Déposé le 10 novembre 2015 par : Mme Berger, Mme Rabault, M. Galut, M. Alexis Bachelay, M. Léonard, M. Ménard, M. Liebgott, M. Bleunven, M. Cresta, Mme Gaillard, M. Juanico, M. Dussopt, M. Cherki, M. Féron, Mme Bruneau, M. Philippe Doucet, Mme Lignières-Cassou, M. Prat, Mme Mazetier, M. Potier, M. Goldberg, Mme Khirouni, M. Paul, M. Boudié, M. Verdier, Mme Capdevielle, M. Launay, Mme Chabanne, M. Fourage, Mme Filippetti, M. Guillaume Bachelay, M. Fauré, M. Kemel, Mme Lacuey, Mme Le Dissez, M. Colas, M. Terrasse, M. Pellois, Mme Tallard, Mme Fournier-Armand, Mme Bouziane-Laroussi, M. Marsac, M. Rogemont, Mme Alaux, M. William Dumas, Mme Laurence Dumont, Mme Coutelle, Mme Chapdelaine, Mme Lousteau, M. Pajon, M. Lesage, M. Daniel, M. Demarthe, M. Arnaud Leroy, M. Laurent, Mme Le Loch, M. Destans, M. Delcourt.
I. – Le I de la section II du chapitre III du titre II de la première partie du livre des procédures fiscales est complété par un article L. 114 B ainsi rédigé :
« Art. L. 114 B.– I. – L'administration, qui délivre ou modifie une décision accordant pour une opération à effet transfrontalier une garantie au sens de l'article L. 80 B, communique aux autorités compétentes des États membres de l'Union européenne ainsi qu'à la Commission européenne, une liste d'informations relatives à cette décision dans les conditions fixées au III .
« II. – L'opération à effet transfrontalier concerne les situations dans lesquelles :
« a) Toutes les parties à l'opération ou à la série d'opérations ne sont pas résidentes fiscales sur le territoire français ;
« b) L'une des parties à l'opération ou à la série d'opérations est résidente fiscale dans un autre État membre de l'Union européenne ;
« c) L'une des parties à l'opération ou à la série d'opérations exerce son activité dans un autre État membre de l'Union européenne par l'intermédiaire d'un établissement stable, l'opération ou la série d'opérations constituant une partie ou la totalité de l'activité de l'établissement stable.
« III. – Un décret en Conseil d'État précise :
« a) Les critères de détermination du seuil financier à partir duquel une décision accordant une garantie au sens de l'article L. 80 B doit être transmise en application du présent article ;
« b) Les informations transmises qui comprennent notamment l'identification du contribuable et, le cas échéant, le groupe d'entreprises au sens du 12 de l'article 39 du code général des impôts, auquel celui-ci appartient, l'identification des tous les États membres et personnes susceptibles d'être directement ou indirectement concernés, le contenu de la décision emportant application de l'article L. 80 B, le cas échéant les critères utilisés pour déterminer la méthode de fixation du prix de transfert ou le prix de transfert lui-même dans le cas d'accord préalable en matière de prix de transfert au sens de l'article L. 13 AA ;
« c) Les modalités de la communication des informations. Celles-ci doivent être notamment transmises dans des conditions garantissant leur confidentialité et substantiellement similaires à celles de l'article L. 103. Cette communication doit être réalisée au moins une fois par an et au plus tard trois mois après la fin de l'exercice fiscal auquel ces informations se rapportent. ».
II. – Le présent article entre en vigueur le 1er janvier 2017.
III. – Les décisions accordant pour une opération transfrontière une garantie au sens de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales et en vigueur au moment de la publication de la présente loi de finances doivent être communiquées selon les règles prévues au I du présent article, si elles ont été en dernier lieu édictées ou renouvelées dans les dix ans avant l'entrée en vigueur de la présente loi.
L'affaire Luxleaks a un peu plus dévoilé aux yeux du grand public des pratiques de certains États trop favorables aux entreprises multinationales, qui ont trouvé via certaines décisions fiscales anticipées (ruling) des garanties en droit interne leur permettant d'échapper à un taux d'imposition supérieur sur leurs bénéfices.
