d'entreprises ou à l'association professionnelle ou syndicale auxquels ceux-ci sont destinés dans le cadre d'une procédure judiciaire ou administrative.
« Les informations non publiques échangées entre juristes d'entreprise sont confidentielles, sauf déclaration unilatérale de l'émetteur ou convention contraire préalable et écrite.
« III. – Les personnes répondant aux conditions définies au I et qui sont membres d'une association professionnelle représentative de juristes d'entreprise dotée d'un corps de règles déontologiques, peuvent se prévaloir du titre de « juriste d'entreprise » après leur inscription sur une liste établie par le procureur de la République du ressort de la cour d'appel dont dépend son entreprise ou son association professionnelle ou syndicale.
« Le procureur se prononce, au vu des justifications produites, sur l'existence des conditions requises. Il établit la liste des juristes d'entreprise qui remplissent les conditions pour figurer sur une liste de juristes d'entreprise et tient celle-ci à jour.
« Ses décisions peuvent être contestées devant le tribunal de grande instance. Il peut être fait appel des décisions de celui-ci devant la cour d'appel La demande en vue de l'obtention du titre de juriste d'entreprise est adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance soit du siège social soit de l'établissement secondaire de l'entreprise soit du siège de l'association professionnelle ou syndicale représentative de juristes d'entreprises dont il est membre.
« Lorsqu'un juriste d'entreprise se rend coupable soit de faits contraires à l'honneur, à la probité, aux bonnes mœurs ou lorsqu'il a encouru l'une des condamnations ou sanctions qui auraient motivé le refus de son inscription sur la liste prévue au présent III, le procureur peut le faire citer devant le tribunal de grande instance aux fins d'avertissement, de blâme, d'amende ou de radiation temporaire ou de radiation définitive de la liste. Appel des décisions du tribunal peut être interjeté devant la cour d'appel.
« Des décrets pris en Conseil d'État déterminent les modalités d'application du présent article en ce qui concerne :
« - le dépôt et l'instruction de la demande d'inscription ;
« - les règles relatives à l'établissement et à la mise à jour de la liste ;
« - les modalités de contrôle exercé par le procureur de la République ;
« - la liste des associations professionnelles représentatives dotées d'un corps de règles déontologiques, et les modalités de formation permanente du juriste d'entreprise. ».
À l'heure de la globalisation et de la bonne gouvernance économique et mondiale, il importe de créer les conditions d'une meilleure prise en considération des enjeux juridiques dans la détermination de la stratégie de nos entreprises. Dans l'attente d'une éventuelle fusion des professions d'avocat et de juriste d'entreprise, il est proposé de régler immédiatement la question urgente de la confidentialité des avis et recommandation des juristes d'entreprise.
Pour contribuer à cet objectif, il convient, à l'instar de ce qui existe dans bon nombre de pays européens – à la fois de common law et de droit continental - de reconnaître officiellement la profession de Juriste d'entreprise de façon à permettre à nos entreprises de bénéficier pleinement des qualités et du savoir-faire de professionnels compétents, à même de défendre leurs intérêts dans le respect des lois et règlements.
Les Juristes d'entreprise, dont le nombre est estimé à plus de 16.000, constituent numériquement la deuxième profession du droit en France et ont su développer leur pratique du droit au sein des entreprises en France et à l'international depuis un demi-siècle.
Or, en dépit de ce professionnalisme incontesté, la profession de Juriste d'entreprise ne bénéficie pas de la reconnaissance législative et réglementaire permettant aux entreprises qui les emploient d'utiliser à plein leurs compétences et de se positionner à parité avec leurs concurrentes étrangères. En particulier, les avis écrits des Juristes d'entreprise ne sont pas, en France, protégés par la confidentialité et peuvent de ce fait être saisis ou produits dans le cadre d'une enquête ou d'un litige et, finalement, se retourner contre l'entreprise qui a choisi de les solliciter.
Une telle situation a pour effet de dissuader les entreprises françaises de solliciter des avis écrits de ses juristes internes, alors que l'objet même de ces avis est de permettre à l'entreprise de prendre sa décision en connaissant la dimension juridique des options qui s'offrent à elle. A l'heure où le droit s'affirme comme une composante essentielle de la stratégie des entreprises et où celles-ci sont encouragées à mettre en oeuvre des programmes de conformité, une telle lacune de la loi française constitue un réel handicap pour notre pays et pour la compétitivité des entreprises françaises qui, dans le souci légitime de connaître et de respecter le droit sans qu'il puisse en résulter une aggravation de leur niveau de risque juridique, peuvent se voir contraintes d'organiser leurs services juridiques à partir de l'étranger.
La solution proposée, pour rétablir l'équilibre compétitif de nos entreprises et mettre fin à cette distorsion de concurrence, consiste à renforcer le rôle du Juriste d'entreprise et à rapprocher les règles françaises relatives au statut des Juristes d'entreprise et celles relatives à la protection des documents juridiques qu'ils établissent avec celles des pays étrangers dans lesquels opèrent leurs concurrents.
Le projet présenté s'articule autour de critères objectifs de compétences sanctionnées par un diplôme Master 1 en droit ou équivalent et par le respect de règles déontologiques, et de l'adhésion à une association de juristes d'entreprise représentative de la profession et dotée d'une déontologie adaptée, sous le contrôle du Procureur de la République qui peut sanctionner toute infraction ou mauvaise conduite. Le texte reconnaît et consacre ainsi le principe de la confidentialité des consultations, avis, notes et correspondances du Juriste d'entreprise qui ne pourront ainsi être ni saisis ni opposés à son entreprise ou au groupe auquel il appartient dans le cadre d'une procédure judiciaire ou administrative.
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