Déposé le 15 juin 2015 par : M. Cherpion.
Section 4 bis
Durée du temps de travail et aménagements
Article XXX
L’article L. 3122‑4 du code du travail est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« L’accord collectif visé aux articles L. 3122‑2 ou L. 3152‑1 peut prévoir que la limite visée au 1° correspond à la prise de la durée du congé visée à l’article L. 3141‑3 sur la période de variation et est augmentée ou réduite à due proportion du nombre de jours de congés pris ou non durant cette période en application des dispositions des articles L. 3141‑1 à L. 3141‑21 et L. 3151‑1 à L. 3153‑3. ».
Le code du travail permet depuis les années quatre-vingt de comptabiliser la durée du travail sur l’année au lieu de la semaine, par accord collectif.
Successivement, cette forme d’aménagement du temps de travail a pris le nom de modulation puis d’aménagement négocié du temps de travail. La loi du 19 janvier 2000 a fixé dans ce contexte un seuil annuel de 1600 heures, devenu 1607 heures après la mise en place en 2004 de la journée de solidarité, au-delà duquel les heures de travail effectuées sont des heures supplémentaires.
Ce seuil avait été calculé à partir de la prise sur l’exercice annuel de 5 semaines de congés payés.
Depuis un arrêt du 14 novembre 2013, la Cour de cassation considère, de façon très contestable, que le seuil de déclenchement des heures supplémentaires ne peut être supérieur au plafond de 1607 heures de travail par an, quand bien même le salarié n’aurait pas acquis l’intégralité de ses droits à congés payés au titre de la période de référence prévue par l’accord (Cass. soc., 14 novembre 2013, no 11‑17.644).
Cette interprétation est d’autant plus contestable que ce seuil de 1607 heures vise les accords conclus depuis 2003 puis 2008 dans le cadre du nouvel aménagement négocié du temps de travail. La loi no 2000‑37 du 19 janvier 2000 relative à la réduction négociée du temps de travail prévoit que les stipulations des conventions ou accords collectifs intervenues sur le fondement des articles L. 212‑2‑1 et L. 212‑8 du Code du travail applicables à la date de publication de la loi demeurent en vigueur. Il s’agit des anciennes modulations dites de type 1, 2 et 3.
Toutefois, selon cette loi, à compter de la date à laquelle la durée légale du travail est fixée à 35 heures, les heures excédant une durée moyenne sur l’année de 35 heures par semaine travaillée sont des heures supplémentaires soumises aux dispositions des articles L. 212‑5, L. 212‑5‑1 et L. 212‑6 du même code.
Le texte ne mentionnait pas, après censure du Conseil constitutionnel (Cons. const., Déc. no 99‑423 DC, 13 janv. 2000), la durée de 1600 heures (devenue ensuite 1607 heures après ajout de la journée de solidarité).
La cour de cassation ne tient aucun compte de cette décision du Conseil constitutionnel et on peut craindre qu’elle refuse de transmettre à celui-ci une Question prioritaire de constitutionnalité qui viserait à censurer sa propre position.
La Cour de cassation vient d’inventer de fait, le droit à cinq semaines de congés payés supplémentaires pour les salariés employés dans le cadre d’une annualisation du temps de travail, même venant d’être embauchés.
Cet arrêt place beaucoup d’entreprises dans une position délicate puisque la Cour de cassation considère que l’employeur ne peut imposer au salarié la prise anticipée des congés payés (Cass. soc., 10 février 1998, no 95‑40.905). Cela signifie donc que si le salarié nouvel embauché ne souhaite pas prendre de congés payés par anticipation, l’employeur devra forcément lui verser en fin d’année des heures supplémentaires, ne pouvant également réduire son temps de travail sans l’accord de l’intéressé.
Cela signifie aussi que si le salarié décide de placer une semaine de congés payés sur son compte épargne temps, il va générer de fait, alors que cette décision relève de son seul arbitrage, des heures supplémentaires.
Ces conséquences kafkaiennes et couteuses pourraient être évitées.
Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cet amendement.