Cette affaire a amené plusieurs démarches de la part des institutions européennes
1. La Commission européenne, via ses services de la Concurrence, a par exemple remis en cause le 21 octobre 2015, la compatibilité avec le droit des aides de certains rulings accordés au Luxembourg et aux Pays-Bas à deux sociétés appartenant à des entreprises multinationales.
2. Le Conseil européen, lors de l'ECOFIN du 6 octobre 2015, considère que « le défi posé par le contournement de l'impôt au niveau transfrontalier, la planification fiscale agressive et la concurrence fiscale dommageable a pris une ampleur nouvelle et est devenu une source de préoccupation majeure au sein de l'Union et au niveau mondial. L'érosion de l'assiette fiscale diminue considérablement les recettes nationales, ce qui freine les États membres dans la mise en œuvre de politiques fiscales favorables à la croissance ».
Sur la base de ce constat, le Conseil considère « qu'il est urgent de renforcer la transparence […] et de renforcer les outils et mécanismes créés par la directive 2011/16/UE ». Il est parvenu à dégager un accord politique pour une directive « en ce qui concerne l'échange automatique et obligatoire d'informations dans le domaine fiscal », donnant ainsi le feu vert à l'échange automatique d'informations concernant les rescrits fiscaux. L'adoption très rapide, surtout en matière fiscale, de la directive, montre l'impérieuse nécessité d'une action volontariste contre les mécanismes atteignant les ressources fiscales des États membres.
3. Le Parlement européen, a le 26 octobre 2015 relevé l'impérieuse nécessité d'une action volontariste contre les mécanismes atteignant les ressources fiscales des États membres. Un encadrement du ruling est ainsi très fortement préconisé au sein du Parlement européen, soutenu par le Parti socialiste européen et dépassant largement les clivages politiques habituels.
Dans son programme de lutte contre l'érosion des bases fiscales (BEPS), l'OCDE a justement actualisé sa recommandation n°5 (Lutter plus efficacement contre les pratiques fiscales dommageables) et souligne l'intérêt éminent d'une transparence accrue entre États sur ces « décisions anticipées » en matière de fiscalité, soutenant les dernières initiatives européennes.
Cet amendement propose une adaptation du droit français afin que l'administration fiscale puisse communiquer à ses partenaires européens les informations fiscales relatives aux rescrits qu'elle accorde à un certain nombre d'entreprises.
Les textes européens doivent permettre une réciprocité d'échange d'information. En procédant ainsi, il sera alors possible de réduire la portée des « rulings » qui conduisent à réduire à la base fiscale des multinationales au sein de l'Union européenne.
Différentes versions de cet amendement sont déposées : celle-ci s'appuie sur les dispositions inscrites dans l'accord politique pour la proposition de directive portant sur l'échange automatique et obligatoire d'informations dans le domaine fiscal.
En résumé, la directive :
1. Donne une définition de « la décision fiscale anticipée en matière transfrontalière et de l'accord préalable en matière de prix de transfert » ;
2. Fixe les intervalles réguliers pour la communication des informations. La directive propose ainsi que les informations soient transmises au plus tard 3 mois après la fin du semestre de l'année civile au cours duquel les décisions fiscales anticipées en matière transfrontalière ou les accords préalables en matière de prix de transfert ont été émis, modifiés ou renouvelés
3. Propose que les accords sur les prix de transfert signés avant la mise en œuvre de cette directive fassent aussi l'objet de transmission d'information. Elle propose de considérer les accords signés 5 ans avant la date de la mise en œuvre de la directive et toujours valables au 1er janvier 2014
4. Fixe des seuils. La directive propose que les particuliers ou sociétés dont le chiffre d'affaires annuel est inférieur à 40 millions d'euros soient exclus, sous certaines conditions, de l'échange automatique et obligatoire d'information.
5. Définit des exceptions à la transmission obligatoire et automatique d'informations
6. Estime nécessaire que l'État membre qui reçoit les informations donne son avis en retour sur celles-ci à l'État membre qui les transmet
7. Prévoit qu'avant le 1er janvier 2018, les états membres communiquent à la Commission, sur une base annuelle, des statistiques sur le volume des échanges automatiques.
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