Déposé le 2 avril 2015 par : M. Cinieri, M. Perrut, M. Mathis, M. Decool, M. Quentin, M. Darmanin, M. Lazaro, M. Berrios, Mme Louwagie, M. Salen.
Supprimer les alinéas 4 et 5.
Cet article tend à élargir les missions de la HAS à la rédaction ou la validation d'un guide des stratégies thérapeutiques et diagnostiques les plus efficientes et de listes de médicaments préférentielles pour les professionnels de santé. D'après l'étude d'impact, l'objectif est de fournir aux prescripteurs des outils réduisant les choix possibles parmi les médicaments présents sur le marché.
Si l'optimisation de l'efficience des dépenses de santé est essentielle pour dégager des économies et ainsi maintenir l'accès aux soins, une analyse des traitements basée uniquement sur l'efficience peut conduire, dans certains cas, à écarter des traitements bien plus efficaces que d'autres, essentiellement pour des considérations de coûts.
Ce risque est très concret dans des pathologies comme les cancers, avec le développement de thérapies ciblées ou des thérapies géniques ou cellulaires : un traitement innovant qui améliore ou prolonge la vie du patient est difficilement efficient lorsqu'il est comparé à des médicaments anciens devenus peu coûteux. Trois exemples anglais récents, illustrent le propos. Ces médicaments indiqués dans des pathologies aussi graves que le cancer du poumon non à petites cellules au stade avancé, le myélome multiple, le carcinome épidermoïde de la tête et du cou chez des patients récidivants et/ou métastatique ont été reconnus innovants par l'octroi d'une ASMR III (modérée) par la commission de la Transparence et sont pris en charge par l'assurance maladie française. Ces mêmes médicaments ont été considérés comme non efficients par le NICE (équivalent anglais de la HAS), malgré la reconnaissance de leur efficacité clinique. Généralement, l'absence d'efficience implique directement l'absence de prise en charge par le NHS (équivalent anglais de l'Assurance Maladie), au titre de la solidarité nationale. Les Anglais, conscients des pertes de chance subies par les patients face à ce type de décision, ont dû mettre en place un fond spécial en 2011 pour financer certains anticancéreux jugés efficaces mais non efficients (le Cancer Drug Fund). Ces trois médicaments sont finalement pris en charge par ce fond, avec un retard d'accès des patients anglais à la prise en charge comparé aux patients français (18 mois pour le traitement du cancer du poumon par exemple), mais uniquement pour certains patients dans le cadre de ce financement dérogatoire.
Cet article ne prévoit pas non plus les modalités d'actualisation de ce guide ou de ces listes. Or, en raison de la complexité et la durée des processus d'évaluation d'un nouveau traitement, il est évident que ce guide et ces listes ne pourront pas être actualisés au fur et à mesure de l'arrivée de nouveaux médicaments.
Enfin, l'assimilation de ce guide ou de cette liste à des recommandations de Bonnes Pratiques de la HAS pourrait, selon la jurisprudence du Conseil d'État, avoir un caractère contraignant pour les médecins et porter atteinte à leur liberté de prescription (arrêt du 27/4/2011 n°334396). Ceci sans compter la possibilité d'accord préalable de prescription s'appuyant sur ces recommandations ou encore la mise en place des Rémunérations sur Objectifs de Performance (ROSP) pour inciter les médecins à respecter les recommandations de la HAS.
Alors que l'accès aux meilleurs soins est une priorité pour les français, la prescription dans un guide de stratégies thérapeutiques les plus efficientes ou dans une liste préférentielle de médicaments ne permet donc pas de garantir aux patients qu'ils seront traités par les traitements les plus adaptés à leur état clinique individuel et que les meilleures chances de guérison ou d'amélioration de leur maladie leur seront offertes.
Cet article constitue donc un risque de perte de chance pour les patients.
C'est la raison pour laquelle cet amendement propose de conserver uniquement l'élaboration de fiches de bon usage du médicament par la HAS, afin de conforter leur existence, utile pour les professionnels de santé.
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