Déposé le 18 janvier 2016 par : M. Assaf, M. Hammadi.
« Section 4
« Partage européen des liquidités de jeux de hasard et d'argent en ligne
« Article 42bis
« La loi n° 2010‑476 du 12 mai 2010 relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne est ainsi modifiée :
« 1° Le II de l'article 14 est complété par deux alinéas ainsi rédigés :
« Par dérogation à l'alinéa précédent, l'Autorité de régulation des jeux en ligne peut autoriser un opérateur, titulaire de l'agrément prévu à l'article 21, à proposer aux joueurs titulaires d'un compte validé inscrits sur le site objet de l'agrément de participer à des jeux de cercle avec les joueurs inscrits sur le site d'un opérateur établi dans un État membre de l'Union européenne ou d'un État partie à l'accord sur l'Espace économique européen.
« La demande d'autorisation présentée par l'opérateur titulaire de l'agrément prévu à l'article 21 est subordonnée à la conclusion d'une convention régie par les dispositions de l'alinéa 2 du V de l'article 34. La décision d'autorisation détermine les obligations particulières imposées à l'opérateur pour permettre l'exercice du contrôle de son activité par l'Autorité de régulation des jeux en ligne. » ;
« 2° Le V de l'article 34 est complété par un alinéa ainsi rédigé :
« De telles conventions peuvent également être conclues par le président de l'Autorité pour déterminer les modalités de mise en œuvre et de contrôle des offres de jeux de cercle visées aux alinéas 3 et 4 du II de l'article 14. Ces conventions doivent permettre à l'Autorité de régulation des jeux en ligne d'obtenir la communication de toute information ou document nécessaire à l'exercice de ses missions, notamment en matière de prévention des activités frauduleuses ou criminelles ainsi que du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme. Préalablement à leur signature, elles font l'objet d'un avis du ministre de l'Intérieur et du ministre en charge du budget, qui se prononcent dans un délai de deux mois à compter de leur saisine par le président de l'Autorité. » »
L'objet du présent amendement est d'offrir la possibilité aux clients d'opérateurs de poker en ligne agréés en France de jouer contre des joueurs inscrits auprès d'opérateurs opérant légalement dans un autre État membre de l'Union européenne ou partie à l'Espace Economique Européen.
L'article 14 de la loi n° 2010‑476 du 12 mai 2010 a en effet instauré un cloisonnement du marché français du poker en ligne, interdisant l'accès aux tables de poker proposées par des opérateurs de jeux en ligne agréés en France à des joueurs inscrits sur des sites d'opérateurs étrangers non titulaires de l'agrément français. Cette mesure avait essentiellement pour objet de garantir la protection des consommateurs.
Il apparaît néanmoins que cette mesure restreint le volume des liquidités accessibles sur les tables françaises de poker en ligne, sans atteindre l'objectif de protection des consommateurs.
En effet, l'attractivité du poker repose en grande partie sur le volume des liquidités apportées par les joueurs accédant aux tables proposées par les opérateurs. La restriction de l'accès aux tables de poker aux seuls joueurs d'opérateurs agréés ne permet pas de réunir un volume de liquidités suffisamment attractif pour ces joueurs et conduit certains d'entre eux à se tourner vers l'offre illégale. De fait, le marché du poker en ligne décroît régulièrement depuis début 2012, tout comme les recettes fiscales qui y sont associées. Le retour de joueurs français vers l'offre illégale les replace en situation de risque.
Le partage de liquidités entre des opérateurs agréés par l'ARJEL et des opérateurs étrangers régulés dans un autre État membre de l'Union européenne ou partie à l'Espace Economique Européen, à condition qu'il soit strictement encadré, devrait ainsi favoriser l'offre légale du poker en ligne au détriment de l'offre illégale.
Le dispositif proposé repose sur deux outils destinés à garantir des standards de régulation comparables à ceux actuellement imposés à l'offre régulée de poker en ligne.
Tout d'abord, il conviendra que l'Autorité de régulation des jeux en ligne conclue une convention de coopération avec l'autorité de régulation de l'État membre de l'Union Européenne ou partie à l'Espace Economique Européen dont dépend l'opérateur étranger. Seule une coopération avec les autorités de régulation mettant en œuvre des standards de régulation équivalents à ceux du système français pour la protection des consommateurs pourra être formalisée dans de tels accords. Ces conventions détermineront les modalités de mise en œuvre et de contrôle de l'offre de poker en ligne partagée, qui devra se conformer aux deux cadres de régulation, français et étranger, envisagés. Elles permettront notamment à l'Autorité de régulation des jeux en ligne d'obtenir de son homologue étranger les informations relatives aux joueurs étrangers qu'elle ne pourrait obtenir directement des opérateurs qu'elle régule.
A cet égard, lorsqu'il engage la négociation d'une convention prévue par le V de l'article 34 de la loi du 12 mai 2010 susvisée, le Président de l'ARJEL en avise le Premier ministre, en application de l'article 10 du décret n° 2010‑481 du 12 mai 2010 relatif à l'organisation et au fonctionnement de l'Autorité de régulation des jeux en ligne. Un dispositif d'information du ministre de l'intérieur et du ministre chargé du budget préalable à la conclusion de conventions de coopération pour la mise en œuvre et le contrôle d'offres de poker en ligne partagées, pourrait, le cas échéant, compléter cette disposition réglementaire.
Ensuite, le partage des tables de poker ne pourra avoir lieu qu'après la délivrance à l'opérateur agréé par l'Autorité de régulation des jeux en ligne d'une autorisation spéciale, déterminant des obligations spécifiques pour cette offre de poker en ligne, liées notamment à l'exécution de la convention de coopération. A cette occasion puis pendant l'agrément, le régulateur français pourra s'assurer de la sécurité des différents logiciels de jeu permettant l'offre de poker en ligne et de l'efficacité des dispositifs de détection de la collusion de l'opérateur agréé.
Enfin, la fraude aux moyens de paiement intervient fréquemment par l'intermédiaire de comptes joueurs provisoires, pour lesquels les opérateurs agréés n'ont pas encore reçu les justificatifs de l'identité de leur titulaire. Pour empêcher ce type d'agissements dans un contexte international, seuls les joueurs titulaires d'un compte validé par l'opérateur agréé après vérification des justificatifs d'identité pourront accéder à l'offre de poker partagée avec des opérateurs étrangers.
Tel que proposée, l'offre de poker en ligne partagée fera l'objet de contrôles analogues à ceux menés sur l'offre de poker en ligne entre opérateurs agréés. Ils porteront sur les données relatives aux joueurs français, dans les mêmes conditions que celles existant aujourd'hui, sur les données relatives aux joueurs d'opérateurs étrangers, en application de la convention de coopération, ainsi que sur l'intégralité des données de jeu auxquelles le régulateur français pourra accéder en temps réel. Sur ce dernier point, le dispositif proposé nécessitera la modification du décret n° 2010‑509 du 18 mai 2010, relatif aux obligations imposées aux opérateurs agréés de jeux ou de paris en ligne en vue du contrôle des données de jeux par l'Autorité de régulation des jeux en ligne, pour adapter les obligations d'enregistrement des données de jeu à l'offre partagée.
Le niveau de contrôle exercé par l'Autorité de régulation sur l'offre de poker en ligne partagée sera ainsi comparable à celui de l'offre de poker accessible aux seuls joueurs français, s'inscrivant dans les objectifs poursuivis par la politique de l'État en matière de jeux d'argent parmi lesquels figurent la protection de l'ordre public et social et la prévention des activités frauduleuses ou criminelles, du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme.
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